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Vie professionnelle

Publié le 18 juin 2025Lecture 4 min

Écologie en rythmologies : réutilisation des cathéters d’ablation

Laure CHAMP-RIGOT, Caen

La problématique du développement durable est cruciale dans le secteur de la santé dont les dépenses augmentent de manière exponentielle depuis la seconde moitié du XXe siècle, en parallèle d’un impact environnemental croissant. L’électrophysiologie (EP), en particulier l’ablation des troubles du rythme, connaît une forte croissance depuis les années 2000, avec une projection de plus de 10 % par an jusqu’en 2030(1). La question de la durabilité de nos pratiques se pose, sous l’influence de deux types de contraintes : d’aval et d’amont.

Les contraintes d’aval concernent les conséquences de nos activités, notamment la pollution, mesurée en CO2 équivalent (CO2e). Si le secteur de la santé était un pays, il serait le 5e plus gros émetteur mondial de CO2e avec 2,2 gigatonnes par an. En plus du réchauffement climatique, la pollution de l’air est le 2e facteur de risque de décès mondial depuis 2021. La production de déchets en EP est conséquente, liée à l’utilisation de dispositifs médicaux à usage unique (DMUU) et à l’anesthésie générale. Une procédure d’ablation de fibrillation atriale génère 76,9 kg de CO2e, soit l’équivalent de 700 000 km en voiture par jour dans le monde. Les cathéters (39 %) et l’anesthésie (26 %) représentent près des deux tiers de cette empreinte(2). Les contraintes d’amont incluent les facteurs qui limitent l’accès aux dispositifs nécessaires, comme les pénuries de matières premières, les difficultés géopolitiques ou réglementaires. Les cathéters d’EP sont particulièrement vulnérables à ces contraintes en raison de la mondialisation de leur fabrication (figure), qui dépend de métaux rares et de semi-conducteurs. Le retraitement des DMUU consiste à réutiliser un dispositif après vérification de son intégrité et stérilisation. Cela diffère du recyclage. Figure. Exemple de circuit de production d’un cathéter d’EP.   Le retraitement des cathéters d’EP présente plusieurs avantages : réduction des besoins en nouveaux cathéters, diminution des déchets, réduction des tensions d’approvisionnement et baisse des coûts. L’économie annuelle peut varier de 35 à 59 % du prix des DMUU neufs, selon le circuit de retraitement(3). Le processus de retraitement doit respecter plusieurs étapes pour garantir la performance et la sécurité des cathéters. Il existe trois cir cuits possibles : au sein de l’hôpital, via une société externe en soustraitance (circuit fermé), ou par une société externe avec le statut de fabricant de DMUU (circuit ouvert). Pour les cathéters d’EP, le nettoyage doit éviter toute contamination infectieuse, surtout que ces dispositifs sont utilisés en endovasculaire. Leur intégrité physique et leurs propriétés techniques, comme la déflexion et la qualité des électrogrammes, doivent être maintenues. Des études montrent que la qualité des cathéters retraités n’est pas altérée et leur utilisation ne compromet ni les patients ni les médecins(1). Le règlement européen 2017/745 autorise le retraitement des DMUU sous un cadre strict, avec une législation nationale qui peut autoriser ou interdire cette pratique. Actuellement, seuls neuf pays permettent ce retraitement, et les trois entreprises spécialisées en Europe se trouvent en Allemagne. En France, la pratique est interdite depuis les années 1980, mais une expérimentation a été autorisée par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2023. Cette expérimentation, prévue pour 2025 dans quatre établissements de santé, portera uniquement sur des cathéters retraités par une société externe, dans un circuit ouvert ou fermé, avec une information obligatoire pour les patients. Le rapport d’évaluation de cette expérimentation déterminera si cette pratique peut être pérennisée(3). En attendant, d’autres solutions peuvent être mises en place pour réduire l’empreinte carbone des procédures. Cela inclut la rationalisation des procédures pour limiter le nombre de cathéters utilisés, la réduction des emballages et la suppression des notices imprimées. Le développement de cathéters réutilisables et le recyclage des matériaux sont également des leviers importants. Le retraitement des cathéters représente une opportunité significative pour améliorer la durabilité de nos pratiques, bien que sa mise en œuvre soulève encore de nombreux défis. La réduction de l’empreinte carbone de notre activité nécessite une approche impliquant tous les acteurs : médecins, industriels, législateurs et patients. Par ailleurs, la réduction des déplacements et la promotion de l’organisation de congrès en train sont aussi des moyens de diminuer l’empreinte carbone du secteur.

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