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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 17 juin 2008Lecture 23 min

Les défibrillateurs : attention aux chocs inappropriés !

P. RITTER, InParys, Saint-Coud


CARDIOSTIM
Sont abordés ici les résultats globaux des suivis de populations de patients implantés, les diverses facettes de leur implantation, à la recherche de seuils de défibrillation offrant une marge de sécurité satisfaisante, la gestion des complications, dominées par les chocs inappropriés qui restent la difficulté la plus importante de cette technique, et les avancées technologiques.

Les résultats de la défibrillation implantable automatique à long terme   Dans les populations globales • La survie des patients porteurs de défibrillateurs, en fonction des pathologies associées est étudiée par Greenberg et coll. La mortalité globale n’est pas plus importante chez les ischémiques que chez les non-ischémiques (7,1 versus 5,8%), dans le registre ACT regroupant 4 578 patients suivis un an. Lubinski et coll. rapportent leur expérience de 2 162 patients implantés de 1996 à 2004, suivis en moyenne pendant 30 mois. La moitié présente des arythmies dans les 6 premiers mois, et la probabilité estimée de subir une intervention du défibrillateur est de 52 % sur une période de 10 ans. • Stockburger et coll. ne remarquent pas de différence de mortalité entre le groupe prévention secondaire et prévention primaire (150 et 210 patients, suivis 42 et 34 mois respectivement). Les patients en prévention secondaire reçoivent davantage de thérapies que les autres, notion confirmée sur la première année de suivi par Deering et coll. sur une population de 3 972 patients. La mortalité globale est de 4,3 %, donc similaire à celle des grands essais sauf MADIT II (8 %). • Defaye et coll. rapportent les résultats du registre français des défibrillateurs, sur 636 patients implantés de 2002 à 2005 : 29 % sont implantés en prévention primaire avec une augmentation de ce taux au fil du temps, passant de 18 à 41 % ; 64 % sont coronariens et 28 % ont une histoire d’arythmie atriale ; 29 % reçoivent une thérapie appropriée, dont 21 % en prévention primaire et 32 % en prévention secondaire (p < 0,01) ; 9 % reçoivent une thérapie inappropriée, dont 8 % en prévention primaire et 9,5 % en prévention secondaire, mais 46 % de ces thérapies pourraient être évitées par une programmation adéquate. Un défibrillateur ne doit pas simplement être implanté, il doit être suivi avec soin et nécessite souvent des reprogrammations. Chez les coronariens Chez 655 patients ischémiques de l’étude MADIT II suivis 63 mois, par Cygankiewicz et coll., la probabilité de décès est de 26, 34 et 40 %, à 4, 5 et 6 ans respectivement. Les éléments prédicteurs de cette mortalité sont un âge > 65 ans, la classe NYHA III et IV, un diabète, un rythme stimulé, la fibrillation atriale, un BNP élevé et l’absence de bêtabloquant. Atary et coll. se sont intéressés aux patients dans le postinfarctus à risque de troubles du rythme ventriculaire grave. Le but est d’évaluer le taux de patients candidats à un défibrillateur et son bénéfice à un an (programme MISSION). Au total, 517 patients ont été inclus de février 2004 à avril 2006. Seuls 5,6 % sont candidats, suivant les recommandations internationales, donc un faible nombre. Ils ont subi un infarctus antérieur dans 93 % des cas contre 47 % chez les non-candidats et l’élévation de la troponine T a été plus élevée (15 contre 5). Des événements rythmiques sont survenus plus souvent quand la fraction d’éjection est basse (< 3 0%) : TV non soutenues, thérapies appropriées et non appropriées. Les résultats sont similaires quand la fraction d’éjection est comprise entre 30 et 35 %. Les auteurs recommandent de se baser sur la fraction d’éjection un mois après l’infarctus avant de décider l’indication d’un défibrillateur qui ne concernera qu’une petite population. Le risque de récidive d’arythmie ventriculaire est plus important en cas de cardiopathie ischémique pour Borleffs et coll. chez 145 patients suivis pendant 2 ans ayant reçu des thérapies appropriées sur une population totale de 476 patients, avec les paramètres prédicteurs suivants : prévention secondaire, arythmie atriale, QRS large, fraction d’éjection