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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 08 nov 2005Lecture 8 min

Le syndrome de Wolff-Parkinson-White asymptomatique : une exploration est-elle nécessaire à tout âge ?

B. BREMBILLA-PERROT, CHU de BRABOIS, Vandœuvre-les-Nancy

Le syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW) est l’une des rares affections cardiovasculaires à risque de mort subite susceptible de bénéficier d’un traitement curatif par l’ablation par radiofréquence du faisceau accessoire. Le dépistage de l’affection et l’identification des sujets à risque de mort subite apparaissent donc essentiels et ce, d’autant que les sujets n’ont généralement pas d’autres maladies associées.

Histoire naturelle du syndrome de WPW Elle est relativement bien connue. Présent chez 0,1 % des nourrissons, l’aspect de WPW disparaît dans 50 % des cas après 1 an de suivi. Lorsque le WPW est dépisté après l’âge de 5 ans, la possibilité de régression spontanée devient plus faible puisque l’aspect ECG reste invariable dans 78 % des cas après un suivi moyen de 7 ans. Toutefois, les données électrophysiologiques évoluent.   Évolution naturelle du WPW - Avant 1 an : régression spontanée 50 % - Prévalence dans la population : 1/1 000 - Sujet asymptomatique dépisté en médecine préventive : risque de mort subite 1 à 2 % (0,02 %/patient/an) - Sujet asymptomatique exploré, ayant une forme potentiellement maligne : risque de 7 % La présence d’un faisceau de Kent expose à la survenue de deux tachycardies : - la plus fréquente est la tachycardie par rythme réciproque qui caractérise généralement les formes symptomatiques de l’affection. Elle survient dans 43 à 90 % des cas, l’incidence de 90 % étant surestimée, car évaluée chez des populations recrutées en milieu hospitalier, donc symptomatiques ; - la moins fréquente est la fibrillation auriculaire ou la tachycardie atriale qui concerne 10 % des patients, mais cette tachycardie peut faire la gravité de l’affection lorsque le sujet a un faisceau de Kent à période réfractaire effective courte ou à conduction rapide. La fibrillation auriculaire est alors conduite en 1/1 aux ventricules et peut dégénérer en fibrillation ventriculaire et donc entraîner une mort subite (figure 1). Ce risque est particulièrement connu chez le sportif où la mort subite inaugurale a été rapportée plusieurs fois, car ce sujet est soumis à une influence catécholergique maximale, qui facilite la survenue d’un trouble du rythme et améliore la conduction dans le faisceau de Kent. Figure 1. Forme maligne de WPW (fibrillation auriculaire rapide) dégénérant en fibrillation ventriculaire. En dehors de ces sujets, le pronostic du WPW est beaucoup plus discuté suivant le type de population étudiée et son mode de recrutement : • s’il s’agit du suivi d’une population pédiatrique avec parfois une cardiopathie congénitale associée, le risque de survenue d’un événement grave peut atteindre 5 à 10 % des cas ; • s’il s’agit d’une population tout-venant dépistée en médecine préventive, le risque de mort subite apparaît beaucoup plus faible (de l’ordre de 1 %). Le problème est que cet événement grave peut survenir chez un sujet symptomatique ayant uniquement des tachycardies par rythme réciproque mais également, dans la moitié des cas, chez un sujet totalement asymptomatique jusqu’alors, avec une incidence similaire. De plus, si la mort subite inaugurale a surtout été rapportée chez de jeunes sportifs, des troubles du rythme graves syncopaux, voire mortels, ont été également signalés chez des sujets parfois très âgés (entre 70 et 80 ans). Des formes très graves ont également été signalées très précocement chez de jeunes enfants entre 6 jours et 12 ans, mais de façon exceptionnelle, et surtout chez des enfants ayant une cardiopathie congénitale associée.   Caractéristiques des sujets ressuscités d'une mort attribuée à un WPW - Asymptomatique avant l’accident : 50 % - Facteur catécholergique au moment de l’accident : sport+++, stress, période postopératoire, fièvre… - Forme potentiellement « maligne à l’exploration électrophysiologique ».   Identifier les sujets exposés à un risque de mort subite est facile dans le WPW - Ni la localisation du faisceau de Kent par l’ECG de surface, ni le caractère intermittent ou non du WPW ne sont des facteurs prédictifs. La disparition brutale de l’aspect de préexcitation ventriculaire à l’épreuve d’effort est un élément en faveur de la bénignité de l’affection, mais cela est rarement observé ou l’examen est peu interprétable, car la conduction s’améliore généralement dans les voies normales de conduction au cours de l’examen. La préexcitation devient donc moins marquée et il est difficile d’affirmer formellement un changement brutal de morphologie du tracé. - L’étude électrophysiologique est donc l’examen de référence. On sait, en effet, que les sujets récupérés de mort subite ont tous les caractéristiques suivantes : une période effective du faisceau de Kent courte à l’état de base ou sous influence adrénergique (isuprel ou épreuve d’effort) < 240 ms à l’état de base, < 220 ms à l’effort, < 200 ms sous isuprel) et, par ailleurs, on déclenche une fibrillation auriculaire avec conduction rapide dans ce faisceau de Kent.   