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Cardiologie générale

Publié le 25 oct 2005Lecture 6 min

Cœur de femme - Un plaidoyer pour une égalité de chances

M. NGUYEN

ESC

Cette année, l’ESC avait décidé de prendre comme thème principal « Women at Heart ». La présentation clinique et la prise en charge des maladies cardiovasculaires chez les femmes apparaît différente de celles des hommes comme l’objective l’état des lieux de l’étude Euro Heart Survey. Le pronostic des maladies cardiovasculaires semble plus sévère chez la femme et la prédominance de la population féminine en Europe aux âges avancés en font un problème majeur de santé publique. L’ensemble des communications concernant ce thème étaient identifiées par le logo « Women at Heart ».

On a longtemps admis, faute de preuves, que les femmes bénéficiant d’une protection hormonale, pouvaient être moins exposées aux risques cardiovasculaires que leurs partenaires masculins. Or, on s’aperçoit enfin, grâce à de grandes enquêtes internationales, qu’elles soient européennes comme Euro Heart Survey, ou mondiales comme REACH (programme portant sur une population de 63 000 hommes et femmes destiné à mieux connaître la pathologie athéromateuse, qu’on les ignorait tout bonnement. D’abord, les femmes n’osaient pas forcément se plaindre et, lorsqu’elle se plaignaient, on les examinait moins, d’où une prétendue protection !   Première cause de décès des femmes en Europe Pour I. M. Graham (Dublin) les chiffres sont désormais connus : les maladies cardiovasculaires sont, avec 44 %, la première cause de décès des femmes en Europe et de loin ; elles tuent deux fois plus que tous les cancers confondus. C’est un fait que les femmes elles-mêmes, mais aussi les professionnels de santé et, à plus forte raison, les pouvoirs publics semblent ignorer : la maladie coronaire et les accidents vasculaires cérébraux sont 10 fois plus fréquents que le cancer du sein !   Une égalité de risques… Les facteurs de risque sont les mêmes dans les deux sexes : l’âge, le tabagisme, le taux de cholestérol, l’hypertension artérielle. Alors que les femmes développent leur cardiopathie environ 10 ans plus tard que les hommes, leur pronostic est souvent plus sévère, avec un risque de décès de 42 % dans l’année qui suit l’accident, contre 24 % chez l’homme. Si la femme cumule plusieurs facteurs de risque, elle perd ce que l’on dénomme son « avantage de l’âge », et la survenue d’un diabète est particulièrement redoutable.   … mais une différence de prise en compte Les progrès diagnostiques et thérapeutiques ont permis d’améliorer le pronostic de l’homme souffrant de cardiopathie. Si les recommandations nationales et internationales ne font pas de discrimination en fonction du sexe des malades, pourquoi en est-il ainsi dans notre pratique quotidienne ? M. Lenzen (Centre Érasme, Pays-Bas) a travaillé sur les données de l’enquête Euro Heart Survey, c’est ainsi qu’elle a constaté qu’il y avait des différences dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique en fonction du sexe des patients. Il y a des différences dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique selon le sexe des patients.   Un diagnostic plus tardif Déjà, sur le plan clinique, lors du diagnostic, les femmes sont dans l’ensemble plus âgées (5 à 8 ans), et plus souvent diabétiques et hypertendues. Elles ont rarement des antécédents personnels de maladie coronaire. Lorsqu’elles sont hospitalisées pour cause (suspectée) d’insuffisance cardiaque, elles ont moins souvent que les hommes une dysfonction ventriculaire gauche : 21 contre 45 %. Ainsi, pour I. Graham, il apparaît clairement que les cœurs des femmes sont moins bien examinés et plus rarement adressés aux spécialistes pour des explorations complémentaires. On n’examine pas de la même façon le cœur de l’homme et de la femme : les épreuves d’effort sont moins souvent pratiquées chez la femme, la coronarographie est plus souvent demandée chez l’homme : 60 versus 47 % pour déterminer la présence et le degré d’obstruction artérielle, comme l’explique C. Daly (Londres).   Une symptomatologie « atypique » Pourquoi cette différence d’attitude ? La raison invoquée, est que la douleur précordiale chez la femme correspond plus rarement à une obstruction coronaire… Ce qui est en partie vrai, ajoute C. Daly, puisque dans Euro Heart Survey, 37 % des femmes qui ont eu une angiographie ne présentaient pas d’obstruction significative de leurs coronaires contre seulement 17 % des hommes !   