publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Valvulopathies

Publié le 18 sep 2012Lecture 7 min

Le traitement du RAC serré en 2012 - La chirurgie sous CEC reste la référence

P. DONZEAU-GOUGE, Hôpital Privé Jacques CARTIER, Massy

Le rétrécissement aortique calcifié (RAC) serré est la valvulopathie la plus fréquemment traitée dans les pays développés. Cela tient au fait que cette valvulopathie dégénérative touche 6 % des sujets de plus de 65 ans et que sa fréquence augmente avec l’âge. Comme la longévité dans ces pays est en augmentation, la chirurgie du RAC représente actuellement 40 % de l’activité d’une unité de chirurgie cardiaque adulte contre 30 % il y a 30 ans.

En France, les hommes ont une espérance de vie à la naissance de 78 ans et de 8 ans s’ils atteignent 80 ans ; tandis que pour les femmes, ces espérances de vie sont de 84,5 ans et de 10 ans. Le RAC, quand il devient serré et s’il n’est pas traité, diminue cette espérance de vie, qui devient inférieure à 2 ans après un premier épisode d’insuffisance cardiaque. De plus, le RAC diminue la qualité de cette survie par ses conséquences fonctionnelles (dyspnée d’effort, angor, syncope/malaises lipothymiques) et augmente les risques d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Cela entraîne une diminution, voire une perte de l’autonomie du patient avec des conséquences humaines mais aussi économiques en matière de budget sanitaire. Il est donc impératif de traiter le RAC serré.   Du remplacement chirurgical valvulaire…   Le traitement consiste essentiellement à lever l’obstacle sur la voie d’éjection du ventricule gauche en substituant à la valve native, dont les sigmoïdes sont immobilisées par des calcifications, une bioprothèse valvulaire chez ces sujets âgés. Ces bioprothèses valvulaires apparues en 1975 ont l’avantage, comparativement aux prothèses mécaniques, de ne pas nécessiter un traitement anticoagulant et ont une durée de vie qui s’est améliorée au fil des modifications de leur design ainsi que de leur tissu constitutif (valve porcine puis péricarde bovin). Actuellement les bioprothèses valvulaires aortiques en péricarde de 3e génération, traitées avec des solutés anticalcifications, ont une espérance de vie de près de 20 ans quand elles sont implantées chez un sujet âgé de ≥ 70 ans.   Ces bioprothèses de 3e génération (figures A et B) sont mises en place sous circulation extracorporelle (CEC) après avoir réalisé une sternotomie totale puis une aortotomie qui permet de réséquer la valve aortique native calcifiée. Cependant, cette technique qui a amélioré plusieurs millions de patients depuis l’avènement de la CEC puis des bioprothèses, n’était pas utilisée chez les patients ayant une contre-indication à la CEC ou un risque opératoire très important. Une étude européenne (Euro Heart Survey) a montré que 33 % des patients porteurs d’un RAC n’étaient pas traités en raison d’un âge très avancé ou de la présence de comorbidités importantes faisant craindre un mauvais résultat chirurgical.   …Au TAVI   Parallèlement, sous l’impulsion de A. Cribier, des techniques endovasculaires visant à traiter le RAC serré sans CEC ont été introduites (valvuloplastie aortique au ballon) pour aboutir en avril 2002 à la mise en place par voie transcathéter de la première bioprothèse aortique sans qu’il soit nécessaire d’utiliser une CEC (TAVI : Transcatheter aortic-valve implantation).   Aujourd’hui, nous disposons donc de deux techniques de mise en place d’une bioprothèse valvulaire aortique : l’une conventionnelle, par sternotomie verticale et totale avec CEC et résection de la valve native calcifiée, l’autre sans CEC, par voie transcathéter (TAVI) sans résection de la valve calcifiée qui est repoussée sur les parois de l’aorte initiale par le déploiement de la bioprothèse aortique. La voie transcathéter peut être réalisée par voie artérielle rétrograde transfémorale (plus rarement par voie sous-clavière) ou par voie transthoracique apicale ventriculaire gauche en réalisant une courte thoracotomie antéro-latérale gauche qui permet d’aborder la pointe du ventricule gauche (VG) ou par une courte sternotomie partielle supérieure qui permet d’aborder l’aorte ascendante. Ces voies permettent d’introduire une bioprothèse valvulaire repliée sur un ballon (figures C et D). Celui-ci permet de déployer la bioprothèse au niveau de l’orifice aortique après que celui-ci a été préalablement dilaté. Le TAVI permet dans tous les cas d’éviter une CEC et quand l’implantation est réalisée par voie artérielle fémorale, cela évite aussi une thoracotomie ; il peut être réalisé sous anesthésie locale. L’avantage du TAVI est d’être moins agressif mais suppose des conditions anatomiques favorables (artère ilio-fémorale de calibre satisfaisant, non calcifiée, non tortueuse, etc.). Le TAVI peut être utilisé en cas de contre-indication à une CEC (âge avancé, comorbidités majeures) ou d’un risque opératoire rédhibitoire de la technique conventionnelle en rapport avec un « thorax hostile » (malformations, lésions cutanées radiques, antécédents de médiastinite) ou une aorte ascendante massivement calcifiée (dite « porcelaine »). Le risque majeur est défini par un EuroSCORE 1 ≥ 20 ou un STS risk score > 10.   