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Coronaires

Publié le 10 oct 2006Lecture 18 min

Les traitements des syndromes coronaires aigus

S. WEBER, hôpital Cochin, Paris

L’utilisation largement répandue ces dernières années du concept de « syndrome coronaire aigu » (SCA) représente, comme bien souvent, un côté médaille et un côté revers. Le côté médaille est qu’il met en avant l’unicité physiopathologique d’un phénomène unique : la rupture de la plaque coronaire compliquée de thrombose. Le revers est qu’il accorde un rôle trop central à l’électrocardiogramme (le centre de l’univers devenant le segment ST !). Il est ainsi générateur de quelques confusions faisant par exemple oublier à nos étudiants que l’angor instable est généralement le précurseur de l’infarctus (notion parfaitement rendue par l’appellation « syndrome de menace ») ; il amène aussi à mettre, dans le même fourre-tout des syndromes coronaires aigus sans sus-décalage de ST, des patients très hétérogènes, de pronostic très différents et nécessitant donc des prises en charge également différentes.

Nous allons envisager successivement au sein des syndromes coronaires aigus, les angors instables puis les infarctus myocardiques sans oublier ce qui unit ces deux entités : la rupture de plaque compliquée de thrombose.   L’angor instable De ce fait deux catégories de traitement occupent les deux premières marches du podium : les modificateurs de l’hémostase et l’angioplastie « d’urgence ». Autant l’angioplastie coronaire est très certainement sur-utilisée chez le coronarien chronique, notamment chez les patients peu ou pas symptomatiques, autant elle trouve toutes ses lettres de noblesse dans la prise en charge des syndromes coronaire aigus, ce qui correspond aussi bien à une logique physiopathologique si l’on s’attarde quelques instants sur la coupe histologique d’une plaque d’athérome coronaire rompu qu’aux résultats des essais thérapeutiques contrôlés. Les effets de l’angioplastie coronaire sur la survie sont manifestes et de grande ampleur à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde ; le bénéfice est moins spectaculaire dans l’angor instable tout simplement parce que la gravité intrinsèque de cette entité pathologique est moindre ; néanmoins, c’est le plus souvent l’angioplastie coronaire d’urgence qui apporte la solution thérapeutique la plus efficace tant en ce qui concerne la réduction de la mortalité et de la morbidité que la simplification de la prise en charge, notamment le raccourcissement des durées d’hospitalisation. Pour ne pas s’encombrer de soucis de classification très variable au fil des ans, selon les modes du moment, seront envisagés le traitement de toutes les formes cliniques de maladie coronaire exposant à un risque significatif d’évolution rapide vers l’infarctus du myocarde ou la mort subite.   Les modificateurs de l’hémostase Ils représentent l’essentiel du traitement médicamenteux ; l’écrasante majorité des angors instables sont la conséquence d’une rupture de plaque compliquée de thrombose elle-même responsable d’une subocclusion et/ou d’épisodes d’occlusion intermittente de l’artère coronaire concernée. Le maniement des modificateurs de l’hémostase représente l’un des soucis majeurs des générations d’internes se succédant dans le service, généralement vers la fin de leur formation cardiologique et très soucieux de connaître le sacro-saint « protocole », auquel notre équipe adhère (à un instant t donné) et qu’il perçoivent comme pouvant être sur le fond, très différent d’une équipe à l’autre… Dans le cadre de ce « banc d’essai », il paraît possible de considérablement simplifier le problème ! Quatre classes médicamenteuses Plusieurs catégories de modificateurs de l’hémostase ont fait la preuve de leur efficacité dans le traitement de l’angor instable : l’aspirine, le clopidogrel, l’héparine et les antagonistes spécifiques des récepteurs IIb/IIIa. Ces quatre classes de modificateurs de l’hémostase ont fait individuellement la preuve de leur efficacité en essais contrôlés contre placebo. La plupart des combinaisons ont été étudiées et il n’existe aucune incompatibilité de type pharmacocinétique ou pharmacodynamique entre ces quatre classes d’antithrombotiques. De surcroît, les doses efficaces ont été bien définies. Le rapport bénéfice/risque De façon volontairement simpliste on peut considérer que plus on additionne les molécules, du moins en utilisant ces quatre classes pharmacologiques, plus l’effet antithrombotique est puissant et le risque hémorragique élevé. L’important n’est donc plus, sauf en recherche clinique, de chercher à tout