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Coronaires

Publié le 03 oct 2006Lecture 11 min

Le coroscanner en pratique

X. CASTELLON, hôpital privé d’Athis-Mons

Le scanner cardiaque multicoupes permet, au niveau des artères coronaires, le diagnostic et l’évaluation des sténoses coronaires, le contrôle des pontages et des stents ainsi que l’étude des plaques molles. Au niveau du myocarde, il permet l’évaluation des séquelles d’infarctus sans onde Q et ses complications. Enfin, il visualise les maladies péricardiques et les masses intracardiaques. Les radiologues et les cardiologues trouveront ici une approche technique et pratique pour mieux réaliser les examens dans leur pratique quotidienne.

Technique d’acquisition L’imagerie non invasive des artères coronaires est devenue possible grâce aux progrès technologiques du scanner (figure 1). Les améliorations techniques permettant la visualisation des artères coronaires par scanner sont principalement : • l’acquisition hélicoïdale, permettant d’acquérir une série de coupes en une seule apnée ; • le déplacement de la table pendant la rotation du tube ; qui permet une acquisition volumique ; • la résolution spatiale est augmentée grâce aux scanners multicoupes et le temps d’acquisition de l’examen est diminué par des coupes de plus en plus fines infra-millimétriques ; • la vitesse de rotation du tube (0,3 secondes) améliore la résolution temporelle et permet l’étude des artères coronaires (vaisseaux principaux et artères de petite taille) ; • l’acquisition couplée à l’électrocardiogramme (synchronisation cardiaque) reconstruit les images en diastole au moment où les artères coronaires sont immobiles. Figure 1. Vue craniocaudale : stent nu sur le TC et l'IVA proximale. Critères de réussite de l’examen La réussite de l’examen dépend du rythme, de la fréquence  cardiaque et de la durée d’apnée. La durée d’apnée du patient pendant l’examen est un facteur limitant, même avec les scanners de dernière génération. Pendant l’examen, le rythme cardiaque doit être sinusal et stable (l’existence d’un trouble du rythme contre-indique l’examen). Plus la fréquence cardiaque est basse, meilleure est la qualité d’acquisition et de reconstruction des images.     Risques Ils se résument essentiellement à l’injection d’iode et à l’irradiation. Cet examen impose l’injection de produits de contraste avec les risques inhérents à l’iode : principalement  allergie et néphrotoxicité. L’irradiation est plus importante qu’avec les scanners de première génération : elle est de l’ordre de 5 mSv pour un coroscanner, équivalente à celle d’une coronarographie et inférieure à celle d’une scintigraphie myocardique. Cet élément doit être pris en compte, notamment si plusieurs contrôles itératifs sont nécessaires. Enfin, l’examen doit être adapté à la corpulence des patients.   Limites La présence d’un athérome calcifié trop important dans le réseau coronaire rend impossible l’interprétation de l’examen. L’évaluation du score calcique, c’est-à-dire de la quantité d’athérome calcaire existant dans le réseau coronaire, est possible  après une acquisition sans injection de produit de contraste.   Rôle de l’opérateur à la console Il est essentiel en raison du risque de faux diagnostics, source d’examens supplémentaires inutiles, une courbe d’apprentissage est donc nécessaire et d’une durée d’analyse prolongée. La reconstruction et le traitement des images acquises se font par étapes : • sélection de différentes phases obtenue via la synchronisation cardiaque et avec le choix des meilleures phases pour chaque artère coronaire ; • reconstruction des vaisseaux coronaires à l’aide de logiciels dédiés : - MIP, - rendu de volume (VRT), - reconstruction multiplanaires (MPVR) en petit axe et grand axe ; • étude  des cavités cardiaques et du muscle cardiaque : - coupes natives, - reconstruction long axe, - reconstruction petit axe.   