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L'ESPRIT DE LUGDUNUM

Publié le 15 oct 2019Lecture 3 min

Le syndrome de Wonder Woman

Patrick LERMUSIAUX, service de chirurgie vasculaire et endovasculaire, Hospice civils de Lyon, CHU de Lyon

Vous avez sans doute remarqué que sur notre planète, un être humain sur deux est une femme… mais pas en chirurgie vasculaire.

Il y a quelques temps de cela, une de nos brillantes internes, m’avait convié à faire partie de son jury de thèse. Nous voilà donc doctement assis dans la grande salle des thèses. Ici, les murs sont tapissés par les portraits de nos illustres doyens depuis le siècle dernier. La plupart arborait une barbe tantôt Napoléon III, tantôt Victor Hugo, en tout cas un authentique Hipster de Melbourne les aurait, sans aucun doute, toutes homologuées. Des regards de nos doyens perlait ce subtil mélange d’autorité et d’autosatisfaction. À la boutonnière, le discret ruban rouge, aux grands hommes, l’université reconnaissante. Tout en essayant de rester concentré sur le résultat des analyses multivariées, je ne pouvais m’empêcher d’être intrigué par l’absence de femmes parmi ces doyens, et je faisais l’hypothèse, que le chromosome Y était une condition nécessaire pour accéder à cette fonction. En médecine, la parité est maintenant de rigueur, mais alors pourquoi, alors que le nombre de femmes en chirurgie augmente progressivement, aucune ne soit PU-PH en vasculaire en 2019, comme il y a si peu de femmes pour diriger les entreprises du CAC40. Pour nos maîtres, la chirurgie était une affaire de super-héros dopés à la testostérone qui enchaînaient les gardes et les blocs sans ressentir la moindre fatigue. Et pourtant l’armée a confié le commandement de la patrouille de France à une femme, et il y a beaucoup de femmes astronautes. Pour être PU-PH, la barre est chaque année de plus en plus haute, points SIGAPS, thèse de sciences, mobilité, sans oublier une forte activité opératoire garante pour l’hôpital d’actuelles et futures sonnantes et trébuchantes T2A. Toutes ces heures passées au bloc opératoire de jour comme de nuit ne seront pas utilisées à écrire les articles qui animent le H-Index. Mais alors qui ira récupérer les enfants chez la nourrice, qui leur donnera le bain, qui vérifiera les devoirs ? Si l’un des deux membres d’un couple veut devenir PU-PH, il faut que le conjoint puisse et accepte de réaliser ces rôles. Beaucoup d’hommes ont décidé de sacrifier ces heures passées auprès de leurs enfants pour leur travail, mais les femmes font passer leur famille et leurs enfants avant tout. Alors vous vous demandez comment être PU-PH en chirurgie vasculaire. C’est simple, il faut tout bonnement être une super héroïne ! Ainsi notre collègue est une super maman, une super épouse, une super chirurgienne, une super enseignante, une super chercheuse… Elle est tout à la fois mais malheureusement elle s’expose au risque d’attraper le fameux syndrome de Wonder Woman, ce que d’aucuns psychiatres classifient parmi les burn-out. Alors, mes chers collègues, oui, vous qui êtes porteurs du chromosome Y, quel que soit votre mode d’activité, vous qui êtes membre du CNU, ou moi qui plaide coupable, il faut toujours avoir en tête le syndrome de Wonder Woman, et lutter pour que la parité, qui s’imposera nécessairement, s’impose dès maintenant. C’est possible, les autres spécialités l’ont fait, acceptons de normaliser les conditions de travail, imposons des quotas, adaptons et modifions les règles. Il n’y a pas d’autres solutions. Même les hommes politiques ont réussi ! Et comme cela, Wonder Woman restera une super-héroïne.

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