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Insuffisance cardiaque

Publié le 29 mar 2024Lecture 6 min

Insuffisance cardiaque : le best of de 2023

François ROUBILLE, Montpellier

En 2023, l’année a été encore extrêmement riche concernant l’insuffisance cardiaque (IC) et les cardiomyopathies. On attendait la mise à jour des recommandations, certes, mais de nombreuses études ont été publiées dans tous les domaines de l’IC et des cardiomyopathies.

Mise à jour des recommandations   Tout d’abord bien sûr, il faut citer la mise à jour des recommandations européennes de l’ESC, avec à la fin de l’été la publication(1) qui précise la prise en charge de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, avec en particulier, comme attendu, l’avènement des gliflozines (dapagliflozine ou empagliflozine à 10 mg). Par ailleurs, dans cette forme d’IC, est toujours soulignée la place des diurétiques de l’anse pour éviter la rétention, et celle de la prise en charge des comorbidités cardiovasculaires et non cardiovasculaires. La classe particulière des IC à fraction d’éjection modérément réduite a pour la première fois le droit à une recommandation spécifique, avec cette fois-là encore les gliflozines en classe I, mais également en classe IIb : la famille des IEC/sartan/sacubitril-valsartan, les inhibiteurs des récepteurs minéralocorticoïdes, les bêtabloquants. Surtout, les recommandations imposent, dans les suites des études publiées récemment, en particulier STRONG, une titration rapide des classes thérapeutiques indiquées dans l’insuffisance cardiaque (en classe I, niveau de recommandation B). Par ailleurs, une réévaluation précoce des patients IC est recommandée (en classe I, niveau de recommandation B). L’objectif dans les deux cas est de réduire les hospitalisations, mais également la mortalité. Enfin commence à apparaître dans les recommandations la finérénone, dont les études en cours vont aider à définir la place. Les recommandations nouvelles concernant les cardiomyopathies(2) accordent une place particulière à la génétique, non seulement pour mieux phénotyper les patients, mais aussi pour adapter la prise en charge aux risques, et en particulier le risque rythmique, et bien sûr, à l’enquête génétique.   Cardiomyopathie hypertrophique obstructive : 1er médicament de sa classe : le mavacamten   La prise en charge de la cardiopathie hypertrophique voit l’arrivée sur le marché d’une 1re molécule de sa classe : le mavacamten, qui a pour fonction d’empêcher le fonctionnement du couple actine/ myosine, ce qui va donc réduire l’inotropisme. Figure 1 Figure 1. Mode d’action du mavacamten.   Ainsi, dans les recommandations concernant l’hypertrophie(2) chez des patients porteurs d’une CMH avérée, qui restent symptomatiques, avec un gradient au repos ou provoqué à plus de 50 mmHg en intraventriculaire, le patient doit 1/ d’abord recevoir le traitement médical par bradycardisant et en particulier les bêtabloquants en classe 1 ; 2/ éventuellement recevoir une association en remplacement des calciques bradycardisants (vérapamil ou diltiazem, classe 1) ; 3/ s’il reste symptomatique, on peut alors recourir au disopyramide (classe I) ou donc au mavacamten (classe II) ; enfin, 4/ s’il reste symptomatique malgré tout cela, une stratégie de réduction septale — que ce soit par chirurgie ou par alcoolisation septale — est indiquée. Figure 2 Figure 2. ESC 2023 : prise en charge de la CMH.   Le médicament expose à un risque d’insuffisance cardiaque, ce qui impose une titration très précautionneuse selon un algorithme complexe, avec des échographies répétées. L’indication est réservée aux patients avec un gradient avéré, et qui restent symptomatiques (NYHA II ou III). Le mavacamten a l’intérêt d’exercer des effets réversibles, comme c’est très bien vu dans les analyses de l’étude pivot, ce qui peut rassurer sur la réversibilité des effets secondaires redoutés. Le mavacamten est toutefois réservé aux centres spécialisés, tout d’abord car sa prescription nécessite au préalable le phénotypage ou le génotypage de l’équipement enzymatique du patient dans certaines sous-catégories du cytochrome (interactions médicamenteuses), mais aussi en raison de la lourdeur du protocole de titration et de surveillance clinique et échographique à l’initiation du traitement. Tout cela n’est donc pas réalisable en pratique de ville et impose une coordination avec le centre de référence locale concernant la prise en charge de la cardiopathie hypertrophique.   Insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée : l’étude STEP-HF   Une grande nouveauté dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée est représentée par une intervention pharmacologique qui vise initialement l’obésité puisque l’étude a été réalisée avec le sémaglutide [étude STEP-HF(3) ] et a montré un impact intéressant sur la réduction du poids comme attendu aux alentours de 15 % en un an, mais surtout une amélioration des scores de qualité de vie et des capacités à l’effort. C’est la première fois que chez des patients (au total 529 patients avaient été inclus) présentant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, avec une obésité, on montre la possibilité d’intervenir sur les aspects métaboliques et en particulier sur le surpoids, avec un impact favorable sur les performances myocardiques. La place d’une telle thérapeutique chez des patients non obèses reste bien sûr à déterminer. Figure 3 Figure 3. D’après Kosiborod MN et al.(3).   Encore des nouveautés dans l’amylose à transthyrétine (TTR)   Le domaine de l’amylose nous réserve toujours des surprises avec cette fois des études de phase 1, en particulier un article publié dans le NEJM(4) (avec le Pr Damy comme dernier auteur, la France étant à l’honneur !) qui montre la possibilité d’utiliser des thérapeutiques par anticorps antitransthyrétine et la possibilité d’une réduction de la charge en fibres amyloïdes, vue en scintigraphie chez des patients porteurs d’une amylose à transthyrétine. Il s’agit d’une étude de phase 1, mais qui ouvre des perspectives majeures en termes de réversibilité des atteintes cardiaques chez les patients porteurs d’amylose à TTR. Figure 4 Figure 4. D’après Garcia-Pavia P et al.(4).   Exit l’ECMO dans la prise en charge du choc cardiogénique compliquant un infarctus aigu du myocarde ?   D’autres domaines sont en revanche décevants, c’est en particulier le cas du choc cardiogénique avec une étude principalement allemande qui montre chez les patients en choc cardiogénique compliquant un infarctus aigu du myocarde, l’inutilité de la mise en place d’une ECMO(5). Il s’agit d’une étude de très grande ampleur (401 patients dans ce contexte c’est une très large étude), mais des patients sans doute déjà un peu trop graves, pour bénéficier d’une telle prise en charge. La place exacte de l’ECMO est donc de plus en plus discutée, et la mise en place d’une telle technique d’assistance de courte durée devrait être réservée aux patients pris en charge précocement, avec un pronostic acceptable. Figure 5 Figure 5. D’après Thiele H et al.(5).   Et dans l’insuffisance cardiaque avancée : comment avancer ?   Enfin, des avancées fondamentales majeures sont en cours avec les premiers cas publiés de transplantation par xénotransplantation, c’est-à-dire la transplantation d’un cœur porcin modifié qui a permis la survie quelque temps des premiers patients qui ont pu en bénéficier. Dans la même catégorie de l’insuffisance cardiaque avancée, l’étude visant à évaluer l’intérêt du dispositif commercialisé par CARMAT a repris en France, avec implantation dans une dizaine de centres de la prothèse AESON chez des patients en pont vers la transplantation. Il s’agit d’une alternative intéressante chez des patients qui ne pourraient pas bénéficier directement de la transplantation, mais qui ne sont pas non plus contre-indiqués de façon définitive.   EN PRATIQUE   L’année 2023 a donc été très riche encore une fois dans le domaine de l’insuffisance cardiaque et des cardiomyopathies, depuis les recherches fondamentales, les médicaments, jusqu’aux dispositifs, le tout synthétisé dans une mise à jour des recommandations, à peine deux ans après les précédentes, ce qui montre le dynamisme et l’abondance de nouvelles données dans ce domaine. N’oublions pas enfin, sur un plan plus organisationnel, l’investissement important des décideurs et de l’Assurance maladie, non seulement dans la campagne de communication grand public, mais également dans la campagne de communication destinée aux soignants. De même, les décrets cet été ont été publiés qui permettent enfin de pérenniser la prise en charge de nos patients à travers le système de télésurveillance.

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