Déroulement  de l’examen : point par point • Informer et  rassurer le patient ; • Mettre en place les électrodes d’enregistrement pour la synchronisation cardiaque • Oxygénothérapie au masque ; • S’assurer d’une voie d’abord, de calibre suffisant (mise en place d’un cathlon 18G) ; • Faire pratiquer un exercice d’apnée reproductible avec surveillance de la fréquence cardiaque ; • Topogramme, choix du protocole d’acquisition et programmation des coupes ; • Choix des kilovolts et milli-ampères par seconde pour une irradiation minimale ; • Choix du protocole d’acquisition en fonction de la fréquence cardiaque et de la durée d’apnée possible, permettant l’utilisation de la résolution spatiale (épaisseur des coupes) et de la résolution temporelle ; • Passage sans injection de produit de contraste, analysant les calcifications pariétales des artères coronaires (score calcique) ; • Injection de produit de contraste, avec acquisition des images  dès l’arrivée du produit de contraste dans l’aorte thoracique ascendante, contrôlée par scopie (100 ml de produit de contraste, concentré à 400 mg d’iode par ml, à un débit de 4 ml par seconde,  pulsé par 30 ml de sérum physiologique à un débit de 2,5 cm3) ;  • Passage tardif à bas kilo-voltage 5 minutes après l’injection, à la recherche d’une prise de contraste tardive.   Indications À l’heure actuelle, le coroscanner est considéré comme une méthode en voie d’évaluation ; les résultats obtenus, grâce à la qualité de l’imagerie bi- et tridimensionnelle, permettent dès à présent, de le proposer dans plusieurs indications.   Recherche de maladie coronarienne chez des patients symptomatiques à risque •  Patients  symptomatiques > 40 ans avec facteurs de risques : douleur thoracique atypique, après test d’effort douteux ou non contributif, scintigraphie suspecte (paroi inférieure). La sensibilité et la spécificité de l’examen sont bonnes ; sa valeur prédictive négative est excellente : un examen normal élimine l’existence de lésions sur tout le réseau coronarien. •  Contrôle des stents : type de stent, topographie du stent (proximal de diamètre ≥ 3,5 mm), Perméabilité ou non du stent, degré de sténose intrastent (contourage de surface) (figure 2). Figure 2. Reconstruction de l'incidence de profil : stent bien visible grâce à sa structure métallique. • Contrôle de pontages : perméabilité ou non du pontage ; étude des artères mammaires restantes ; topographie du sternum en cas de décision de reprise chirurgicale. • Dépistage des lésions coronariennes dans une population à risque, si les examens paracliniques sont douteux. Tel est le cas de patients âgés > 40 ans, asymptomatiques mais ayant plusieurs facteurs de risque, ou ayant un profil particulier (syndrome métabolique, pilote de compagnie d’aviation, poste à haute responsabilité, etc.). La bonne sensibilité et spécificité de l’examen, et son excellente valeur prédictive négative (97 %) justifient son emploi dans ces indications : un examen normal élimine l’existence de lésions coronariennes proximales ou tronculaires. L’examen permet d’étudier la paroi, recherchant des plaques molles, fibreuses et calciques.   Autres indications Aide à l’angioplastie : - Elimination des fausses lésions (spasme et angulation du tronc commun) ; - Degré de sténose avec mesure luminographique ; - Lésion calcifiée ou non ; - Prévision de la topographie et de la taille du stent. Cardiopathies congénitales : - Anomalies de naissance de coronaires ; - Bicuspidie. Contrôles itératifs chez le transplanté cardiaque : - Recherche de coronaropathie dans la maladie du greffon. Bilan préchirurgical des patients valvulaires - Étude du réseau coronarien ; - Quantification par planimétrie des surfaces aortiques et mitrales.   Préparation des patients Les produits de contraste iodés sont largement utilisés en coroscanner à visée diagnostique. Si les chocs anaphylactiques sont exceptionnels, les néphropathies induites par les produits de contraste iodés sont fréquentes, d’où l’intérêt de dépister et de préparer les patients à risque (diabète, allergie, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale et myélome).   