Des prises en charge différentes Lorsque le diagnostic d’insuffisance coronaire est posé, selon I. Graham, les traitements au long cours comme l’aspirine, les bêtabloquants, les hypocholestérolémiants sont moins souvent prescrits chez les femmes ; les revascularisations sont moins souvent proposées, ce qui a pour conséquence un moins bon pronostic. En effet, lorsque des femmes diabétiques et qui sont donc à haut risque, présentent un accident vasculaire cardiaque, leur risque de mortalité est excessivement élevé : – en cas de mort subite en dehors de l’hôpital, les femmes ont moins de chances d’être ressuscitées qu’un homme ; – lorsque des femmes se plaignent de douleurs thoraciques et qu’on leur fait une angiographie des coronaires et que celles-ci sont « apparemment » normales, on a vite fait d’oublier qu’elles peuvent, elles aussi, révéler une athérosclérose sévère si on les explore avec des écho-Dopplers… Enfin, un bon suivi peut montrer qu’elles peuvent présenter des syndromes coronariens aigus comme chez l’homme, si ce n’est plus !   À égalité de risques, il faut donner une égalité des chances Ces constats ont poussé le M. Graham à mettre l’accent sur la nécessité d’alerter le public, les professionnels de santé et les pouvoirs publics sur la nécessité d’une meilleure prise en charge du cœur au féminin, mais sans discrimination. Cette non-discrimination doit commencer avec les essais cliniques Les industriels du médicament doivent veiller à inclure davantage de femmes dans les essais cliniques et ne plus les considérer comme un  « sous-groupe ». Les données épidémiologiques indiquent clairement que l’angor stable est au moins aussi fréquent chez la femme que chez l’homme, affectant 5 à 8 % des femmes adultes avec une prévalence encore plus importante dans les tranches de population les plus âgées. G. Steg (Paris), qui présentait les données du registre REACH, arrive sensiblement aux mêmes conclusions. Les femmes atteintes d’athérothrombose présentent dans l’ensemble des formes plus sévères, mais sont néanmoins moins strictement traitées : avec des traitements moins agressifs, les objectifs cibles sont plus rarement atteints, ce qui en soi peut expliquer un pronostic moins favorable. N. Murphy (Glasgow) a présenté les résultats d’une étude écossaise portant sur 110 226 premières hospitalisations pour infarctus du myocarde entre 1990 et 2000. Ceux-ci ont montré que le pronostic est bien plus sévère chez la femme que chez l’homme : – 26 % de décès à 30 jours chez la femme contre 16 % chez l’homme ; – à 5 ans, 39 % des hommes, contre 53 % des femmes étaient décédés, Ces chiffres reflètent bien une différence de prise en charge.   Quelques progrès depuis le début du siècle Il n’y a pas dans EuroHeart Survey de biais « sexistes », même si l’on y parle encore de « symptômes atypiques » pour décrire l’angor au féminin, l’atypie étant, comme le suggère C. Daly, une façon de définir la symptomatologie par rapport à ce qui a été décrit le plus souvent chez l’homme. Entre les deux études Euro Heart, en 2000, puis en 2004, dans les 32 états membres de l’ESC, on observe toujours une différence entre hommes et femmes quant à la symptomatologie et aux données ECG. On constate plus fréquemment des tachycardies chez les femmes, et plus souvent des signes d’insuffisance cardiaque, mais il existe déjà une amélioration de la prise en charge ; le diagnostic étant posé, on applique désormais les mêmes thérapeutiques…   Le programme Women at Heart La Fondation Bristol-Myers-Squibb et la Société européenne de cardiologie ont décidé de joindre leurs efforts afin d’aider les cardiologues dans la prise en charge des pathologies de leurs patientes et d’informer les femmes sur les risques cardiovasculaires dans un programme baptisé Women at Heart placé sous la présidence de S. Priori (Pavie), membre de la Société européenne de cardiologie. Ce programme comporte trois volets : - une conférence de politique scientifique ; - une campagne d’information destinée aux médecins et aux patients ; - une participation au recueil et à l’interprétation des données relatives à la pratique clinique dans le cadre de l’Euro Heart Survey.

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