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Thrombose

Publié le 16 mai 2006Lecture 7 min

Antithrombotiques en prévention de récidives des infarctus cérébraux

F. WOIMANT, hôpital Lariboisière, Paris

Le taux de récidives après un infarctus cérébral est estimé à 5 % par an. Le risque de rechutes est plus élevé dans les semaines suivant l’infarctus, et ce particulièrement en cas d’athérome carotidien sévère. À 2 ans, le taux de récidives d’IC le plus élevé concerne les infarctus cardioemboliques (22 %) puis les sténoses athéromateuses intracrâniennes (14 %). Les taux sont plus faibles pour les infarctus liés à un athérome des grosses artères (10 %) ou pour les infarctus lacunaires (11 %). Ces récidives se caractérisent par un taux de mortalité marqué et un risque de handicap sévère et de démence important.

Les essais randomisés   La prévention des récidives débute dès la phase aiguë L’aspirine est le seul antiplaquettaire étudié à la phase aiguë de l’IC. La métaanalyse des études IST (International Stroke Trial) et CAST (Chinese Acute Stroke Trial) montre une efficacité de l’aspirine prescrite aux doses de 160 et 300 mg/j dans les 48 premières heures de l’infarctus : réduction de la mortalité de 4 pour 1 000 patients traités, des décès ou dépendances de 12 %. Puis le choix du traitement antithrombotique dépend de l’étiologie de l’infarctus cérébral.   Accidents ischémiques cérébraux liés à l’athérosclérose et maladies des petites artères perforantes intracérébrales Les antiplaquettaires ont été largement étudiés en prévention secondaire des infarctus cérébraux ; ils en réduisent le risque, et plus généralement celui d’événement vasculaire (infarctus cérébral, IDM et mort vasculaire) de 25 %. Quatre antiplaquettaires se sont révélés efficaces dans les essais thérapeutiques contrôlés : • l’aspirine : l’effet s’observe pour des posologies de 50 à 1 300 mg/j ; de faibles doses sont recommandées, la gastrotoxicité étant dose-dépendante ; • la ticlopidine (500 mg), plus efficace que l’aspirine mais présentant un risque d’agranulocytose d’1 % dans les trois premiers mois ; • le clopidogrel (75 mg) diminue de 8 % par rapport à l’aspirine (325 mg) le risque global d’événement vasculaire chez des sujets ayant eu un accident ischémique cérébral, un infarctus du myocarde (IDM) ou une artériopathie des membres inférieurs ; • le dipyridamole (400 mg) en association avec l’aspirine (50 mg) a une efficacité supérieure à celle de l’aspirine seule à cette même dose. - L’étude MATCH (Management of ATherothrombosis with Clopidogrel in High risk patients) a étudié l’association aspirine + clopidogrel versus clopidogrel chez des patients ayant un antécédent ischémique cérébral et au moins un facteur de risque vasculaire. Elle n’a pas montré de diminution significative de nombre d’IDM, d’infarctus cérébral ou de décès vasculaires dans le groupe traité par association d’antiplaquettaires (15,7 versus 16,3 %), mais une augmentation des complications hémorragiques sévères. Figure. Scanner cérébral : hypodensités multiples témoignant d’accidents ischémiques répétés. - Les anticoagulants oraux ne sont pas supérieurs à l’aspirine en prévention de récidives d’infarctus cérébral liés à l’athérosclérose. Dans l’étude SPIRIT (Stroke Prevention In Reversible Ischemia Trial), les anticoagulants (avec une INR > 3) se sont montrés délétères, avec une augmentation du risque hémorragique et l’étude a été arrêtée prématurément. Dans l’étude WARSS (Warfarin Aspirin in Recurrent Stroke Study), qui visait une INR entre 1,4 et 2,5, aucune différence n’a été observée entre les groupes traités par anticoagulants et par aspirine et ce, quel que soit le sous-groupe d’infarctus cérébral : athérome, lacune ou nature indéterminée. - L’étude WASID (Warfarin-Aspirin Symptomatic Intracranial Disease study) a randomisé des patients ayant une sténose intracrânienne symptomatique évaluée entre 50-99 % pour recevoir la warfarine (INR cible : 2,0-3,0) ou de l’aspirine (1 300 mg/j). Le critère de jugement principal a été la survenue d’un infarctus cérébral, d’une hémorragie cérébrale ou d’un décès vasculaire. Après l’inclusion de 569 patients et 1,8 an de suivi, l’étude a été arrêtée en raison du nombre d’événements indésirables survenus dans le groupe warfarine : • décès (9,7 % dans le groupe warfarine versus 4,3 % dans le groupe aspirine, p = 0,02), • hémorragies majeures (8,3 % versus 3,2 % p = 0,01), • et IDM ou mort subite (7,3 % versus 2,9 % p = 0,02). Pour le critère principal de jugement, cet essai n’a pas montré de différence : 22,1 % des patients traités par aspirine et 21,8 % des patients traités par warfarine (p = 0,83). Il faut préciser que l’analyse a posteriori a montré que, lorsque l’INR était compris entre 2 et 3, les récidives d’infarctus cérébral et les complications cardiaques majeures étaient moins fréquentes dans le groupe warfarine, sans excès d’hémorragies par rapport au groupe aspirine.   Embolies cérébrales d’origine cardiaque Les études réalisées dans la fibrillation auriculaire ont montré l’efficacité des anticoagulants avec une réduction du risque de 62 % pour un INR entre 2 et 3. Le bénéfice de l’aspirine est moindre, la réduction du risque relatif n’étant que de 22 %. Les études récentes montrent que moins de 40 % des patients justifiant dans cette indication d’un traitement anticoagulant sont correctement traités. Des alternatives aux AVK sont en cours d’évaluation : oblitération de l’auricule par voie percutanée, inhibiteurs directs de la thrombine, association aspirine + clopidogrel.   