Éducation des patients à visée respiratoire Il est nécessaire d’entraîner les patients afin d’obtenir une période d’apnée (apnée reproductible) comprise entre 10 et 30 secondes (variable selon type de scanner  utilisé).   Utilisation de bêtabloquants La prémédication des patients par les bêtabloquants demande le respect absolu des contre-indications. La prescription de bêtabloquants est nécessaire si la fréquence cardiaque est > 80 bpm en débutant le traitement par une posologie faible, adaptée à la fonction rénale : par exemple, aténolol 50 à 100 mg per os, à augmenter si besoin, à débuter dès que l’indication est posée. Chez les patients sans traitement préalable, la décision d’instaurer un traitement bêtabloquant est prise lors de la consultation précédant le coroscanner ou au moment de l’examen en salle de scanner si la fréquence cardiaque est élevée (≥ 80 bpm), en ayant alors recours soit à la voie orale (50 à 100 mg d’aténolol) soit à la voie veineuse ( 5 à 10 mg d’aténolol, soit de 1 à 2 ampoules de 10 ml en  IV lente, 2 ml/min) pour abaisser le rythme cardiaque à < 65 bpm. Les bêtabloquants ne seront pas utilisés si la fréquence cardiaque spontanée est < 65 bpm, en rythme sinusal. Les patients traités de longue date par un bêtabloquant bénéficieront d’un contrôle clinique et électrocardiographique avant l’examen ; la dose sera augmentée si la fréquence cardiaque le jour de l’examen est > 80 bpm.     En cas de contre-indication aux bêtabloquants On peut utiliser le vérapamil 120 mg (antiarythmique classe 4 à effet inotrope négatif),  2 à 3 gélules/jour, de préférence au cours des repas (dose à diminuer chez le sujet âgé et l’insuffisant hépatique, soit 120 mg/jour), en débutant le traitement 3 à 4 jours avant l’examen.   Effets indésirables des produits de contraste iodé • En cas d’antécédents d’allergie légère (allergie cutanée, nausées, vomissements), une préparation antiallergique habituelle sera mise en œuvre avant l’examen. • En cas d’antécédents d’allergie grave et avérée à l’iode (œdème de quick, troubles hémodynamiques, angor, convulsions, anurie), l’injection du produit de contraste iodé est contre-indiquée. • Insuffisance rénale légère ou  modérée La néphropathie induite par les produits de contraste est fréquente. Ses manifestations sont doubles : • apparition d’une oligurie 24 à 48 h après l’examen et  persistance du néphrogramme 24 heures après l’examen ; •  augmentation de la créatininémie > 25 % dans les trois jours suivant l’injection. En général, il n’existe pas de contre-indication absolue à l’utilisation de produits de contraste iodés en cas d’insuffisance rénale, mais des précautions sont à prendre. Une consultation spécialisée en néphrologie est obligatoire chez les patients à  risque (insuffisance rénale, diabète, myélome multiple) en vue d’une bonne préparation. • Conduite à tenir chez les patients présentant un risque rénal : • Arrêt des diurétiques et des inhibiteurs de l’enzyme de conversion obligatoire  la veille de l’examen. • Prescription d’acétylcystéine (effet néphroprotecteur par  neutralisation des radicaux libres), à la dose de 1 200 mg/j (3 sachets matin et soir) la veille de l’examen et 1 200 mg le jour de l’examen (3 sachets, 2 heures avant, et 3 sachets, le soir de l’examen). • Utilisation de bêtabloquant à adapter à l’état de la fonction rénale (surveillance de la FC et de la TA). • En cas d’anémie secondaire à une insuffisance rénale chronique avec hémoglobine < 11 g, chez un patient symptomatique, le rendez-vous de coroscanner doit être reporté et une consultation de néphrologie s’impose, afin de faire une prise en charge adéquate (le patient doit recevoir un traitement à base d’érythropoïétine). • Electrophorèse des protéines des urines concentrées à la recherche  de  protéine de Bence Jones) pour éliminer une néphropathie de type myélome, qui comporterait un risque d’anurie en cas d’utilisation de produits de contraste iodé en l’absence de préparation adaptée. •  Chez les patients hémodialysés, une coopération étroite doit être développée entre l’équipe cardio-radiologique et celle d’hémodialyse. L’examen de coroscanner doit être réalisé, si possible, le même jour que la séance de dialyse, précédé d’une  prémédication adaptée. • En cas d’insuffisance rénale préterminale (clairance de la créatinine < 15), tout examen radiologique avec utilisation de produits de contraste iodé doit être évité sauf urgence vitale ; dans ce dernier cas, l’examen peut être réalisé sous réserve d’une bonne hydratation avant et après l’examen ; la quantité d’iode injectée devra être alors limitée au strict nécessaire. • Contrôle systématique de la fonction rénale 48 h à 72 h après l’examen.   