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Paramédical

Publié le 30 nov 2013Lecture 8 min

Prise en charge endovasculaire des lésions infrapoplitées

D. HUEL, Pôle cardiovasculaire interventionnel, Hôpital privé d’Antony

L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) est, au même titre que l’insuffisance coronaire, une des manifestations de l’artériosclérose. On estime qu’elle touche environ 800 000 personnes en France(1), principalement les hommes (4 pour 1 femme). On retrouve parmi les principaux facteurs de risque l’intoxication tabagique, le diabète, les dyslipidémies et l’hypertension artérielle. Avec le vieillissement de la population et l’augmentation de la prévalence du diabète, l’AOMI se manifeste fréquemment par une ischémie critique (CLI : Critical Limb Ischemia). Le diagnostic de CLI est établi sur des critères cliniques allant de la douleur de décubitus jusqu’à la gangrène (classification de Rutherford, tableau 1) et critères hémodynamiques (tableau 2)

La prise en charge repose en premier lieu sur un contrôle strict des facteurs de risque cardiovasculaire et un traitement médicamenteux maximal. La revascularisation, qu’elle soit chirurgicale ou endovasculaire, est un objectif obligatoire, car la viabilité de tout ou partie du membre est mise en jeu à court ou moyen terme. Elle a pour but le sauvetage du membre via la cicatrisation des lésions cutanées et la prévention des amputations, dont le pronostic à 5 ans est très péjoratif (chez le diabétique, il rejoint celui de l’infarctus du myocarde !). L’écho-Doppler permet de manière non invasive de localiser et d’évaluer les lésions artérielles. En pratique, on pourra les retrouver aux différents étages : iliaque, fémoropolité et jambier. Chez le patient en CLI, on retrouve très fréquemment des obstructions des vaisseaux infrapoplitées (80 % des localisations chez le diabétique), sous la forme d’occlusions longues des axes jambiers, isolées ou associées à des lésions de l’étage fémoro-poplité. Jusqu’à la fin des années 1990, la seule option de revascularisation des artères distales était la chirurgie de pontage. Dans un premier temps, les alternatives endovasculaires intéressant les artères jambières (BTK : Below The Knee) étaient réalisées de manière concomitante aux angioplasties fémoro-poplitées, et ce, dans le but d’améliorer la perfusion distale, et donc potentiellement la perméabilité à long terme. Plus récemment, le développement de matériels spécifiques dédiés et de techniques adaptées a permis l’élargissement des indications des gestes de BTK en première intention. Rappel anatomique (figures 1a et 1b)   Figure 1A. Anatomie des artères de la jambe. Figure 1B. Anatomie des artères de la jambe et du pied. Après avoir donné naissance aux artères du genou, l’artère poplitée se divise ainsi : • l’artère tibiale antérieure, qui chemine entre le tibia et la fibula puis le long de la face latérale externe du tibia. Elle se termine à la face antérieure de la cheville, ou` elle devient l’artère pédieuse ; • le tronc tibio-fibulaire, qui se divise lui même en : - l’artère fibulaire, qui chemine dans la membrane interosseuse, - l’artère tibiale postérieure, qui descend en dedans jusqu’en arrière de la malléole interne et donne naissance aux artères plantaires latérale et médiale ; • au niveau du pied, un réseau d’anastomose est constitué entre l’arcade plantaire latérale et l’arcade plantaire dorsale qui naît de l’artère pédieuse. Le concept d’angiosome (figure 2)   Figure 2. Angiosomes du pied et de la cheville. L’angiosome est une unité anatomique composite, pluritissulaire (peau, tissu sous-cutané, fascia, muscles et os) vascularisée par un vaisseau principal et correspondant à un territoire cutané unique. Le corps humain est composé d’une quarantaine d’angiosomes, dont cinq sont localisés dans le pied et la cheville. Ils correspondent aux trois principales artères de la jambe. Plusieurs études ont démontré l’importance de revasculariser l’artère alimentant l’angiosome correspondant au territoire ischémique, que le mode de revascularisation soit chirurgical ou endoluminal(2-3). En outre, plus sévères sont les lésions cutanées, plus il est important d’obtenir une revascularisation directe de l’angiosome concerné. La revascularisation de plusieurs artères infrapoplitées peut être envisagée quand les lésions s’étendent à plusieurs angiosomes. Angioplastie des artères jambières L’abord fémoral peut être rétrograde controlatéral ou antérograde homolatéral. La ponction rétrograde, plus aisée, engendre moins de complications au point de ponction (hématome et faux anévrisme), en particulier chez les patients obèses. Elle permet la réalisation d’une artériographie complète de l’aorte abdominale et des membres inférieurs (visualisation de l’ensemble des lésions, y compris les éventuelles localisations supra-inguinales). En revanche, elle impose l’utilisation de dispositifs d’angioplasties longs dont l’utilisation peut s’avérer contraignante pour l’opérateur. La ponction homolatérale descendante peut donc être préférée, les difficultés de ponction pouvant être contournées par la réalisation d’un échoguidage. Le premier temps de l’examen consiste en la réalisation d’une artériographie sélective du membre en mode soustrait. Une cartographie précise de la vascularisation