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Congrès et symposiums

Publié le 22 nov 2011Lecture 7 min

Comment améliorer la protection cardiovasculaire des patients les plus à risque ?

M. DEKER, d'après F. PAILLARD (Rennes) et S. KOWNATOR (Thionville)

CNCF

Au cœur de cette problématique, le risque lipidique conserve une place de premier plan, tant en prévention primaire que secondaire. Le bénéfice conféré par l’abaissement du LDL-cholestérol grâce au traitement hypolipidémiant, en termes d’épargne d’événements cardiovasculaires et de mortalité, est bien démontré chez les patients à haut risque cardiométabolique, qu’il s’agisse des sujets ayant des antécédents coronariens, des diabétiques ou des insuffisants rénaux, comme vient de le montrer l’étude SHARP.

Contrôler le LDL : quelle est la cible ? Les recommandations concernant les cibles de LDL-C souhaitables sont basées sur la définition des niveaux de risque cardiovasculaire. En France, les recommandations pour la prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique de l’Afssaps datant de 2005 établissent 4 catégories de risque en prévention primaire et 1 catégorie de haut risque cardiovasculaire en prévention secondaire. La cible de LDL-C à atteindre est d’autant plus basse que le patient est à risque élevé(1). Sont considérés comme à haut risque cardiovasculaire : – les patients ayant une maladie cardiovasculaire avérée – coronaire, cérébrovasculaire ischémique ou périphérique ; – les diabétiques de type 2 à haut risque qui, même en l’absence d’antécédent vasculaire, cumulent deux autres facteurs de risque, dont une microalbuminurie (> 30 mg/24 h) ou une atteinte rénale avérée ou définie par une clairance de la créatinine < 60 ml/min ou une protéinurie (> 300 mg/24 h) ; – les patients dont le risque d’événement coronarien calculé est > 20 % dans les 10 ans. Chez les sujets à haut risque, la cible de LDL-C retenue par l’Afssaps est de < 1 g/l. Toutefois, d’autres recommandations internationales, nord-américaines et européennes, ont proposé depuis 2005 d’abaisser encore la cible en deçà d’1 g/l chez certains patients, de < 0,70 g/l (1,8 mmol/l) à < 0,77 g/l (2 mmol/l). Les patients concernés sont ceux qui ont une maladie cardiovasculaire avérée et des facteurs de risque supplémentaires, un diabète, des facteurs de risque non contrôlés, tel un HDL-C bas. Les recommandations européennes de 2007 distinguent, parmi les patients à haut risque, les sujets ayant un diabète et une maladie cardiovasculaire qui justifient d’un objectif à < 0,70 g/l et les diabétiques sans maladie cardiovasculaire chez lesquels la cible reste à < 1 g/l. Les dernières recommandations européennes ESC/EAS parues en 2011 préconisent un objectif < 0,70 g/l ou une diminution de plus de 50 % par rapport au niveau initial chez les patients à très haut risque : sujets ayant une maladie cardiovasculaire, diabétiques, insuffisants rénaux chroniques (< 60 ml/min), risque SCORE > 10 % à 10 ans(2). Ainsi, non seulement la population répondant à la définition du haut risque cardiovasculaire s’est élargie à l’ensemble des diabétiques et des insuffisants rénaux, mais les cibles de LDL-C sont devenues plus strictes.   Pourquoi les cibles de LDL sont-elles revues à la baisse ? Un faisceau d’arguments montre que non seulement la baisse du LDL-C est corrélée de manière linéaire à une réduction des événements cardiovasculaires(3), mais aussi que, chez les patients ayant un LDL-C relativement bas, aux alentours de 1 g/l, il reste un potentiel de protection cardiovasculaire qui peut être obtenu par une réduction supplémentaire jusqu’à 0,70 g/l sous traitement hypolipidémiant. Ce bénéfice a été mis en évidence chez les patients coronariens, comme chez les diabétiques et les insuffisants rénaux(3). Ainsi, dans l’étude PROVE IT-TIMI 22 qui comparait l’efficacité d’un traitement hypolipidémiant intensif versus standard après un syndrome coronaire aigu, l’analyse des résultats stratifiés en fonction des niveaux de LDL-C atteints sous traitement a montré que les événements cardiovasculaires majeurs étaient d’autant moins nombreux que les concentrations de LDL-C étaient basses sous traitement par statine(4). Un traitement intensif par statine a également montré un effet sur un marqueur intermédiaire de risque, l’athérome coronarien évalué par IVUS : la baisse du LDL-C aux alentours de 0,70-0,80 g/l s’est accompagnée d’une stabilisation, voire d’une régression de l’athérome(5). Tous les diabétiques n’ont pas le même risque cardiovasculaire, bien que leur niveau de risque soit plus élevé en moyenne que celui des non-diabétiques. Le bénéfice absolu que tirent d’un traitement hypolipidémiant strict les diabétiques à très haut risque, cumulant une maladie vasculaire et métabolique, est d’autant plus important. Chez ces patients, la réduction du risque relatif obtenue par un traitement intensif par statine a été évaluée à 25 % comparativement à un traitement standard(6). La dernière métaanalyse des CTT montre que les insuffisants rénaux, comme les diabétiques tirent un bénéfice équivalent d’un contrôle intensif du cholestérol(3). La vraie difficulté consiste à atteindre les cibles très basses préconisées par les nouvelles recommandations, chez des patients souvent polymédicamentés et pouvant avoir des problèmes de tolérance. L’observance des traitements est une autre difficulté à franchir et il a été bien montré que la non-observance des traitements, en particulier des statines, se traduit par une augmentation du risque d’événements cardiovasculaires. Des progrès ont toutefois été accomplis au niveau européen et français dans l’atteinte des objectifs et, en 10 ans, c’est la cible des LDL qui a connu l’amélioration la plus importante. Il reste que 50 % des patients coronariens n’étaient pourtant pas à la cible de LDL < 1 g/l en 2008(7). Or, l’absence de suivi des traitements ayant démontré leur efficacité en prévention secondaire augmente le risque de mortalité et de réhospitalisations de plus de 40 %(8).   