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Publié le 30 sep 2010Lecture 10 min

Comment gérer une anomalie de connexion proximale d’artère coronaire

P. AUBRY, Centre Hospitalier Bichat, Paris X. HALNA du FRETAY, Hôpital Foch, Suresnes E. SORBETS, Centre Hospitalier Bichat, Paris

Les anomalies congénitales des artères coronaires sont une entité polymorphe. Anomalie de naissance, souvent utilisé, est mal approprié car l’artère coronaire vient se connecter à l’aorte lors de sa maturation. Aussi, anomalie de connexion sera utilisé dans cet article consacré uniquement aux ANOmalies de connexion proximale des artères CORonaires (ANOCOR), en excluant les formes associées à une cardiopathie congénitale touchant les gros troncs artériels.  

La prévalence angiographique des ANOCOR proximales varie de 0,6 à 3 % selon les séries. Tout cardiologue interventionnel est donc confronté régulièrement à une ANOCOR. Le développement de l’imagerie en coupe apporte des cas nouveaux avant la réalisation d’une coronarographie. La conduite à tenir reste difficile pour les ANOCOR à risque, surtout en cas de découverte fortuite. Une mise en commun prospective des données relatives aux ANOCOR détectées (anatomie, clinique, angiographie, imagerie en coupe, thérapeutique, suivi clinique) pourrait permettre à terme une conduite plus factuelle.  C’est le but principal de l’étude ANOCOR qui a débuté cette année. L’objectif de cet article est de rappeler des notions élémentaires pour éviter des erreurs d’interprétation et de tenter de répondre aux questions que suscitent les ANOCOR.  Éviter les diagnostics par excès ou par défaut  La reconnaissance d’une ANOCOR nécessite de définir les variantes anatomiques présentées dans le tableau 1. Une classification simple des ANOCOR reconnaît 6 types principaux (tableau 2).    Le diagnostic angiographique est généralement facile pour une ANOCOR gauche par un cathétérisme sélectif aisé dans le sinus antérodroit ou dans la coronaire droite. Il est souvent plus difficile pour une ANOCOR droite avec une opacification sélective délicate, réalisée au mieux avec une AL3, mais aussi avec une JL4 (figure 1). Un cathétérisme difficile de la coronaire droite ne signifie pas obligatoirement une ANOCOR. Par l’orientation de l’aorte initiale, l’ostium droit est normalement situé plus bas que l’ostium gauche. Un ostium droit de niveau proche de l’ostium gauche en incidence OAG doit faire suspecter une ANOCOR. L’imagerie cardiaque en coupe (scanner et imagerie par résonance magnétique) a maintenant une place incontournable pour confirmer ou infirmer le diagnostic d’ANOCOR.    Figure 1. Cathétérisme sélectif avec une JL4 dʼune anomalie de connexion droite dans le sinus antérogauche. (Document du Dr Thierry Joseph). Éviter les diagnostics erronés  La coronaire dite « unique » doit être différenciée des autres ANOCOR avec un seul ostium. De nombreuses classifications ont été proposées pour les multiples formes de la coronaire unique. Il paraît plus utile de différencier une coronaire unique d’un réseau coronaire avec ostium commun. Dans ce dernier cas, l’ANOCOR naît peu après l’ostium commun avec un trajet proximal obligatoirement anormal pour rejoindre la région myocardique habituelle (figure 2).    Figure 2. Réseau coronaire avec ostium commun par connexion du tronc gauche sur la coronaire droite. Au contraire, la coronaire unique a un trajet proximal normal avec un réseau distal très développé vers le territoire de l’artère absente via les sillons intercavitaires ou des branches marginales épicardiques (figure 3). L’intérêt de cette distinction est d’identifier les ANOCOR avec trajet proximal anormal, potentiellement graves.     Figure 3. Coronaire unique avec volumineuse coronaire droite quidonne le réseau gauche par une marginale très développée. Une autre source d’erreur potentielle est l’ANOCOR par connexion aortique anormalement haute. Le critère de définition retenu (≥ 10 mm audelà de la jonction sinotubulaire) ne peut être confirmé ou infirmé que par une imagerie en coupe (figure 4). Une connexion haute au-dessus du sinus habituel (sans caractère péjoratif) doit être différenciée des autres connexions aortiques hautes, mais avec trajet proximal anormal.    