prix à s’accrocher à tel ou tel « protocole » rigide mais d’essayer de raisonner intelligemment le cas particulier de chacun de nos malades en mettant d’un côté de la balance la sévérité du syndrome coronaire aigu et de l’autre le risque hémorragique individuel encouru compte tenu du terrain de chaque patient. Savoir quand les associer Les critères de gravité du syndrome coronaire amenant à « additionner » les antithrombotiques sont : • la sévérité du tableau clinique, notamment sa réponse ou non au traitement antiischémique ; • l’existence de complications de type rythmique ou hémodynamique ; • la sévérité des signes électrocardiographiques : l’amplitude des modifications du segment ST ou de l’onde T, l’étendue du territoire myocardique concernée, le caractère permanent ou intermittent des signes électriques ; • l’existence de signes de souffrance cellulaire myocardique, au mieux appréciée maintenant par les dosages de troponine. Attention à l’âge du patient Les déterminants du risque hémorragique individuel de chaque patient qui sont identiques à ceux que nous prenons en compte avant la prescription d’un traitement anticoagulant ou thrombolytique. Rappelons l’importance, parfois sous-estimée, de l’âge, sans oublier qu’un âge élevé représente un surrisque hémorragique mais également un surrisque d’évolution péjorative de l’angor instable lui-même. Entrent également en ligne de compte d’éventuels antécédents cérébrovasculaires. L’élaboration de l’ordonnance d’antithrombotiques prendra également en compte la décision ou non d’effectuer à titre systématique une coronarographie. indication de plus en plus largement retenue à juste titre, de même, les résultats d’éventuelles coronarographies antérieures ainsi que l’historique de revascularisations antérieures peuvent faire considérer comme plus probable après la coronarographie, l’indication d’une angioplastie ou plus rarement d’une revascularisation chirurgicale.   En bref L’aspirine, sauf très rare contre-indication absolue réellement documentée (allergie) fait partie intégrante de la quasi-totalité des prescriptions. Le clopidogrel (débuté généralement par une dose de charge de 300 mg) a de larges indications, surtout si une coronarographie est programmée à la phase aiguë ; la seule réserve serait que les antécédents coronaires du patient rendent plus vraisemblable l’indication d’un pontage que d’une angioplastie ; mais de plus en plus d’équipes chirurgicales ne considèrent plus qu’un traitement en cours par clopidogrel représente un surrisque hémorragique peropératoire très significatif. L’héparine est, comme l’aspirine, quasi systématique à la phase aiguë, sauf allergie documentée. Les héparines de bas poids moléculaires occupent à juste titre la quasi-totalité du terrain en raison de leur maniement plus facile et de leur efficacité mieux prévisible. Les indications résiduelles de l’héparine non fractionnée se limitent aux difficultés d’utilisation des héparines de bas poids moléculaires, notamment en cas d’insuffisance rénale sévère. Les antagonistes des récepteurs IIb/IIIa, utilisables par voie intraveineuse, ont surtout fait la preuve de leur efficacité en encadrement de la cardiologie interventionnelle à la phase aiguë de l’angor instable avec réduction du risque de thrombose aiguë coronaire pendant et au décours immédiat d’un geste d’angioplastie avec implantation d’un stent. Il n’y a pas d’élément décisif de littérature permettant de donner préférence à un anticorps monoclonal (Réopro) par rapport aux molécules synthétiques (Intégrilin ou Aggrastat). S’il faut absolument proposer une « recette », celle-ci comporterait : • l’association aspirine + HBPM pour les formes à bas risque sur les paramètres cliniques et/ou les formes à risque intermédiaire chez les patients porteurs d’un surrisque hémorragique. • l’association aspirine + clopidogrel + HBPM pour les « gros bataillons » de patients présentant un angor instable sans paramètre de gravité particulier, sans surrisque hémorragique et chez lesquels sera pratiquée une coronarographie rapide. L’adjonction à ce type de traitement d’une 4e molécule sous forme d’un anti-GP IIb/IIIa est justifiée chez les patients sans surrisque hémorragique bénéficiant d’une coronarographie à la phase aiguë d’un angor instable avec signe de gravité clinique ou électrique ou biologique.   