En pratique Les statines demeurent la première ligne de traitement. Pour parvenir à l’objectif ≤ 1 g/l de LDL-C, trois possibilités sont offertes si la baisse de LDL-C n’est pas sufisante : – augmenter la dose de statine : en doublant la posologie, on obtient en moyenne une baisse supplémentaire de 6 % ; – changer de statine au profit d’une molécule plus puissante : la baisse supplémentaire est de l’ordre de 8 % à dose équivalente ; – prescrire un traitement hypolipidémiant potentialisateur associant une statine, qui diminue la synthèse de cholestérol au prix d’une petite augmentation de l’absorption intestinale, et un bloqueur de l’absorption du cholestérol, dont l’effet est inverse. Cette troisième option est celle qui permet le plus facilement d’atteindre les résultats escomptés. Les patients sont plus ou moins répondeurs aux statines, les moins bons répondeurs étant souvent ceux qui répondent le mieux à l’ézétimibe, et inversement. L’association simvastatine + ézétimibe permet en moyenne d’obtenir une réduction supplémentaire du LDL-C de l’ordre de 18 à 20 %. Les patients diabétiques sont de bons répondeurs, meilleurs que les non-diabétiques, à l’association ézétimibe/simvastatine, comme l’a montré l’étude IN-Cross(9).   Dernière preuve de protection cardiovasculaire : l’insuffisant rénal L’insuffisance rénale est fréquente, touchant plus de la moitié des septuagénaires. Elle est responsable d’une maladie vasculaire, différente de l’atteinte athéromateuse mais favorisant le développement de l’athérome. Le risque d’événements cardiovasculaires est potentialisé par la présence d’une insuffisance rénale et proportionnel à sa sévérité. L’insuffisance rénale sévère est aussi un facteur d’aggravation en prévention secondaire. Jusqu’à présent, les statines n’avaient montré qu’un bénéfice marginal en prévention secondaire chez les patients insuffisants rénaux. L’étude SHARP(10) succède à deux précédentes études négatives, 4D et AURORA, qui n’avaient pu démontrer le bénéfice d’un traitement par statine chez des patients insuffisants rénaux sur un critère composite cardiovasculaire. Au début des années 2000, près de 10 000 patients insuffisants rénaux sévères, non dialysés pour les deux tiers, dialysés pour le dernier tiers, ont été recrutés et randomisés en trois groupes : – ézétimibe/simvastatine (n = 4 193) ; – simvastatine (n = 1 054) ; – placebo (n = 4 191). Au bout d’un an, les patients du groupe simvastatine seule, n’ayant pas montré de problème de tolérance, ont été re-randomisés dans les deux autres groupes. Ces patients âgés de plus de 40 ans, sans antécédents cardiovasculaires, n’avaient a priori aucune indication de traitement par une statine, sur la base de leur bilan lipidique. Ils sont bien représentatifs de la population des insuffisants rénaux : âge moyen 60 ans, LDL-C environ 1,10 g/l, DFG estimé par MDRD : 26,6 ml/min en moyenne. Le critère d’évaluation principal était un critère composite des événements athérosclérotiques majeurs (IDM non fatal ou décès coronarien, AVC non hémorragiques ou toute procédure de revascularisation) ; un autre objectif principal était l’évolution de l’insuffisance rénale. Le traitement par l’association ézétimibe/simvastatine a permis de diminuer de 43 mg/ml les concentrations moyennes de LDL-C, soit davantage que la simvastatine seule (30 mg/ml). Cet effet hypoLDLémiant a permis de diminuer significativement de 17 % la survenue du critère principal (p = 0,0021 ; IC 0,74-0,94) et ce, malgré un taux d’observance des deux tiers seulement, ce qui est habituel dans la population des insuffisants rénaux. Quel que soit le sous-groupe considéré, les résultats sont superposables, à ceci près que le bénéfice est toujours supérieur chez les patients non dialysés, qui sont aussi ceux qui sont pris en charge par les cardiologues. Le traitement n’a pas eu d’impact sur la mortalité, probablement en raison d’un manque de puissance de l’étude, ni malheureusement sur l’évolution de l’insuffisance rénale. Il a été très bien toléré sur les critères habituels (risque hépatique et musculaire) et aucun signal de risque de cancer n’a été observé. Les résultats de SHARP, con-formes aux estimations de la métaanalyse des CTT, permettent de conclure que l’abaissement du LDL-C au moyen de l’association ézétimibe/simvastatine, en deçà de 1 g/l chez des patients à haut risque cardiovasculaire, ici des insuffisants rénaux, est bénéfique pour le système cardiovasculaire, même s’il elle n’influe pas sur la fonction rénale. La réduction de 17 % des événements athérosclérotiques majeurs observée sous traitement aurait sans doute pu être plus importante si l’observance du traitement (définie par la prise d’au moins 80 % des médicaments) avait été complète. Ces bénéfices sont obtenus sans problème de tolérance particulier. C’est donc avec sérénité que l’on attend les résultats de l’étude IMPROVE-IT qui compare ézétimibe/simvastatine versus simvastatine en prévention secondaire après un syndrome coronaire aigu.

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