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Cardiologie interventionnelle

Publié le 01 mai 2017Lecture 8 min

Le TAVI en question

François DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque

L’une des avancées marquantes de ce congrès 2017 a été l’évaluation de l’implantation d’une valve aortique percutanée (TAVI) par rapport à la chirurgie valvulaire aortique chez des patients ayant un rétrécissement aortique (RAo) serré et un risque chirurgical intermédiaire (étude SURTAVI).

TAVI : l’étude SURTAVI en perspective de l’étude PARTNER 2A L’étude SURTAVI est un essai thérapeutique contrôlé, conduit en ouvert, ayant démontré que chez des patients ayant un rétrécissement aortique (RAo) serré, symptomatique, l’implantation percutanée d’une valve aortique CoreValve n’est pas inférieure en termes de mortalité totale et de survenue d’AVC à 2 ans à la chirurgie de remplacement valvulaire aortique (figure 1). Figure 1. Étude SURTAVI : résultat sur le critère primaire (mortalité totale et AVC invalidant). Cet essai a été conduit chez 1 746 patients âgés en moyenne de 79,9 ans dont 63 % avaient une maladie coronaire associée. Ces patients devaient, pour être inclus, avoir un âge d’au moins 70 ans, avoir un RAo serré et un score STS entre 3 et 8 % s’ils étaient inclus hors États-Unis, et entre 4 et 8 % s’ils étaient inclus aux États-Unis. Les résultats de cette étude doivent être mis en perspective avec ceux de l’étude PARTNER 2A afin de tenter une synthèse de l’apport du TAVI dans cette situation clinique. Les résultats de l’étude PARTNER 2A sont parus en 2016 (figure 2). Cet essai thérapeutique contrôlé a été conduit dans un même objectif que celui de l’étude SURTAVI : la comparaison du TAVI et de la chirurgie de remplacement valvulaire aortique chez des patients à risque chirurgical intermédiaire. Figure 2. Étude PARTNER 2A : résultat sur le critère primaire en intention de traiter de l’étude. L’implantation d’une valve aortique percutanée n’est pas inférieure, à 2 ans, à la chirurgie valvulaire chez des patients ayant un RAo serré et un risque chirurgical intermédiaire. Ainsi, l’étude SURTAVI montre que le TAVI n’est pas inférieur, en termes de décès et d’AVC à 2 ans, à la chirurgie valvulaire chez des patients ayant un rétrécissement aortique (RAo) serré et un risque chirurgical intermédiaire, défini par un score STS compris entre 3 et 8 %. Le score STS (Society of thoracic surgeons) est un score permettant d’évaluer le risque absolu de décès à 1 mois postopératoire chez un patient ayant une chirurgie cardiaque. Le résultat de l’étude SURTAVI est donc concordant avec celui de l’étude PARTNER 2A. Les critères principaux évalués dans ces 2 études sont les mêmes : non-infériorité à 2 ans en termes de décès et d’AVC. Les principaux éléments différenciant les études SURTAVI et PARTNER 2A sont : - l’évaluation de la valve Core-Valve dans l’étude SURTAVI et de la valve SAPIEN XT dans l’étude PARTNER 2A ; - le fait que l’étude SURTAVI soit une étude internationale alors que l’étude PARTNER 2A a été conduite uniquement aux États- Unis et au Canada ; - un score STS un peu plus bas dans l’étude SURTAVI (4,4 %) que dans l’étude PARTNER 2A (5,8 %), ce qui peut expliquer pour tout ou partie que l’incidence des événements du critère principal soit plus basse dans le groupe contrôle ou chirurgical à 2 ans dans SURTAVI (14,0 %, dont décès : 12 %) que dans PARTNER 2A (19,3 %, dont décès : 18%) ; - des modalités d’évaluation différentes de la non-infériorité. Ainsi, dans l’essai SURTAVI, un protocole peu habituel a été utilisé : une analyse bayesienne de probabilité que le résultat soit précocement significatif (en termes de non-infériorité et donc de possibilité d’évaluer la supériorité) ou futile, reposant sur 5 analyses intermédiaires et devant conduire à continuer l’étude en l’état ou augmenter le nombre de patients inclus, ou encore arrêter l’étude (pour succès ou futilité) en fonction des taux d’événement s constatés lors des analyses intermédiaires et des probabilités préétablies d’être dans la fourchette de résultat postulé. Les