Avantages et risques des techniques de remplacement valvulaire   Cependant, le TAVI présente des risques : complications vasculaires de la voie fémorale (hématomes, dissection, rupture artérielle), d’hémostase de la pointe du ventricule gauche en cas de myocarde friable ou de l’aorte ascendante quand la paroi est fine ou calcifiée, complications vasculaires emboliques avec AVC temporaire ou permanent en rapport avec la migration de plaques athéromateuses mobilisées lors du passage des guides ou de la bioprothèse. Par ailleurs, un défaut de coaptation de la bioprothèse à l’anneau aortique calcifié peut entrainer une fuite aortique paraprothétique dont le degré élevé est un facteur de mauvais pronostic. L’anneau aortique peut se rompre lors des manœuvres de dilatation ou de déploiement de la bioprothèse. La bioprothèse peut migrer dans le VG ou dans l’aorte ascendante lors de sa mise en place. Toutes ces complications sont à l’origine d’une mortalité à 30 jours de 9,7 % à propos de 3 195 opérés dans l’étude FRANCE 2.   La mise en place d’une bioprothèse aortique sous CEC est responsable d’une mortalité de l’ordre de 3 à 4 % chez les patients âgés. Cependant, les populations concernées étant différentes, ces mortalités ne peuvent pas être comparées.   Ces chiffres montrent simplement que la technique conventionnelle du fait de son ancienneté et des améliorations de l’anesthésie, des techniques chirurgicales, de la protection myocardique et des progrès de la réanimation a une morbi-mortalité faible. Le TAVI qui permet de traiter des patients jusque-là inopérables ou avec un risque opératoire très élevé permet un traitement du RAC sans pour autant que sa morbimortalité soit nulle. Enfin et surtout, les bioprothèses conventionnelles mises en place sous CEC ont un recul de plus de 30 ans et de 20 ans pour la dernière génération alors que l’on ignore la longévité des bioprothèses utilisées dans le TAVI, dont certaines n’ont été mises sur le marché que depuis quelques mois. N’oublions pas l’engouement qu’il y a eu dans le passé pour l’utilisation des bioprothèses chez l’enfant qui était ainsi dispensé du traitement anticoagulant et de ses complications (l’anticoagulation est obligatoire avec les prothèses mécaniques), puis la déception quand ces enfants sont revenus quelques années plus tard dans les services de chirurgie pour procéder au remplacement de ces bioprothèses précocement calcifiées.   Quel sera le devenir du tissu péricardique dans les stents métalliques utilisés dans les bioprothèses mises en place par TAVI ? Ces bioprothèses/TAVI, mis à part le tissu péricardique qui les constitue, ont une architecture qui n’est pas comparable aux bioprothèses/CEC. De plus, quelle sera la conséquence de l’appui du segment inférieur du stent valvulaire, intraventriculaire, sur le feuillet antérieur de la valve mitrale ? Seules des études à long terme répondront à ces questions.   Pour un respect des indications   Au final et en 2012, il est impératif de traiter tous les RAC serrés symptomatiques du sujet âgé. Ce traitement consiste à lever l’obstacle représenté par une valve immobilisée par des calcifications en mettant en place une bioprothèse au niveau de l’orifice aortique. Ceci entraine une disparition des symptômes, une amélioration de la qualité de la survie et une préservation de l’autonomie du patient qui sont tout aussi, voire plus importants que l’augmentation de la survie qui en résulte. Pour ce faire, on dispose d’une technique validée par plusieurs décennies et des millions de patients qui en ont bénéficié. Elle consiste à mettre en place par sternotomie et sous CEC une bioprothèse de 3e génération utilisée depuis plus de 20 ans et dont la « survie » est supérieure à celle de l’opéré âgé. Cependant, certains patients ont une contre-indication à la CEC ou un risque de morbimortalité rédhibitoire en raison de comorbidités. Pour ces patients, qui jusque-là ne pouvaient pas être traités en raison de l’inefficacité du traitement médical, est apparue une alternative thérapeutique avec la possibilité de mettre en place une nouvelle génération de bioprothèses sans CEC (TAVI). La morbi-mortalité du TAVI est liée à la technique mais aussi aux comorbidités des patients chez qui cette nouvelle technique est utilisée. À la différence des bioprothèses standard utilisées sous CEC, ces nouvelles bioprothèses employées par voie transcathéter ont une espérance de vie à long terme, in vivo, actuellement inconnue.   Toutes ces raisons justifient que les indications actuelles du TAVI soient réservées aux seuls patients ayant une contre-indication à la CEC ou des comorbidités faisant craindre une morbi-mortalité élevée avec la technique conventionnelle.   Une extension de ces indications serait actuellement d’un point de vue éthique et médicolégal tout à fait contestable. En outre, d’un point de vue économique, si la santé n’a pas de prix elle a un coût et une bioprothèse TAVI coûte 10 fois plus cher qu’une bioprothèse standard (23 000 versus 2 600 ⇔). Il est donc impératif de suivre les recommandations des sociétés savantes (SFC et SFCTCV) qui ont été appliquées dans l’étude nationale FRANCE 2 (N Engl J Med 2012 ; 366 : 1705-1715).

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème