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Mise au point

Publié le 25 mar 2024Lecture 4 min

Quelle fréquence ventriculaire cibler en cas de FA chronique ?

David PERROT, Paris

La fibrillation atriale (FA) est l’arythmie soutenue la plus courante, avec un impact majeur pour les patients. Des études épidémiologiques ont montré une augmentation progressive de sa prévalence et de son incidence, particulièrement chez les sujets âgés, faisant de la FA un enjeu de santé publique(1). Les recherches cliniques actuelles dans ce domaine sont davantage axées sur le contrôle du rythme, notamment par ablation par cathéter, et sur la meilleure approche de dépistage pour prévenir les événements thrombo-emboliques(2). Cependant, la FA est une maladie évolutive qui, chez une large proportion des patients, glisse vers une forme permanente, nécessitant un traitement approprié pour un bon contrôle de la fréquence cardiaque. Dans quelle mesure la gestion de la fréquence cardiaque chez les patients en FA doit-elle être stricte ou indulgente ?

Contexte   L’article de Westergaard et coll.(3) apporte un éclairage quant à la fréquence cardiaque à cibler en FA, avec des critères de jugement durs : mortalité toutes causes et insuffisance cardiaque. Les auteurs fournissent les résultats d’une analyse rétrospective entre 2001 et 2015, basée sur plus de 7 000 patients issus d’un registre danois, présentant pour la première fois un électrocardiogramme (ECG) en FA ou flutter atrial, et qui ont bénéficié d’une stratégie de contrôle de la fréquence cardiaque (figure 1). Figure 1. Design de l’étude.   Les patients avaient un âge médian de 78 ans, et 54 % étaient des femmes. Au cours du suivi, 9 % des patients ont développé une insuffisance cardiaque, et 11,6 % sont décédés. Grâce à une méthode d’appariement avec d’autres bases de données, les auteurs ont pu montrer qu’une fréquence cardiaque rapide ≥ 100 bpm était indépendamment associée à un sursaut de mortalité à un an et à un sur-risque de développer une insuffisance cardiaque de novo. Les auteurs montrent une relation dose-réponse, c’est-à-dire que plus la fréquence cardiaque des patients était élevée, plus les patients étaient à risque de décès ou de développer une insuffisance cardiaque à un an de suivi (figure 2). Figure 2. Survenue d’insuffisance cardiaque (en haut) et mortalité toutes causes (en bas), en fonction de de la fréquence cardiaque en FA.   Malgré les limites de la conception de l’étude, les auteurs doivent être félicités pour ces résultats obtenus sur une large cohorte de patients en FA non sélectionnés, apportant de nouvelles informations sur un sujet débattu.   Discussion   Les preuves sur le contrôle de la fréquence dans la gestion de la FA sont clairement contradictoires, puisque les données des essais AFFIRM et RACE n’ont trouvé aucune différence sur les événements cardiovasculaires majeurs chez les patients soumis à une stratégie stricte de contrôle de la fréquence (≤ 80 bpm, dans l’essai AFFIRM) et à un contrôle indulgent de la fréquence (< 100 bpm, essai RACE)(4). Ces résultats ont ensuite été confirmés par l’essai RACE II, montrant qu’une stratégie de traitement indulgente avec contrôle de la fréquence (< 110 bpm) n’était pas inférieure à une stratégie thérapeutique stricte de contrôle de la fréquence (< 80 bpm) en termes de symptômes et de mortalité(5). La Société européenne de cardiologie traduit cela par une recommandation de classe IIa en faveur d’un contrôle indulgent de la fréquence (< 110 bpm) chez les patients en FA(6). Les auteurs soulignent le niveau de preuve limité et contradictoire des recommandations. Comme indiqué dans les recommandations actuelles, l’adaptation minutieuse du traitement de contrôle de la fréquence ne peut se limiter à l’ajout de digoxine à un bêtabloquant ou à un inhibiteur calcique bradycardisant, compte tenu du risque connu de cardiomyopathie induite par la tachycardie. En tenant compte des comorbidités du patient et de la tolérance de la tachycardie, on peut envisager l’association d’un bêtabloquant avec un bloqueur des canaux calciques, avec ou sans utilisation de digoxine, et dans certains cas l’ajout d’amiodarone. L’alternative aux médicaments pour obtenir un contrôle adéquat de la fréquence est la stratégie « Pace & Ablate », qui pourrait être une option intéressante chez des patients correctement sélectionnés, en particulier avec le développement de la stimulation des voies de conduction. Cependant, cette approche est encore exploratoire et des essais spécifiques sont en cours. Une autre considération clinique concerne les méthodes d’évaluation du contrôle de la fréquence cardiaque dans la vie quotidienne. Les avancées sur le suivi à distance des patients avec une arythmie pourraient également tirer parti des appareils connectés pour personnaliser la stratégie de contrôle de la fréquence cardiaque (figure 3)(7). Figure 3. Personnalisation de la stratégie de contrôle de la fréquence cardiaque en FA et domaines de recherche. BB : bêtabloquant ; IC ; inhibiteur calcique   CONCLUSION   • Les fréquences ventriculaires élevées (≥ 100 bpm) sous traitement, chez les patients présentant une FA à l’ECG avec stratégie de contrôle de la fréquence cardiaque, sont associées à un risque plus élevé d’apparition d’insuffisance cardiaque et de mortalité toutes causes confondues. • Les résultats de l’étude de Westergaard suggèrent de cibler un contrôle plus strict des fréquences cardiaques en FA que ce que préconisent les recommandations européennes actuelles.

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