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Cardiologie interventionnelle

Publié le 20 mar 2023Lecture 6 min

JESFC - L'essentiel 2022 vu par le GACI

Hakim BENAMER, Président du GACI (Groupe Athérome coronaire et Cardiologie Interventionnelle)

Dans les cardiopathies ischémiques, nous avons pour habitude de prendre en charge le coronarien dans sa globalité, tenant compte de l'ensemble de ses comorbidités, de la fonction ventriculaire gauche, de l'extension des lésions coronaires, qui est quantifiée (score Syntax) et dont la complexité de revascularisation est discutée en réunion multidisciplinaire. Les éléments qui permettent d’orienter la revascularisation sont les données cliniques et les examens complémentaires évaluant l'ischémie myocardique et les éventuelles données de viabilité lorsque la fonction ventriculaire gauche est altérée. Ces deux éléments que sont l'ischémie myocardique et la viabilité sont déterminants pour réaliser un choix de revascularisation (figure 1). Ces deux piliers sont chahutés dans des publications prestigieuses en 2022. Nous avons choisi de présenter des études qui s'intéressent à l'évaluation de l'ischémie myocardique par la FFR et une étude s'intéressant au concept de viabilité et de l’impact de la revascularisation par angioplastie.

Étude FAME 3 : fragilise la FFR dans la prise en charge du patient tritronculaire   En 2021, plusieurs études ont été négatives pour la FFR dans les cardiopathies ischémiques comme l’étude RIPCORD 2, l’étude FUTURE, FLOWER-MI et l’étude FAME 3. Dans ce contexte, nous avons choisi de présenter l’étude FAME 3 publiée en 2022 dans le New England Journal of Medicine(1). Cette étude multicentrique internationale de non-infériorité a randomisé des patients tritronculaires entre revascularisation chirurgicale par pontage versus angioplastie guidée par la FFR avec mise en place de stents actifs au zotarolimus. Le critère primaire à un an était la survenue d’un événement cardiaque ou d’événements cérébraux vasculaires définis par le décès l’infarctus du myocarde, l’AVC ou le recours à une nouvelle revascularisation. Les deux groupes étaient comparables en termes d’âge, de sexe ratio, de facteurs de risque et d’antécédents avec 757 patients dans le groupe angioplastie et FFR contre 743 patients dans le groupe revascularisation chirurgicale. Les données angiographiques étaient aussi comparables dans les deux groupes avec une proportion non différente d’occlusion chronique, de présence de bifurcation et de score Syntax global qui était aux alentours de 26. Le nombre de stents utilisés dans le groupe angioplastie était de 3,7 ± 1,9, le recours à l’imagerie intracoronaire de 11,7 %. Pour le groupe revascularisation par pontage, il convient de noter que le nombre d’anastomoses distales était de 3,4 ± 1, les pontages sans CEC représentent 24 % des patients et les pontages tout artériel n’étaient que de 24,5 %. Par ailleurs, 10 % des patients revascularisés chirurgicalement ont fait l’objet d’une FFR les requalifiant probablement comme tritronculaires. Les résultats à un an pour le critère primaire ne retrouvent pas de non-infériorité de la stratégie d’angioplastie guidée par la FFR versus revascularisation par pontage. De plus, l’analyse des différents sous-groupes ne permet pas de dégager un sous-groupe pouvant bénéficier de cette stratégie (figure 2).   Les limites de cette étude sont l’échantillon relativement modeste des groupes, le suivi qui est simplement d’un an, le fait que dans le groupe pontage 10 % des patients ont eu une FFR les requalifiant. De plus, cette étude compare une stratégie de revascularisation par angioplastie guidée par la FFR à une revascularisation systématique par pontages ne faisant pas ou peu intervenir la physiologie coronaire. Cette méthodologie complexe rend beaucoup plus difficile l’interprétation des résultats. Soit étudier la nécessité de revascularisation par FFR, soit ses modalités angioplasties ou pontages serait plus simple. Cette nouvelle étude négative montre que l’interprétation de la FFR chez les patients pluritronculaires est beaucoup plus complexe qu’une simple addition de l’analyse binaire d’évaluation de l’ischémie myocardique de chaque tronc coronaire. Il existe très probablement des interactions entre les vaisseaux coronaires qui rendent cette analyse plus complexe. De plus, une évaluation du résultat de l’angioplastie par la FFR en fin de procédure est probablement très importante car il est maintenant admis que dans un tiers des cas la FFR reste pathologique à l’issue de l’angioplastie.   La FFR en pratique n’a pas dit son dernier mot !   