Les antiischémiques Le traitement antiischémique a fait l’objet de moins d’innovations récentes que le traitement antithrombotique mais il reste le deuxième versant incontournable du traitement médicamenteux de l’angor instable. Les bêtabloquants devraient être de prescription systématique et immédiate sauf contre-indication réellement authentifiée et insurmontable. Ils réduisent la fréquence des récurrences ischémiques, la fréquence et la gravité d’une éventuelle évolution vers l’infarctus du myocarde et participent au contrôle des troubles du rythme ventriculaires d’origine ischémique. Toutes les molécules de cette classe pharmacologique sont efficaces. Sauf très rares exceptions, l’administration par voie orale est suffisante ; il n’est nullement nécessaire de rajouter un énième perfuseur électrique chez un malade qui, souvent, en bénéficie déjà de plusieurs. Des posologies modérées de l’ordre par exemple de 100 mg pour l’aténolol ou le métoprolol sont généralement suffisantes dans ce contexte. La trinitrine administrée par voie intraveineuse a été probablement quelque peu délaissée ces dernières années, les équipes cardiologiques s’étant plus focalisées sur les antithrombotiques et la cardiologie interventionnelle. Cet appoint pharmacologique n’est pas indispensable dans les angors instables sans critère de gravité et ne récidivant pas sous traitement. Dans tous les autres cas, la trinitrine intraveineuse est indiquée car susceptible d’améliorer la perfusion coronaire par vasodilatation directe et la balance énergétique du myocarde par réduction des besoins. L’utilisation de faibles posologies initiales met à l’abri d’une vasodilatation excessive avec chute tensionnelle et/ou d’une réaction vagale paradoxale. Ces posologies de démarrage volontairement faibles nécessitent presque toujours un réajustement à la hausse facilité par la très brève demi-vie d’élimination de la trinitrine ; les ajustements posologiques sont possibles toutes les 20 minutes. Autant les bêtabloquants, traitement de la phase aiguë, doivent être prolongés sur le long terme, autant les dérivés nitrés ne représentent le plus souvent qu’une thérapeutique « momentanée ». Un relais per os n’est indiqué que dans une minorité de situations. La place des anticalciques est plus modeste dans l’angor instable ; les anticalciques bradycardisants sont indiqués en l’absence de dysfonction gauche lorsqu’il existe une contre-indication aux bêtabloquants. Les anticalciques dihydropyridiniques sont indiqués dans deux situations particulières : - lorsqu’il existe un élément vasospastique prédominant ou significatif ; - en coprescription avec les bêtabloquants lorsqu’il existe une hypertension artérielle préoccupante.   Les indications de revascularisation Ce domaine a fait l’objet de nombreux essais thérapeutiques contrôlés comparant généralement une stratégie de coronarographie systématique d’emblée, assortie de revascularisation chaque fois que techniquement possible, et une stratégie conservatrice ne réservant la coronarographie éventuellement suivie de revascularisation qu’aux patients présentant des signes de grande gravité immédiate et/ou souffrant d’une récurrence ou d’une persistance de l’ischémie malgré le traitement médical. Les résultats de cette littérature sont hétérogènes à la fois dans le temps et dans l’espace… En effet, les premiers essais publiés ont été quelque peu hypothéqués par une incidence élevée de complications d’angioplastie liée, d’une part, à un encadrement pharmacologique, notamment antithrombotique, insuffisant et, d’autre part, dans ce contexte « historique » au faible débit et à l’expérience insuffisante de bon nombre des centres investigateurs. Dans les études les plus récentes, le risque iatrogène de la coronarographie et de la revascularisation d’urgence est devenu beaucoup plus faible, ce qui fait pencher, dans la majorité des études, vers l’approche « invasive ». Dans le groupe invasif, s’il n’y a pas de gain spectaculaire de mortalité dans une pathologie où la mortalité hospitalière et celle des six premiers mois, est devenue très basse ; il y a presque toujours un gain de morbidité ainsi qu’une diminution importante des durées d’hospitalisation au profit des patients ayant bénéficié d’une coronarographie dans les premières heures ou du moins dans les 48 premières heures de leur admission. Soulignons enfin, que ces études, par souci de simplicité, prévoyaient dans le groupe « invasif » que soient dilatées toutes les sténoses coronaires « coupables » jugées techniquement accessibles, quelles que soient la gravité du tableau clinique et l’importance du territoire vasculaire concerné. Dans la vraie vie, il est tout à fait possible et raisonnable – et c’est ce que nous pratiquons – d’effectuer systématiquement la coronarographie précocement sauf contre-indication liée à une trop importante comorbidité. En revanche, une fois