Protocole d’hydratation Il faut toujours utiliser des produits de basse osmolalité. Par voie orale : 2 litres d’eau riche en sodium et bicarbonates pendant les 24 heures précédentes et les 24 heures suivant l’injection de produit de contraste (Vichy ou Saint-Yorre). Par voie parentérale : 100 ml/h de sérum salé isotonique ou de sérum bicarbonaté isotonique pendant les 12 heures précédant et les 12 heures suivant l’injection de produits de contraste iodé.   Le cas particulier des patients diabétiques Les patients diabétiques cumulent trois difficultés : le jeûne, l’insuffisance rénale et les traitements en cours (insuline, antidiabétiques oraux, metformine) : • le jeûne expose aux accidents hypoglycémiques ; • l’insuffisance rénale peut être aggravée par injection de produit de contraste ; • Le traitement en cours doit être pris en considération. La metformine est contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale. Elle peut être à l’origine d’une acidose lactique par accumulation du produit lors d’une insuffisance rénale, induite par un produit  de contraste iodé, qui survient dans les 48 heures après l’injection. Ce traitement par metformine doit être interrompu pour une durée de 48 heures après l’injection de produit de contraste. En effet, ce délai est nécessaire pour une élimination complète du principe actif non métabolisé. En revanche, il n’est plus recommandé de l’interrompre 48 heures  avant l’examen. Le traitement est réintroduit 48 après contrôle de la fonction rénale. Les patients diabétiques recevant d’autres antidiabétiques oraux ne doivent pas modifier leur traitement. Il en est de même pour l’insuline. Le jeûne est évité par une perfusion d’insuline, jusqu’à la reprise de l’alimentation. L’examen sera programmé au plus tôt et la durée du jeûne ne dépassera pas 6 heures. • Diabète associé à une insuffisance rénale Il est nécessaire de disposer d’un dosage de la créatinine plasmatique récent (< 3 mois), d’utiliser des produits de faible osmolalité et d’hydrater le patient.       En résumé   Le scanner multicoupes devient un examen incontournable en pratique clinique, avec de nombreuses indications potentielles. Les inconvénients et les limites de réalisation de l’examen doivent cependant être connus : l’irradiation délivrée, le respect de conditions idéales de réalisation, score calcique élevé, en tenant compte de l’expérience nécessaire à la réalisation et à l’interprétation d’un scanner cardiaque. Sa pratique exige un temps d’analyse à la console important et demande une courbe d’apprentissage, afin d’éliminer les faux diagnostics, source d’examens supplémentaires inutiles, qui iraient à l’encontre du but recherché. La technologie multicoupes évolue vite et pourra, dans un avenir proche, supplanter la coronarographie diagnostique, en raison de sa réalisation non invasive, de son faible coût et de sa précision diagnostique. Son essor doit être envisagé en raison du caractère souvent silencieux de la maladie coronarienne et du grand nombre de coronariens sévèrement atteints mais non diagnostiqués. L’examen devient particulièrement intéressant dans le dépistage de patients asymptomatiques à risque dont le bilan est douteux. Une prescription abusive chez les patients asymptomatiques, avec ou sans facteurs de risque, et une répétions inconsidérée de cet examen chez un même patient doit cependant être proscrite.  

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