Quelle attitude adopter en pratique ?   La prévention des récidives débute dès la phase aiguë de l’IC et repose sur l’aspirine Le traitement est ensuite adapté en fonction des résultats du bilan étiologique. En l’absence d’étiologie retrouvée, ce qui est le cas presque une fois sur deux chez le sujet jeune, l’aspirine est poursuivie.   En cas d’accidents ischémiques cérébraux liés à l’athérosclérose ou à la maladies des petites artères perforantes intracérébrales Le traitement associe les antiplaquettaires, la prise en charge des facteurs de risque et, chez certains patients, la chirurgie carotidienne. Le bénéfice de la chirurgie carotidienne est largement démontré pour les sténoses symptomatiques Ž 70 %, la chirurgie évitant un infarctus cérébral homolatéral pour 6 sujets opérés. Le bénéfice est plus inconstant (en particulier chez la femme et en cas d’événement qualifiant rétinien) pour les sténoses symptomatiques comprises entre 50 et 69 %, la chirurgie évitant alors un infarctus cérébral homolatéral pour 19 sujets opérés. Les sténoses < 50 % ne relèvent pas de la chirurgie. L’angioplastie carotidienne est une alternative à la chirurgie. Elle est actuellement en évaluation dans plusieurs études randomisées versus chirurgie. Aucune étude randomisée n’a été consacrée à la chirurgie ou l’angioplastie des sténoses symptomatiques dans le territoire vertébro-basilaire.   La prévention des récidives des accidents ischémiques cérébraux sur sténose athéromateuse intracrânienne Elle associe la prise en charge des facteurs de risque artériel et les antiplaquettaires. Le taux annuel de récidives d’IC ou d’accidents ischémiques transitoires atteint presque 20 % dans l’étude GESICA (Grupo de Estudio de la Sobrevida en la Insuficiencia Cardiaca en Argentina). Ces récidives sont le plus souvent précoces : 50 % surviennent durant les 2 mois suivant le premier événement, ce malgré un traitement antithrombotique adapté. Figure. Angioscanner : reconstruction 3D d’une sténose serrée de la carotide interne droite à son origine (a,b). Soustraction numérisée avec angiographie avant (c) et après (d) stenting carotidien. L’angioplastie est une autre option thérapeutique, en cours d’évaluation. Les complications neurologiques de ce geste peuvent atteindre 28 % ; il s’agit de dissections, de thrombi endoluminaux, d’occlusions d’artères perforantes lors de l’impaction de la plaque ou de rupture artérielle. La pose d’un stent réduit le risque de dissection ou de sténose après angioplastie. Les études prospectives sur le stenting intracrânien portent sur de faibles nombres de patients ; elles rapportent une morbi-mortalité périprocédurale variant de 6,6 à 14,2 %. Devant l’insuffisance des données de la littérature sur l’efficacité et la sécurité du stenting intracrânien, ces traitements ne peuvent être actuellement recommandés en pratique courante comme thérapeutique de première ligne, ils sont réservés aux patients ayant une sténose symptomatique de plus de 50 % et récidivant sous traitement médical bien conduit.   La prévention des récidives des accidents ischémiques cérébraux en rapport avec une fibrillation auriculaire idiopathique La FA est la première cause cardiaque d’embolie cérébrale. La prévention repose sur les AVK, avec un INR compris entre 2 et 3,5. Cependant, il convient de respecter les contre-indications que sont l’hypertension artérielle mal contrôlée, les troubles importants des fonctions supérieures, les troubles de la statique avec chutes et les difficultés d’un suivi clinique et biologique régulier. Est alors indiquée l’aspirine qui a également une efficacité mais plus modérée.   La prévention des récidives des accidents ischémiques cérébraux en rapport avec un athérome de l’aorte En attendant les résultats des études randomisées, l’athérome de l’aorte compliqué d’un thrombus aortique mobile est une indication au traitement anticoagulant relayé par un traitement antiplaquettaire.   En cas de foramen ovale perméable (FOP) isolé Le risque embolique est faible et le traitement proposé est l’aspirine. En cas de FOP associé à un anévrisme du septum, le risque annuel de 4 % de récidives d’infarctus cérébraux sous aspirine justifie pour certains la mise sous anticoagulant. Des études comparant fermeture percutanée du FOP versus traitement antithrombotique sont en cours.   Conclusion   La compréhension du mécanisme et de l’étiologie de l’infarctus cérébral est indispensable pour décider du meilleur traitement antithrombotique au décours de celui-ci. Les traitements anticoagulant et antiplaquettaire ne sont toutefois qu’un aspect du traitement de prévention de récidives des accidents ischémiques cérébraux. La prise en charge associe également : - la baisse de la pression artérielle, y compris chez les sujets considérés comme normotendus, - le traitement par statine en cas d’hypercholestérolémie, d’antécédent coronarien ou d’athérome des troncs supraaortiques, - le traitement du diabète, - l’arrêt de l’intoxication tabagique, - l’activité physique régulière. Une bibliographie sera adressée aux abonnés sur demande au journal.

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