Publié le 30 avr 2025Lecture 6 min
Exercice, réadaptation, sport et prévention : l’essentiel de 2024
Frédéric SCHNELL, service de médecine du sport, CHU Pontchaillou ; LTSI, INSERM, U1099, université de Rennes ; CIC 1014 INSERM, CHU-université de Rennes

L’année 2024 a été marquée par de nombreuses avancées scientifiques dans les domaines de la prévention, de la réadaptation cardiovasculaire et de la cardiologie du sport. Dans cet article, nous en explorerons les principales nouveautés, notamment l’identification de nouveaux facteurs de risque cardiovasculaires, les avancées sur l’organisation de la réadaptation, ainsi que les évolutions dans la prise en charge cardiologique des athlètes, du dépistage à la gestion de leur pratique sportive en cas de pathologie cardiovasculaire.
Au-delà des facteurs de risque traditionnels
La prévention cardiovasculaire (CV) s’est principalement concentrée sur des facteurs de risques traditionnels (HTA, diabète, hypercholestérolémie et tabagisme). Bien que ces mesures aient permis d’en réduire l’incidence, la maladie CV demeure la principale cause de mortalité dans le monde. Ainsi, il est impératif de développer une vision plus holistique en intégrant les nouveaux facteurs de risque environnementaux dans les stratégies de prévention(1). Parmi ces nouveaux facteurs de risque, une association entre l’exposition aux micro- et nano-plastiques (MNP) et l’augmentation du risque d’événements CV ont été mises en évidence(2). Malgré un ajustement sur les facteurs de risques traditionnels, les résultats indiquent que, chez les sujets opérés pour une endartériectomie, ceux qui présentaient des MNP dans leur plaque carotidienne ont présenté une hausse du risque d’accidents vasculaires cérébraux non fatals, d’infarctus du myocarde et de mortalité toutes causes confondues. Ce constat souligne l’urgence de mener des recherches plus approfondies sur la présence de ces microparticules dans notre environnement quotidien et leurs conséquences sur la santé CV. Concernant la pollution de l’air et leurs effets CV, il a été démontré que l’exposition aux particules fines (PM2.5) entraînait une augmentation des événements CV majeurs et une diminution de la survie à long terme au décours d’un pontage aortocoronarien(3). Les efforts de santé publique visant à réduire l’exposition à la pollution doivent donc être intégrés dans les stratégies de prévention des maladies CV.
Bienfaits de l’activité physique et sportive et de la lutte contre la sédentarité
La lutte contre la sédentarité est un élément de prévention essentiel dans nos sociétés modernes, l’association entre le temps passé assis et debout de manière statique, et l’incidence des maladies CV majeures ainsi que des maladies circulatoires orthostatiques a été étudiée chez plus de 80 000 adultes britanniques(4). Le fait de rester assis plus de 10 heures par jour et debout plus de 2 heures par jour était directement associé à une augmentation du risque de maladies circulatoires orthostatiques ; mais se tenir debout de manière statique seul n’était pas être une stratégie suffisante pour réduire le risque de maladies CV majeures.
Sur un suivi de 90 000 individus, il a été montré que les individus pratiquant une activité physique intense (au moins 150 minutes par semaine) concentrée sur le week-end bénéficiaient des mêmes avantages que ceux répartissant leur activité physique de manière plus homogène tout au long de la semaine(5). Les bénéfices observés incluaient une réduction significative du risque de FA, d’infarctus du myocarde, AVC et d’insuffisance cardiaque. L’étude n’a pas mis en évidence d’augmentation du taux d’accidents musculosquelettiques chez les « week-end warriors », confirmant ainsi que cette approche est une alternative viable pour les personnes ayant des emplois du temps chargés. Traditionnellement réalisée en centres spécialisés, la réadaptation cardiovasculaire connaît une transformation avec l’émergence des structures libérales légères et de la télé-réadaptation, mis en avant dans les dernières recommandations HAS sur les critères d’orientation vers la réadaptation cardiaque(6). La télé-réadaptation permet aux patients de suivre un programme structuré depuis leur domicile, en bénéficiant d’un accompagnement médical à distance. Chez les patients avec cardiopathies congénitales, cette approche améliorait l’adhésion aux programmes de réadaptation et la qualité de vie(7).
