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Polémique

Publié le 25 mar 2024Lecture 8 min

Imagerie endocoronaire - OCT ou IVUS : et si vous ne deviez en garder qu’un ?

Nicolas AMABILEa , Ayoub BELFEKIHb , Quentin LANDOLFFc, a : Institut Cardiovasculaire Paris Sud, Massy-Antony-Quincy, b : Institut Mutualiste Montsouris, Paris, c : Clinique Saint-Hilaire, Rouen

Les deux dernières années ont vu la publication à un rythme soutenu de travaux de recherche mettant l’accent sur l’intérêt clinique de l’utilisation de l’imagerie endocoronaire au sein de notre activité de cardiologie interventionnelle.
À ce jour, les deux modalités d’imagerie disponibles sont l’IVUS (intravascular ultrasound system), basée sur la physique acoustique des ultrasons et l’OCT (optical coherence tomography) basée sur la physique optique des infrarouges, qui ont donc des caractéristiques différentes.
Ces différences ont-elles un impact sur leur application au quotidien et les informations que l’on peut en tirer ? Pourrait-on n’en choisir qu’une seule ?

PRÉAMBULE : OCT ET IVUS, DES CARACTÉRISTIQUES DIFFÉRENTES   L’OCT Elle utilise une technologie basée sur l’analyse de la réflexion, réfraction et dispersion des photons infrarouges au sein des structures vasculaires. Les systèmes disponibles en France actuellement sont proposés par Abbott Vascular, Terumo et Microport. Cette technologie permet d’obtenir une résolution spatiale axiale de près de 10 µm mais avec un pouvoir de pénétration assez limité (2 mm). Cependant, elle permet d’identifier et de mesurer les dimensions des structures lipidiques, calciques, fibreuses et thrombotiques. Elle nécessite pour son acquisition une opacification du vaisseau cible par injection de produit de contraste (15-25 cc/run avec un débit de 4-5 ml/s) afin de s’affranchir de la présence d’hématies qui altèrent la qualité d’image, ce qui rend son emploi plus délicat chez les patients insuffisants rénaux sévères. Par ailleurs, son utilisation est assez complexe pour l’analyse des ostias coronaires (à cause de la nécessité d’une bonne opacification et donc d’une intubation correcte du cathéter guide). La durée des acquisitions est rapide (< 5 s) mais nécessite un cathéter guide de 6 F au moins(1).   L’IVUS Elle utilise l’analyse de la réflexion des ultrasons sur les différentes structures pariétales vasculaires pour construire son image. Les systèmes disponibles en France actuellement sont proposés par Boston Scientific, Volcano/Philips et ACIST. La résolution spatiale est inférieure à celle de l’OCT (100 µm), mais le pouvoir de pénétration est plus puissant permettant d’analyser des structures théoriquement plus grandes et de plus larges vaisseaux. Par ailleurs, du fait de ces caractéristiques techniques différentes, il convient de garder à l’esprit que les dimensions vasculaires (diamètres et aires) sont plus grandes en IVUS qu’en OCT (et donc les différentes valeurs seuils ne sont pas forcément applicables entre modalités). L’identification « histologique » des différentes structures est possible en IVUS, mais moins précise, notamment pour l’analyse des masses thrombotiques. Par ailleurs, du fait de la réflexion importante des ultrasons sur le calcium, une mesure de l’épaisseur des calcifications est quasi impossible en routine ainsi que l’analyse des structures au-delà de celles-ci. L’acquisition des images d’IVUS ne nécessite pas d’injection obligatoire de produit de contraste iodé, est compatible avec l’emploi de cathéters guides 5 F mais est plus lente qu’en OCT (même si les nouveaux systèmes AVVIGO™+ (Boston Scientific) ou le système Volcano (Philips) permettent un retrait plus rapide(1). Du fait de ces caractéristiques techniques, le choix de la modalité optimale d’imagerie intracoronaire va donc dépendre de la situation clinique et des objectifs de l’opérateur.   GESTION DU SCA   La gestion du syndrome coronaire aigu (SCA) s’envisage sur deux aspects : le diagnostic des formes atypiques/MINOCA et le guidage de l’angioplastie. Les deux techniques ont le même niveau de recommandation selon l’ESC pour le guidage de l’angioplastie transluminale coronaire (ATC) en cas de SCA (grade IIA). Cependant, dans ce cadre nosologique, l’OCT semble être une option plus efficace que l’IVUS car sa sensibilité pour l’identification du thrombus est bien meilleure et sa résolution spatiale supérieure permet de diagnostiquer plus facilement les rupture ou érosion de plaque(2).   ↑ Avantage OCT   ANALYSE DES RESTÉNOSES/THROMBOSES INTRASTENT   Les échecs poststenting (stent failures : thrombose et resténose) représentent une indication reconnue et de volume croissant de l’imagerie endocoronaire, car permettant une gestion individualisée des causes du problème et diminuant le risque de récidive. L’objectif de l’imagerie est d’identifier des anomalies souvent non visibles en angiographie telles que sous-expansion, malapposition, existence d’une lésion néoathéroscléreuse, dissection résiduelle et de guider leur correction(3). Même si l’expansion du stent est également appréciable par l’IVUS et l’OCT, la résolution spatiale supérieure de cette dernière technique permet de mieux analyser les anomalies mécaniques des endoprothèses (malapposition, sous-expansion) et la présence de thrombus (figure 1)(4). Figure 1. Analyse d’une thrombose tardive de stent par OCT révélant une malapposition majeure des mailles à la paroi artérielle.   ↑ Avantage OCT   GUIDAGE DE L’ANGIOPLASTIE COMPLEXE   Derrière ce terme générique se cachent plusieurs situations et types de lésion : tronc coronaire gauche, bifurcations, lésions diffuses, lésions calcifiées et occlusions coronaires chroniques (CTO). L’imagerie endocoronaire permet d’améliorer la précision du geste en optimisant la préparation des lésions, le dimensionnement des stents à employer et l’identification des défauts initiaux du geste permettant leur correction (sous-expansion, malapposition de prothèse, dissection résiduelle)(5). L’étude RENOVATE-COMPLEX-PCI a bien démontré l’utilité du guidage par imagerie endocoronaire (OCT ou IVUS) dans l’angioplastie de ces lésions avec une amélioration nette du pronostic clinique(6). Dans cette étude, il semblait même y avoir une supériorité modérée à l’emploi de l’OCT par rapport à l’IVUS : il convient toutefois de garder à l’esprit que l’étude n’était pas construite pour prouver la supériorité d’une technique sur l’autre et que les études OCTIVUS et OPINION ont, elles, montré une équivalence des techniques(7,8). Cependant, l’analyse des données de la littérature et des caractéristiques techniques de ces modalités d’imagerie laisse apparaitre une analyse plus nuancée, où l’indication influence le choix optimal.   Le TCG et les bifurcations L’analyse précise de l’ostium d’un vaisseau est assez complexe et aléatoire par OCT. De ce fait, l’angioplastie d’une lésion du tronc commun coronaire gauche (TCG) impliquant l’ostium est considérée comme une contreindication à l’emploi de l’OCT(1). Pour les lésions du TCG distal, par contre, l’angioplastie guidée par OCT est complètement faisable et montre de bons résultats cliniques(9). Elle bénéficie par ailleurs des technologies de reconstruction 3D en temps réel qui améliorent la précision du geste (figure 2). Figure 2. Angioplastie d’une lésion ostiale de l’IVA impliquant la couverture du TCG distal (A et B) sous guidage OCT et résultat en reconstruction 3D (C).   Les études cliniques montrent unanimement la supériorité de l’approche guidée par imagerie endocoronaire pour le sous-groupe des lésions du TCG, mais les résultats des études prospectives randomisées strictement dédiées au sujet (OPTIMAL pour l’IVUS, DOCTORS-LM pour l’OCT) ne sont pas encore disponibles au moment de la rédaction de cet article. Cependant, les différents documents de consensus actuels prônent plutôt l’IVUS dans cette indication (IIA)(10). En ce qui concerne l’angioplastie des autres bifurcations, l’étude OCTOBER a rapporté le bénéfice clinique significatif à 2 ans induit par l’utilisation de l’OCT, surtout pour les techniques à 1 stent(11).   ↑ Avantage  IVUS (pour le moment)   Les lésions diffuses ou calcifiées L’analyse des plaques calcifiées par IVUS est moins poussée que par OCT, car l’épaisseur des calcifications n’est pas mesurable précisément avec les ultrasons. Cependant les autres paramètres (longueur des lésions, répartition des calcifications, diamètre des vaisseaux), sont appréciables de la même façon par les deux modalités. L’imagerie apparaît comme un outil crucial pour appréhender le degré de calcification intraplaque et proposer un outil adéquat pour leur préparation (athérectomie, lithotripsie intravasculaire, ballons de scoring) afin d’améliorer la qualité de l’angioplastie (figure 3)(12). Figure 3. Analyse d’une lésion ambiguë d’ostium de CD en IVUS révélant un nodule calcifié excentré.   = Égalité OCT/IVUS   Les CTO L’emploi de l’imagerie dans le guidage des occlusions coronaires chroniques (CTO) procure les mêmes avantages que dans les autres lésions (analyse des lésions, dimensionnement du stent, etc.) mais permet également d’analyser la position des guides en cas de techniques de dissection réentrée (parallel wires). Par ailleurs, le guidage par imagerie en mode « live » permet également d’accéder aux techniques de ponction antérograde de la chape proximale en cas de lésion ambiguë (figure 4). Du fait de l’injection de produit de contraste lors des acquisitions de retraits d’OCT (risquant d’aggraver les dissections coronaires et augmentant la quantité globale d’iode délivrée au cours de ces procédures) et de l’absence d’un mode « live » approprié, cette technique ne semble donc pas particulièrement adaptée à la réalisation de ces angioplasties(13). Figure 4. Guidage d’angioplastie d’occlusion chronique d’IVA2 (A) par technique de ponction sous IVUS (B) avec analyse en temps réel (C1 et C2). La sonde d’IVUS est placée dans la diagonale (ligne pointillée) et permet de repérer la pénétration d’un guide rigide (Hornet 14/ flèche rouge) dans la chappe proximale.   Différentes études cliniques prospectives et registres ont montré les avantages de l’emploi de l’IVUS pour la prise en charge des lésions d’occlusion chronique, rendant ce dernier outil tout à fait pertinent au quotidien(13).   ↑ Avantage IVUS   CONCLUSION   IVUS et OCT sont deux outils utiles pour améliorer la prise en charge des patients et améliorer le pronostic clinique(14). Ces techniques peuvent être utilisées indifféremment dans près de 90 % des situations au quotidien en salle de cathétérisme cardiaque (figure 5). S’il ne fallait vraiment en choisir qu’une seule, ce choix serait influencé par la pratique de l’opérateur : plutôt l’OCT en cas de pratique incluant beaucoup de SCA, plutôt l’IVUS pour guider les angioplasties complexes et les CTO. Figure 5. Indications préférentielles des techniques d’OCT et d’IVUS dans l’activité de cardiologie interventionnelle.

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