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Insuffisance cardiaque

Publié le 13 mar 2007Lecture 9 min

L'échographie dans l'insuffisance cardiaque : la domination de la resynchronisation

S. BRETTE, hôpital du Haut-Lévêque, Pessac


Les Journées écho-Doppler cardiovasculaire de Bordeaux
La matinée consacrée à l’insuffisance cardiaque a débuté par un exposé de S. Brette (Bordeaux) sur l’adaptation du traitement médicamenteux « écho guidé ». P. Lancelotti (Liège) a souligné dans le cadre d’une myocardiopathie dilatée, l’importance de l’évaluation de l’insuffisance mitrale fonctionnelle et la conduite à tenir. G. Habib (Marseille) a rappelé l’intérêt de l’analyse échographique pour la sélection des patients à resynchroniser. Dans une suite logique, S. Lafitte (Bordeaux) a mis en évidence l’importance du suivi des patients resynchronisés. Pour clore cette session sur l’insuffisance cardiaque, T. Couffinhal et L. Labrousse (Bordeaux) nous ont fait entrevoir les perspectives d’avenir.

Échoguidage du traitement En pratique, cinq classes thérapeutiques majeures sont recommandées pour le traitement de l’insuffisance cardiaque systolique (IEC, ARA II, bêtabloquants, antagonistes de l’aldostérone et diurétiques), et leurs indications et adaptations posologiques reposent essentiellement sur la clinique (classe NYHA). Cependant, la prise en charge de nos patients peut être améliorée, par exemple, en adaptant le traitement en fonction des dosages réguliers du BNP ou encore grâce à l’échocardiographie. L’échocardiographie permet d’identifier les « patients à haut risque » en recherchant les facteurs de mauvais pronostic : dilatation VG, altération sévère de la FE, dysfonction VD, IM fonctionnelle sévère et profil mitral de type restrictif. Ensuite, l’ETT représente une aide précieuse pour adapter les médicaments. Concernant les diurétiques, en phase aiguë, l’échocardiographie est utile pour le relais diurétiques IV/per os, puis pour optimiser la dose de sortie en fonction des pressions de remplissage. Au décours de la phase aiguë, l’ETT est également utile pour ajuster la dose de diurétique en fonction des pressions de remplissage droite et gauche. Concernant les bêtabloquants, l’ETT est surtout utile pour repérer les patients les plus sévères (profil mitral restrictif irréversible) chez lesquels la mise en place et l’augmentation des bêtabloquants sera plus longue et difficile. Pour ces patients, une augmentation « écho guidée » en fonction des pressions de remplissage permettra d’améliorer la tolérance et d’obtenir les doses cibles. L’intérêt de l’ETT est de favoriser l’adaptation posologique des traitements de fonds comme les IEC ou ARA II en diminuant les diurétiques si les pressions de remplissage sont normales ou abaissées, mais aussi d’apporter des réponses en cas d’hypotension artérielle ou d’insuffisance rénale (hypovolémie ou bas débit ?). • Les objectifs de la surveillance échocardiographique sont donc : • à court terme, l’étude des pressions de remplissage : la réversibilité du profil transmitral sous traitement est un facteur de bon pronostic ; • à long terme, l’étude du remodelage VG. En effet, un remodelage inverse est un facteur de bon pronostic, contrairement à une absence de remodelage qui aggrave sévèrement le pronostic de ces patients. Le remodelage est analysé sur l’amélioration des diamètres, des volumes, de la FE, de l’IM et de l’asynchronisme. • Si l’évolution clinique et échocardiographique n’est pas satisfaisante, l’ETT permet de réévaluer la cardiopathie afin de savoir si le patient peut bénéficier d’une resynchronisation biventriculaire, d’une plastie mitrale, d’un filet de contention myocardique ou d’une greffe cardiaque.   Myocardiopathie dilatée   Recherche d’IM fonctionnelle L’insuffisance mitrale fonctionnelle est une complication fréquente de la myocardiopathie dilatée, souvent insidieuse qui survient dans un climat de déséquilibre entre « forces de traction et forces de fermeture » et qui alourdit fortement le pronostic. Plusieurs facteurs interviennent sur des valves structurellement normales : la déformation de l’appareil valvulaire mitral, le décalage temporel de l’activation des piliers, le remodelage ventriculaire gauche régional et global, le retard de la montée de pression pendant la phase de contraction isovolumique, et le gradient de pression transmitral. Dans cette forme, les seuils d’IM associés à une mauvaise évolution sont bien codifiés : surface de l’orifice régurgitant (SOR) Ž 20 mm2 et volume régurgité Ž 30 ml. La caractéristique la plus importante de cette régurgitation est son aspect dynamique. Il se définit par des changements épisodiques du degré de la régurgitation. Des variations parfois importantes de