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Insuffisance cardiaque

Publié le 27 nov 2007Lecture 7 min

Les nouveaux types d'assistance circulatoire : une alternative à la transplantation ?

P.-Y. LITZLER, hôpital Charles Nicolle, Rouen


Les Journées de l'insuffisance cardiaque
La transplantation cardiaque, même si elle reste le meilleur traitement de l’insuffisance cardiaque terminale, est de plus en plus entravée dans sa réalisation du fait du manque chronique d’organes, de l’augmentation du nombre potentiel de receveurs et de la présence fréquente de contre-indications. La disponibilité de nouveaux types d’assistance circulatoire de longue durée, légers, silencieux, sans vibrations, permettant d’obtenir une qualité de vie satisfaisante, peut faire envisager une nouvelle stratégie dans la gestion de l’insuffisance cardiaque avancée.

Les machines disponibles Ces systèmes ont la particularité, par rapport à la génération précédente de pompes pulsatiles, de produire, par conception, un flux continu. Cependant, en fonction de la récupération de la fonction ventriculaire gauche, le flux obtenu à la sortie de la pompe présentera un aspect plus ou moins pulsatile du fait de la transmission du flux liée à la contraction ventriculaire. Ces nouveaux systèmes se répartissent en deux grandes familles d’assistance circulatoire : les pompes axiales et les pompes centrifuges. Les pompes axiales Elles sont également appelées pompes de deuxième génération par opposition à la première génération de pompes électriques mono-ventriculaires gauches pulsatiles, comme le Novacor® ou le HeartMate I®. Ces systèmes sont représentés, entre autres, par : • le HeartMate II® de Thoratec, plus de 1000 implantations ; • le DeBakey® de MicroMed, plus de 200 implantations ; • le Jarvik 2000® de Jarvik Heart, plus de 200 implantations ; • l’Incor® de Berlin Heart. Ces pompes rotatives axiales sont composées d’un rotor actionné par la force électromotrice générée par le moteur. La rotation du rotor fournit la force motrice nécessaire pour propulser le sang dans l’axe de la pompe, depuis le ventricule gauche jusqu’à l’aorte (figure 1). Le débit obtenu dépend de la vitesse de rotation du rotor ainsi que de l’écart de pression entre l’entrée et la sortie de la pompe. Figure 1. Pompe axiale à flux continu HeartMate II® (Thoratec). Les pompes centrifuges Elles sont appelées pompes de troisième génération et sont représentées, entre autres, par : • le VentrAssist® de Ventracor, plus de 200 implantations ; • le DuraHeart® de Terumo Heart. Ces pompes centrifuges sont composées d’une roue à aubes qui tourne en lévitation magnétique et qui propulse le sang du centre de la pompe vers l’extérieur (figure 2). Elles ont l’avantage théorique de ne présenter aucune zone de frottement mécanique. Comme pour les pompes axiales, le débit dépend de la vitesse de rotation et de l’écart de pression entre l’entrée et la sortie de la pompe. Figure 2. Pompe centrifuge à flux continu VentrAssist® (Ventracor). Une mise en œuvre et une surveillance simples L’implantation chirurgicale nécessite la création d’une poche, le plus souvent derrière le muscle grand droit, pour loger la pompe. Cette pompe relie, au moyen de canules, la pointe du ventricule gauche à l’aorte ascendante ou descendante (Jarvik 2000®). L’alimentation électrique du moteur se fait le plus souvent au moyen d’un câble électrique qui traverse la peau du patient et qui est relié à un boîtier de contrôle alimenté par deux batteries (figure 3). Le seul réglage possible de ces pompes est celui de la vitesse de rotation de la pompe. Cette vitesse de rotation est optimisée en fonction de l’échographie cardiaque. Une vitesse trop faible entraîne une décharge insuffisante du ventricule gauche. Une vitesse trop importante entraîne un phénomène de succion du ventricule gauche avec un effet délétère immédiat sur l’hémodynamique. Figure 3. Pompe axiale (HeartMate II®) reliée électriquement par un câble traversant la peau, à un boîtier de contrôle alimenté par deux batteries. Ces systèmes nécessitent la prise d’antivitamines K au long cours, associée ou non à la prise concomitante d’aspirine. L’objectif d’INR se situe entre 2 et 3. Contrairement aux pompes de première génération, la fibrillation ventriculaire est très mal supportée par ce type d’assistance. Il semble donc nécessaire d’implanter un défibrillateur selon les mêmes indications qu’un patient non assisté. En effet, la décharge ventriculaire gauche ne semble pas diminuer les risques de troubles du rythme ventriculaire.   Pour quels patients ? Ces pompes à flux continu sont utilisées dans deux indications majeures : comme étape vers la transplantation ou comme implantation définitive lorsque la transplantation n'est pas envisageable ou refusée par le patient. L’expérience aidant, leur potentiel d’implantation semble progresser. Compte tenu des multiples avantages (autonomie du patient, fiabilité, etc.) par rapport aux systèmes pulsatiles, on recherche plutôt leurs contre-indications « formelles », qui sont : • les chocs hémodynamiques sévères avec retentissement hépato-rénal ; • l'insuffisance ventriculaire droite « majeure » ; • les contre-indications à la prise d’anticoagulants ; • l'hypertension artérielle pulmonaire fixée ne semble plus être une contre-indication absolue(1), mais des études complémentaires et une grande prudence restent nécessaires dans ces indications limites. Ces contre-indications ont cependant des limites floues et chaque malade se présente le plus souvent comme un cas particulier qui nécessite un avis multidisciplinaire. L’évaluation de la fonction ventriculaire droite par échographie reste un élément essentiel de cette décision.   