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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 22 nov 2005Lecture 6 min

L'ablation : un traitement pour toutes les fibrillations auriculaires ?

P. JAIS, CHU de Bordeaux

L’ablation de la fibrillation auriculaire (FA) est devenue une réalité thérapeutique et occupe aujourd’hui une place significative dans l’arsenal thérapeutique dont nous disposons. Les taux de succès rapportés par différents centres de par le monde dépassent couramment les 80 %, mais cela ne doit pas faire oublier qu’il s’agit d’une procédure invasive à laquelle s’associent des complications, certes rares, mais potentiellement graves. Il est donc raisonnable de proposer cette procédure aux patients symptomatiques chez lesquels les antiarythmiques ne sont pas efficaces ou dont la tolérance est vraiment trop mauvaise.

Ablation de FA : la ou les technique(s) ? Les premiers cas d’ablation de fibrillation auriculaire par cathéter ont été rapportés en 1994. Depuis, les procédures ont considérablement évolué. Au cours des cinq dernières années, la procédure s’est véritablement démocratisée donnant lieu à de nombreuses publications, parfois contradictoires, ce qui a pu engendrer une certaine confusion. En effet, les procédures ont été cataloguées soit : • comme visant à faire disparaître les gâchettes responsables du déclenchement des crises de fibrillation (triggers), • comme visant à modifier le substrat responsable de la perpétuation de l’arythmie. Ces deux procédures sont en réalité plus proches qu’il n’y paraît. Isolation des veines pulmonaires L’isolation des veines pulmonaires permet d’isoler les foyers responsables des démarrages de FA mais a également un rôle sur le substrat responsable de la perpétuation de l’arythmie. En effet, l’isolation des veines pulmonaires en cours de FA se traduit par un allongement très significatif du cycle fibrillatoire. Par ailleurs, 75 % des fibrillations paroxystiques sont interrompues lors de l’isolation des veines pulmonaires. Enfin, plus de 50 % des patients initialement inductibles par stimulation ne le seront plus après isolation des veines pulmonaires. Il n’est donc pas raisonnable d’attribuer à cette procédure un rôle limité aux gâchettes. Cela n’est d’ailleurs pas très étonnant lorsque l’on sait que les veines pulmonaires ont des périodes réfractaires très courtes par rapport au reste du tissu auriculaire et qu’elles ont également des temps de conduction très longs. Ces caractéristiques électrophysiologiques favorisent très certainement la perpétuation de l’arythmie. L’analyse de la littérature montre que 95 % des centres ayant publié sur l’ablation de la FA pratiquent une ablation circonférentielle autour des veines pulmonaires. Les lésions sont maintenant placées par tous les auteurs en dehors des veines pulmonaires, en tissu atrial, si possible à 1 cm au moins de l’ostium. L’avantage est d’inclure dans la zone lésée la transition entre tissu auriculaire et tissu veineux qui est sans doute arythmogène. On note également que le risque de sténose des veines pulmonaires est plus faible avec cette stratégie. Si tous les centres placent les lésions à peu près au même niveau, la seule vraie différence, pour ce qui est de l’ablation des veines pulmonaires, concerne le but de la procédure. - Certains centres vérifient qu’ils ont complètement isolé les veines du reste de l’oreillette ; cela se traduit par une disparition de l’activité électrique de la veine pulmonaire ou par la présence d’une activité électrique complètement dissociée. - D’autres centres ne font pas cette vérification et gagnent donc quelques dizaines de minutes sur le temps de procédure ; cela se fait certainement au détriment du résultat car il n’y a aucune raison pour qu’une lésion imparfaite soit plus performante qu’une lésion complète. L’isolation des veines pulmonaires est suffisante chez une grande majorité de patients souffrant de FA paroxystique. Deux autres types de lésions ont été proposés en matière d’ablation de fibrillation auriculaire.   