basse, usage de sotalol. Les populations particulières Syska et coll. ont suivi 135 patients ayant une cardiopathie hypertrophique, dont les trois quarts en prévention secondaire, pendant 5,4 ans ; 35 % des patients ont reçu une thérapie appropriée en prévention secondaire contre 15 % en prévention primaire. Les thérapies inappropriées sont survenues chez 32 % des patients en prévention secondaire contre 12 % en prévention primaire. Etaient-ils correctement programmés ? Un grand nombre d’auteurs payent une attention particulière à la fonction ventriculaire gauche au moment de l’implantation d’un défibrillateur ; comme la cause de mort la plus importante est l’insuffisance cardiaque (Marijon et coll.), la préservation ou l’amélioration de la fonction VG par la resynchronisation cardiaque devrait être une préoccupation constante des équipes médicales au moment du choix de la prothèse à implanter. Dans une étude d’observation de 258 défibrillateurs suivis entre 2001 et 2007, 112 défibrillateurs purs et 138 resynchronisations-défibrillations, 57 % des patients ont été implantés pour prévention primaire, et 53 % avec coronaropathie. La fraction d’éjection moyenne était de 28 %. La mortalité globale a été de 13 % par an en prévention primaire et 6 % en prévention secondaire. Le taux de chocs appropriés est de 24 % (14 % en prévention primaire, sans différence entre les défibrillateurs et défibrillateurs biventriculaires, et 38 % en prévention secondaire) contre 12 % pour les chocs inappropriés. Un mystère Malgré les résultats satisfaisants de toutes ces études, il reste étonnant que 48 % des patients présentant les critères des recommandations à l’implantation de défibrillateurs ne sont jamais référés ! Bradfield et coll. mettent en exergue une éducation insuffisante des médecins, en constatant une mortalité de 18 % chez les porteurs de défibrillateur contre 32 % chez les non-implantés sur une période de suivi ayant débuté en 2002 chez 600 patients candidats. Les patients insuffisants cardiaques présentant les critères d’implantation des recommandations d’implantation de défibrillateurs, sont-ils réellement implantés ? Salvo et coll. (Los Angeles), dans une partie du monde ne connaissant pas de restrictions budgétaires, constatent qu’un quart de patients éligibles ne sont pas implantés, le plus souvent par refus du patient. Cependant, ils évoquent aussi le manque d’éducation de la communauté médicale à une thérapie ayant fait ses preuves.   En pratique   Ce chapitre de résultats révèle donc qu’au fil du temps et du fait des recommandations internationales, la proportion des patients implantés pour prévention primaire augmente. Or, ce sont eux qui subissent plus volontiers des chocs inappropriés sur altération de sonde de défibrillation ou sur arythmie atriale, d’où une mauvaise acceptation psychologique du défibrillateur puisque les malades ont été implantés, non pas à la suite d’une morte subite récupérée, mais pour la prévenir, sans qu’ils n’aient encore subi d’arythmies ventriculaires graves.   La procédure d’implantation   Évaluation des seuils de défibrillation • La procédure d’implantation d’un défibrillateur se termine classiquement par un test de défibrillation, qui est davantage l’évaluation d’un niveau de probabilité de défibrillation une fois l’appareil implanté, en cas de survenue d’un épisode de fibrillation ventriculaire. Il est classiquement admis que le seuil de défibrillation doit se situer à un niveau inférieur d’au moins 10 J par rapport au niveau d’énergie de choc programmée. Pour obtenir une probabilité de 97 % pour un niveau d’énergie testée, il est nécessaire d’obtenir deux chocs efficaces sur FV induite. Osman et coll. ont colligé 264 implantations de défibrillateurs simple, double et triple chambre. Un premier test efficace avec une marge de sécurité de 10 J a été obtenu dans 97,6 % des cas (25-30 J), et dans 96 % pour le deuxième test (25-40 J). Tous les tests efficaces la première fois avec une marge de 10 J, l’ont été la deuxième fois (97,9 % avec une marge de sécurité de 10 J). Leur conclusion est qu’un seul test efficace avec une marge de 10 J suffit, règle appliquée par la majorité des équipes. • Quel est le profil des patients présentant des seuils de défibrillation élevés (Pasquié et coll.) ? Sur plus de 1 000 patients, 10 (indication prophylactique chez 8) présentent un seuil de plus de 30 J, malgré les changements de polarité et de positionnement de sonde. Sauf un patient avec cardiopathie hypertrophique, les 9 autres ont une fraction d’éjection moyenne à 19 %, avec un diamètre télédiastolique ventriculaire gauche (DTDVG) moyen de 61 mm, et 8 ont un asynchronisme VG. Une tendance émerge pour les seuils élevés, quand la fraction d’éjection est < 20 %, le DTDVG > 80 mm. Les auteurs recommandent d’arrêter la cordarone et de vérifier l’absence de pneumothorax (1pt) si le seuil de défibrillation est élevé. • En revanche, Val Mejias et coll. ne retrouvent pas d’influence de la fraction d’éjection sur le seuil de défibrillation. Ils plaident en faveur d’une optimisation des largeurs d’impulsion pour une meilleure efficacité, et précisent qu’un temps constant de membrane de 3,5 ms devrait être utilisé quelle que soit l’impédance de choc, alors qu’une valeur de 2,5 ms ne devrait pas être programmée quand l’impédance de choc est de plus de 50 Ohms. La limite supérieure de vulnérabilité La limite supérieure de vulnérabilité (LSV) est l’énergie la plus basse au-dessus de laquelle un choc sur onde T n’induit pas de FV. Ce niveau est corrélé avec l’efficacité de la défibrillation et permettrait ainsi de limiter le nombre de chocs de défibrillation pour vérifier la qualité de protection au moment de l’implantation du défibrillateur. Patel et coll. montrent que cette LSV révèle une efficacité de défibrillation de 50 % tandis que pour LSV plus 6 J, cette efficacité passe à 95 %. Bien que le protocole de recherche de cette LSV limite le nombre d’inductions de FV (1 induction chez 50 %), les implanteurs préfèrent encore la recherche du seuil de défibrillation qui implique l’induction de plusieurs chocs efficaces pour obtenir une probabilité de défibrillation équivalente. Cela est confirmé par Avella et coll. Influence du positionnement des sondes de choc sur le seuil de défibrillation Shaerf et coll. rapportent les résultats de l’ACT Registry sur 4 408 patients suivis sur un an, implantés d’un défibrillateur ou d’un resynchroniseur-défibrillateur dont la sonde ventriculaire est placée à différents sites du ventricule droit. Il n’y a pas de différence significative des paramètres de sonde ni de choc entre ces diverses positions, démontrant que les sondes de défibrillation peuvent être placées à des sites autorisant une bonne resynchronisation sans compromettre le fonctionnement du défibrillateur (ni la qualité de détection, ni l’énergie de choc efficace). Ces faits sont confirmés par Mabo et coll. sur un suivi de 213 patients sur un an. Cooper et coll. rapportent l’implantation d’un coil de défibrillation additionnel dans la veine azygos, en arrière du cœur, chez 7 patients dont les seuils de défibrillation sont élevés. Ils obtiennent une amélioration du seuil de défibrillation avec une marge de plus de 10 J chez 4 patients, de moins de 10 J chez 2 patients, et un échec total chez le dernier, y compris avec un patch sous-cutané. Bonnet propose de placer des coils de défibrillation intrathoraciques et extracardiaques, en cas d’impossibilité de cathétérisme, l’un à la surface du ventricule gauche, l’autre en rétrosternal. L’implantation est facilitée par l’utilisation d’un défibrillateur muni de télémétrie transmise à distance par radiofréquence. Éviter de « balader » une tête de télémétrie dans le champ opératoire permet de gagner du temps et d’éviter certaines fautes d’asepsie (Seidl et coll). Et quand le test de défibrillation n’est pas réalisé à l’implantation ? Dans la vie réelle, Lazarus et coll. rapportent les résultats du registre international Leader où un test de défibrillation a été effectué chez 593 patients, dont 46 % de resynchroniseur-défibrillateurs ; 11 % des implantations se sont terminées sans test, principalement en cas d’altération hémodynamique majeure au moment de l’implantation (classe NYHA III ou plus, fraction d’éjection très basse), ou plus souvent dans les indications d’implantation primaire. Après un suivi moyen de 6,4 mois, il a fallu revoir les paramètres de programmation chez 40 patients (6,7 %). Chez ces 40 patients, il n’y a pas eu de décès ou d’événement