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Valvulopathies

Publié le 20 oct 2009Lecture 7 min

Valvulopathies : recommandations ESC 2009 pour l'endocardite, stratification du risque dans les valvulopathies asymptomatiques

J.-L. MONIN, CHU Henri Mondor, Créteil


ESC
Un des événements majeurs de l’ESC 2009 a certainement été la présentation en avant-première de la mise à jour des Recommandations européennes pour la prise en charge de l’endocardite. Je retiendrai également plusieurs études convergentes qui démontrent l’intérêt d’utiliser plusieurs indices complémentaires (mesures échographiques, Doppler, éventuellement couplés au dosage des peptides natriurétiques : BNP et NT-proBNP) afin de prédire la survenue d’événements indésirables en cas de valvulopathie asymptomatique. Parmi les nouvelles techniques d’échocardiographie, l’imagerie de déformation myocardique (2D-Strain), qui permet une analyse quantitative de la fonction systolique ventriculaire gauche dans ses trois composantes (longitudinale, radiale et circonférentielle), semble être une piste intéressante afin de détecter la dysfonction ventriculaire gauche à un stade très précoce, c’est-à-dire quand la fraction d’éjection est encore conservée.

Prévention, diagnostic et traitement de l’endocardite La mise à jour des Recommandations de l’ESC pour la prise en charge de l’endocardite, coordonnée par le Pr. G. Habib (CHU La Timone, Marseille), a fait l’objet de plusieurs sessions plénières et pratiques. Sans rentrer dans le détail de ce document disponible dans sa version intégrale(1) ou en version Pocket Guidelines, sur le site de l’ESC (www.escardio.org/guidelines), les principales nouveautés par rapport à la version précédente (2004) résident dans les modalités de l’antibioprophylaxie et dans la place croissante de l’échocardiographie dans la stratégie thérapeutique. Les indications d’antibioprophylaxie sont actuellement réduites aux situations à haut risque d’endocardite, en accord avec les recommandations américaines (tableau 1). Par rapport aux Américains, les recommandations européennes sont encore plus restrictives, puisque les patients greffés cardiaques porteurs d’une anomalie valvulaire ne sont pas reconnus comme un groupe à haut risque, justifiant une prophylaxie(1). Concernant le diagnostic d’endocardite, la place prépondérante de l’échocardiographie est confirmée dans ces recommandations. Cependant, les limites de l’échocardiographie sont également soulignées : l’échographie, y compris par voie transœsophagienne, n’a pas une sensibilité de 100 % pour le diagnostic d’endocardite. Les situations difficiles peuvent être : l’endocardite sur prothèse valvulaire, les tissus valvulaires très redondants (maladie de Barlow) ou des végétations de petites taille (< 2 mm) au stade précoce de la maladie. De ce fait, en cas de forte suspicion clinique, il est recommandé de répéter l’échographie après 7 à 10 jours si les symptômes persistent(1). Les indications de chirurgie précoce ont également évolué, notamment par rapport à la taille des végétations dont il a été prouvé qu’elle influence significativement le risque d’embolies systémiques. Les indications chirurgicales urgentes (dans les 24 heures) ou rapides (dans les 2-3 jours) sont posées en cas d’insuffisance cardiaque réfractaire, d’infection non contrôlée ou pour la prévention du risque d’embolie systémique, notamment cérébrale (tableau 2). Patients valvulaires asymptomatiques : stratification du risque d’événements Si l’indication opératoire est formelle en cas de valvulopathie sévère et symptomatique (indication de classe I dans les Recommandations américaines et européennes(2,3)) la chirurgie précoce pour les patients asymptomatiques reste largement débattue. D’après ces mêmes recommandations, la décision est prise sur un certain nombre