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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 29 jan 2008Lecture 12 min

Un duo toujours en tête : la FA et la resynchronisation

B. BREMBILLA-PERROT, CHU de Brabois, Vandœuvre


AHA
Dans ce grand congrès de cardiologie générale, un grand nombre de communications ont traité de rythmologie ; problème intervenant dans l’évolution d’une majorité des cardiopathies et donc dans leur prise en charge. Comme à l’ESC, deux grands thèmes se sont partagés la vedette : la fibrillation auriculaire (FA) et la resynchronisation.

La fibrillation auriculaire La prise en charge de ce trouble du rythme, le plus fréquent puisque son incidence croît avec l’âge et la présence d’une cardiopathie, dépend essentiellement des symptômes et du retentissement clinique éventuel. Chez le sujet très symptomatique et très gêné par des accès de tachycardie non contrôlables par les antiarythmiques, ou chez lequel la survenue d’une FA est associée à une mauvaise tolérance hémodynamique, le traitement curatif de l’affection est envisageable. Il ne fait, en effet, plus aucun doute que la FA peut être guérie. Les traitements curatifs Plusieurs communications générales ont rappelé le principe de ce traitement. Si le point de départ de la FA le plus fréquent est situé dans l’oreillette gauche, comme l’a démontré l’équipe bordelaise il y a plus de 10 ans, il a été rappelé qu’il est important de vérifier qu’il n’existe pas une cause aisément curable par ablation et susceptible d’expliquer la FA comme la présence d’une double voie nodale compliquée de tachycardies par réentrée intranodales, la présence d’un faisceau accessoire ou d’un flutter auriculaire. Ces différents troubles du rythme peuvent dégénérer en FA et leur suppression laisse espérer une guérison ou une amélioration chez le patient < 50 ans. En l’absence de ces causes, l’abord transseptal de l’oreillette gauche est nécessaire. Il apparaît que la meilleure méthode pour éradiquer les foyers issus en majorité des veines pulmonaires n’est pas complètement définie car de grandes équipes ont rapporté des méthodes d’approche différentes. L’ablation La technique conventionnelle, la plus utilisée, consiste à rechercher les foyers et à isoler les veines pulmonaires, mais il peut y avoir d’autres foyers d’origine dans l’oreillette droite ou au niveau du sinus coronaire. La recherche d’électrogrammes fractionnés complexes selon la technique de Nademanee pourrait être également une bonne approche. Les techniques de reconstruction de l’oreillette gauche sont dorénavant associées à l’approche électrophysiologique. Les équipes de Bordeaux représentée par M. Hocini, celle de Nademanee (USA), de Pappone (Italie), Natale (USA), Marchlinski (USA) rapportent de bons résultats dans le traitement de la FA paroxystique avec un taux de guérison dans les 2 ans qui suivent, de plus de 85 %, sous réserve que la surveillance Holter durant les 2 semaines qui suivent l’ablation ne montre pas de récidive de FA (Choi AD). Lorsqu’elle est permanente, le geste devient plus complexe du fait du remodelage de l’oreillette et des lignes supplémentaires doivent être appliquées au niveau de l’oreillette gauche mais aussi à droite. Le taux de complications noté par ces grandes équipes paraît assez faible, mais il s’agit d’équipes parfaitement expérimentées ayant une large expérience dans cette technique qui reste lourde, et dont les résultats ne sont probablement pas les mêmes dans de plus petites équipes. Étude AF-CHF trial (RS : rythme sinusal, bb : bêta bloquant, CV : cardiovasculaire). La chirurgie C’est pourquoi d’autres mé-thodes ont encore leur place avec notamment la technique chirurgicale type Maze lorsqu’une chirurgie cardiaque est indiquée ; l’équipe lyonnaise de M. Chevalier rapporte de bons résultats chez ces patients. La prévention L’étude MASCOT (the Management of Atrial fibrillation Suppression in AF-HF COmorbidity Therapy) confirme en revanche qu’il est difficile de prévenir la FA par des algorithmes de stimulation cardiaque. Cette étude incluait des patients qui devaient bénéficier d’une resynchronisation cardiaque, car ils avaient tous une altération de la fonction ventriculaire gauche avec une FE < 35 % et un