marges de non-infériorité ont été aussi différentes : 7 % dans l’étude SURTAVI et 20 % dans l’étude PARTNER 2A. Des résultats sur les critères secondaires et tertiaires concordants entre PARTNER 2A et SURTAVI Ce qui différencie le TAVI du remplacement valvulaire aortique chirurgical n’est donc pas le risque de décès et/ou d’AVC à moyen terme mais des risques spécifiques d’autres complications, des traitements associés (potentiellement différents du fait du type de valve chirurgicale, et/ou des complications précoces, et/ou d’une angioplastie ou d’un pontage coronaire associé) et les caractéristiques hémodynamiques et peut-être de durabilité de la valve implantée. Ainsi, dans l’étude PARTNER 2A, il y a eu plus de complications vasculaires dans le groupe TAVI (7,9 % vs 5,0 % ; p = 0,008) que dans le groupe chirurgical et, dans ce dernier groupe, il y a eu plus d’hémorragies mettant en jeu le pronostic vital (43,4 % vs 10,4 % ; p < 0,001), plus d’insuffisance rénale aiguë (3,1 % vs 1,3 % ; p = 0,006) et plus de nouvelles fibrillations atriales (26,4 % vs 9,1 % ; p < 0,001) que dans le groupe TAVI. Dans l’étude SURTAVI, les données, quoique différentes en valeurs absolue et relative, sont concordantes. En termes de fonctionnalité de la valve implantée, à 2 ans les deux études montrent que la surface valvulaire aortique est plus grande et le gradient moyen plus faible avec le TAVI qu’avec la valve chirurgicale. Elles montrent aussi que le taux de fuite aortique sévère est similaire avec un TAVI ou une valve chirurgicale, mais que le taux de fuite de degré modéré est plus élevé sous TAVI qu’avec la valve chirurgicale à 2 ans (taux respectifs de 5,4 % et 0,8 % dans l’étude SURTAVI et de 7,5 % et 0,4 % dans l’étude PARTNER 2A). Hors les modalités procédurales, ce qui différencie, en termes de résultats, les deux types de valve (CoreValve et Sapien XT) est essentiellement les taux associés d’implantation de stimulateur cardiaque : 11,8 % sous TAVI Sapien XT, non significativement différent des 10,3 % sous chirurgie dans l’étude PARTNER 2A à 2 ans, et de 25,9 % sous TAVI CoreValve et de 6,6 % dans le groupe chirurgie, la différence étant nettement significative, dans l’étude SURTAVI, à 30 jours. Doit-on proposer un TAVI chez les patients à risque chirurgical intermédiaire ? Au terme des études PARTNER 2A et SURTAVI, en 2017, il est possible d’affirmer qu’en considérant deux critères simples et a priori pertinents, le décès et les AVC, que le TAVI n’est pas inférieur à la chirurgie de remplacement valvulaire aortique chez des patients à risque chirurgical intermédiaire. Les différences sur les critères secondaires et ou tertiaires n’influencent pas globalement ces deux critères majeurs, mais, en moyenne, à 2 ans. La question est donc posée : connaissant l’important recul dont on dispose avec le remplacement valvulaire chirurgical, est-on prêt à proposer plutôt un TAVI qu’une chirurgie chez un patient à risque chirurgical intermédiaire ? Plusieurs éléments de divers ordres peuvent intervenir dans cette réflexion. Certains seront envisagés dans les lignes qui suivent. Un suivi moyen encore « court », mais tout est relatif Un premier élément est un suivi moyen de « seulement » 2 ans dans les études PARTNER 2A et SURTAVI. Ceci peut faire craindre que les résultats puissent être différents à 5 voire 10 ans que ceux observés à 2 ans et donc en faveur d’une méthode plutôt que l’autre. Toutefois, une limite à ce raisonnement est que dans les deux études, la moyenne d’âge de l’intervention a été de 80 ans reflétant l’état de la pratique. Il faudrait donc que les résultats divergent très franchement à 5 et 10 ans ensuite pour qu’ils puissent avoir une importance majeure compte tenu, qu’en France, l’espérance de vie moyenne d’un homme de 80 ans est de 8 ans et 4 mois (8,33) et celle d’une femme de 80 ans est de 10 ans et 7 mois (10,56), ce qui est proche de la durabilité moyenne des prothèses valvulaires cardiaques non mécaniques. De ce fait, la question pourrait potentiellement se poser différemment : chez des patients dont l’espérance de