d’indices, notamment échocardiographiques, ou sur les résultats du test d’effort(2,3). Malgré cela, la stratification du risque reste imparfaite et les indications opératoires précoces sont le plus souvent discutées (indications de classe IIa voire IIb, faible niveau de preuve (B ou C)). L’étude de nouveaux paramètres pronostiques est donc importante, afin de définir des groupes à risque, pouvant éventuellement bénéficier d’une chirurgie précoce. Rétrécissement aortique calcifiée : pic de vitesse transvalvulaire, déformation longitudinale (2D-strain) et surface de l’oreillette gauche L’impact pronostique majeur du pic de vitesse transvalvulaire aortique (Vmax) a été rappelé par l’étude de Rosenhek et coll., qui concerne 118 patients consécutifs (57 femmes, âge moyen : 67 ± 16 ans) ayant un RAC asymptomatique très serré (défini par une Vmax > 5,0 m/s). Après 2 ans de durée moyenne de suivi, les symptômes classiques (dyspnée, angor, syncope) sont apparus chez 90 patients ; 6 autres sont décédés de cause cardiaque (une seule mort subite). Le seul facteur pronostique indépendant était une Vmax supérieure à 5,5 m/s à l’entrée dans l’étude. À l’opposé, la surface valvulaire aortique, une maladie coronaire associée, l’hypertension artérielle, le diabète et l’hypercholestérolémie n’étaient pas discriminants. L’étude de Lancellotti et coll. concerne 163 patients avec un RAC serré asymptomatique. Au cours d’un suivi moyen de 20 mois, 6 patients sont décédés, 57 ont été opérés et 11 sont devenus symptomatiques. Les facteurs de risque indépendants dans cette étude étaient la Vmax initiale (p = 0,027), la déformation myocardique VG longitudinale (figure 1, p = 0,009), l’impédance valvulo-aortique (indice global de postcharge intégrant l’obstacle valvulaire et la résistance aortique, p = 0,001) et la surface de l’oreillette gauche (p = 0,0003). Plus intéressant, la combinaison des différents facteurs permettait d’améliorer la stratification du risque : en fonction de la présence d’1 seul, 2 ou 3 facteurs de risque, la survie sans événement à 2 ans était respectivement de 73 ± 8 %, 35 ± 8 % et 10 ± 6 %. Cette étude illustre donc parfaitement l’intérêt de combiner plusieurs indices complémentaires. Figure 1. Analyse de la déformation myocardique longitudinale (2D-Strain) en cas de RAC asymptomatique avec fraction d’éjection normale (calculée à 55 % dans cet exemple). La déformation longitudinale globale est altérée (-11 % pour une normale ≥ 20 %). (Cf. Poster n°4093. Remerciements : Dr. Pascal Lim.). Intérêt du BNP chez les patients valvulaires asymptomatiques Une étude prospective brésilienne a inclus 79 patients ayant une insuffisance aortique asymptomatique d’origine rhumatismale (Spina et coll.). L’âge moyen était de 31 ± 11 ans (77 % d’hommes). Ces patients ont été suivis de manière prospective tous les 6 mois pendant 7 ans. Les critères de jugement étaient l’apparition des symptômes ou le décès. Plusieurs marqueurs biologiques ont été testés comme éventuels facteurs pronostiques, notamment le BNP et les cytokines (tumor necrosis factor, interleukines et endothéline). Les résultats montrent que le BNP est le seul marqueur pronostique indépendant de la survenue d’événements : un taux initial de BNP > 100 pg/ml était hautement corrélé à la survenue des symptômes (risque relatif = 10,1, IC95 % = 2,7-36,8, p = 0,001). Par ailleurs, une autre équipe sud-américaine (Pizzaro et coll.) rapporte des résultats similaires sur une large étude prospective concernant 269 patients consécutifs ayant une insuffisance mitrale organique (prolapsus) sévère et une fonction VG normale (fraction d’éjection > 60 %). Les événements indésirables (apparition de symptômes d’insuffisance cardiaque ou d’une fraction d’éjection VG < 60 %) étaient corrélés au taux de BNP initial. En effet, un BNP > 105 pg/ml était