Figure 4. Connexion gauche au-dessus du sinus antérogauche < 10 mm de la jonction sinotubulaire (variante anatomique). (Document fourni par le Dr Patrick Dupouy). Identifier avec précision le trajet initial Cette étape est primordiale pour déterminer le caractère de gravité d’une ANOCOR. Pour rejoindre leur territoire myocardique habituel, les ANOCOR ont plusieurs trajets possibles par rapport aux gros troncs artériels : prépulmonaire, interartériel, intraseptal ou rétroaortique (figure 5).    Figure 5. Trajets initiaux possibles des anomalies de connexion proximale à partir du sinus antérodroit ou de la coronaire droite. Des méthodes angiographiques existent pour identifier le trajet initial (tableau 3), mais peuvent être prises en défaut. Il existe deux situations où l’erreur est improbable : la visualisation de branches à direction septale à la partie moyenne d’un tronc gauche ou d’une IVA ectopiques signe toujours un trajet intraseptal, et la connexion ectopique de la circonflexe est associée dans 99 % des cas à un trajet rétroaortique. L’objectif de l’imagerie en coupe est d’identifier le trajet précis d’une ANOCOR, en particulier pour différencier un trajet interartériel de mauvais pronostic d’un trajet intraseptal de pronostic plus favorable.    IVA : interventriculaire antérieure. Connaître les rapports des artères coronaires avec les gros troncs artériels  Le plan de l’anneau aortique est situé au-dessous du plan de l’anneau pulmonaire avec un espace presque virtuel entre les gros troncs artériels. Cette notion anatomique est fondamentale, car le segment proximal d’une ANOCOR interartérielle passe entre l’aorte et l’infundibulum pulmonaire (figure 6), et non entre l’aorte et l’artère pulmonaire comme cela est souvent rapporté. Le trajet d’une ANOCOR prépulmonaire est variable, parfois particulièrement long et sinueux, et remontant sur l’artère pulmonaire (figure 7). Des erreurs d’interprétation scanographique sont possibles en coupe axiale entre une ANOCOR interartérielle et une ANOCOR intraseptale si on ne s’aide pas d’une reconstruction volumique.    Figure 6. Trajet dʼune ANOCOR interartérielle qui passe entre lʼaorte et lʼinfundibulum pulmonaire. Figure 7. Trajet prépulmonaire dʼun tronc gauche ectopique. (Document fourni par le Dr Hakim Benamer). Identifier les formes à risque  Hors une maladie athéromateuse associée, la gravité de certaines formes anatomiques a été établie par des études autopsiques. Les ANOCOR avec trajet prépulmonaire, intraseptal ou rétroaortique sont considérées comme bénignes. Par contre, un trajet interartériel doit toujours être pris en considération. Il peut concerner le tronc commun ou l’IVA, mais aussi la coronaire droite. La fréquence de trajet interartériel serait plus élevée pour les ANOCOR droites que pour les ANOCOR gauches.  Le site précis de connexion d’une ANOCOR est primordial à considérer pour donner un pronostic. Cela est généralement facile pour les ANOCOR gauches car la connexion se fait sur la coronaire droite ou est très proche de l’ostium de cette dernière.  La situation est différente pour les ANOCOR droites. Hors les connexions directes sur le tronc ou l’IVA, l’ostium d’une ANOCOR droite est souvent à distance de l’ostium gauche et proche de la jonction entre les sinus antérogauche et antérodroit (figure 8). Il existe des ANOCOR droites de siège très excentré, mais dans le sinus antérodroit. Ce qui pose le problème de la classification de ces anomalies.    Figure 8. Connexion ectopique dʼune coronaire droite très proche de la jonction entre sinus antérogauche et antérodroit. Les morts subites sont plus souvent observées avec les ANOCOR gauches. L’importance du territoire myocardique en cause a été suggérée. L’autre explication est que certaines ANOCOR droites seraient classées à tort dans les formes interartérielles à risque, alors que le trajet proximal ectopique est situé à distance de l’infundibulum pulmonaire. Une extension de la classification actuelle avec un trajet supplémentaire (extraartériel ou libre ?) peut se discuter. La réalisation systématique d’un scanner cardiaque pourrait permettre de mieux cerner les différentes formes anatomiques des ANOCOR droites.   Faut-il rechercher une ischémie myocardique ?  