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Prévention et protection

Publié le 04 sep 2007Lecture 8 min

L'activité physique : un traitement de plus du coronarien ?

B. VERGÈS, CHU de Dijon


Le Printemps de la cardiologie
Si les progrès thérapeutiques à la phase aiguë, qu’ils soient interventionnels ou médicamenteux (BASIC), ont considérablement amélioré le pronostic des patients après un syndrome coronarien aigu, la maladie coronarienne reste une maladie chronique et diffuse ; pour améliorer le pronostic à long terme, il est indispensable d’agir sur les facteurs de risque cardiovasculaires pour lesquels il existe à l’heure actuelle des traitements ayant fait la preuve de leur efficacité (dyslipidémies, diabète, hypertension artérielle). Mais l’expérience quotidienne nous apprend que les résultats des études d’intervention sont toujours moins bons que dans la « vraie vie » car des problèmes d’observance à long terme persistent. Cependant la plupart de ces facteurs de risque, bien qu’accessibles à des moyens non médicamenteux (activité physique, diététique ou arrêt du tabac) sont souvent difficiles à mettre en œuvre car ils nécessitent un changement de comportement des patients dans la durée.

La réadaptation cardiaque Par les multiples actions qu’elle propose, la réadaptation cardiaque tient une place originale, efficace et aujourd’hui incontournable dans la prise en charge thérapeutique et éducative du patient coronarien, non seulement après un syndrome coronarien aigu mais aussi après angioplastie avec dysfonction ventriculaire gauche, après chirurgie coronaire et dans l’angor stable. Si la prise en charge en réadaptation cardiaque est une prise en charge globale, la reprise d’une activité physique en toute sécurité reste l’une des actions fondamentales. L’activité physique, par un effet direct et par une aide au contrôle des facteurs de risque, contribue à diminuer les mortalités cardiaque et globale, comme l’ont confirmé les métaanalyses récentes. L’entraînement physique régulier améliore les performances physiques : capacité maximale à l’effort, pic de VO2, tolérance aux efforts sous-maximaux. La capacité maximale d’effort a une valeur pronostique fondamentale. Chaque MET gagné en puissance maximale développée, entraîne une diminution de 27 % de la mortalité à 3 ans. Un gain en VO2 de 1 ml/kg/min améliore le pronostic de 9 %. Ce bénéfice global de l’entraînement physique passe par des effets bénéfiques sur le cœur (amélioration de la perfusion myocardique, diminution de l’ischémie myocardique avec recul du seuil ischémique, stabilisation, voire régression des lésions coronaires), sur les vaisseaux (vasodilatation au repos et à l’effort, restauration de la vasomotricité artérielle endothélium-dépendante et de l’angiogenèse au niveau de l’arbre vasculaire coronaire avec augmentation du débit coronaire à l’exercice), sur le système nerveux autonome (diminution du taux de noradrénaline circulante, diminution de l’activité sympathique et augmentation de l’activité parasympathique, augmentation de la variabilité sinusale), sur le muscle (augmentation du débit sanguin local, modification de la morphologie musculaire avec augmentation de la capacité oxydative du muscle, augmentation de l’endurance musculaire) et sur les poumons.   La réadaptation cardiaque supervisée Elle s’effectue en unité spécialisée, sous la responsabilité d’un cardiologue. Le mode de prise en charge est fonction du risque évolutif du patient, de son lieu d’habitation et de l’organisation locale. Il peut se faire soit en hospitalisation complète, soit en ambulatoire. Cette prise en charge est remboursée par la CPAM, au même titre que tout traitement médicamenteux. La durée sera variable, en fonction du mode de prise en charge et du nombre de séances par semaine. Le patient est pris en charge par une équipe dont les membres ont des compétences techniques complémentaires et une formation spécialisée : cardiologue, kinésithérapeute, infirmière, diététicienne, tabacologue, psychologue, assistante sociale, ergothérapeute… En dehors des actions menées par cette équipe, des consultations pluridisciplinaires organisées permettront de prendre en charge au mieux les facteurs de risque.   