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Dyslipidémies

Publié le 15 jan 2024Lecture 4 min

Les dyslipidémies au congrès du CNCF 2023

Pierre SABOURET, Paris

Les dyslipidémies représentent un des facteurs de risque cardiovasculaires majeurs d’événements ischémiques athérothrombotiques. Malgré les progrès médicaux réalisés depuis les résultats de l’étude 4 S publiée en 1994, et suivie par de nombreuses études randomisées qui ont démontré des bénéfices supplémentaires à abaisser intensément et rapidement les particules athérogènes représentées par l’apolipoprotéine B (ApoB), présente dans le LDL-C, mais aussi dans les remnants, la lipoprotéine (a), notée Lp(a), et dans les triglycérides (TG), les résultats des registres et notamment du registre national français ESTEBAN montrent un mauvais contrôle lipidique des patients, aussi bien en prévention primaire que secondaire. Les facteurs de non-atteinte des objectifs lipidiques sont nombreux, et parmi eux, on peut citer l’impact négatif de certains médias sur les effets des statines, la connaissance imparfaite des médecins sur les bénéfices cardiovasculaires d’une baisse profonde et durable de l’ApoB, la multiplicité des recommandations ou avis d’experts, et l’inertie thérapeutique.

L’évaluation du risque cardiovasculaire en prévention primaire est perfectible, les outils d’évaluation du risque cardiovasculaire recommandés par l’ESC (SCORE2 et SCORE OP pour les patients âgés) étant peu utilisés en France. L’imagerie cardiovasculaire (score calcique coronaire, Doppler artériel, voire scanner coronaire) peut apporter une aide à une meilleure stratification du risque en prévention primaire, mais ses indications restent perfectibles dans les recommandations et son utilisation reste marginale avec une grande hétérogénéité des pratiques. En prévention secondaire, les objectifs de LDL-C inférieurs à 55 mg/dL ont été validés par 3 grandes études randomisées (IMPROVE-IT, ODYSSEY Outcomes, étude FOURIER), mais ne sont atteints que pour une minorité de patients dans les registres récents (notamment le registre mondial DaVinci). En effet, les statines puissantes à fortes doses permettent une baisse de 50 % du LDL-C ne permettant pas à une majorité de patients d’atteindre les objectifs bas en prévention secondaire. Certains groupes de recommandations plaident pour une stratégie associant d’emblée statines à fortes doses et ézétimibe, qui permet une baisse supplémentaire de 20 à 25 % du LDL-cholestérol avec une réduction des événements cardiovasculaires majeurs (MACE : Major CV Events) démontrée dans l’étude IMPROVE-IT pour un suivi de plus de 8 ans, et en prévention primaire dans l’étude japonaise EWTOPIA. Les inhibiteurs des PCSK9 (iPCSK9) représentés par l’alirocumab et l’evolocumab ont démontré des bénéfices additionnels à ceux des statines dans les études randomisées ODYSSEY Outcomes et FOURIER, la réduction des événements cardiovasculaires étant plus marquée chez les patients dont le risque à l’inclusion était plus élevé (patients diabétiques de type 2, patients pluritronculaires, patients polyartériels) et que la durée sous traitement était prolongée, ainsi que l’a parfaitement illustré l’étude OLE-FOURIER (Open Label Extension). Les patients ayant les taux de LDL les plus bas ont un moindre risque, sans signal concernant la sécurité d’emploi, notamment concernant le risque d’hémorragie cérébrale et les fonctions cognitives. Dans le cadre du syndrome coronarien aigu (SCA), une stratégie précoce d’emblée associant une statine de forte intensité et de l’ézétimibe permet une atteinte rapide des objectifs lipidiques et de lutter contre l’inertie thérapeutique souvent prégnante pour de multiples motifs après la sortie de l’hôpital. Un contrôle précoce du bilan lipidique 4 à 6 semaines après le SCA identifie les patients pouvant bénéficier d’un iPCSK9, à savoir les patients sous dose maximale tolérée de statines et ézétimibe avec un LDL supérieur à 70 mg/dL, qui représentent dans les registres environ 10 % des patients coronariens. L’icosapent éthyl (EPA) est un oméga-3 ayant démontré des bénéfices cardiovasculaires chez des patients diabétiques à risque élevé en prévention primaire ou des patients en prévention secondaire. Cette molécule bénéficie d’une indication en France à 4 grammes par jour chez les patients coronariens sous dose maximale tolérée de statines. Le registre français ODIACOR a récemment rapporté qu’un tiers des patients coronariens diabétiques serait éligible en ambulatoire. L’inclisiran est un nouvel hypolipémiant, concurrent direct des inhibiteurs des PCSK9 puisqu’il agit en inhibant sur 6 mois le brin d’ARN messager agissant les récepteurs PCSK9. Deux injections par an seulement sont nécessaires, permettant une diminution de 50 % du LDL-cholestérol. Le programme ORION est un programme comportant de nombreuses études randomisées. Il a permis de démontrer que l’inclisiran permet une baisse importante du LDL-C comme nous l’avons vu, avec une excellente tolérance clinique et biologique au long cours. L’efficacité clinique sur les événements cardiovasculaires majeurs fait l’objet de deux études randomisées de grande envergure : une se déroule aux États-Unis (étude de morbi-mortalité ORION IV), l’autre en Europe (VICTORION 2P) avec une étude s’intéressant spécifiquement à la régression des plaques d’athérome chez les patients en prévention primaire traités par statines et ézétimibe (VICTORION plaque). Un autre nouvel entrant (non disponible en France) est représenté par l’acide bempédoïque avec le programme CLEAR (dont l’étude de morbi-mortalité CLEAR OUTCOMES). Cette molécule inhibe l’ATP lyase et n’est pas exprimée au niveau musculaire. La baisse du LDL obtenu est de l’ordre de 20 %, plus importante chez les patients intolérants aux statines, car elle agit sur la même voie, et l’association avec l’ézétimibe s’avère complémentaire puisque cette dernière inhibe spécifiquement l’absorption du cholestérol au niveau de l’intestin grêle. Des sessions consacrées à la lipoprotéine (a) (Lp[a]) ont souligné le rôle délétère de cette particule athérogène, non seulement sur les événements athérothrombotiques, mais aussi sur le risque de sténose valvulaire aortique. Deux inhibiteurs spécifiques de la Lp(a) sont en cours d’évaluation : l’olpasiran et le pélacarsen. Les résultats d’efficacité clinique sur les MACE et sur la progression de la sténose aortique sont prévus dans plusieurs années. Enfin, la fascinante technique du CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats) permet de corriger des anomalies génétiques spécifiques avec une baisse prolongée du LDL-cholestérol sur des modèles animaux et plus récemment chez les humains lors de l’étude VERVE 101. Cette technique de CRISPR est également évaluée dans d’autres pathologies, dont la cardiopathie amyloïde avec des premiers résultats encourageants. Toutes ces nouveautés thérapeutiques ne doivent pas occulter ni sous-estimer les bénéfices cardiovasculaires produits par un régime de type méditerranéen et l’adoption de règles hygiéno-diététiques au long.   « Lipidement vôtre. »

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