Sans doute, mais la particularité des ANOCOR à risque est son mode de révélation, souvent une mort subite survenant chez un adulte jeune lors d’un effort violent. Des signes cliniques prémonitoires d’ischémie myocardique sont inconstants, de même que des anomalies ischémiques d’effort si une recherche a été réalisée. En cas de découverte fortuite d’une ANOCOR à risque, la mise en évidence d’une ischémie myocardique est souvent négative. Une explication est suggérée par l’échographie endocoronaire retrouvant une déformation ellipsoïde juxtaostiale, mais avec une surface identique au segment circulaire d’aval (figure 9). Il est donc possible que les tests classiques de stimulation ne soient pas adaptés à la physiopathologie des ANOCOR.    Figure 9. Analyse par échographie endocoronaire dʼune connexion anormale de la coronaire droite avec une surface artérielle identique entre la portion juxtaostiale (A) et la portion proximale (B). Quelle est la cause des décès ?  La mort subite est sans doute liée à une fibrillation ventriculaire de cause ischémique dont le mécanisme reste incertain. Une compression à l’effort par l’infunfibulum pulmonaire, longtemps présentée comme la cause principale, n’a jamais été démontrée. Les rapports anatomiques entre une ANOCOR et la paroi aortique sont plus intéressants à considérer pour comprendre la gravité de certaines formes. Un ostium non circulaire, une hypoplasie proximale (figure 10) et un trajet tangentiel juxtamural ou intramural à l’aorte avec un angle initial très marqué, réalités anatomiques bien connues, sont maintenant visualisés par l’imagerie en coupe et l’échographie endocoronaire, outil qui devrait être plus utilisé. Ces particularités anatomiques pourraient entraîner une ischémie sévère en cas de demande myocardique importante en oxygène, avec peut-être comme facteur surajouté une compression par dilatation de la racine aortique. Il n’existe pas encore de séries conséquentes d’ANOCOR avec évaluation hémodynamique par la FFR.    Figure 10. Hypoplasie proximale (flèche) dʼune coronaire droite de connexion anormale dans le sinus antérogauche. Quelle attitude après la découverte d’une ANOCOR ? Elle dépend de sa gravité potentielle. Pour les ANOCOR considérées bénignes, l’abstention est la règle, hors une maladie athéromateuse associée nécessitant une revascularisation. Pour les ANOCOR à risque, un traitement chirurgical doit être discuté. En l’absence d’avis européens, des recommandations nord-américaines récentes1 sont souvent assez directives (tableau 4). L’indication chirurgicale concerne principalement les ANOCOR du tronc gauche avec trajet interartériel. La technique de choix est de réaliser une anastomose latérolatérale du tronc dans le sinus gauche en créant ainsi un nouvel ostium. La dissection du tronc pour le réimplanter dans le sinus gauche est techniquement difficile avec risque supplémentaire de créer artificiellement des sténoses. Une ligature du vaisseau ectopique avec implantation d’un pontage est une autre alternative. Une réparation chirurgicale peut être proposée en cas d’ANOCOR droite avec ischémie documentée, situation où une angioplastie a été aussi proposée.  L’âge de découverte, une symptomatologie, une ischémie documentée, le territoire myocardique exposé, une maladie athéromateuse associée et une activité professionnelle avec efforts intenses vont intervenir dans la discussion de corriger ou non une ANOCOR à risque. La décision n’est pas aisée pour les ANOCOR à risque découvertes fortuitement chez des patients âgés de plus de 35 ans. Une forme bénigne, mais symptomatique, peut aussi prêter à discussion.       Comment améliorer nos connaissances La décision finale vis-à-vis d’une ANOCOR à risque reste difficile dans une population adulte souvent pauci-symptomatique. Cela tient au manque de données factuelles actuellement disponibles. La réalisation d’un registre prospectif sur les ANOCOR pourrait aider à terme les praticiens confrontés à ces anomalies. L’étude prospective et observationnelle ANOCOR, débutée en février 2010 sous l’égide du GACI a été conçue dans ce sens. Son schéma est présenté dans le tableau 5. Pour constituer une cohorte d’au moins 300 anomalies, nous sommes encore à la recherche de cardiologues interventionnels intéressés par l’étude ANOCOR.  N’hésitez pas à contacter le centre coordonnateur par l’adresse suivante : pcaubry@yahoo.fr.  

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