la coronarographie effectuée, il faut savoir n’envisager la revascularisation que dans les situations où le rapport bénéfice/risque sera a priori favorable : La revascularisation ne sera indiquée que : • s’il existe des signes cliniques de gravité ; • si le territoire anatomique concerné est important ; • ou, plus rarement, lorsque l’aspect angiographique de la sténose coupable est particulièrement inquiétant. Il faut savoir résister à la tentation de dilater « inutilement » une sténose commandant un petit territoire chez un malade sans signe de gravité et notamment parfaitement stabilisé par le traitement médical. Une telle attitude raisonnée permet de concentrer le bénéfice de l’angioplastie sur les malades réellement à risque et d’optimiser ainsi la balance bénéfice/risque. Nous ne discuterons pas les indications respectives de l’angioplastie et de la chirurgie. Toutefois, si l’angioplastie se taille la part du lion, la chirurgie garde de solides indications, soit chez les patients jeunes chez lesquels on découvre dès la première coronarographie des lésions anatomiquement sévères soit à l’autre extrémité, lorsque l’angor instable représente un énième épisode chez un coronarien déjà multidilaté.   L’infarctus myocardique Le déterminant physiopathologique est le même que celui de l’angor instable : plaque rompue et thrombose endocoronaire ; la différence fondamentale est la constitution rapidement progressive de dégâts cellulaires myocardiques nécrotiques liés au caractère permanent et total de l’occlusion coronaire. Cette profonde différence aura trois conséquences : • le traitement de la phase aiguë se passe dans une ambiance de course contre la montre, la quantité de myocarde « récupérable » étant très directement proportionnelle au délai de reperfusion ; • les dégâts myocardiques se comptent dans l’angor instable en centaines de milligrammes de myocarde sans autre conséquence que de libérer un peu de troponine alors que, dans l’infarctus myocardique, ils peuvent se compter en dizaines de grammes soit plus de 100 fois plus… Les conséquences notamment hémodynamiques en sont autrement sérieuses et menaçantes ; • de ce fait, le traitement comporte, en plus de celui de l’angor instable, des molécules à visée cardioprotectrice et éventuellement contribuant à rétablir l’équilibre hémodynamique.   Les thérapeutiques des premières minutes Les thérapeutiques des premières minutes, préhospitalières, voire prémédicales n’occupent qu’une place limitée dans la littérature cardiologique, qu’il s’agisse de recherche ou d’enseignement alors même que c’est à ce moment-là que tout ce joue. Rappelons que l’essentiel de la mortalité de la phase aiguë de l’infarctus du myocarde est une mortalité préhospitalière ; il s’agit même de l’écrasante majorité si l’on considère que la plupart des 30 000 à 40 000 morts subites annuelles en France sont en fait des à un infarctus « foudroyant ». En termes de service rendu, la qualité de la gestion des premières minutes est très certainement beaucoup plus importante que les subtilités de choix des associations antithrombotiques, des modèles de stents, ou les légères différences au sein des principales classes pharmacologiques constituant l’ordonnance du postinfarctus qui, pourtant, suscitent d’abondants flots de littérature médicale… L’éducation du patient, et plus généralement du public, est le premier « traitement » de la phase préhospitalière puisqu’elle conditionne la rapidité de la mise en œuvre du traitement et donc la sauvegarde du pronostic vital. À cet égard, pour le primo infarctus, le système de soins français occupe une place très honorable au banc d’essai international : les numéros d’appel SAMU et/ou Pompiers sont bien connus ; les circuits de prise en charge préhospitalière sont généralement courts et bien organisés. Le palmarès est paradoxalement moins brillant en ce qui concerne les récidives d’infarctus chez le coronarien connu. L’utilisation de la trinitrine et surtout ses limites n’ont pas toujours été bien enseignées, pouvant entraîner des retards de recours au système de soin. L’utilisation chez le coronarien « chronique » de circuits de prise en charge spécifique, parfois complexes et souvent source de retard n’est malheureusement pas exceptionnel. • Ce banc d’essai doit comprendre, en toute première ligne, les traitements de la douleur. La morphine injectée par voie sous-cutanée (5 à 10 mg de chlorhydrate de morphine) afin de ne pas se couper d’une éventuelle indication de thrombolyse ; l’utilisation de la voie intraveineuse en bolus fractionné est parfois souhaitable une fois que la médicalisation