élargissement de QRS au-delà de 130 ms. L’étude concernait 409 patients ; 156 ont eu un pacemaker comportant un algorithme de prévention de la FA et 197 une resynchronisation simple ; 19 % de ces patients avaient des antécédents de FA. Au bout d’un an seulement, 3,3 % des patients avaient une FA et l’incidence était la même, qu’il y ait un algorithme de prévention de la FA ou pas d’algorithme. Notons en outre un risque de FA transitoire dans 4 % des cas lors de l’implantation d’un simple stimulateur double chambre (Mittal S) mais aussi lors d’une mise en place de pacemaker triple chambre. Quelle prise en charge ? Pour la majorité de nos patients, la prise en charge classique selon les recommandations des sociétés européennes et américaines de cardiologie de 2006 reste indiquée, car il est rare de ne pas trouver un traitement permettant une tolérance fonctionnelle satisfaisante de la FA. Le registre canadien de la FA qui a recruté 803 patients confirme la bénignité relative de l’arythmie, notamment quand il n’y a pas de cardiopathie (26 % de la population), avec un faible risque d’accident thromboembolique et de passage en FA permanente. Cela conforte l’absence de traitement dans les cas de FA paroxystique sur cœur sain si les accès sont peu fréquents. Dans les cas d’une FA permanente ou de FA paroxystiques multirécidivantes, le congrès confirme que, dans les cas généraux, maintenir un rythme sinusal n’apporte aucun bénéfice clinique et pronostique au patient à condition que l’anticoagulation soit faite selon les recommandations internationales (selon le score de CHADS) et ceci même dans l’insuffisance cardiaque. L’étude AF-CHF trial (figure), similaire à des études telles que AFFIRM, SAFET, CTAF, concerne ici des patients qui avaient une insuffisance cardiaque (stade III, IV) et une FE < 35 %. Elle vient de démontrer qu’il n’y a aucun changement de la mortalité cardiovasculaire suivant que l’on contrôle simplement la fréquence cardiaque par bêtabloquant et éventuellement digitalique ou que l’on tente de maintenir un rythme sinusal par des cardioversions et par utilisation d’un traitement d’entretien par amiodarone ou sotalol ou dofetilide. Au total, 1 375 patients ont été recrutés et randomisés en deux groupes, 682 patients ont eu une tentative de maintien d’un rythme sinusal et 694 patients un respect de la FA ; la mortalité était respectivement de 27 et 28 %. De plus, il n’est pas apparu de différences pour le risque d’accident vasculaire ou celui d’aggravation éventuelle de l’insuffisance cardiaque. Il y avait plus d’hospitalisations dans le groupe où une tentative du maintien du rythme sinusal a été effectuée. Ces données randomisées ne font pas apparaître les risques d’événement rythmique ventriculaire précipités par un passage en FA, chez les sujets qui ont un défibrillateur. Ce problème était déjà connu et a été confirmé par Lemola H. qui rapporte une multiplication par 3 des chocs appropriés en cas de FA. Traitements pharmacologiques Quant au maintien du rythme sinusal par une nouvelle molécule antiarythmique, il n’y a pas eu de nouveauté, à l’exception du nifekalant, de classe III, qui permettrait d’arrêter les flutters auriculaires. On retiendra encore des petites études montrant que les drogues non directement antiarythmiques sont probablement intéressantes que ce soit les ARA II ou les IEC, ou surtout les statines. Une métaanalyse des études randomisées introduisant des statines chez des patients en rythme sinusal mais avec une histoire clinique de FA ou devant subir une chirurgie cardiaque, réalisée par L. Fauchier, confirme une diminution significative du risque de rechute de la FA chez les sujets traités par statines. La resynchronisation ventriculaire La resynchronisation ventriculaire a également fait l’objet de très nombreuses communications. Son intérêt clinique n’est plus remis en cause et a été confirmé dans de nombreuses communications avec un maintien au cours du temps (tableau). De nombreux travaux sur des signes échographiques susceptibles d’identifier les patients qui pourraient bénéficier de la technique ont été rapportés. Depuis la présentation de l’étude PROSPECT (Providing Regional Observation to Study Prediction of Events in the Coronary Tree), ces signes échocardiographiques sont cependant remis en cause car aucun signe n’est réellement fiable. L’étude RethinQ, menée chez 172 pa-tients au stade III de la NYHA avec une FE < 35 % mais avec des QRS < 130 ms, montre que ces sujets ne tirent aucun bénéfice de la resynchronisation ; elle vient de confirmer à nouveau que c’est la largeur de QRS qui est le moyen le plus fiable d’identifier les sujets susceptibles d’être améliorés. Il faut que le QRS soit au moins égal à 120 ms pour noter une amélioration, même s’il y a des signes d’asynchronisme à l’échographie. Chez les sujets avec QRS larges et absence d’amélioration sous traitement médical conventionnel, il faut noter une amélioration importante de l’état fonctionnel des patients qui avaient bénéficié auparavant d’une stimulation conventionnelle dans l’apex du ventricule droit (Thelen A) ou chez des sujets où la stimulation ventriculaire induit un BBG. Le bénéfice de la resynchronisation se maintient chez les sujets en FA. Il ne semble pas aussi bon en cas de BBD dans l’étude CARE-HF (Gervais R, Rennes France). Pour l’équipe rennaise, la diminution de la largeur du QRS et du QTc après resynchronisation est un facteur pronostique favorable. La présence d’une sévère dilatation ventriculaire gauche (diamètre télédiastolique > 186 mm et télésystolique > 138 mm) est en revanche un signe de non réponse à la resynchronisation (USA). L’intérêt clinique de la resynchronisation n’est plus à mettre en doute. La technique doit être cependant réservée à des sujets symptomatiques. L’équipe lilloise avec D. Klug rappelle les risques d’endocardite d’Osler et tente d’établir un score de gravité de l’affection incluant des critères majeurs (hémoculture + végétations) et mineurs (fièvre, symptômes locaux…) conduisant à l’ablation du matériel.   Autres problèmes rythmologiques   Indications du défibrillateur implantable Il y a un consensus mondial sur l’indication de ce défibrillateur en cas d’arrêt cardiaque récupéré en dehors d’une cause aiguë réversible ou en cas de tachycardie ventriculaire (TV) compliquant une cardiopathie avec altération de la fonction ventriculaire gauche (FE < 35 %). À partir d’une sous-étude de MUSTT, M.-A. Crandall a rapporté un risque d’effet pro-arythmique lié au traitement antiarythmique, dont la nature n’a pas été précisée, élevé chez les sujets avec ischémie coronaire non corrigeable et qui pourrait être un motif d’implantation d’un défibrillateur en cas de TV et de cardiopathie ischémique avec fonction systolique relativement préservée. D’autres indications du défibrillateur restent à mieux définir, notamment quand l’indication est prophylactique. Il apparaît, en effet, que les sujets issus de l’étude MADIT-II et sélectionnés sur le fait qu’ils ont une cardiopathie ischémique avec des antécédents d’infarctus de plus de 6 semaines et une FE < 30 %, ne bénéficient pas tous de l’implantation de ce défibrillateur et peuvent même souffrir des complications et des effets secondaires liés au système. Dans une sous-étude de la population de MADIT II, Vyas (USA) a montré qu’il fallait au moins un facteur de risque associé à la baisse de la FE pour que le défibrillateur soit utile. Les facteurs de risque rapportés sont cliniques, âge supérieur à 70 ans ou stade de la NYHA ≥ 3 ou présence d’un élargissement de QRS (≥ 120 ms), ou présence d’une FA, ou taux d’urée > 0,26 mg/dl. Ces données sont à confirmer car elles excluent le sujet relativement jeune qui vient de présenter une nécrose étendue, qui est habituellement asymptomatique et qui semblait le candidat idéal pour cette implantation. Ce patient serait toutefois en voie de disparition car T. Shiga (Japon) note que, lors du recrutement de 4 122 infarctus consécutifs à l’ère de l’angioplastie primaire, seuls 4 % des patients auraient les critères MADIT II.   