Au demeurant, de nombreux travaux montre que la FFR permet d’améliorer les pratiques de revascularisation des troncs coronaires. C’est le cas du travail publié par J. Adjedj et coll. sur les données du registre français France PCI et qui s’est intéressé à l’impact de la FFR sur l’angioplastie guidée dans l’angor chronique(2). Sur les 52 610 angioplasties réalisées en France entre 2014 et 2019, 14 384 ont été réalisées dans le cadre de la prise en charge d’un syndrome coronarien chronique et chez des patients ayant un suivi d’au moins un an. Parmi eux, 13 125 ont bénéficié d’une angioplastie guidée par l’angiographie seule, ce qui représente 91 % de l’effectif, contre 1 259 patients (9 %) ayant eu une angioplastie guidée par la FFR. Les deux populations n’étaient pas totalement comparables, avec un âge moyen un peu plus élevé dans le groupe angioplastie guidée, ainsi qu’une proportion de femmes plus importante, moins de patients diabétiques et une fonction ventriculaire gauche un peu plus basse. Par ailleurs, sur les critères angiographiques, la proportion de lésions du tronc commun était un peu plus importante dans le groupe angioplastie guidée alors que le score Syntax était globalement un peu plus bas. L’analyse des résultats à un an a permis d’objectiver une réduction significative de la survenue d’événements cardiaques graves (odds ratio [OR] 1,44 ; [1,2-1,7] ; p = 0,0004). De la même façon, la mortalité à un an a été réduite significativement dans le groupe FFR (OR 2,84 [2,1-3,9] ; p = 0,0001) (figure 3).   L’analyse du groupe FFR-guidée a permis de retrouver une meilleure pratique globale dans ce groupe, avec notamment plus de tests de stimulation en amont de la coronarographie et un meilleur respect des recommandations concernant les traitements antiagrégants plaquettaires. On peut se demander si la FFR est un témoin des bonnes pratiques en termes de revascularisation des patients en syndrome coronarien chronique. Les limites de cette étude sont bien évidemment l’absence de randomisation et le caractère non comparable des deux groupes, mais aussi le follow-up qui est de simplement un an. Ainsi, la FFR dans la pénétration en France est de 9 % et permet de réduire de manière très significative la survenue d’événements cardiaques (-64 %) et la mortalité à un an des patients pris en charge pour un syndrome coronarien chronique.   Le concept de viabilité bousculé par l’étude REVIVED   L’étude REVIVED concerne l’évaluation de l’intérêt de la revascularisation par angioplastie coronaire des patients ayant une fonction ventriculaire gauche < 35 % avec des territoires viables sur au moins quatre territoires(3). Cette étude randomisée multicentrique internationale a inclut 347 patients dans le groupe angioplastie complétant un traitement médical optimal et 353 patients dans le groupe traitement médical optimal seul. Ces deux groupes étaient comparables en termes de démographie, de facteurs de risque cardiovasculaires, d’antécédents et de symptomatologie. La fraction d’éjection du ventricule gauche était aussi comparable, de l’ordre de 27 % environ. L’extension des lésions coronaires était comparable dans les deux groupes avec une proportion de tritronculaires aux alentours de 40 %. Le critère primaire qui comprenait décès toutes causes et hospitalisation pour insuffisance cardiaque était comparable dans les deux groupes : 37 % dans le groupe angioplastie et 38 % dans le groupe traitement médical optimal seul. L’analyse des différents sous-groupes ne permettait pas de retrouver de bénéfice en fonction de l’âge, de l’altération de la fonction ventriculaire gauche, de l’existence d’un diabète, d’une fibrillation atriale, d’une lésion du tronc commun de la coronaire gauche ou de données biologiques comme le proBNP. Les points faibles de cette étude sont : l’effectif des groupes qui est modeste, le suivi à 8 ans qui est probablement trop court, le fait de ne pas tenir compte de la survenue de revascularisation dans le suivi des patients. Cette étude, qui challenge l’impact de la revascularisation par angioplastie des territoires viables, entre en opposition avec l’étude STICH qui avait démontré l’impact positif de la revascularisation par pontage des patients ayant une viabilité documentée. Avec une réduction significative de la mortalité à 10 ans(4) (figure 5).   Ces résultats divergents montrent bien que la viabilité est un concept beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. C’est en fait un continuum entre un territoire myocardique hibernant dont la revascularisation va permettre un retour de la fonction systolique et un myocarde fibreux dont la revascularisation ne permettra pas d’obtenir d’amélioration (figure 6A). Nous devons probablement mieux maîtriser les différents outils qui permettent une évaluation précise de la viabilité comme la scintigraphie myocardique, le PET-scan, l’échographie de stress sous dobutamine et l’IRM. Ces différents examens n’apportant pas la même information sur le territoire évalué (figure 6B).

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