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Paramédical

Publié le 30 sep 2014Lecture 5 min

Prise en charge de la douleur en salle de cardiologie interventionnelle : la place de l’hypnose

N. JAMMOT, IADE, Clinique Alleray-Labrouste, Paris

La prise en charge de la douleur des patients est une des préoccupations majeures des soignants. C’est avec l’objectif de mieux soigner que se sont développées des techniques d’analgésie et d’anesthésie fiables et adaptées. Le pouvoir analgésique de l’hypnose, aujourd’hui validé par les neurosciences(1) est utilisé depuis des siècles pour soulager l’être humain. Depuis une quinzaine d’années en France, l’intérêt de l’hypnose pour la prévention et le traitement de la douleur aiguë trouve une place dans tous les lieux de soins où une douleur aiguë peut être provoquée, en particulier les salles de cathétérisme cardiaque.

Points essentiels L’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP, International Society for the Study of Pain) définit la douleur comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en des termes évoquant une telle lésion ». Cette définition prend en compte deux aspects : l’intensité (expérience sensorielle) et l’affectif (expérience émotionnelle). La douleur est multidimensionnelle, filtrée par les émotions, le savoir et la mémoire de chacun. La plupart des patients devant bénéficier d’une coronarographie sont stressés, angoissés. Les peurs sont multiples : expérience antérieure désagréable, peur de souffrir, de l’inconnu, de la perte de contrôle, du résultat de l’examen, etc. D’autant plus que cet examen présente la particularité d’explorer le cœur, centre vital de l’être humain, organe hautement symbolique de vie, de sentiment et d’amour. Tout comme la douleur, le stress se manifeste par une stimulation du système nerveux sympathique : tachycardie, augmentation de la pression artérielle, vasoconstriction périphérique, tension musculaire, etc., pouvant se traduire par un spasme de l’artère radiale, des douleurs thoraciques, etc. Que proposer au patient ? Les techniques médicamenteuses Les produits d’anesthésie ont démontré leur efficacité et leur malléabilité pour lutter contre le stress et la douleur. Ils assurent confort et sécurité au patient tout en offrant des conditions de travail optimales à l’opérateur. En cardiologie interventionnelle, il peut être proposé en association à l’anesthésie locale du site de ponction : - du MEOPA (mélange equimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote) (figure 1) ; - une sédation intraveineuse : les molécules les plus utilisées sont le propofol (anesthésique général d’action rapide et brève), et les benzodiazépines (type midazolam) qui sont sédatives, anxiolytiques et plus ou moins amnésiantes ; - ou un analgésique central de type sufentanil ou alfentanyl.   Figure 1. L’administration du MEOPA se fait sur prescription médicale. Elle nécessite une formation spécifique des soignants (médicaux, paramédicaux) et la mise en place d’un protocole.   Leur administration requiert un niveau de compétence ainsi qu’une surveillance particulière du fait de leurs effets secondaires potentiels (dépression respiratoire, action parasympa-thomimétique, etc.). L’hypnose L’hypnose peut être utilisée comme technique alternative ou associée aux techniques médicamenteuses.   « L’hypnose thérapeutique est une expérience relationnelle mettant en jeu des mécanismes physiologiques et psychologiques permettant à l’individu de supprimer, d'atténuer ou de mieux vivre une pathologie douloureuse aiguë ou chronique »(2).   Toutes les techniques d’hypnose utilisent cette base naturelle qui est celle des mécanismes de l’attention. Spontanément, nous évoluons au quotidien entre deux modes de conscience qui semblent être fondamentaux à notre équilibre. Un état de conscience ordinaire qui nous permet de nous adapter rapidement à notre environnement grâce à une attention très mobile. Elle assure notre sécurité. La transe spontanée qui se caractérise par une fixité de l’attention, une focalisation sur un seul phénomène, sur une seule idée. Elle est soit totalement orientée vers un aspect du monde extérieur, soit totalement orientée vers notre monde intérieur (les émotions, l’imaginaire)(3). Elle est dite « positive » lorsqu’elle incite au bien-être, à la rêverie et « négative » lorsqu’elle est orientée vers des émotions et des sensations désagréables comme c’est souvent le cas dans les situations de soin. Le vécu douloureux est alors modifié : le seuil de perception de la douleur est réduit, la douleur ressentie est augmentée et le temps de cette même douleur ressentie, allongé. L’hypnose va donc consister à induire de façon intentionnelle une transe positive par orientation de la conscience. Ceci permet au patient de rester ou de retrouver un état de bien-être et de confort émotionnel.   Pratiquer l’hypnose, c’est tout d’abord adapter et modifier son langage (encadré). Il est maintenant établi que le langage a une influence sur la façon dont un événement, par exemple un soin potentiellement algique, peut être ressenti(4).   Les différentes formes d’hypnose L’hypnose conversationnelle Elle utilise des principes de communication pour créer, en parlant avec le patient, un état de conscience modifié (léger le plus souvent). Elle pourra ainsi avoir un effet thérapeutique(5). Elle s’appuie sur la réalité de ce que vit le patient : le lieu où se fait le soin, son ressenti, ses préoccupations autour du soin – expliquer le déroulement du soin avec des mots positifs et rassurants, sa durée, préciser s’il y a des moments qui ne sont pas agréables(6) –, ses passe-temps, ce qu’il aime faire pour mobiliser sa mémoire et son imagination. C’est sous cette forme qu’elle est le plus facilement intégrée dans notre activité quotidienne (figure 2).   Figure 2. Hypnose conversationnelle : entrée en relation avec le patient. L’hyp​nose formelle Elle se fait en accord avec le patient et peut être proposée en amont de l’examen chez des patients particulièrement anxieux ou phobiques. Elle nécessite une formation spécifique afin de respecter rigoureusement toutes les étapes de l’induction, de l’accompagnement et de fin de transe. La transe ainsi créée est très stable, très confortable et permet la réalisation de gestes potentiellement douloureux par l’analgésie qu’elle génère(7). Le temps d’induction de la transe est de quelques minutes, l’accompagnement se poursuit pendant toute la durée de l’examen. Certaines adaptations sont nécessaires afin de respecter les bonnes pratiques de radioprotection. Ainsi, certaines équipes disposent de casques non filaires (Dr L. Collombier, service de Médecine nucléaire, CHU de Nîmes) afin de rester en contact avec le patient, d’autres vont positionner à côté d’une des oreilles du patient un smartphone diffusant une musique adaptée (Dr G. Tran, Service d’anesthésie, CHU de Nîmes*). Enfin, plus simplement quand la transe est stable, des suggestions hypnotiques appropriées permettent au soignant de s’éloigner de la source. Conclusion La pratique de l’hypnose dans nos structures « hypertechniques » de cardiologie interventionnelle apporte un vrai bénéfice au patient en termes de confort émotionnel et physique. Elle s’inscrit dans notre objectif d’amélioration de la prise en charge des patients tout en impliquant la participation et l’adhésion de toutes les équipes (médicales, paramédicales). Des instituts proposent aux professionnels de santé des formations à l’hypnose et à la communication thérapeutique.

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