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Publié le 07 sep 2021Lecture 6 min

Évaluation du ventricule droit : l’IRM est-elle indispensable ?

Alain FURBER, service de cardiologie, CHU d’Angers ; UMR CNRS 6015 – Inserm U1083 équipe physiopathologie cardiovasculaire, UFR Santé, Angers

Le ventricule droit (VD) a une forme complexe, s’enroulant autour du ventricule gauche, une paroi mince et de nombreuses trabéculations expliquant les difficultés d’analyse de l’échocardiographie. Grâce à une approche tridimensionnelle sans modélisation géométrique, l’IRM cardiaque permet avec précision de quantifier les volumes du VD et sa fonction systolique. L’IRM permet également une quantification des flux utile dans l’analyse des fuites pulmonaires et tricuspides. La fraction d’éjection ventriculaire droite est un indice pronostique majeur de beaucoup de cardiopathies. En pratique clinique, l’IRM cardiaque est utile, voire indispensable, dans le bilan des cardiomyopathies avec dysfonction ventriculaire droite et notamment de la dysplasie arythmogène du VD, dans le suivi de certaines cardiopathies congénitales de l’adulte, dans la prise en charge des hypertensions pulmonaires et dans le diagnostic des masses cardiaques en regard du VD(1).

• Les cardiopathies avec atteinte du VD La dysplasie arythmogène du VD : l’IRM est indispensable au diagnostic précoce de la maladie La dysplasie arythmogène du ventricule droit est une maladie héréditaire à transmission autosomique dominante, caractérisée par le remplacement du myocarde normal du ventricule droit par du tissu fibro-adipeux, dont le pronostic vital potentiellement engagé à l’effort impose un diagnostic précoce. Le diagnostic est difficile, principalement dans les formes débutantes, et s’appuie sur des critères diagnostiques qualifiés de critères majeurs et mineurs incluant les données de l’IRM cardiaque(2). Un critère majeur en IRM doit associer 1) une dyskinésie ou une akinésie localisée du VD (figures 1 à 3) ou un asynchronisme de contraction du VD et 2) une fraction d’éjection VD ≤ 40 % ou un volume télédiastolique du VD ≥ 100 ml/m² chez la femme et ≥ 110 ml/m² chez l’homme. L’association 1) d’une dyskinésie ou d’une akinésie localisée du VD ou d’un asynchronisme de contraction du VD et 2) d’une fraction d’éjection VD > 40 % et ≤ 45 % ou d’un volume télédiastolique du VD ≥ 90 ml/m² et < 100 ml/m² chez la femme et ≥ 100 ml/m² et < 110 ml/m² chez l’homme, constitue un critère mineur. L’introduction d’une analyse quantitative du volume et de la fonction ventriculaire droite dans les critères diagnostiques de dysplasie arythmogène du VD permet d’améliorer de façon significative les sensibilités et spécificités de l’IRM cardiaque. Des structures trabéculaires dysplasiques sont fréquemment retrouvées, correspondant à l’aspect « en piles d’assiettes » décrit dans les études angiographiques. Le ventricule gauche peut également être atteint. Les séquences de rehaussement tardif permettent de mettre en évidence le remplacement fibro-adipeux sous forme d’un hypersignal (figure 4). Bien que cela ne soit pas considéré comme un critère diagnostique, ces séquences permettent d’écarter les principaux diagnostics différentiels de la dysplasie arythmogène du VD, notamment l’infarctus du VD, une cardiomyopathie dilatée ou une hypertension artérielle pulmonaire. La présence d’un amincissement pariétal localisé, d’un microanévrisme pariétal ou d’une infiltration graisseuse des parois du VD (séquences spin-échoo pondérées T11 avec et sans suppression de graisse) ne fait plus partie des critères diagnostiques. Cette approche a en effet plusieurs limites : les effets de volumes partiels créés par la graisse épicardique ou les trabéculations du VD ou la présence physiologique de graisse dans la paroi du VD chez le sujet sain et chez les sujets âgés. L’infarctus du ventricule droit est plus fréquent qu’on ne le croit Après un infarctus inférieur récent, la prévalence d’un infarctus du VD diagnostiqué par IRM est élevée, variant de 50 à 60 % et ceci alors que dans plus de la moitié des cas l’ECG et l’échocardiographie ne retrouvent pas d’arguments en faveur d’une atteinte du VD. L’IRM visualise l’atteinte ventriculaire droite sous forme d’un œdème myocardique sur les séquences pondérées T2 et d’un hypersignal en rehaussement tardif(3) (figure 5). Cette atteinte ischémique du VD est associée à une dysfonction VD régionale (figure 6) ou globale. L’atteinte du VD est également présente dans 10 à 30 % des infarctus antérieurs. Au cours du suivi, la persistance d’un hypersignal ventriculaire droit en rehaussement tardif est rare, mais est associée à un mauvais pronostic (remodelage ventriculaire droit délétère et dysfonction du VD). Les cardiomyopathies dilatées et hypertrophiques Si le diagnostic de cardiomyopathie hypertrophique (CMH) repose sur l’échocardiographie, certaines situations doivent inciter l’échographiste à demander une IRM cardiaque pour compléter l’analyse du ventricule droit : 1) lorsque le patient n’est pas très échogène, faire la part entre une hypertrophie septale et une bande modératrice du VD particulièrement développée, n’est pas toujours possible. L’IRM redresse facilement le diagnostic ; 2) dans le bilan