Prescription de l’activité physique Le patient coronarien admis en réadaptation cardiaque va bénéficier d’un programme individualisé. La consultation initiale est alors fondamentale, précisant l’histoire de la maladie, les facteurs de risque, les facteurs pronostiques (dysfonction ventriculaire gauche, ischémie, troubles du rythme), l’existence d’un programme individualisé de déficiences associées, la motivation initiale, le retentissement psychologique de l’accident aigu, le traitement en cours, le poste de travail si le patient est encore en activité professionnelle. Ce bilan initial sera complété par un examen clinique et un électrocardiogramme de repos. Les examens complémentaires (échographie cardiaque, Holter, évaluation de l’adaptation à l’effort) sont essentiels pour la stratification du risque du patient.   Première étape : le test d’effort initial Avant la mise en place du programme, il est le plus souvent réalisé sur bicyclette ergométrique ; dans certains cas, il sera réalisé sur tapis roulant ou encore sur manivelle. Ce test dont le protocole le plus couramment admis est une augmentation des charges par paliers de 10 Watts toutes les minutes, est réalisé sous traitement médical. En effet, la plupart des patients sont sous bêtabloquants, il faut donc connaître leur profil de fréquence cardiaque à l’effort sous ce traitement pour ne pas fausser les repères qui seront utilisés ensuite pour prescrire le réentraînement à l’effort (fréquence d’entraînement) et conseiller le patient dans ses activités quotidiennes. Le test permettra de préciser la puissance maximale atteinte en Watts et/ou METS et, s’il est couplé à une mesure des échanges gazeux respiratoires, le pic de VO2 sera déterminé ainsi que le seuil d’adaptation ventilatoire. Ce test est fondamental pour la stratification du risque et pour s’assurer de la stabilité du patient. Deuxième étape : la mise en place du programme d’activité physique Chez le patient coronarien, l’objectif est de réduire le travail myocardique, pour un même effort de la vie courante, et donc la consommation d’oxygène du myocarde. Les programmes d’entraînement associent à la classique activité physique d’endurance sur des ergomètres variés (vélo, tapis roulant, manivelle…) en plateau à la fréquence d’entraînement ou en interval training, un renforcement musculaire segmentaire, une activité gymnique en salle ou en piscine, des séances de relaxation… Par ailleurs, des parcours de marche de différents niveaux seront proposés de façon complémentaire au travail en salle. Tout programme doit tenir compte du profil (à risque ou non) du patient et de la proximité de l’événement coronarien. La sécurité du patient repose sur une équipe formée et une surveillance cardiologique étroite, avec une évaluation régulière et fréquente des patients. Il est important d’accompagner le patient dans cette progression, de l’encourager, de le rassurer, de lui apprendre à être bien à l’écoute de ses sensations. Le but de cette éducation est de faire acquérir au patient un savoir-faire et une autonomie. Enfin, il faut rappeler que, pendant toute cette période de réentraînement supervisé, le traitement médicamenteux associé sera adapté et optimisé en fonction de la surveillance à l’effort.   Troisième étape : le bilan de sortie Celui-ci comprendra un examen clinique, la vérification et la prise en charge des facteurs de risque, la vérification de la cohérence du traitement médicamenteux ; une épreuve d’effort permettra de s’assurer de la stabilité du patient et d’adapter au mieux les conseils de sortie. Il s’agit ensuite d’encourager le patient à poursuivre une activité physique régulière dans la durée. Pour l’aider, le cardiologue dans son cabinet a un rôle clé qui ne se limite pas qu’à la suite du séjour en réadaptation mais qui est déterminant dans toute la prise en charge du patient coronarien. Tout en apportant son expertise cardiologique pour le suivi clinique, paraclinique et thérapeutique de son