préhospitalière à été organisée. Les analgésiques non morphiniques sont rarement efficaces sur une douleur d’infarctus. • L’aspirine doit être administrée à posologie antiplaquettaire (sans dépasser 500 mg par voie orale) ; à cette posologie elle n’a aucun effet analgésique. • Enfin, l’héparine, quelle que soit sa modalité d’administration (fractionnée ou non, intraveineuse ou sous-cutanée), est un excellent antithrombotique mais n’est pas un analgésique… L’administration de doses successives d’une héparine à visée analgésique est donc inutile et dangereuse. La non-prescription d’un analgésique morphinique chez un patient souffrant d’une douleur intense d’infarctus (comme la grande majorité des infarctus) constitue une double faute : • négligence de la prestation minimale, qui est l’allègement de la souffrance, et perte de chance de survie : la douleur est, en effet, susceptible d’aggraver les conséquences de la nécrose en raison de l’hypertonie sympathique réflexe (hypertension, tachycardie) ou, à l’inverse, de l’exacerbation de l’hypertonie vagale (hypotension pouvant aller jusqu’au collapsus). • Les anxiolytiques sont quelquefois utiles en thérapeutique d’accompagnement ; ils ne présentent pas une alternative aux analgésiques morphiniques et ne doivent pas être utilisés à posologie trop élevée. La collaboration et la compréhension du patient et donc sa lucidité sont cruciales de même que sa réceptivité aux premiers messages de prévention secondaire, notamment concernant l’éradication du tabac. En cas d’hypertonie vagale, fréquente lors des nécroses inférieures, l’administration d’atropine par voie sous-cutanée (0,5 à 1 mg) est nécessaire permettant le contrôle d’une bradycardie, d’une hypotension voire d’un trouble conductif.   Le choix de la technique de reperfusion Cet item ayant fait l’objet d’innombrables controverses est devenu (presque) consensuel pour peu que l’on analyse les données disponibles avec un minimum de bon sens et de sérénité. Les thrombolytiques obtiennent une reperfusion efficace dans environ deux tiers des cas dans un délai de 60 à 90 min après l’injection intraveineuse. Le risque de complication hémorragique grave est très variable selon le terrain (âge, comorbidité). Chez le sujet de moins de 70 ans sans comorbidité, le risque d’hémorragie mortelle ou laissant des séquelles très invalidantes (hémorragie cérébrale) est probablement légèrement inférieur à 1 %. Le traitement thrombolytique est décidé en préhospitalier sur des arguments cliniques et électrocardiographiques ; pour une équipe d’urgence préhospitalière bien entraînée, le risque de faux positif (administration d’un thrombolytique à ce qui n’est pas un infarctus) ne dépasse pas quelques pourcents. Il est établi que les thrombolytiques de génie génétique sont, en matière de rapport bénéfice/risque, significativement supérieurs à la streptokinase. En revanche, il n’y a pas de différence décisive entre les diverses molécules « génétiques » actuellement disponibles. L’angioplastie primaire. La reperfusion mécanique par angioplastie primaire est efficace dans plus de 90 % des cas ; elle n’est appliquée qu’avec une certitude diagnostique quasi absolue ; elle permet un traitement de la thrombose ainsi que de la lésion athéromateuse sous-jacente. La coronarographie permet d’évaluer l’existence de sténoses significatives sur les troncs coronaires non concernés par l’infarctus, mais il n’y a, sauf cas particulier, pas d’indication à traiter en phase aiguë d’autres artères que celle de la nécrose, ce bilan lésionnel étant cependant précieux pour envisager chez certains patients dans un deuxième temps un complément de revascularisation. Le délai moyen entre l’arrivée de l’ambulance du SAMU à l’hôpital et l’ouverture effective de l’artère et donc la restauration d’un flux coronaire normal est de 60 min, notablement moins long dans certains centres très orientés sur l’urgence coronaire. L’angioplastie primaire s’accompagne quasi « automatiquement » de l’implantation d’un stent ; l’utilisation d’un stent actif à la phase aiguë de l’infarctus est sans influence sur le pronostic immédiat mais réduit le risque de récidive ischémique par resténose. Le traitement antithrombotique d’accompagnement comporte, pour la thrombolyse comme pour l’angioplastie, la prescription d’aspirine. Pour la thrombolyse, l’administration d’une héparine est souvent pratiquée avec cependant des modalités différentes d’une équipe à l’autre (coprescription avec la thrombolyse ou relais de la thrombolyse). En ce qui concerne l’angioplastie primaire, elle est « encadrée » par la prescription de clopidogrel, d’héparine de bas poids moléculaire et, chez certains patients à risque, de la perfusion, parfois dès la phase préhospitalière, d’un anti-GPIIb/IIIa. Tout comme pour l’angor instable, plutôt que de rechercher le protocole « miracle », variable d’une équipe à l’autre, il suffit d’user d’un minimum de jugement. « L’empilement » des modificateurs de l’hémostase augmente l’efficacité antithrombotique mais augmente le risque hémorragique. La balance bénéfice/risque doit donc être jugée au cas par cas.   