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Focus

Publié le 29 fév 2012Lecture 6 min

La stimulation hisienne et parahisienne : concepts, technique et résultats

F. MASSIN, F. CRANSAC, T. TRI CUNG, J.-M. DAVY, J.-L. PASQUIE, unité de rythmologie et insuffisance cardiaque, Hôpital Arnaud de Villeneuve, CHU de Montpellier

La stimulation permanente apicale ventriculaire droite ayant été accusée de dégrader la fonction ventriculaire gauche, des solutions alternatives à ce mode de stimulation potentiellement délétère ont été recherchées depuis une quinzaine d’années. Ainsi sont apparus les algorithmes de préservation de la conduction intrinsèque chez les patients indemnes de troubles conductifs atrioventriculaires (AV) ou nécessitant une stimulation ventriculaire intermittente. Ceux-ci ont permis de réduire de façon très importante le pourcentage de stimulation ventriculaire droite, en comparaison avec le mode DDD standard.

Concernant les patients dépendants de la stimulation ventriculaire, d’autres sites de stimulation que l’apex ont été recherchés(1) : la stimulation biventriculaire, bien sûr, tient une place prédominante mais on peut également citer le septum interventriculaire et l’infundibulum pulmonaire, la stimulation hisienne (SH) et parahisienne (SPH). La SH transitoire à l’aide d’électrodes multipolaires a été décrite chez l’homme en 1970 par Narula(2) ; en tant que technique de stimulation cardiaque définitive, elle a été décrite pour la première fois par Deshmukh et al.(3), chez des patients en fibrillation atriale à QRS fins et avec altération de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG), retenus pour une ablation de la jonction atrioventriculaire (AV) et une stimulation cardiaque permanente. L’intérêt de ce mode de stimulation est de préserver la séquence de dépolarisation physiologique des deux ventricules en conservant une activation par les voies normales de conduction. Celui-ci s’applique donc aux patients indemnes de troubles conductifs infrahisiens (QRS fins) nécessitant une stimulation ventriculaire permanente (blocs AV à QRS fins ou ablation thérapeutique de la jonction AV). Méthode d’implantation L’implantation d’une sonde sur le faisceau de His est techniquement difficile (la cible mesure 2 mm de diamètre). Des outils spécifiques (gaine orientable) ont été développés de façon à rendre acceptables les temps de procédure : dans la première description en 2000 par Deshmukh(3), le temps d’implantation (incluant l’ablation de la jonction AV) était de 3,7 ± 1,6 heures !  En pratique, le faisceau de His est repéré à l’aide d’une électrode multipolaire avec un écart interélectrodes de 2 mm, introduite par voie fémorale. La possibilité de capture du faisceau de His est vérifiée à l’aide de cette sonde. La gaine orientable est introduite par voie sous-clavière, puis la sonde de stimulation est vissée au niveau de la partie haute du triangle de Koch, à l’endroit d’enregistrement du potentiel hisien le plus volté. Les critères électrophysiologiques permettant d’affirmer la capture hisienne sont : •  l’enregistrement par la sonde de stimulation d’un potentiel hisien bien volté ; • un intervalle stimulation-ventricule égal à ± 15 msec à l’intervalle His-ventricule (HV) ; •  une morphologie des QRS stimulés exactement identique aux QRS spontanés ; • la capture du myocarde adjacent à une amplitude de stimulation élevée : les QRS sont précédés d’un empâtement semblable à un aspect de préexcitation, cet aspect disparaissant pour des amplitudes moindres.  Les critères concernant la stimulation  parahisienne sont moins bien définis, on retrouve : • l’enregistrement d’un potentiel hisien par la sonde de stimulation ; • des QRS larges (de type stimulation septale) à faible amplitude de stimulation, affinés à des amplitudes supérieures ; • un intervalle stimulation-ventricule plus court que le HV, proche de zéro. Résultats Les temps d’implantation sont plus longs que pour la stimulation conventionnelle(3,4), de même que les temps de fluoroscopie ; aucune complication liée à cet allongement du temps de procédure n’a cependant été rapportée. Les dernières séries publiées rapportent des temps d’implantation aux alentours de 80 minutes en moyenne(5-7), parfois plus (135 ± 18 min pour Catanzariti et al.,8). Les taux de succès rapportés sont de 85 à 95 % selon les séries, avec cependant un taux non uniforme du ratio pacing hisien/pacing parahisien obtenu. Les seuils de stimulation sont d’une façon générale moins bons que ceux obtenus en stimulation conventionnelle : 2,4 ± 0,9 V pour Deshmuk et al., 2,3 ± 1 V pour Zanon et al., 4,3 ± 1,3 V pour Cantu et al.  