Bakker et coll.(8) se sont intéressés aux risques et bénéfices associés à la participation aux événements sportifs de masse. L’analyse des données de prêt de 550 000 participants a révélé une élévation non significative du risque de mortalité à court terme (0-7 jours) après un exercice intense (odds ratio = 1,92 ; IC à 95 % [0,95-3,85]). Toutefois, sur le long terme, les compétiteurs présentaient une réduction de 30 % du risque de mortalité (HR = 0,70 ; IC à 95 % [0,69-0,74]). Les coureurs affichaient les meilleurs taux de survie, suivis des cyclistes et des marcheurs. Ces résultats suggèrent que les risques immédiats de la pratique sportive en compétition sont très faibles et qu’elle apporte un bénéfice notable en termes de longévité à long terme.
Dépistage des pathologies cardiaques chez le sportif et gestion de leur pratique sportive après diagnostic
L’ECG est essentiel dans le dépistage des anomalies cardiologiques chez l’athlète, il est donc important d’améliorer son interprétation. Il a été montré que les QRS fragmentés en V1 étaient plus fréquents chez les athlètes avec les meilleures capacités fonctionnelles et le remodelage ventriculaire le plus important, mais n’étaient pas associés à des arythmies ventriculaires plus fréquentes(9). Chez des athlètes présentant des arythmies ventriculaires non soutenues avec une morphologie de retard droit, il a déterminé que 7 anomalies ECG étaient associées à une fibrose myocardique non ischémique ventriculaire gauche : microvoltage QRS dans les dérivations périphériques, ondes T négatives dans les dérivations inférieures, latérale (DIAVL) et V4-V6, bloc fasciculaire postérieur gauche, ondes Q pathologiques et rabotage de l’onde R en antérieur(10). Cette étude confirme donc qu’un microvoltage n’est pas habituel chez un athlète.
En 2024, la Heart Rhythm Society a publié un consensus sur l’évaluation, le traitement et la reprise sportive chez les athlètes avec des arythmies(11), ils recommandent l’évaluation dans un centre expert, une décision collégiale et partagée avec l’athlète, et la mise en place d’un plan d’action d’urgence incluant notamment l’acquisition d’un défibrillateur automatisé externe. Les recommandations concernant la prise en charge du syndrome du QT long (SQTL) sont soutenues par de nouvelles études, dont celle de Lampert R et coll.(12). Cette étude a suivi 1 413 sujets avec un SQTL, dont 90 % avec un génotype positif (49 % de SQL1) ; quasiment tous traités et dont 25 % étaient implantés d’un défibrillateur automatique. Dans cette population, dont 52 % pratiquaient le sport de manière intense et 29 % en compétition, 37 événements (parmi décès, mort subite récupérée, syncope rythmique et choc approprié) ont été observés. Le taux d’événements à 3 ans était équivalent entre les sujets pratiquant du sport de manière intense et les autres (2,6 % vs 2,7 %).
Concernant les pathologies valvulaires, le suivi sur 30 ± 17 ans de 407 patients avec bicuspidie aortique n’a pas retrouvé d’association entre l’exercice physique et l’évolution de la maladie valvulaire ou de la dilatation aortique(13), ne justifiant donc pas d’apporter des restrictions de pratique sportive aux patients avec bicuspidie aortique non compliquée.
Jansen et coll.(14) ont étudié la libération de troponine post-effort dans 3 groupes de sujets : des sujets avec un score calcique nul, avec un score calcique élevé (≥ 300 UA/ ou ≥ 75e MESA percentile) et avec une sténose coronaire significative (≥ 50 %), mais sans ischémie myocardique. Il n’a pas été retrouvé de différence sur le taux de troponine au décours d’un effort intense de plus d’une heure. Ceci nous rappelle qu’une élévation de troponine post-effort n’est pas forcément pathologique et que la découverte d’une lésion significative sur une imagerie n’implique pas la présence d’une ischémie myocardique.
EN PRATIQUE
• L’évolution des connaissances en cardiologie met en lumière de nouveaux facteurs de risque environnementaux et comportementaux.
• Les avancées en prévention et en réadaptation cardiaque permettent d’affiner les stratégies de prise en charge des patients à risque.
Liens d’intérêt en rapport avec le manuscrit : aucun.
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