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Explorations-Imagerie

Publié le 05 avr 2005Lecture 4 min

Dyspnée : BNP, troponine, D-dimères, écho-Doppler cardiaque... Restez clinique !

F. BIAUSQUE, P.-V. ENNEZAT et P. ASSEMAN, CHRU de Lille

Cette observation nous démontre qu’à côté de nombreux marqueurs biologiques et de l’écho-Doppler, la prise en charge d’un malade doit rester basée sur la clinique.

Observation Madame V. âgée de 84 ans, hypertendue traitée par l’association Aldalix-Hyperium®, est adressée par son médecin traitant pour l’évaluation d’une dyspnée installée depuis 48 heures. Les urgences en cardiologie sont surchargées. Un premier examen physique révèle une patiente en bon état général, peu dyspnéique au repos avec une fréquence respiratoire de 16/min, une saturation artérielle en oxygène à 95 % en air ambiant, une pression artérielle de 197/63 mmHg, une fréquence cardiaque de 95/min et une normothermie. Il est noté une turgescence jugulaire spontanée avec des râles pulmonaires crépitants à la base gauche sans œdème des membres inférieurs ni souffle cardiaque. - L’électrocardiogramme s’inscrit en rythme sinusal sans autre anomalie. - La radiographie de thorax réalisée au lit montre une surcharge alvéolo-interstitielle modérée de la base gauche. - L’échocardiographie bidimensionnelle montre un ventricule gauche non dilaté remodelé de façon concentrique avec une fraction d’éjection préservée, l’absence de valvulopathie, des cavités droites modérément dilatées, un péricarde libre et une veine cave inférieure dilatée à 25 mm. - L’analyse Doppler du flux transmitral révèle une fusion des ondes E et A (figure 1), la pression artérielle pulmonaire systolique est estimée à 45 + 15 mmHg sur la vélocité maximale de l’insuffisance tricuspide. Figure 1. Fusion des ondes E et A sur le flux Doppler pulsé transmitral. - La première partie des examens biologiques est récupérée révélant une élévation isolée du taux de BNP (peptide natriurétique de type B) avec le système Triage® Test de Biosite Inc, San Diego, CA) à 455 pg/ml sans élévation de la troponine I. Une injection de furosémide est alors prescrite. - Une seconde évaluation clinique et échocardiographique est réalisée mettant essentiellement en évidence l’absence d’orthopnée et un flux transmitral de type I (anomalie de la relaxation) après massage sino-carotidien (figure 2). Le dosage des D-dimères, alors rajouté au bilan initial, revient élevé à 4 157 µg/l (n < 500). Un angioscanner thoracique spiralé réalisé en urgence confirme la présence d’embolies pulmonaires bilatérales intéressant les troncs proximaux. La prescription de furosémide est alors annulée et un traitement anticoagulant efficace administré. Figure 2. Mise en évidence d’un trouble de relaxation (type I) après massage sino-carotidien. Ce cas clinique permet de souligner plusieurs faits L’examen clinique des patients reste primordial. L’interrogatoire soigneux de la patiente a permis de mettre en évidence l’installation brutale de la dyspnée et surtout l’absence totale d’orthopnée. La radiographie thoracique, bien que de qualité douteuse, ne montrait pas de redistribution vasculaire vers les sommets, ni de ligne de Kerley. De plus, la sémiologie était unilatérale. Le dosage du BNP ne peut se substituer à l’évaluation clinique. Ce polypeptide natriurétique et vasorelaxant est effectivement secrété par les ventricules en cas d’élévation des contraintes pariétales (« wall stretch ») ou de surcharge volumique. L’insuffisance cardiaque aiguë ou décompensée est donc la première étiologie à évoquer devant une élévation des taux de BNP, surtout lorsqu’ils dépassent 400 pg/ml. Néanmoins, une surcharge ventriculaire droite à l’occasion d’embolies pulmonaires peut stimuler la secrétion de BNP. Le patient insuffisant cardiaque stable, dans un autre cas de figure, peut présenter une dyspnée en rapport avec une pneumopathie ou un pneumothorax alors que le taux de BNP est élevé de façon chronique. À l’inverse, des taux normaux ou peu élevés de BNP (aux alentours de 100 pg/ml) peuvent être observés au cours d’œdèmes pulmonaires « flashs » nécessitant une ventilation non invasive à pression positive et l’administration de fortes doses de nitroprussiate de sodium. L’examen échocardiographique doit être interprété de façon fiable. La fraction d’éjection du ventricule gauche ne permet pas de confirmer ou d’infirmer l’insuffisance cardiaque puisque son épidémiologie révèle 40 à 50 % d’insuffisances cardiaques à FE préservée. L’hypertension artérielle pulmonaire avec retentissement sur la géométrie des cavités droites diagnostiquée par écho-Doppler peut être d’origine postcapillaire (élévation des pressions gauches) ou précapillaire (anomalies du parenchyme pulmonaire ou obstructions vasculaires pulmonaires). Si l’analyse du flux transmitral après manœuvre vagale oriente davantage vers une étiologie précapillaire, une publication de Dumesnil et coll. (Am J Cardiol 2002) démontre l’absence de spécificité de cette sémiologie Doppler en cas d’insuffisance cardiaque aiguë puisqu’une inversion des ondes E et A (flux type I retrouvé dans 50 % des cas) peut témoigner d’une relaxation hyperanormale avec élévation des pressions diastoliques du ventricule gauche. Les taux élevés de D-dimères étaient très en faveur d’une maladie thromboembolique. La haute sensibilité des D-dimères, aux alentours de 99 % (technique ELISA), en cas de pathologie veineuse thrombotique, permet en règle d’écarter le diagnostic d’embolie pulmonaire. Néanmoins, en cas de forte suspicion clinique, les examens complémentaires (scintigraphie de perfusion-ventilation, scanner spiralé, voire angiographie pulmonaire) doivent être réalisés afin de confirmer une exceptionnelle embolie pulmonaire sans détection de D-dimères (2/547, d’après Goldhaber).   En résumé   De plus en plus d’outils diagnostiques sont à la disposition immédiate des praticiens avec des sensibilités et spécificités remarquables, selon les travaux publiés. La physiopathologie des symptômes peut être de nos jours obtenue en urgences (« from bench to bedside »). En revanche, une interprétation raisonnée et intégrée est nécessaire ; l’expérience clinique demeure la pierre angulaire de la médecine. Taux élevé de BNP n’est pas seulement synonyme de diurétique, mais peut également signifier remplissage et fibrinolyse.

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