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Insuffisance cardiaque

Publié le 11 avr 2006Lecture 5 min

Prise en charge de l'insuffisance cardiaque : BNP, échographie ou les deux ?

D. LOGEART, hôpital Lariboisière, Paris

L’écho-Doppler cardiaque est l’examen-clé dans la prise en charge de l'insuffisance cardiaque. À la phase diagnostique et d'évaluation, l'échographie met en évidence l'existence d'un dysfonctionnement cardiaque, en précise la cause et la sévérité, et finalement, oriente la thérapeutique. L'échographie donne des informations indispensables, notamment étiologiques, que ne saurait donner le dosage des peptides natriurétiques à ce stade initial de la prise en charge. Au cours du suivi, l'échographie est souvent nécessaire pour comprendre la cause d'une aggravation et aider au choix de l’ajustement thérapeutique (resynchronisation par exemple).
À défaut d'apporter cette finesse d'analyse et donc de remplacer l'échographie, le dosage du BNP ou du Nt-pro-BNP peut être utilisé utilement dans un certain nombre de situations.

Rappelons que les taux sanguins de BNP ou de Nt-pro-BNP sont déterminés notamment par la masse ventriculaire, l'étirement pariétal ventriculaire et les taux de catécholamines, angiotensine et cytokines. Le niveau de pression de remplissage ventriculaire, déterminant de l'étirement pariétal, est ainsi un paramètre assez étroitement lié aux variations des taux de BNP dans l'insuffisance cardiaque. Le dosage du BNP a pour avantage d’être simple, moins coûteux que l'échographie, et de donner une valeur quantifiable et reproductible.   Dépistage d’une dysfonction ventriculaire asymptomatique L'avantage potentiel d'un simple dosage sanguin est évident comparativement à la relative lourdeur et au coût d'une échographie et d’une consultation spécialisée afférente. Concernant le BNP, la rentabilité reste néanmoins assez modeste. En effet, il faut s'attendre à des taux sanguins peu augmentés chez les patients asymptomatiques. La valeur diagnostique seuil devra donc être basse afin d'assurer une sensibilité correcte et d’éviter les « faux négatifs ». Donner ici des valeurs aurait peu d'intérêt car ces seuils dépendent de la question posée (par exemple, environ 55 pg/ml pour le BNP et le dépistage d'une FEVG basse). Par conséquent, la spécificité est médiocre dans ce contexte, d’où un grand nombre de « faux positifs », et la nécessité d'une échographie systématique en cas de dosage « positif ». La rentabilité de cette stratégie de dépistage (BNP ± écho) dépend de la population dépistée et des conséquences pratiques : prévalence de la pathologie (population à haut risque), risque de « faux positifs » (femmes âgées, insuffisance rénale, autres comorbidités, etc.), possibilité ou non d'une thérapeutique préventive au décours. Par exemple, le dépistage d'une hypertrophie VG chez l'hypertendu au moyen de ce dosage a probablement peu d'intérêt alors que celui d'une FEVG basse dans une population à haut risque mérite plus de considération.   Aide au diagnostic d'insuffisance cardiaque chez un patient symptomatique L'utilité du dosage est ici clairement pertinente et a été retenue dans l'algorithme diagnostique des recommandations de l'ESC depuis 2001. Chez un patient symptomatique et dont l'examen clinique n'emporte pas la conviction, un taux de BNP < 100 pg/ml ou de Nt-pro-BNP < 300 pg/ml rend le diagnostic d'insuffisance cardiaque très improbable. Ensuite, la probabilité d'une insuffisance cardiaque augmente avec l'augmentation du taux de BNP (figure 1). Figure 1. Élévation progressive du taux de BNP au cours de l'histoire naturelle de l'insuffisance cardiaque et schématisation de son utilisation comme biomarqueur. Ce n'est qu'au-delà de 400 pg/ml pour le BNP ou 1 200 pg/ml pour le Nt-pro-BNP que le diagnostic d'insuffisance cardiaque devient très probable sur la seule foi de ce dosage. Entre ces valeurs seuils, l'aide diagnostique du dosage est médiocre en raison du grand nombre de « faux positifs » : femme âgée, insuffisance rénale, cœur pulmonaire chronique ou aigu, sepsis… Enfin, si le taux de peptides natriurétiques est augmenté, une échographie est nécessaire pour confirmer et préciser la cardiopathie sous-jacente, du moins si celle-ci n'avait pas été documentée récemment. Une utilisation intéressante serait le diagnostic d’insuffisance cardiaque diastolique, en l’utilisant cette fois en complément de l’échographie. En effet, ce diagnostic requiert la mise en évidence échographique d’une dysfonction diastolique, notamment une élévation des pressions de remplissage qui traduit une dysfonction sévère, dont on connaît les imprécisions chez nombre de patients (arythmie, échogénicité médiocre, prothèse valvulaire, critères Doppler discordants…) ; dans ces cas douteux, l’existence d’un taux de BNP/Nt-pro-BNP augmenté est un argument fort pour affirmer ou conforter le diagnostic.   Stratification pronostique Le taux sanguin de peptides natriurétiques est un indicateur très puissant du pronostic de l'insuffisance cardiaque, qu'elle soit chronique ou aiguë. Conséquence de ses mécanismes de sécrétion, le taux de BNP englobe, en effet, l'information pronostique liée au remodelage VG (degré d'hypertrophie, dilatation), à la dysfonction notamment diastolique, à l'éventuel retentissement sur le cœur droit et à la stimulation neurohormonale. Dans la littérature, cela se traduit par une supériorité du BNP à n'importe quel paramètre échographique isolé. Les valeurs seuils sont variables selon le contexte. Par exemple, un taux de BNP > 300-350 pg/ml semble identifier des patients à haut risque (décès/réadmission) dans le cadre d'une insuffisance cardiaque chronique NYHA 2-3 ou au décours immédiat d'une décompensation. Malgré cette supériorité statistique du dosage du BNP, l'échographie est bien sûr indispensable quand il s'agit de repérer les patients à inscrire sur une liste de transplantation par exemple; c'est l'échographie, et non pas le BNP, qui peut mettre en évidence une fuite mitrale ou un asynchronisme à tenter de corriger avant une HTAP sévère, etc (figure 2). Notons au passage l'importance d'autres examens tels que le test d'effort dans ce contexte. Figure 2. Effondrement de la FEVG. En revanche, le dosage du BNP pourrait apporter un plus dans le suivi rapproché des patients en raison de sa simplicité, de sa fiabilité et de cette information pronostique simple et robuste. Ce pourrait être le cas lors du monitorage d'une décompensation ou du suivi ambulatoire en incitant à une thérapeutique plus intensive chez des patients semblant cliniquement stables mais dont le taux de BNP reste très augmenté. La fréquence des prélèvements sanguins et les valeurs seuils restent à déterminer. Les résultats de plusieurs études sont attendus pour valider ou non cette stratégie. Dans le même registre, l'utilisation du taux de BNP comme critère de substitution dans l'évaluation d'essais thérapeutiques, comparativement aux critères cliniques usuels, telle la mortalité, est tentante (suivi plus court et cohorte moins importante) mais n'est pas validée. D'ailleurs, l'échographie et ses différents critères ne donnent pas non plus de critères de substitution (FEVG…) très solides.   Au total L’échographie est l’examen-clé dans le diagnostic d’insuffisance cardiaque dont il permet de préciser le mécanisme. Son intérêt est également déterminant chez le patient asymptomatique. Le dosage du BNP est simple et son utilisation, notamment dans le suivi, sera certainement croissante dans les années à venir.

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