la SOR au cours du cycle cardiaque s’observent déjà au repos et peuvent être accentuées par des modifications des conditions de charge (inotrope, effort, etc.), par la présence d’une arythmie ou la survenue d’une ischémie myocardique. L’augmentation de la SOR dépend surtout de l’aggravation de la déformation de l’appareil valvulaire mitral, des modifications de la relation tridimensionnelle entre l’anneau mitral, les piliers et la désynchronisation dynamique à l’effort de la base du ventricule gauche. Le caractère dynamique de l’insuffisance mitrale à l’effort contribue, indépendamment du degré de la dysfonction ventriculaire gauche et de la sévérité de l’insuffisance mitrale de repos : - à la diminution de la tolérance à l’effort, - à l’aggravation d’une dyspnée, - et à la survenue d’une orthopnée. L’augmentation de la SOR supérieure ou égale à 13 mm2 à l’effort est le paramètre le plus prédictif de la survenue de décès, d’épisodes de décompensation cardiaque et d’événements cardiovasculaires. Aucune donnée n’est actuellement disponible dans les formes non ischémiques.   Prise en charge de l’IM fonctionnelle La prise en charge de l’IM fonctionnelle des myocardiopathies dilatées reste difficile. De nature, le traitement médical est souvent décevant. En cas de cardiopathie ischémique, la chirurgie de revascularisation isolée semble également inefficace sur l’IM. Dans cette forme, l’indication d’une correction chirurgicale de l’insuffisance mitrale doit être pesée au cas par cas et ne devrait être envisagée qu’en l’absence d’indication d’une stimulation biventriculaire. La stimulation biventriculaire est donc une approche intéressante ; elle permet de réduire à la fois la sévérité de l’insuffisance mitrale au repos et son caractère dynamique. Cette thérapeutique n’est toutefois justifiée que s’il existe un asynchronisme intraventriculaire.   Sélection des patients à resynchroniser Pour bien sélectionner les patients à resynchroniser, G. Habib (Marseille) nous rappelle que l’analyse échographique de l’asynchronisme est un examen qui doit être minutieux et multiparamétrique. Les principaux paramètres sont les suivants (figure 1) : • la recherche d’un asynchronisme atrioventriculaire est la première étape, facilement appréhendée par l’étude du flux mitral en Doppler pulsé (rapport temps de remplissage VG/intervalle RR < 40 %) ; • la recherche d’un asynchronisme interventriculaire est basée sur la comparaison des délais prééjectionnels aortique et pulmonaire. Ce paramètre, significatif si > 40 ms, présente l’avantage de sa simplicité mais l’inconvénient d’être mauvais prédicteur d’une réponse à la stimulation multisite ; • la recherche d’un asynchronisme intraventriculaire est plus complexe et fait appel à de nombreuses méthodes : - estimation visuelle, mesure du délai de contraction entre la paroi postérieure et la paroi septale en mode TM (Pitzalis), - mesure du temps prééjectionnel aortique (> 140 ms), - recherche d’une contraction diastolique de la paroi postérieure (Cazaux), - recherche d’un asynchronisme de contraction longitudinale en Doppler tissulaire myocardique, - recherche d’une contraction longitudinale retardée (Sogaard). Parmi ces méthodes, le DTI semble la méthode la plus fiable pour détecter les futurs répondeurs. Cependant, elle présente de nombreuses limitations qui seront probablement bientôt résolues par l’utilisation des nouvelles technologies échocardiographiques : strain, strain rate, tissue tracking, color kinesis, échographie tridimensionnelle, speckle tracking. Figure 1. Algorithme général d’analyse des asynchronismes. Dans l’état actuel de nos connaissances, un examen multiparamétrique est actuellement nécessaire pour faire le diagnostic d’asynchronisme intraventriculaire. Cette évaluation doit inclure des paramètres évaluant à la fois : - l’asynchronisme radial et longitudinal, - l’asynchronisme temporel et spatial. Des études multicentriques, incluant les paramètres échocardiographiques, sont en cours et les résultats nous permettront de préciser la place réelle de chacun d’entre eux pour sélectionner les patients à resynchroniser.   