adverse lié à l’incapacité du système à reconnaître et réduire les arythmies. Ces résultats nécessitent une étude randomisée pour déterminer le rapport bénéfice/risque de l’absence de test à l’implantation d’un défibrillateur. Et au fil du temps ? Un défibrillateur doit être en mesure de maintenir sa capacité de défibrillation avec pleine sécurité tout au long de sa vie. Or, comme les sondes de stimulation, les sondes de défibrillation subissent une maturation qui peut modifier le seuil de défibrillation (élévation de 15 % d’après la littérature). Val Meijas et coll. ont étudié ce phénomène, en montrant que l’impédance de choc change chez 38 % des patients, avec une augmentation chez 72 %. S’ils analysent le seul coil ventriculaire droit, l’impédance moyenne augmente de 8 Ohms après 6 semaines pour rester stable ensuite, à la différence du coil de la veine cave supérieure. Ce fait explique qu’il soit nécessaire de réévaluer le seuil de défibrillation au moment d’un changement de défibrillateur pour épuisement de pile.   En pratique   Ce chapitre exprime la hantise de l’implanteur de mettre en place un système qui ne serait pas en mesure de protéger pleinement le patient. Cependant, le déclenchement d’une fibrillation ventriculaire n’est pas un acte anodin et il faut savoir parfois différer ce test lorsque la cardiopathie sous-jacente est très dilatée, chez un patient en mauvais état hémodynamique. Il faut savoir compter sur l’effet bénéfique de la resynchronisation par exemple, la suppression de la cordarone, avant de vraiment juger du niveau de sécurité de la prothèse implanté, un commentaire qui n’engage que l’auteur de ce texte. La gestion des complications Les chocs inappropriés : le problème essentiel des défibrillateurs aujourd’hui ! La difficulté la plus importante concernant les défibrillateurs est de savoir discriminer les rythmes supraventriculaires qui ne seront pas traitées, des arythmies ventriculaires qu’il faut absolument traiter. L’absence de discrimination correcte explique la survenue de thérapies inappropriées et participe à l’anxiété des patients volontiers implantés en prévention primaire et qui subissent les inconvénients des défibrillateurs, surtout si ceux-ci n’ont pas encore eu l’occasion de se déclencher de façon appropriée. • Prakash et coll. repèrent 138 pa-tients ayant reçu des chocs inappropriés sur un total de 3 333 patients implantés de 2004 à 2006. Le taux est donc ici très faible de 4,4 % seulement (cf. le premier chapitre). Les caractéristiques cliniques qui distinguent ces patients des autres sont qu’ils sont connus pour faire davantage d’épisodes de fibrillation atriale et que plusieurs zones de thérapie sont programmées. Lorsqu’une seule zone de FV est programmée, les chocs inappropriés sont quasi inexistants. Cela signifie toutefois que l’on ignore totalement les tachycardies ventriculaires de fréquence « moyenne », une mesure qui n’est sûrement pas du goût des patients si elles surviennent. • À partir du registre danois, Johansen et coll. ont mis en évidence un taux de chocs inappropriés de 2,8 % et d’ATP (stimulation antitachycardique) inappropriés de 3,6 %. Ils confirment que ceux-ci (ATP et chocs) surviennent plus souvent sur arythmies supraventriculaires que sur anomalie de matériel (72 % contre 18 %). Le problème concerne alors le traitement de tachycardies ventriculaires non fibrillatoires qui conduisent le plus souvent à des chocs par dégénérescence du trouble du rythme avec choc. C’est pourquoi Saeed et coll. ont tenté d’évaluer le bénéfice de la programmation empirique de la stimulation antitachycardique (ATP, deux séquences de burst entre 120 et 220 bpm) dans cette population (prévention primaire), en complément des chocs de défibrillation ; 743 patients ont été suivis sur 10 mois en moyenne pour constater, chez les 24 patients ayant présenté des tachycardies ventriculaires, 89 % de réduction par ATP et 11 % de chocs sur arythmies accélérées par les ATP. Il a été démontré qu’il est souhaitable de programmer l’ATP, même de façon empirique, pour éviter les chocs toujours pénibles, puisque la plupart des tachycardies ventriculaires sont stoppées par l’ATP. Dans l’étude PITAGORA, Gulizia et coll. rapportent que l’ATP sous forme de burst est plus efficace