Résultats Les résultats des implantations de ces systèmes sont souvent rapportés sur de petites séries et à court terme. Par ailleurs, la plupart de ces implantations ont pour indication d’être un pont à la transplantation et il est souvent difficile d’analyser la survie au long cours des patients sous assistance. Néanmoins, pour le HeartMate II®, Thoratec, Miller et al. ont rapporté un taux de survie actuariel sous assistance à 6 mois de 75 % et à 1 an de 68%(2). Ces chiffres sont à comparer à ceux de l’étude REMATCH (Randomized Evaluation of Mechanical Assistance for the Treatment of Congestive Heart Failure) utilisant une assistance monoventriculaire gauche électrique pulsatile en implantation définitive. Cette étude rapportait un taux de survie à 1 an sous assistance de 53,5 % et sous traitement médical optimal de 26,5 %(3). Les progrès réalisés sont dus à la fois à une meilleure sélection et prise en charge des patients, mais également à une augmentation des performances de ces systèmes. La durabilité attendue (de 10 ans pour certains systèmes) devrait encore creuser l’écart pour des durées d’assistance plus longues. L’analyse des résultats pour les implantations en pont à la transplantation retrouve des taux de survie à 1 an entre 75 et 85 %(2,4,5). Enfin, quelques cas de récupération avec sevrage de la pompe ont été décrits dans la littérature(2,6). Les complications de ces systèmes dans la publication de Miller et al. sur le HeartMate II®(2) sont dominées par : • les reprises chirurgicales pour saignement avec un taux de 0,78 par patient-année ; • les infections de la ligne électrique d’alimentation traversant la peau avec un taux de 0,37 par patient-année ; • les complications neurologiques emboliques avec un taux de 0,19 par patient-année ; • les complications neurologiques non emboliques avec un taux de 0,26 par patient-année. Il est important de noter que ces taux sont en nette diminution par rapport à ceux qui sont observés avec les anciennes pompes électriques pulsatiles.   La vie sous assistance Toutes les études montrent, au travers des questionnaires de qualité de vie, une très nette amélioration de cette dernière(2,4). Ces pompes vont faciliter la reprise rapide de l’autonomie du patient et permettre un retour à domicile avec, parfois, une reprise de l’activité professionnelle. Une campagne d’information vis-à-vis de la médecine du travail est probablement indispensable pour faciliter ce retour à une vie professionnelle car le plus difficile est souvent de convaincre l’employeur de sa faisabilité. Les qualités intrinsèques de ces systèmes ne dispensent pas pour autant de négliger un important travail de rééducation et de réadaptation cardiaque. Toute amélioration de la fonction ventriculaire aura pour effet de faciliter le travail de la pompe et donc de diminuer son usure et d’augmenter l’autonomie des batteries. Actuellement la durée d’utilisation des batteries est d’environ 4 heures. L’amélioration de celles-ci peut faire espérer une autonomie de 8 heures d’ici 6 à 8 mois. La nuit ou lors d’une activité sédentaire, le patient a la possibilité de se connecter directement sur le secteur. Dans notre expérience personnelle et à la lecture de différentes publications, un certain nombre de patients implantés en pont à la transplantation ne désirent plus avoir recours à la greffe. La qualité de vie obtenue et l’accès à la connaissance des complications de la transplantation, facilité par Internet, semblent orienter ce choix, même si la durabilité à très long terme de ces systèmes n’est encore que théorique.   Une nouvelle gestion de la transplantation ? Compte tenu des résultats très encourageants obtenus et si ces données sont confirmées dans l’avenir, on pourra envisager une nouvelle stratégie de la transplantation. La majorité des patients seraient dirigés d’emblée vers ce type d’assistance circulatoire, la transplantation étant réservée aux contre-indications et aux complications (médicales ou sociales) de l’assistance. La distinction entre implantation définitive et pont à la transplantation ne se ferait que secondairement. Il est évident que les données sont encore insuffisantes, à ce jour, pour envisager une telle évolution. Mais, compte tenu de l’augmentation des besoins et de la pénurie de greffon, il est probable que cette stratégie s’impose rapidement.   En pratique   L’utilisation des nouveaux types d’assistances circulatoires électriques à flux continu permet d’obtenir une qualité de vie au long cours satisfaisante. Ces systèmes permettent également, pour la première fois, d’envisager une alternative de longue durée pour les patients présentant une contre-indication à la transplantation. Si ces résultats favorables étaient confirmés dans l’avenir, il faudrait probablement envisager une nouvelle stratégie dans l’utilisation des greffons cardiaques.

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