étiologique d’une CMH, l’IRM cardiaque est à la fois plus sensible et plus spécifique que l’échocardiographie (hypertrophie ventriculaire gauche, aspects spécifiques en rehaussement tardif) et permet de confirmer le diagnostic d’hypertrophie ventriculaire droite orientant vers un diagnostic d’amylose cardiaque ou de maladie de Fabry. Dans le bilan étiologique des cardiomyopathies dilatées, l’IRM cardiaque est très utile. L’altération de la FE ventriculaire droite est un facteur pronostique indépendant puissant de survenue d’événements cardiovasculaires. • Les cardiopathies congénitales de l’adulte avec surcharge du ventricule droit L’IRM est en effet l’examen de référence dans le suivi d’une tétralogie de Fallot. La chirurgie réparatrice proposée dès la première année associe la fermeture de la communication interventriculaire à l’élargissement de la voie pulmonaire infundibulaire par patch. À long terme, la survenue d’une insuffisance pulmonaire est fréquente conduisant progressivement en présence d’une insuffisance pulmonaire sévère à une dilatation puis à une dysfonction du VD (figure 7) et à la survenue de troubles du rythme ventriculaires sévères. L’IRM permet de suivre la dilatation du VD, l’altération de la FE VD et de quantifier l’insuffisance pulmonaire (IP) (IP sévère fraction de régurgitation > 40 %, IP moyenne fraction de régurgitation comprise entre 20 et 40 %). Ces critères quantitatifs aident au choix du moment idéal pour proposer un remplacement valvulaire pulmonaire surtout chez les patients peu ou asymptomatiques. Les critères récemment publiés(4) retiennent chez le patient asymptomatique avec IP sévère, sans dysfonction ventriculaire sévère, une indication de valvulation en présence d’un des critères suivants : une dysfonction ventriculaire droite progressive ; une dilatation VD sévère (volume télédiastolique du VD ≥ 160 ml/m² ou volume télésystolique du VD ≥ 80 ml/m²) ; une pression systolique du VD > 80 mmHg secondaire à une obstruction de la voie d’éjection pulmonaire ; une réduction progressive de la tolérance à l’effort. L’hypertrophie ventriculaire droite est également un facteur prédictif de troubles du rythme ventriculaires sévères et de mortalité. Les séquences de rehaussement tardif mettent fréquemment en évidence des hypersignaux sur les zones de jonction entre le VD et le VG. Elles permettent ainsi de quantifier la fibrose myocardique, facteur prédictif de survenue de troubles du rythme ventriculaires et de mort subite. L’IRM permet également d’analyser l’anatomie de la voie d’éjection pulmonaire (anévrisme ou rétrécissement résiduel, taille de l’anneau pulmonaire) et l’arbre artériel pulmonaire (sténose pulmonaire). • Les hypertensions pulmonaires Dans un premier temps, l’IRM permet de s’assurer de l’absence de retour veineux pulmonaire anormal ou de shunt intracardiaque. L’angioscanner pulmonaire est également important et l’examen de base pour diagnostiquer une hypertension pulmonaire liée à une maladie thromboembolique chronique. L’IRM analyse précisément le remodelage ventriculaire droit lié à l’augmentation des pressions pulmonaires(5) : hypertrophie VD (figure 8A) puis dilatation du VD (figure 8B), aplatissement ou déviation vers la gauche du septum interventriculaire. La dilatation de l’artère pulmonaire (> 30 mm sur les coupes axiales) n’est pas à elle seule un marqueur d’hypertension pulmonaire. Par contre l’association d’un rapport artère pulmonaire segmentaire/bronche adjacente > 1 à une dilatation de l’artère pulmonaire a une spécificité élevée pour le diagnostic d’hypertension artérielle pulmonaire. L’IRM est la méthode de référence pour quantifier la défaillance VD : baisse de la fraction d’éjection VD (dysfonction VD modérée lorsque la FE VD < 45 %), excursion systolique du plan de l’anneau tricuspide (TAPSE) < 18 mm dans les dysfonctions VD modérées et < 8,5 mm dans les dysfonctions VD sévères. La défaillance du VD est souvent associée à une dilatation de l’oreillette droite et de la veine cave inférieure. La présence en rehaussement tardif d’hypersignaux au site d’insertion du VD sur le septum interventriculaire est peu spécifique d’hypertension pulmonaire, mais représente un marqueur pronostique important en plus des paramètres fonctionnels VD. Enfin l’IRM est de plus en plus utilisée pour évaluer l’impact des traitements de l’hypertension pulmonaire sur le remodelage ventriculaire droit inverse, en lien avec l’amélioration fonctionnelle et la survie(5). • Les masses ventriculaires droites(1) Le protocole d’acquisition des images comprend des séquences. Les tumeurs cardiaques du VD sont rares, le plus souvent détectées par l’échocardiographie. L’IRM est l’examen de référence, le plus performant pour la caractérisation tissulaire conduisant parfois à la caractérisation de la lésion. Elle permet de rechercher des arguments en faveur d’une tumeur maligne et de différencier une tumeur cardiaque d’un thrombus. Chez l’adulte les tumeurs ventriculaires droites les plus fréquentes sont les lymphomes primitifs et les métastases des tumeurs rénales, abdomino-pelviennes et des carcinomes hépatocellulaires. Cardiologie Pratique : publication avancée en ligne.

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