que l’ATP par Rampe (76 % contre 51 % d’efficacité) dans une population tout venant de porteurs de défibrillateurs. Ce fait est confirmé par Schwab et coll. Et chez l’enfant ? Malgré des fréquences cardiaques physiologiques plus rapides, notamment à l’effort, Botsch et coll. rapportent très peu de chocs inappropriés (seulement 3, causés par un flutter atrial) chez les 11 enfants porteurs de défibrillateur ayant reçu des chocs (63 au total). Ce résultat est lié à une surveillance serrée qui aboutit à la combinaison de médicaments, de procédures d’ablation et de programmations soigneuses. Un soutien psychologique • Ces complications, ajoutées à la situation clinique ayant conduit à l’implantation, ne sont pas sans poser des problèmes psychologiques. Sur 53 patients, Munoz et coll. rapportent des états d’anxiété chez 30 % d’entre eux, de la dépression chez 24 %, des insomnies chez 32 % ; 60% des patients affirment que le niveau d’anxiété s’est accru au cours de la derrière année (suivi entre 1 et 5 ans) et la moitié d’entre eux évoquent une relation entre le niveau de stress et la survenue d’événements rythmiques. • Fisher et coll. insistent sur leur soutien psychologique tout au long du suivi, surtout lorsqu’il y a rappel de matériel. Le score d’« anxiété » diminue avec le nombre de consultations destinées à apporter toute l’information nécessaire. Ce lien particulier entre l’équipe soignante et le patient est d’autant plus important lorsqu’il s’agit de resynchronisation-défibrillation car les patients, insuffisants cardiaques, exigent un suivi plus précis du fait de la cardiopathie. À cela s’ajoutent les problèmes spécifiques de la sonde ventriculaire gauche (Sadoul et coll. sur 668 patients inclus dans Leader). Existe-il des parades aux chocs inappropriés ? Quelques abstracts, dont celui de Hébrard et coll., évoquent les éléments prédicteurs éventuels de cette complication et tous retrouvent le stade premier de l’insuffisance cardiaque et l’existence de tachycardies supraventriculaires (TSV) avant l’implantation, mais Hébrard accuse aussi les algorithmes de discrimination basés sur la morphologie du QRS endocavitaire. En effet, certains algorithmes s’appuient sur l’analyse de la morphologie pour améliorer la qualité de discrimination. Si l’on ne prend en compte que la durée du QRS endocavitaire, présumée allongée en cas de tachycardie ventriculaire, l’incidence de l’absence d’élargissement des QRS endocavitaires sur TV est de 34 % dans l’étude de Przibille et coll. Il faut donc utiliser d’autres critères et les variations de morphologie. Dans ce cas, la sensibilité passe à 96,5 % et la spécificité à 94,6 %. • Mais les critères de morphologie sont-ils stables dans le temps? Theuns et coll. ont évalué cette fonction chez 90 patients ; 57 d’entre eux ont présenté 984 épisodes, dont 465 (47 %) ont été classés supraventriculaires par les investigateurs. La spécificité de discrimination basée sur ce paramètre a été de 93 %, et 32 épisodes ont été mal classés, sans qu’il n’y ait de relation avec le cycle RR des tachycardies. Les critères morphologiques sont stables dans le temps, rendant donc ces paramètres utiles pour une discrimination plus fiable que la simple analyse de fréquence. • Dans le cadre de la resynchronisation cardiaque, attention toutefois au remodelage ventriculaire qui s’accompagne d’un raccourcissement des QRS spontanés au long cours, ce qui risque de mettre en défaut les algorithmes de discrimination basés sur la durée des QRS (Boriani et coll.). Il est donc impératif d’offrir des appareils possédant une capacité exemplaire de discrimination des arythmies car, même si les fonctions diagnostiques ont largement progressé, il faut encore améliorer la spécificité des prothèses. Ce défaut explique en partie le frein à la proposition de la défibrillation par les médecins non rythmologues, en plus des soucis techniques liés à la construction complexe des sondes. • Ellenbogen et coll. présentent trois abstracts proposant un mode de protection et de reprogrammation des défibrillateurs pour éviter les chocs inappropriés des défibrillateurs en cas de surdétection d’événements cardiaques (surdétection des ondes T ou des potentiels de rupture de sonde de défibrillation défectueuse). En ce qui concerne le