vie est nettement supérieure à 10 ans, le TAVI doit-il être proposé en place de la chirurgie en cas de risque chirurgical intermédiaire ? Par exemple, chez un patient de 72 ans, dont on sait que l’espérance de vie moyenne à cet âge et de 13 ans et 4 mois (13,35) chez l’homme et de 16 ans et 8 mois (16,7) chez la femme ? Et dans les quelques cas de sujets encore plus jeunes, par exemple à 60 ans, âge où l’espérance de vie moyenne est de 22 ans et 3 mois (22,21) chez l’homme mais de 27 ans (26,98) chez la femme ? Nul doute que la maîtrise des procédures augmentant la durabilité et la fiabilité des valves implantées et les probabilités offertes de reprise chirurgicale et/ou interventionnelle au niveau de la valve implantée finiront par prendre une place importante dans ce débat. Le patient au centre de la décision : tenir compte de la qualité de vie à court et long terme Un deuxième élément à prendre en compte est probablement le choix du patient : face à des connaissances limitées, prenant en compte le fait que le recul comparatif n’est que de 2 ans, mais en lui exposant aussi divers autres paramètres, il est éthiquement (et même légalement) nécessaire que le patient indique quel est son choix de traitement. Et ce, même si l’option qu’il choisira sera de s’en remettre à l’avis de son médecin, il s’agira de son choix exprimé (et à enregistrer dans le dossier médical) qui prend en compte ce qu’il pense devoir être et devenir sa qualité de vie ultérieure. Un modèle économique complexe réservé aux agences Enfin, un troisième élément à prendre en compte sera probablement le coût comparé des deux modes de prise en charge, chirurgicale ou interventionnelle, et ce, dès lors que le bénéfice n’est pas très différent. Mais le coût comparatif est de toute évidence difficile à établir, tant les éléments sur lequel il repose sont différents et variés. Ainsi, à titre indicatif, le prix actuel du dernier modèle de CoreValve, l’Evolut R est de 19 517,50 euros, celui de la Sapien XT et de la Sapien III est de 17 175,40 euros. Comparativement, le prix des prothèses valvulaires cardiaques, qu’elles soient mécaniques ou bioprothétiques, est compris en moyenne entre 2 500 et 3 000 euros mais peut s’élever entre 4 500 et 5 000 euros pour les valves sans sutures. Ces données ne concernent que le coût du dispositif médical et ne prennent pas en compte tous les coûts associés, comme par exemple ceux allant de 16 394,50 à 25 884,96 euros pour une chirurgie de remplacement valvulaire avec circulation extracorporelle, sans cathétérisme cardiaque, ni coronarographie, selon que le niveau va de 1 à 4. Le calcul de ces coûts globaux donc la structure est complexe est difficile à modéliser de façon simple, mais s’ils sont très différents entre le TAVI et la chirurgie, ils pourraient être pris en compte dans les indications proposées et remboursées par les agences et la solidarité nationale.    En pratique Le TAVI et la chirurgie de remplacement valvulaire aortique sont des procédures de traitement du RAo serré apportant un avantage similaire dans la prise en charge de patients âgés en moyenne de 80 ans et à risque chirurgical intermédiaire. Dès lors, on peut considérer que le choix entre les deux techniques est désormais ouvert, mais probablement uniquement pour le grand âge et avec encore quelques inconnues sur le devenir respectif des deux techniques avec le temps. Les paramètres du choix reposeront sur les croyances spécifiques du médecin par rapport à l’avantage à long terme d’une technique ou de l’autre, sur les possibilités qui seront offertes par les autorités pour une prise en charge par la solidarité nationale chez des patients à risque intermédiaire et in fine, mais nécessairement, sur le choix exprimé par le patient.  Conflits d’intérêts de l’auteur lors des 5 dernières années : honoraires pour conférences ou conseils pour les laboratoires Alliance BMS-Pfizer, AstraZeneca, Bayer, BMS, Boehringer-Ingelheim, Daiichi-Sankyo, Menarini, Novartis, Novo- Nordisk, Pfizer, sanofi-aventis France, Servier.

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