Autres lésions   Les lésions linéaires Les lésions linéaires, habituellement placées au niveau du toît de l’oreillette gauche entre les veines pulmonaires supérieures, et au niveau de l’oreillette gauche latérale, sur l’isthme mitral, entre l’anneau mitral et la veine inférieure gauche, peuvent avoir un intérêt. Elles vont réaliser un bloc complet permettant de traiter les flutters gauches que l’on observe parfois dans les suites de l’isolation des veines pulmonaires. Elles ont également une efficacité sur la fibrillation auriculaire elle-même et sont donc souvent employées en présence de fibrillation auriculaire chronique. Là encore, l’efficacité sur le cycle fibrillatoire est évidente puisque celui-ci s’allonge de manière très significative lorsque ces lésions linéaires sont délivrées en cours de fibrillation. Et là encore, des lésions complètes sont hautement désirables. Leur caractère incomplet se traduit souvent par la présence d’un flutter gauche d’une stabilité exaspérante. Malheureusement, il est parfois très difficile d’obtenir un bloc complet et cela rend le maniement de ces lésions linéaires relativement délicat. Il n’est donc pas surprenant qu’elles soient associées à un surcroît de risques, notamment de tamponnade, mais également d’accidents vasculaires cérébraux. Dans notre expérience, il reste < 1 % mais le recours aux lignes multiplie par trois ces risques lorsqu’on les compare à la simple isolation des veines pulmonaires.   L’ablation des zones fragmentées La dernière stratégie développée en matière d’ablation de FA consiste, au cours d’une cartographie de la FA, à repérer des zones ayant une activité complexe et fragmentée, au moins par instant, et à en faire l’ablation. Cette approche est actuellement développée dans un centre américain et semble donner des résultats intéressants. Notre expérience nous fait toutefois penser qu’il ne s’agit pas d’une alternative à l’isolation des veines pulmonaires. Son intérêt réside plutôt dans une association avec l’isolation des veines pulmonaires et les lésions linéaires pour traiter les fibrillations auriculaires chroniques, les plus résistantes.   Les indications - D’une manière générale, il est raisonnable de proposer une ablation de FA à un patient symptomatique malgré le traitement médicamenteux. Les symptômes peuvent être variés et, si l’on pense immédiatement aux palpitations, on oublie parfois qu’une dyspnée ou une fatigue peuvent être dues à une fibrillation auriculaire. La plupart des auteurs considèrent qu’il faut avoir constaté l’échec d’au moins un antiarythmique de membrane (classe I ou III) avant d’envisager l’ablation. Une densité minimale d’ablation paraît également nécessaire pour pouvoir justifier le geste. Un épisode tous les 15 jours semble adéquat mais il s’agit surtout d’une discussion personnalisée avec chaque patient afin d’évaluer le degré de gêne ressentie. Les taux de succès sont particulièrement élevés chez des patients jeunes qui ont des épisodes brefs et fréquents en l’absence de cardiopathie sous-jacente. On dépasse alors les 90 %. Lorsque les épisodes sont plus prolongés et notamment > 24 h, et a fortiori s’il existe une cardiopathie associée, les taux de succès sont un peu plus faibles, mais demeurent de l’ordre de 80 %. Ils sont, comme chaque fois en matière d’ablation, très dépendants de la motivation du patient et du médecin. Leur capacité à accepter le fait que plusieurs procédures sont parfois nécessaires est déterminant ; en effet, 30 % des patients souffrant de fibrillation auriculaire paroxystique auront besoin de plus d’une procédure. - La FA chronique représente toujours la forme la plus difficile à traiter. Les indications sont donc un peu plus restrictives. On attendra notamment l’échec de plusieurs traitements antiarythmiques avant de proposer le geste. Les patients les plus sévèrement atteints se présentent avec des cavités cardiaques dilatées, une fonction systolique dégradée et parfois une cardiopathie structurelle sous-jacente. C’est dans ce contexte que l’ablation de la FA comporte le plus de risques, aussi bien d’accidents vasculaires cérébraux que de tamponnade. C’est également chez ces patients-là que le bénéfice est le plus important. Dans notre expérience, la fraction d’éjection moyenne passe de 35 à 56 %. Il s’y associe bien évidemment une amélioration spectaculaire de la qualité de vie. Il reste que ce type d’indication doit faire l’objet d’une discussion approfondie avec le patient, pour qu’une fois informé des risques de la procédure, il puisse choisir en toute connaissance de cause.   En pratique L’ablation de la FA joue maintenant un rôle majeur dans la prise en charge thérapeutique des patients les plus résistants. Une altération de la fonction systolique ventriculaire gauche devrait faire rapidement considérer l’ablation d’une FA comme toujours délétère au plan hémodynamique.

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