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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 04 sep 2007Lecture 7 min

Fibrillation et flutter auriculaires : vers une prise en charge identique ?

F. ANSELME, CHU de Rouen


Le Printemps de la cardiologie
Si les interactions entre ces deux arythmies sont étroites, les stratégies thérapeutiques les concernant ont longtemps été bien distinctes. Le développement des techniques ablatives, une meilleure connaissance des risques thromboemboliques ont fait évoluer la prise en charge de ces deux arythmies, dont les objectifs thérapeutiques sont véritablement communs.

Si le mécanisme électrophysiologique qui sous-tend le flutter et la fibrillation auriculaire (FA) est un mécanisme de réentrée, il s’agit d’une macro-réentrée sur un circuit stable dans le premier cas et de multiples micro-réentrées instables dans le temps et l’espace dans le second cas. Il est bien connu depuis de nombreuses années que ces deux arythmies peuvent fréquemment cohabiter chez un même patient. Le flutter auriculaire peut dégénérer en FA en raison de la survenue d’une conduction fibrillatoire à partir d’un circuit de cycle rapide, de la disparition de zones de blocs de conduction fonctionnels qui maintenaient stable le circuit de macro-réentrée, ou bien en raison d’une perturbation du circuit par des extrasystoles auriculaires. À contrario, certains auteurs avancent que l’instauration d’un circuit de flutter ne peut se faire qu’après un passage, même très bref en FA(1).   Ralentir la cadence ventriculaire C’est l’objectif premier que ce soit pour la FA ou pour le flutter. Pour cela, les mêmes moyens médicamenteux sont utilisés, qu’ils s’agisse des bêtabloquants, des inhibiteurs calciques non dihydropyridiniques, ou encore des digitaliques. On notera toutefois qu’il est souvent plus difficile de ralentir efficacement un flutter qu’une FA.   L’anticoagulation et le risque thromboembolique Il s’agit là d’une grande évolution de ces dix à quinze dernières années. Le flutter a longtemps été considéré comme moins thrombogène que la FA. Dans une étude utilisant l’échographie transœsophagienne sur 47 patients, la présence d’un contraste spontané intraauriculaire était retrouvée dans 23 % des cas avant cardioversion de flutter, et un thrombus endocavitaire dans 2 % des cas(2). De la même manière, le risque d’accident thromboembolique a été évalué à 9 % après cardioversion de flutters qui n’avaient pas été anticoagulés au préalable. Ce risque diminuait significativement si les patients étaient correctement anticoagulés avant cardioversion(3). Au long cours, dans une métaanalyse regroupant 13 études de la littérature, le taux d’événements thrombo-emboliques chez les patients en flutter permanent non anticoagulés a été évalué autour de 3 % par an(4). Ces résultats ont conduit les sociétés savantes à préconiser la même stratégie thérapeutique concernant l’anticoagulation chez les patients souffrant de FA ou de flutter(5). Notamment, une antiocoagulation est nécessaire au moins 3 semaines avant et 1 mois après une cardioversion d’un flutter persistant (quelle que soit la méthode de cardioversion).   Convertir en rythme sinusal En dehors de la cardioversion électrique, qui est très efficace dans les deux cas, les moyens utilisés pour restaurer le rythme sinusal diffèrent. La cardioversion chimique est efficace dans environ 70 % des cas pour restaurer le rythme sinusal chez un patient en FA depuis moins de 7 jours. Les drogues utilisables sont, en France, le flécaïnide, la propafénone (recommandation de classe I) et l’amiodarone (recommandation de classe IIa). À l’inverse, pour le flutter seul l’ibutilide s’est révélé efficace, mais il n’est pas commercialisé en France. Pour le flutter uniquement, il est possible de le convertir en rythme sinusal par stimulation auriculaire rapide soit par voie transœsophagienne, soit par voie endocavitaire. Cette méthode permet le retour en rythme sinusal dans 60 % des cas environ parfois après un court passage en FA.   Maintien en rythme sinusal : prévention des récidives   Les moyens disponibles Les médicaments antiarythmiques Il n’y a pas, dans la littérature, d’études spécifiques sur l’efficacité des médicaments antiarythmiques pour la prévention de la récidive de flutter. Cependant, dans une étude récente comparant l’efficacité de l’ablation au traitement par amiodarone pour maintenir le rythme sinusal à long terme après un accès de flutter, 80 % des patients n’avaient pas fait de récidive à 1 an dans le bras médicamenteux(6). En ce qui concerne la FA, il est considéré que les médicaments antiarythmiques permettent le maintien en rythme sinusal dans environ 50 % des cas à 1 an pour les classes Ic et le sotalol, et dans 70 à 80 % des cas pour l’amiodarone. L’ablation - L’ablation par cathéter du flutter auriculaire typique qui, par définition, voit son circuit passer obligatoirement par l’isthme cavo-tricuspide est une technique sûre et efficace avec un taux faible (5 à 6 %) de récidives à long terme pour peu qu’un bloc de conduction isthmique complet et bidirectionnel ait été documenté pendant la procédure(7). En ce qui concerne les flutters atypiques pour lesquels le circuit de macroréentrée peut être localisé n’importe où dans l’oreillette droite