diagnostic, la fonction dite de Sensing Integrity Count compte les événements ventriculaires très rapides qui ne peuvent pas correspondre à des événements physiologiques (intervalles RR < 130 ms), ainsi que les dérives d’impédance. Sur 10 patients présentant ces comptages anormaux, 4 patients présentent un problème de sonde et 6, un problème de surdétection « physiologique ». Il s’agit le plus souvent d’événements très rapides révélés sous la forme de « tachycardies ventriculaires non soutenues » quand la sonde est en cause, tandis que les dérives d’impédance ne sont qu’exceptionnellement remarquées (1 patient/10). • La parade (dans le cadre des défectuosités de sondes Sprint Fidelis Medtronic, qui peut s’appliquer quel que soit le type de sonde) consiste à augmenter le nombre de cycles de détection de la fibrillation ventriculaire avant que l’appareil ne charge ses condensateurs et ne choque. Cette mesure risque d’augmenter le délai de détection des vraies fibrillations, tout en réduisant le risque de choc inapproprié sur courants de rupture de sonde. Sur 148 épisodes chez 47 patients présumés subir une fracture de sonde, il a fallu allonger le nombre de cycles de détection de FV à 12/16 chez 25 patients, 18/24 chez 20 patients, 24/32 chez 2 patients et 30/40 chez un patient, allongeant ainsi le délai de détection des vraies FV respectivement à 3, 4, 5, 6 et 7,5 s. On peut en conclure qu’un algorithme automatique destiné à éviter les chocs inappropriés au prix d’un allongement raisonnable du délai de détection des vraies FV serait utile. Si l’on ajoute les variations d’impédance à ce premier critère, alors le système devient encore plus sensible. Encore faut-il que la mise en route de l’algorithme alarme le médecin rapidement car il s’agit bien alors d’une rupture de sonde. Ensuite, il sera nécessaire de changer systématiquement la sonde de défibrillation. Ces préoccupations résultent des difficultés de conception et de construction des sondes de défibrillation qui sont extrêmement complexes, ce qui les rend plus fragiles. En parallèle, il est souhaitable pour le patient qu’il soit implanté avec des sondes de petit calibre, une évolution relativement accomplie pour les sondes de stimulation. Han et coll. révèlent que ces sondes de défibrillation de petite taille sont bien plus souvent responsables de fractures ou de perforations que les sondes plus anciennes, puisque plus grosses. La prudence est donc de mise au moment de leur pose pour que les manœuvres d’implantation ne les fragilisent pas.   En pratique Ce chapitre touche ici au challenge auquel sont confrontés les constructeurs : éviter les chocs inappropriés ! Le lecteur aura compris que cette mission présente en fait deux facettes : améliorer les critères de discrimination des arythmies pour un typage correct et construire des sondes fines mais sûres. Lorsque ces sondes sont défectueuses ou qu’il existe une infection, il faut les extraire, un exercice d’autant plus difficile que les sondes sont implantées depuis longtemps. Cichero et coll. rapportent l’expérience de 108 sondes de défibrillation retirées complètement dans 98 % des cas, une fois partiellement et une fois seulement après chirurgie, après une durée moyenne d’implantation de 47,4 mois. Ces résultats ne peuvent être obtenus que par des centres expérimentés disposant de tout l’arsenal de matériel d’extraction avec parfois l’aide de chirurgiens cardiaques. Figure 1. À la fin de l’implantation d’un défibrillateur, il est recommandé de vérifier l’efficacité de détection et de réduction automatiques du trouble du rythme le plus grave qui pourrait survenir, la fibrillation ventriculaire. Ce tracé est celui de l’ECG de surface lors du test. À l’extrême gauche, le rythme sinusal, puis le déclenchement de 8 cycles de stimulation ventriculaire, suivis d’un choc sur onde T qui déclenche la fibrillation ventriculaire, laquelle est réduite par un choc efficace. La marge de sécurité de 10 J est respectée puisque le défibrillateur sera programmé à 34 J délivrés pour les chocs. Les nouveautés techniques   Accroître la longévité • La consommation énergétique des défibrillateurs biventriculaires est un point critique d’influence sur leur longévité, notamment quand l’amplitude programmée ventriculaire