patient, il peut contribuer pleinement à cette démarche de prévention non médicamenteuse, dans l’esprit de l’éducation thérapeutique. Cette démarche n’est pas simple, il faut tout d’abord trouver les arguments qui vont convaincre le patient du bien-fondé de l’activité physique. On peut en expliquer les bénéfices multiples et « raconter » les études de prévention. Une fois le patient convaincu, il faudra l’aider à créer une motivation pour changer son comportement : quelles sont ses raisons de changer, et aussi quels sont les freins bien souvent très nombreux qui vont l’empêcher de changer ? Une fois motivé, le patient aura besoin d’être aidé pour organiser son emploi du temps sportif et l’intégrer de façon réaliste dans sa vie, mais aussi pour savoir quelle activité physique choisir, quelle dose et à quel niveau la pratiquer. Il lui sera conseillé de pratiquer une activité physique d’endurance dite modérée, 3 à 4 heures par semaine, en variant s’il le souhaite : marche active, vélo, jogging, natation, gymnastique… Il est important est de laisser au patient la liberté de s’approprier ses choix car la notion de plaisir est primordiale si l’on veut espérer une motivation dans la durée. Pour assurer une certaine efficacité à son activité physique, on conseillera au patient d’être bien à l’écoute de son corps, de rester en aisance respiratoire, de ressentir l’effort musculaire comme étant « moyennement difficile ». Il pourra utiliser dans certains cas un cardiofréquencemètre. En dehors de cette activité cadrée et organisée, on conseillera au patient de bouger plus dans la vie de tous les jours. Les activités en groupe pourront l’aider à maintenir sa motivation et sa pratique dans la durée. La Fédération française de cardiologie, relayée par 27 associations régionales et 180 Clubs cœur et santé répartis sur toute la France, a dans ce domaine pour mission d’informer pour prévenir et d’aider à la réadaptation des cardiaques. Une dynamique collective est donnée, sous l’impulsion des cardiologues parrains, par l’organisation de séances d’activité physique encadrées en groupe et du parcours du cœur annuel. Les liens de convivialité qui se créent au sein des clubs contribuent à améliorer le plaisir et la motivation dans la durée. Les centres de réadaptation cardiaque ainsi que les cardiologues traitants ont un rôle important à jouer pour faire connaître l’existence des Clubs et les actions qui y sont proposées. En dehors de la Fédération française de cardiologie, il existe de nombreuses autres associations locales pouvant ainsi aider les patients à reprendre confiance en eux et les accompagner dans la durée. Les associations « Montagne et santé « à Lyon ou « Cyclocœur » à Beaumont de Lomagne nous ont donné un magnifique témoignage de belles expériences humaines vécues par tous ceux qui se sont lancés dans l’aventure sportive de randonnées en montagne ou en cyclotourisme, dans des sites de toute beauté à travers la France et même au-delà des frontières. Le dynamisme et la passion qui animent les cardiologues parrains et tous ceux qui les entourent sont le garant de la réussite exemplaire de ces actions de bénévolat au service de la prévention. Les équipes d’accompagnement, remarquables, sont capables non seulement d’évaluer l’aptitude des patients mais aussi de les éduquer afin qu’ils soient parfaitement acteurs de leur prise en charge, de faire face aux problèmes pendant les sorties, tout en assurant la compétence technique liée au sport pratiqué.   En pratique   L’activité physique régulière est véritablement une arme thérapeutique supplémentaire pour les patients coronariens, et ceci à tout moment de leur évolution. Les cardiologues traitants, en étroite collaboration avec les médecins généralistes, les structures de réadaptation cardiaque et les associations de patients ont un rôle évident pour motiver, conseiller, encourager les patients régulièrement et dans la durée. Ce soutien personnalisé améliore incontestablement l’observance thérapeutique. L’auteur n’a pas déclaré de conflit d’intérêt.

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