associé à un risque relatif d’événements multiplié par 5,6 ; IC95 % : 2,9-10,6, p < 0,001. Au total, en accord avec d’autres études publiées, notamment dans la sténose aortique, une valeur seuil de BNP autour de 100 pg/ml semble être discriminante pour la prédiction d’événements à moyen terme chez les patients valvulaires asymptomatiques. Intérêt du NT-ProBNP, combinaison des facteurs pronostiques Concernant le NT-ProBNP, Juta Bergler-Klein a présenté les résultats d’une étude prospective concernant 99 patients avec un RAC asymptomatique. L’apparition des symptômes dans les 6 mois était associée à un taux de NT-proBNP significativement plus élevé (valeur médiane (quartiles 1-3) : 825 pg/ml (487-1459) versus 240 pg/ml (120 à 512) ; p < 0,0001). Dans cette étude, le taux de NT-proBNP était moyennement corrélé à la surface valvulaire aortique (r = -0,21, p = 0,02), et mieux corrélé au degré d’hypertrophie ventriculaire gauche (r = 0,56; p < 0,0001) et à la taille de l’oreillette gauche (r = 0,41, p < 0,0001). Une équipe de Barcelone (Gomez Perez et coll.) a rapporté des résultats similaires sur une série de 160 patients ayant un RAC sévère asymptomatique (âge moyen: 77 ± 4 ans, surface valvulaire aortique : 0,8 ± 0,3 cm2, gradient moyen : 45 ± 13 mmHg, fraction d’éjection VG : 61 ± 14 %). L’évaluation initiale comportait un dosage du NT-proBNP et une étude des pressions de remplissage VG par Doppler pulsé et Doppler tissulaire (rapport de l’onde E mitrale sur l’onde E à l’anneau : E/Ea). Après un suivi moyen de 18 ± 4 mois, un événement indésirable (dyspnée, angor, syncope ou décès) est survenu chez 59 patients. Un rapport E/Ea > 14 était corrélé à la survenue d’événements, de même qu’un taux de NT-proBNP > 964 pg/ml. La combinaison de ces deux critères permettait de prédire la survenue d’événements avec une sensibilité de 90 % et une valeur prédictive positive de 86 %. Score de risque dans le RAC asymptomatique L’intérêt de combiner plusieurs indices pour la stratification du risque a également été rapporté par une étude bicentrique franco-belge (Monin et coll.). Pour cette étude, 104 patients avec un RAC asymptomatique (âge moyen : 72 ans [63-77] ; 35 femmes ; Vmax: 4,1 m/s [3,5-4,4]) ont été suivis de manière prospective au CHU Henri Mondor (Créteil). Les événements considérés étaient la survenue des symptômes, un test d’effort positif ou le décès (toutes causes). Les trois facteurs prédictifs indépendants d’événements (sexe féminin, Vmax et taux de BNP initial) ont été combinés dans un score de risque selon la formule suivante : Score = [Vmax (m/s) x 2] + [Log népérien (BNP) x 1,5] + 1,5 (sexe féminin). Ce score a ensuite été validé sur une cohorte de 107 patients ayant les mêmes caractéristiques de départ et suivis de manière prospective au CHU Sart Tilman de Liège, Belgique. Les résultats montrent que, dans les deux cohortes, le taux d’événements est fortement influencé par la valeur initiale du score de risque. Le taux d’événements à 20 mois est de 4 à 7 % dans le premier quartile du score, contre 80 à 85 % dans le quatrième quartile (figure 2). De plus, 5 patients de la cohorte liégeoise décédés avant la chirurgie (2 morts subites et 3 insuffisances cardiaques réfractaires) avaient tous des valeurs de score situées dans le 3e ou 4e quartile. Une validation plus large de ce score de risque est en cours, afin de permettre son utilisation en pratique courante pour sélectionner les patients à haut risque pouvant bénéficier d’une chirurgie précoce. Figure 2. Survie sans événement en cas de RAC asymptomatique, en fonction des quartiles d’un score de risque basé sur le sexe, le pic de vitesse transvalvulaire et le taux de BNP. (A) Cohorte initiale et (B) cohorte indépendante de validation. (D’après Abstract 5162.)

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