ou gauche, les résultats de l’ablation sont moins bons que ce soit en aigu ou à long terme. Ces ablations sont parfois complexes et nécessitent alors l’utilisation de systèmes de cartographie tridimensionnelle pour faciliter la procédure et améliorer les taux de succès. - Dans le cas de la fibrillation auriculaire, l’ablation a pris depuis quelques années une place importante dans la stratégie thérapeutique. Sur le plan technique, les travaux de recherche sont encore en cours sur la méthodologie de l’ablation. Les auteurs s’accordent pourtant à dire qu’il faut probablement dans tous les cas isoler électriquement les veines pulmonaires du reste de l’oreillette. L’adjonction de lignes d’ablation, par exemple sur le toit de l’oreillette gauche ou dans l’isthme mitral (entre la veine pulmonaire inférieure gauche et l’anneau mitral), ou encore l’ablation de potentiels fragmentés de haute fréquence est à discuter en fonction du type de FA et au cas par cas. Dans les formes paroxystiques de FA, l’ablation permet le maintien en rythme sinusal à long terme, sans traitement antiarythmique dans 70 à 80 % des cas au prix parfois de deux sessions d’ablation. Pour les formes plus évoluées, persistantes ou permanentes, les résultats sont moins bons, autour de 60 % de succès au long cours.   Les stratégies thérapeutiques Dans les formes persistantes ou permanentes, les stratégies thérapeutiques du flutter et de la FA sont aujourd’hui encore bien distinctes : - en présence d’un flutter typique, l’ablation a une place de choix et peut s’envisager dès la première récidive ou bien en cas de mauvaise tolérance (recommandation de niveau I). En cas de premier épisode bien toléré, l’ablation peut également emporter la préférence du médecin et du patient compte-tenu de ses taux de succès élevés, et de son faible taux de complications et de récidives à long terme ; - à l’inverse, en cas de FA permanente, le premier choix thérapeutique sera d’anticoaguler et de ralentir. L’ablation dans cette forme de FA ne peut s’envisager qu’en cas de mauvaise tolérance clinique et/ou d’insuffisance cardiaque ; - si la FA est persistante, les recommandations préconisent comme première étape la réalisation d’une cardioversion, et ce n’est qu’en cas de récidive de FA symptomatique sous traitement antiarythmique qu’une procédure ablative peut être proposée(5). Dans le cas des flutters atypiques, l’attitude sera similaire à celle proposée pour la FA : compte-tenu des résultats de l’ablation et de la complexité de certaines procédures, l’ablation sera discutée en cas de récidives symptomatiques et d’échec d’un ou plusieurs traitements antiarythmiques. Comme pour les flutters typiques persistants, l’ablation intervient très tôt dans la stratégie thérapeutique des formes paroxystiques isolées. C’est pour les FA paroxystiques isolées que la place de l’ablation a le plus évolué ces dernières années. En effet, les nouvelles recommandations préconisent de considérer l’ablation après l’échec d’un seul traitement antiarythmique, au même niveau que l’utilisation de l’amiodarone(5).   L’association d’épisodes de FA et de flutter Comme nous l’avons vu en introduction, l’association d’épisodes de FA et de flutter se présente fréquemment en pratique clinique. Aujourd’hui, lorsque l’une des deux arythmies est prédominante, le schéma thérapeutique est celui de l’arythmie qui domine le tableau clinique. Cependant, chez les patients présentant un flutter prédominant avec des antécédents de FA, cette approche a des limites. De nombreuses études ont montré qu’après ablation de l’isthme cavotricuspide, 50 à 70 % de ces patients développent de la FA à plus ou moins longue échéance et cela, malgré le traitement antiarythmique(8). La problématique actuelle est donc de tenter de prévenir la récidive de FA après ablation du flutter typique soit par des moyens médicamenteux autres que les antiarythmiques classiques, soit par des approches ablatives combinées. Concernant les patients bénéficiant d’une ablation de FA ayant présenté des accès de flutter auriculaire typique, l’intérêt d’une ablation de l’isthme cavotricuspide systématique durant la procédure reste discuté. Dans une étude prospective randomisée comparant, dans cette population de patients, une isolation des veines pulmonaires seule ou associée à une ablation de l’isthme cavotricuspide, il n’a pas été retrouvé de différence significative dans l’incidence de flutter après ablation(9).   En pratique   La fibrillation auriculaire et le flutter sont des arythmies qui interagissent fortement, ce qui explique leur association fréquente chez un même patient. Il est maintenant bien démontré que l’attitude vis-à-vis de l’anticoagulation doit être identique pour ces deux arythmies. De par son efficacité, ses critères de succès bien établis et son innocuité, l’ablation par cathéters intervient plus rapidement dans le schéma thérapeutique du flutter. En présence des deux types d’arythmie chez un même patient, la conduite à tenir est fonction de l’arythmie prédominante. Les approches d’ablation combinée de ces deux arythmies, correspondant à une prise en charge commune, sont des voies intéressantes de recherche clinique. L’auteur n’a pas déclaré de conflit d’intérêt.

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