gauche est élevée quand le seuil est augmenté. Il est donc opportun de proposer un algorithme de capture automatique sur cette sonde, comme déjà appliqué à la stimulation cardiaque conventionnelle. Dix-huit patients ont été particulièrement suivis par Biffi et coll., car ils présentaient des seuils élevés pour diverses raisons. La corrélation entre les mesures manuelles et automatiques a été de r = 0,87. Le seuil s’est élevé de 1 volt chez 4 patients sur 18 pendant le suivi moyen de 14 mois. La fiabilité de fonctionnement a été de 100 % sans stimulation phrénique. La variabilité de seuil quotidien a été de 0,4 V, offrant donc un bénéfice majeur sur la consommation des appareils puisque l’algorithme cale l’amplitude à 0,5 V au-dessus du seuil mesuré. La capture automatique et le contrôle automatique de seuil sont donc tout à fait applicables aux défibrillateurs, comme ils l’ont été pour le pacemaker depuis plusieurs années (Gold et coll., et Greer). • Turner et coll. se sont interrogés sur la nécessité de stimuler après un choc de défibrillation ce, dans le cadre des défibrillateurs sous-cutanés sans sonde. Une bradycardie significative post-choc a tout de même été retrouvée chez 11 % des patients. L’absence de capacité de stimulation, du fait de l’absence totale de sonde, puisque le système est strictement sous-cutané, rend donc difficile l’application large de cette technique, d’autant plus que les patients peuvent voir leur thérapeutique médicamenteuse changer au fil du temps. • Déterminer la tolérance clinique d’une arythmie reste actuellement impossible et ne peut passer que par l’utilisation d’un capteur hémodynamique. En appliquant l’impédance trans-valvulaire, Pandozi et coll. suggèrent que ce capteur pourrait être utile, en partant d’une expérience toutefois très limitée. • Lorsqu’une TV a été reconnue, la stimulation antitachycardique est, en général, la première thérapie appliquée. Mais peut-on prédire son efficacité ? Il semble qu’un pourcentage de variation de l’intervalle RR > 1,5 (moyenne de la variation des intervalles RR/cycle moyen de la TV monomorphe) soit un bon prédicteur de l’efficacité de l’ATP. Les bêtabloquants amélioreraient cette efficacité, l’effet étant dose-dépendant (Jimenez-Candil). Figure 2. Tableau de bord du programmateur après réalisation du test. Le tableau, en bas d’écran, révèle les temps de couplage des cycles cardiaques (points rouges) à l’intérieur des zones diagnostiques, notamment la zone de fibrillation ventriculaire (en vert). Au-dessus de ce tableau, on reconnaît le choc de déclenchement (1J), puis le moment du diagnostic de FV, puis le choc de défibrillation de 22 J délivrés, et la reconnaissance du retour d’un rythme lent (RL), considéré comme sinusal normal par l’appareil. Figure 3. Il s’agit toujours du même épisode, cette fois détaillé, avec les temps de couplage des événements détectés hors des périodes réfractaires de l’appareil, avec des échantillons mémorisés des électrogrammes endocavitaires. Cet ensemble permet de confirmer le diagnostic, de vérifier la parfaite détection du trouble du rythme, et d’apprécier l’efficacité de la thérapeutique appliquée. C’est à partir de ces informations qu’il est possible de certifier le caractère approprié ou non d’un diagnostic et d’une thérapie par le défibrillateur. Une révolution : la télémédecine ! La surveillance classique des prothèses cardiaques actives (stimulateurs, défibrillateurs, resynchroniseurs) passe par des visites de contrôle espacées dans le temps, et l’on compte sur la richesse des mémoires embarquées pour faire l’analyse a posteriori des événements survenus entre deux visites. Cependant, on constate souvent à regret, qu’il eut été préférable de voir rapidement le malade peu de temps après un événement grave pour enclencher une reprogrammation, une nouvelle thérapeutique, ou une réintervention. Grâce à la télétransmission des données embarquées, il devient possible d’accélérer le processus diagnostique et de décision, et ainsi de prévenir les complications. Pour cette édition de Cardiostim, les premiers résultats cliniques de l’utilisation de la télémédecine apparaissent. Ottaviano et coll. collectent 2 055 transmissions chez 20 porteurs de défibrillateur, dont 9 avec resynchronisation, pendant 