distale est nécessaire avant d’envisager tout geste de revascularisation ; inutile, par exemple, d’aborder une occlusion jambière si on ne visualise pas les artères d’aval. Le matériel dédié BTK est dérivé de celui utilisé en angioplastie coronaire. On dispose de guides de calibre 0,018” ou 0,014 ” de rigidité croissante (âmes en nitinol ou en acier renforcé). Les revêtements polymériques offrent des capacités de franchissement élevées (amélioration de la « glisse »). La rigidité de l’extrémité peut atteindre jusqu’à 30 g, conférant au guide un pouvoir de pénétration (rapport entre la rigidité et la surface de l’extrémité) très important. Les cathéters de support peuvent être armés (maillage de fils d’acier) et/ou angulés, disponibles en plusieurs tailles et compatibles avec les différents diamètres de guides. Ils peuvent également être effilés à leur extrémité afin d’augmenter leur capacité de franchissement. La présence de marqueurs radio-opaques permet d’estimer facilement la taille des cathéters d’angioplastie à utiliser. Dans un premier temps, on tentera toujours de respecter la lumière de l’artère. Le cathéter supporte le guide pour l’aider à franchir la lésion, il progresse en même temps que celui-ci afin d’en maintenir le support. Une fois la lésion totalement franchie, le guide est retiré et l’injection réalisée par l’intermédiaire du cathéter permet de confirmer que l’on a retrouvé la lumière artérielle. On pourra alors utiliser un guide différent afin d’augmenter le support et/ ou d’améliorer la stabilité. En cas d’échec de franchissement transluminal, on peut envisager une recanalisation selon la technique sous-intimale décrite par Bolia (figure 3).   Figure 3. Angioplastie sous-initimale intentionnelle selon la technique de Bolia. Cette technique consiste à créer de manière intentionnelle un faux chenal de dissection et de réentrer dans la vraie lumière en aval de l’occlusion. On pratique ensuite une angioplastie au ballon afin de créer une nouvelle lumière artérielle. La principale difficulté de la technique réside dans la réentrée, notamment en présence d’artères calcifiées. Différents systèmes mécaniques ont été mis au point dans le but de faciliter le retour du guide dans la lumière artérielle, mais ils ne sont pas adaptés au petit calibre des vaisseaux distaux. Pour cette raison, l’abord rétrograde des axes jambiers par ponction directe a été développé grâce à la miniaturisation des matériels en pratiquant une ponction distale sous contrôle angiographique. Le but est alors de franchir la lésion par la voie rétrograde, de récupérer le guide par voie haute et de pratiquer une angioplastie par voie antérograde en préservant l’abord distal. Récemment sont apparus des systèmes de microponction et d’introducteur 3 F dédiés à l’abord distal et compatibles avec des ballons de 2,5 F permettant la réalisation de la procédure d’angioplastie par l’abord distal. Les profils de franchissement des cathéters d’angioplastie ont également été améliorés. Les ballons coaxiaux offrent des capacités de franchissement supérieures (push) à celles des ballons de type monorail. Ils sont disponibles dans une grande variété de longueurs (de 20 à 220 mm) pour des diamètres allant de 2 à 4 mm. Des ballons « coniques » (le diamètre diffère de 0,5 mm entre l’extrémité proximale et distale) ont été développés spécifiquement pour l’angioplastie des axes jambiers. Les ballons « actifs » au paclitaxel sont également disponibles dans une grande variété de longueurs et de diamètres ; ils seraient susceptibles d’offrir des taux de perméabilité supérieurs aux ballons traditionnels. Le recours au stenting est réservé aux lésions résistantes à l’angioplastie au ballon simple. Des endoprothèses, qu’elles soient serties sur ballon ou autoexpansive en nitinol, ont été spécifiquement mises au point pour traiter les lésions infrapoplitées, mais leur utilisation systématique de première intention reste très controversée. Angioplastie des artères de l’arche plantaire : plantar loop technique (figure 4)   Figure 4. Plantar loop technique.   En cas de lésions associées ou isolées des vaisseaux constituant l’arche plantaire, la technique du plantar loop peut être envisagée. Elle consiste à faire naviguer un guide polymérique 0,014” d’une artère tibiale vers l’autre, en passant par l’arcade plantaire anastomosant le réseau plantaire et dorsal du pied via le premier espace métatarsien. On pourra ainsi pratiquer une angioplastie de l’arcade plantaire afin d’améliorer la vascularisation du pied et même éventuellement entreprendre une recanalisation rétrograde de l’artère tibiale malade sans avoir recours à une ponction distale. Conclusion  L’évolution des techniques et des matériels d’angioplastie dérivés de ceux utilisés en angioplastie coronaire a permis un élargissement des indications de revascularisation des artères jambières. Le paramédical se doit de connaître ces différents matériels et techniques afin d’être en mesure d’aider l’opérateur lors de procédures qui peuvent s’avérer longues et complexes.  Lors de l’installation, une attention toute particulière devra être apportée au confort du patient, mais également à celui de l’opérateur, et à l’optimisation de la radioprotection des malades et du personnel. 

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