En ce qui concerne la SPH, celle-ci donne des seuils assez bas (de l’ordre de 1,5 V) pour la capture du myocarde mais très élevés dès lors qu’on veut capturer également le faisceau de His (entre 3,5 et 5 V en moyenne selon les séries). La détection des signaux ventriculaires est également moins bonne, ce qui est moins problématique chez des patients a priori stimulodépendants auxquels s’adresse ce mode de stimulation. Par contre, il existe des cas rapportés de cross-talk atrioventriculaire, compte tenu de la position hisienne de la sonde VD, avec possibilité théorique d’inhibition de la stimulation ventriculaire. Pour éviter les problèmes de défaut de stimulation (en cas de déplacement de sonde ou d’élévation importante du seuil de stimulation sur la sonde hisienne) ou d’inhibition de la stimulation par cross-talk AV, certains auteurs mettent en place de façon systématique une sonde de secours ventriculaire droite (sur laquelle est réalisée la détection et avec un délai programmé stim His-stim VD long à 80 ms), nécessitant l’implantation d’un stimulateur biventriculaire. Enfin, il est difficile d’établir le bénéfice clinique de ce type de stimulation, compte tenu du faible nombre de patients ayant bénéficié d’une sonde hisienne et du fait qu’aucune étude randomisée en comparaison avec la stimulation conventionnelle n’a été réalisée jusqu’à présent.  Dans une étude échographique, Catanzariti et al.(8) ont démontré une supériorité de la SH en comparaison de la stimulation apicale VD en termes d’induction de désynchronisation par la stimulation : les délais interventriculaires et intraventriculaire gauche étaient très significativement plus longs dans le groupe « apex VD » que dans le groupe SH ; de même, les fuites mitrales étaient significativement plus importantes en cas de stimulation apicale VD et l’index de Tei de performance myocardique était meilleur dans le groupe SH. Deshmukh et al.(4) ont également démontré une supériorité de la SH en comparaison de la stimulation apicale en termes de durée d’exercice, de VO2max et de seuil anaérobie. Quelques écueils La stimulation hisienne souffre de plusieurs écueils : • La mise en place d’une sonde de stimulation sur le faisceau de His est une technique difficile, engendrant des temps de procédure longs, avec le risque infectieux que ceux-ci comportent. Il existe bien entendu une courbe d’apprentissage de cette technique, utilisant du matériel dédié. • Les seuils de stimulation sont souvent élevés, voire parfois inacceptables dans le cadre d’une stimulation cardiaque définitive chez des patients stimulodépendants, avec pour conséquence des changements itératifs de boîtier de stimulation. • L’oversensing potentiel des signaux atriaux dans certaines situations (passage en fibrillation atriale par exemple) et la sous-détection des signaux ventriculaires par la sonde hisienne rendent quasiment nécessaire la mise en place d’une sonde VD de sécurité. Conclusion La SH est une technique théoriquement séduisante indiquée principalement chez des patients avec troubles de conduction AV haut situés et conduction infrahisienne préservée. Elle semble supérieure à la stimulation apicale sur le plan hémodynamique, mais n’a pas été étudiée dans des études randomisées.  L’implantation d’une sonde hisienne peut être proposée comme une alternative à une stimulation biventriculaire en cas de décision d’ablation de la jonction AV associée à une resynchronisation. En effet, il existe des similitudes entre ces deux techniques : en termes d’objectif thérapeutique (maintenir la synchronisation inter et intraventriculaire), de temps de procédure et de taux de succès.

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