1 à 36 mois. Le nombre de rapports par patient et par mois est de 0,6, et la moitié des patients a présenté des événements probants. Sur un total de 2 087 visites d’un suivi moyen de 45 mois de 208 porteurs de défibrillateur, 30 % des visites impromptues (368), conduisent à un aménagement thérapeutique ou à la programmation de la prothèse ou à une hospitalisation, contre 9 % avec les visites « classiques » de routine. Une surveillance continue semble donc plus importante que la répétition des visites à intervalle rapproché (Stiller et coll.). D’où l’intérêt de la télésurveillance qui permet de surcroît de raccourcir l’hospitalisation au moment de l’implantation. Et ce d’autant plus qu’il est maintenant possible d’obtenir les électrogrammes des arythmies pour une meilleure analyse de la qualité de discrimination des rythmes par le défibrillateur (Berndt et coll.). • Ainsi, Halimi et coll rapportent les résultats préliminaires de l’étude française, ŒDIPE, chez 379 patients répartis en deux groupes : un groupe sortant une nuit après l’implantation d’un pacemaker ou le jour même en cas de changement, avec algorithme de télésurveillance mis en route en continu durant un mois, et un groupe « classique », avec une sortie en fonction des habitudes du centre avec contrôle au centre à un mois. Dans le groupe « actif », la détection d’événements adverses est survenue en moyenne 20 j avant l’autre groupe, avec un temps de réactivité moyen du médecin de 3 j. La durée moyenne de séjour a été de 3,2 j (49 % de réduction) dans le groupe actif. • Vogtmann et coll. rapportent les premiers résultats de l’étude MoniC, prospective et multicentrique, regroupant les données de 54 défibrillateurs et 41 pacemakers, collectées à la Charité à Berlin. Un total de 17 824 jours de suivi est ainsi analysé. MoniC a reçu 684 rapports, 72 % d’entre eux étant filtrés par le système. Dans un quart des cas restants, la transmission a eu une conséquence clinique : dans 59 % un contact téléphonique avec le patient, dans 31 % une prise de rendez-vous, dans 16 % une modification d’intervalle de surveillance ou de thérapie. Le temps moyen d’analyse a été de 14 min. Aucun effet adverse n’a été noté suite à une réaction négative du système. La fiabilité et la transmission rapide de données de 146 patients implantés d’un défibrillateur de la série de Theuns sont confirmées. • Landolina et coll. se concentrent sur 67 patients porteurs de défibrillateur-resynchroniseur, avec 264 transmissions ; 22 épisodes d’insuffisance cardiaque sont survenus chez 19 patients, avec alerte transmise dans 20 cas (sensibilité 91 %). Pour 20 autres alertes de surcharge pulmonaire transmises, 14 ont conduit à des arrangements thérapeutiques ayant évité une hospitalisation. • Theuns et coll. rapportent des résultats globaux similaires à ceux qui précèdent mais ils évoquent la charge de travail qu’ont représenté les 57 148 transmissions obtenues chez 146 patients, suivis pendant 22 mois en moyenne. Ces systèmes, qui seront différents d’une marque à l’autre, imposeront donc un réaménagement des centres de suivi. Cette tâche passe donc probablement par un nouveau métier, celui de technicien(ne) de surveillance… • Conscients de cette charge nouvelle, Raatikainen et coll. révèlent la réduction du temps moyen passé par patient comparativement aux contrôles classiques : 7 min contre 190 min pour le patient (du fait des transports) et 8,4 min contre 26 min pour le médecin, sur un suivi de 9 mois de porteurs de défibrillateur. L’économie est de 524 e par patient (41 %) si le patient est d’habitude suivi deux fois par an. De plus, ce sont 1 000 e par patient qui sont économisés, quand des transmissions imprévues sont déclenchées par des alertes rapportées à des événements qui peuvent être résolus à distance.   En pratique La télémédecine est donc bien une véritable révolution qui s’applique à tout porteur de prothèse cardiaque active puisqu’elle permet un diagnostic plus rapide, une réactivité elle-même plus rapide de la part du médecin, un suivi plus précis, une économie sur les coûts de santé, mais au prix d’une réorganisation des centres de contrôle quand le nombre des suivis concernera la totalité des patients implantés.

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