Que choisir ? Rappelons les chiffres clés : deux tiers de succès pour la thrombolyse, plus de 90 % pour l’angioplastie, 60 à 90 min de délai de reperfusion après injection intraveineuse d’un thrombolytique, 60 min de délai entre l’arrivée du camion du SAMU et la restauration du flux coronaire. La confrontation de toutes ces données permet de proposer le schéma suivant : • angioplastie primaire non précédée de thrombolyse chaque fois que le temps d’acheminement du malade vers un centre spécialisé est < 45 min ; • thrombolyse dans tous les autres cas ; • réalisation la plus rapide possible d’une coronarographie lorsque l’option thrombolyse a été retenue afin de pouvoir corriger un éventuel échec de thrombolyse par une angioplastie de sauvetage ; • en revanche, la pratique de « l’angioplastie facilitée » comportant l’administration systématique d’un thrombolytique, même si le délai d’acheminement est court, n’est pas validée. Cette attitude thérapeutique est en fait moins performante que l’angioplastie primaire car elle ajoute le risque hémorragique spécifique des thrombolytiques sans réellement améliorer les résultats de la thrombolyse. Bien entendu, cette « motion de synthèse » peut connaître des exceptions notamment en raison de considérations matérielles : difficulté « d’extraction » d’un patient d’un domicile difficile d’accès ; indisponibilité temporaire d’une salle de cathétérisme. Une parfaite concertation entre les équipes préhospitalières et les équipes cardiologiques, donnant priorité au pragmatisme sur le dogmatisme, reste la clé d’une performance optimale.   Les autres traitements de la phase aiguë En dehors des antithrombotiques dont les modalités d’administration pendant l’hospitalisation varient selon le type de revascularisation choisie, le traitement comporte : - un bêtabloquant administré très précocement, sauf contre-indication patente : trouble conductif fréquent à la phase aiguë d’une nécrose inférieure ou une défaillance ventriculaire gauche. Toutes les molécules bêtabloquantes cardiosélectives peuvent être utilisées ; l’administration préhospitalière de bêtabloquants et/ou l’utilisation de la voie intraveineuse n’ont que des indications marginales ; - les inhibiteurs de l’enzyme de conversion sont formellement indiqués, en dehors d’une instabilité hémodynamique initiale, lorsqu’il existe une dysfonction ventriculaire gauche significative (fraction d’éjection < 40 %) et/ou des signes cliniques congestifs. En raison du délai de dissipation des phénomènes de sidération myocardique, d’une part, et d’hypercinésie compensatrice des segments non nécrosés, d’autre part, une évaluation pertinente de la fonction ventriculaire gauche doit être reportée au 4e-5e jour avant la sortie du patient. La prescription précoce de statine n’obtient, certes, pas une stabilisation miraculeuse et instantanée des plaques d’athéromes. Toutefois, elle a le mérite de « sacraliser » cette classe pharmacologique pour laquelle certains patients ou certaines familles gardent une suspicion injustifiée. En matière d’IEC comme de statines, le bénéfice thérapeutique est lié à un effet de classe et il n’y a aucune raison de privilégier une molécule particulière. L’ordonnance du postinfarctus comporte donc obligatoirement : • de l’aspirine à posologie antiagrégante, • un bêtabloquant sauf contre-indication absolue, • une statine, • du clopidogrel en cas d’angioplastie primaire avec implantation d’un stent, éventualité de plus en plus fréquente, • assez souvent, un inhibiteur de l’enzyme de conversion, cette prescription n’étant cependant pas indispensable s’il s’agit d’un infarctus peu étendu chez un patient non diabétique. Enfin, ce banc d’essai ne serait être complet si l’on n’y inclut pas : la prescription d’un dérivé nitré sublingual assorti : • d’une explication (et réexplication) du mode d’emploi ; • l’explication des modalités de la surveillance cardiologique ultérieure et, le « mode d’emploi » pouvant être variable selon les circonstances, du recours au « système de soin » en cas de récidive douloureuse.

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