Importance du suivi des patients resynchronisés Avant tout, ces patients sont des insuffisants cardiaques sévères ayant bénéficié du traitement électrique multisite sur des critères de sévérité comme une fraction d’éjection et une classe fonctionnelle NYHA, malgré un traitement médical optimal. Il est donc nécessaire d’évaluer l’effet de la stimulation sur l’équilibre hémodynamique par des critères écho-Doppler simples comme les indices combinés pour les pressions de remplissage, la dP/dT comme indice de contractilité ou encore l’évaluation des pressions droites. Ces éléments doivent aider à adapter le traitement médical. Par ailleurs il y a un suivi spécifique après resynchronisation qui débute par la vérification du bon fonctionnement du stimulateur et des différentes sondes. Pour le suivi échocardiographique, la première étape, obligatoire avant le départ du patient, s’attache à optimiser le délai atrio-ventriculaire (figure 2). Ce délai n’est pas la cible initiale de la resynchronisation biventriculaire mais peut, dans certains cas, générer un conflit hémodynamique par chevauchement des phases systoliques auriculaire et ventriculaire (syndrome du pacemaker). Les enregistrements Doppler aortique et mitral permettent d’identifier et de corriger ce phénomène et d’optimiser le délai AV en quelques minutes afin d’obtenir le flux de remplissage le plus long possible sans tronquer l’onde de contraction atriale A.                                                 Figure 2. Optimisation du délai atrio-ventriculaire.                          L’optimisation du délai ventriculoventriculaire (figure 3) doit être considérée comme une option supplémentaire visant à améliorer des patients non répondeurs. Deux stratégies de réglages sont possibles : - la première vise à obtenir l’asynchronisme le moins marqué en se basant sur les outils utilisés en préresynchronisation (DTI, Tracking, 3D/4D), - la deuxième recherche le retentissement de l’optimisation sur des paramètres de fonction globale (ITV sous-aortique, dP/dt, IM…). Figure 3. Imagerie paramétrique type « bull-eye » représentative de zones myocardiques asynchrones (en rouge) obtenue à partir d’une acquisition 3D/4D – Cette approche permet également le calcul automatique des volumes ventriculaires et de la fraction d’éjection. A droite, application de ce mode d’imagerie à l’optimisation des délais VV avec déplacement des zones asynchrones vers le septum en mode biventriculaire puis optimisation de la contraction en préactivation gauche de 20 ms (LV20 ms) à l’opposé des pré-activations droites (RV20, RV40) ou gauches à 40 ms (LV40). Quelle que soit la stratégie, différents types de délais ventriculaires peuvent être programmés et testés : préactivation droite versus préactivation gauche, ce qui en fait une procédure longue, difficile et non applicable à tous les patients resynchronisés. Enfin, dans le cadre de suivi de ces patients, il faudra surveiller une aggravation d’une valvulopathie mitrale ou aortique qui pourrait à terme devenir chirurgicale.   Perspectives dans l’insuffisance cardiaque   Thérapie cellulaire Après un bref rappel sur la complexité des cellules de la moelle osseuse, T. Couffinhal a souligné que la mobilisation des cellules progénitrices endothéliales est corrélée à la survenue des événements cardiovasculaires. Il a donc rapporté les résultats de TOPCARE-AMI (Transplantation of Progenitor Cells and Regeneration Enhancement in Acute Myocardial Infarction) et BOOST (BOne MarrOw tranfer to enhance ST-elevation infarct regeneration), et fait le point sur les questions actuelles pour conclure qu’il n’y a pas de déception mais un espoir raisonné : il faut trouver la (les) cellule(s) les plus faciles à isoler et à amplifier, définir les facteurs et les conditions nécessaires à la survie dans les tissus et à leur différenciation en cellules endothéliales ou cardiomyocytes, définir le moment idéal pour l’injection, définir la voie idéale d’injection et en enfin, définir le type de bénéfice que l’on attend...   Chirurgie de l’IM dans la myocardiopathie dilatée D’après L. Labrousse, s’il apparaît séduisant de corriger l’IM dans la mesure où celle-ci est un facteur de mauvais pronostic, la place de la chirurgie est encore largement discutée car aucune étude n’a démontré un impact pronostique favorable. Le principe de la réparation est une annuloplastie restrictive de l’anneau mitral qui a pour but de diminuer la distance antérolatérale, de rapprocher les bords libres des deux valves et d’améliorer la coaptation valvulaire. Bien que les résultats soient insuffisants sur le long terme, cette chirurgie peut être réalisée au prix d’une faible mortalité opératoire et l’on peut espérer une amélioration fonctionnelle. Il souligne que l’association d’une hypercorrection de la dilatation annulaire et du traitement médical optimal permet d’obtenir une survie à 4 ans d’environ 70 %. Différents procédés ont par ailleurs été proposés pour lutter contre le remodelage ventriculaire gauche. Concernant le dispositif de contention cardiaque, il rappelle les résultats de l’étude Acorn et conclut que la combinaison d’une chirurgie de l’IM et d’un contenseur cardiaque semble, de ce contexte, apporter un bénéfice supérieur en termes de remodelage ventriculaire gauche.

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