Prédiction du risque de mort subite Aucun examen non invasif (ou invasif) n’est réellement complètement fiable pour prédire le risque de mort subite. Après les succès transitoires pour la stratification du risque de l’enregistrement Holter ECG, de l’ECG haute amplification, de l’analyse de la variabilité sinusale, c’est au tour de la technique d’étude de l’alternance de T, qui semblait prometteuse pour identifier le risque de mort subite, d’être remise en question. L’étude MASTER TRIAL, effectuée chez 575 patients de type MADIT II avec FE < 30 %, a montré que le taux d’événements était le même que les patients aient une alternance d’onde T positive (différence de plus de 1,9 mv) ou négative. Kadish a rappellé cependant que les études basées sur les événements enregistrés par le défibrillateur surestiment le taux d’événements rythmiques dans l’évolution naturelle des maladies ; certaines TV n’auraient certainement pas abouti au décès du patient et n’auraient pas été ressenties par le patient. Le simple ECG de surface est certainement encore un examen simple et peu coûteux à prendre en compte pour la stratification du risque. La largeur de QRS est importante à considérer et l’aspect fractionné du QRS s’avère être un élément péjoratif et prédictif d’événements rythmiques (W Maskoun, USA), de très nombreuses années après sa description initiale. Il faut garder à l’esprit qu’il est, et qu’il sera toujours impossible de prédire avec certitude la mort subite, qui est multifactorielle et dont le mécanisme implique de nombreux éléments, comme la coronaropathie et l’ischémie, les modifications du système nerveux autonome et les substrats arythmogènes.   Syndrome de Brugada Plusieurs publications japonaises ont rapporté des signes ECG dans le syndrome de Brugada qui pourraient aider à identifier les sujets les plus à risques. On sait maintenant que le test à l’Ajmaline n’est peut-être plus utile si les dérivations précordiales sont positionnées au 3e espace intercostal et font apparaître un aspect de syndrome de Brugada de type I car, à ce niveau, l’enregistrement est à la hauteur de l’infundibulum du ventricule droit où seraient situées les anomalies (S. Nagase). En V2, la présence d’un intervalle entre le début du QRS (r) et le retour à la ligne isoélectrique (J) > 90 ms avec un QRS ≥ 90 ms en V6 serait plus souvent associé à un risque d’événement (M. Takagi). L’ECG haute amplification pourrait être également intéressant s’il est enregistré à deux reprises, une fois au moment du dépistage et une fois 3 mois après ; si les données de cet examen fluctuent, il y aurait plus d’événements graves. Sinon, une nouvelle étude japonaise confirme que le pronostic des sujets asymptomatiques ayant un aspect de syndrome de Brugada de type I à l’ECG, semble bon avec une absence d’événements chez 98 sujets dépistés après un enregistrement ECG systématique chez 13 904 sujets au bout de 7,8 ± 1,6 ans.   QT long De très nombreux travaux ont également porté sur le syndrome du QT long et sa génétique et, bien sûr, de nouveaux gènes identifiés. L’étude italienne de Stramda-Bachale a rapporté la prévalence d’un nouveau syndrome de QT chez 34 000 nouveaux-nés vus consécutivement qui est de 1 sur 2 500 à 3 000 naissances. La longueur du QTc > 440 ms, déjà connue, apparaît toujours comme un facteur de risque d’événement dans cette affection. Les risques sont majeurs quand le QTc est > 500 ms. Des anomalies de l’onde T seraient aussi à prendre en compte.   Cardiomyopathies obstructives L’alcoolisation septale comme traitement des cardiomyopathies obstructives reste l’objet de nombreux travaux avec des résultats apparemment satisfaisants pour les équipes entraînées, mais avec un risque d’arythmie ventriculaire dans les 2 semaines qui suivent. Pourquoi ne pas essayer auparavant la cibenzoline qui diminue le gradient intraventriculaire comme cela avait été rapporté il y a plusieurs années et qui semble toujours utile (M. Saito) ?   Au total Aucune « révolution rythmologique » n’a eu lieu. La prise en charge et le traitement des troubles du rythme restent complexes et les recommandations ne doivent être appliquées qu’après avoir pris en compte l’histoire clinique et familiale, les signes fonctionnels, l’âge, l’état général, l’atteinte extracardiaque, l’état coronarien et le traitement de tous les facteurs aggravants des troubles du rythme. Cela est particulièrement important avant de prendre des décisions parfois lourdes comme l’ablation de la fibrillation auriculaire ou la mise en place d’un défibrillateur avec ou non resynchronisation, qui nécessitent une large expérience.

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