Caractéristiques électrophysiologiques des formes potentiellement graves - Période réfractaire effective du faisceau de Kent < 240 ms base, < 220 ms à l’effort, < 200 ms sous Isuprel® - Induction d’une fibrillation auriculaire avec cycle RR conduit par le faisceau de Kent < 250 ms à l’état de base, < 220 ms à l’effort ou sous Isuprel® Pappone et al. retiennent plus récemment la période réfractaire effective courte associée au déclenchement d’une fibrillation auriculaire ou d’une tachycardie par rythme réciproque pour qualifier une forme potentiellement grave. Si, il y a 15 ans, les études systématiques réalisées chez des sujets asymptomatiques n’ont pas permis de montrer que les patients avec une forme identifiée comme potentiellement grave avaient effectivement un risque de mort subite augmenté, la série plus récente de Pappone (2003-2004) semble le démontrer avec la survenue de deux décès (dont un ressuscité) chez 27 sujets ayant une forme potentiellement grave et non traités. L’exploration par voie endocavitaire n’est néanmoins elle-même pas dénuée de risques car il s’agit d’une méthode invasive. Il faut certainement lui préférer l’évaluation par voie transœsophagienne, l’avantage de cette technique étant son caractère non invasif et sa réalisation en consultation. Son inconvénient est qu’elle est parfois désagréablement ressentie par le sujet. Dans notre expérience, elle est rarement réalisable sans prémédication avant l’âge de 10 ans. Lorsqu’elle est déclenchée chez un enfant, il apparaît souvent à l’interrogatoire que cet enfant a déjà présenté de telles tachycardies, mais ne s’en est jamais plaint ; l’enfant est donc considéré comme asymptomatique. L’induction d’une fibrillation auriculaire (20 à 30 %) et la découverte d’une forme potentiellement maligne (10 à 15 %) sont aussi fréquentes que chez le sujet symptomatique. Le reste des sujets a une forme bénigne et peut être autorisé à pratiquer du sport.   L’âge du sujet influe-t-il sur ces résultats ? Les études ont montré qu’il n’y a pas de différence significative dans le risque de trouver une forme potentiellement grave en fonction de l’âge du sujet. Le risque d’induction d’une fibrillation auriculaire augmente de 20 à 30 % entre 10 et 70 ans, mais parallèlement, la période réfractaire du faisceau de Kent tend à s’allonger modérément et, au total, l’association période réfractaire courte et induction d’une fibrillation auriculaire se retrouve avec une même incidence à tous les âges de la vie c’est-à-dire chez environ 20 % des sujets (figure 2). Figure 2. Nombre de troubles du rythme dépistés selon les tranches d’âge. TRP : tachycardie réciproque paroxystique ; FA : fibrillation auriculaire ; F maligne : fibrillation auriculaire maligne. Indications de l’étude électro-physiologique chez le sujet asymptomatique L’événement clinique grave survient généralement sous l’influence du stress ou de l’effort. Ce facteur conditionne souvent l’indication de l’exploration du syndrome de WPW asymptomatique. Par ailleurs, il faut que ces études soient fiables, facilement réalisables et sans risques pour le sujet. En pratique, l’exploration se fait généralement à partir de l’âge de 10 ans. C’est à partir de cet âge que les ECG peuvent être faits de façon systématique pour entrer dans un club de sport ou envisager une classe sport étude. Avant 10 ans, le risque de fibrillation auriculaire est minime et l’évaluation requiert une sédation et donc une hospitalisation. Elle ne s’envisagera que si l’enfant a une cardiopathie associée qui majore le risque de survenue d’une fibrillation auriculaire. Les indications d’étude électrophysiologique par voie transœsophagienne doivent être très larges, de l’âge de 10 ans jusqu’à l’âge d’environ 40 ans, période durant laquelle les sujets ont des activités sportives dans le cadre de leur cursus scolaire ou en activité de loisirs ou en club. Au-delà de 40 ans, l’étude reste impérative chez un sujet qui pratique une activité sportive. Elle doit également s’envisager dans les circonstances où il y a un risque d’influence catécholergique, comme les suites d’une chirurgie lourde. Elle reste discutée chez les autres patients. Toutefois, il n’est pas toujours facile de prévoir une situation de stress ou d’effort inhabituel. Si le sujet n’a pas de tare générale autre, s’il est en bon état général, il serait regrettable de passer à côté d’une forme potentiellement grave de l’affection. À l’heure des techniques curatives, il semble raisonnable de ne pas indiquer de limite d’âge supérieure pour l’évaluation du syndrome de Wolff-Parkinson-White asymptomatique, la seule condition étant un bon état général, l’absence de tare générale et la poursuite d’une activité physique normale. Cette attitude ne peut être recommandée que si l’étude est faite par voie transœsophagienne pour éviter toute tentation d’ablation d’un faisceau de Kent, alors qu’il n’y aurait pas de caractère de gravité de l’affection. En effet, les risques inhérents à une ablation, quoique faibles, doivent être mis en balance avec les risques, eux-mêmes faibles, d’accident subit chez le sujet asymptomatique. Indications d’exploration électrophysiologique du WPW asymptomatique en fonction de l’âge (grade A : nécessaire, grade B : recommandée, grade C : peu utile) : - Avant 10 ans : grade B en cas de cardiopathie associée (Maladie d’Ebstein), sinon grade C - 10-40 ans : grade A - 40-70 ans : pratique sportive : grade A, sinon grade B - Après 70 ans : grade C   En pratique Bien que le risque de mort subite soit faible dans le WPW asymptomatique en dehors du sport de compétition, il serait dommage de méconnaître un tel accident alors que l’étude électrophysiologique par voie transœsophagienne est facile et fiable pour détecter les formes potentiellement graves de l’affection et qu’il est alors possible de proposer un traitement curatif de l’affection par ablation du faisceau accessoire « malin ». Les indications doivent être larges : dès l’âge de 10 ans et jusqu’à un âge relativement élevé si le sujet reste actif et n’a pas une autre pathologie grave.

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