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Congrès et symposiums

Publié le 31 mar 2014Lecture 5 min

Regards croisés sur le rein et le risque cardiovasculaire

M. DEKER

Depuis 2002, la maladie rénale chronique (MRC) est définie, indépendamment du type de néphropathie, par la présence d’anomalies de structure à l’échographie et la biopsie rénale, et par des marqueurs urinaires d’atteinte rénale, pendant au moins 3 mois, avec un impact sur la santé. Les critères retenus sont le ratio albumine/créatinine avec un seuil de 30 mg/g (3 mg/mmol) et le débit de filtration glomérulaire (DFG) avec un seuil de 60 ml/min. Cette définition s’accompagne d’une classification en stades basée sur le DFG et l’albuminurie. 

Épidémiologie de la MRC   Le DFG est le plus souvent estimé par une équation basée sur l’âge, le sexe, la race et le niveau de créatinine sérique mesuré par une méthode enzymatique. Il est conseillé d’utiliser plutôt l’équation CKD-EPI, plus précise que l’équation MDRD pour les débits élevés et préférable pour un diagnostic précoce. Pour les sujets ayant un DFG compris entre 45 et 59 ml/min, il est conseillé d’ajouter une évaluation de la cystatine C, en l’absence de marqueur d’atteinte rénale. Les stades pour l’albuminurie sont : normale ou modérément augmentée pour un seuil < 30 mg/g ; augmentation modérée entre 30 et 300 mg/g ; augmentation sévère pour un seuil > 300 mg/g. La prévalence de la MRC a globalement tendance à progresser et augmente avec l’avance en âge (< 5 % chez les < 30 ans ; 40- 50 % chez les > 70 ans). Chez les sujets âgés, une proportion importante présente une diminution isolée du DFG. En France, l’étude des 3 Cités a évalué la prévalence de la MRC à 28 % (7 % stades 1-2 ; 15 % stades 3) ; les femmes présentent plus souvent une MRC définie par un DFG abaissé isolé. Parmi les personnes ayant une MRC, 1 % vont présenter une insuffisance rénale terminale, si bien que toutes les autres décéderont d’une autre pathologie avant d’atteindre le stade terminal, et le plus souvent d’une maladie cardiovasculaire. La baisse du DFG est associée à une augmentation de la mortalité et des événements cardiovasculaires (risque x 3 pour un DFG entre 15 et 30 ml/min/ 60 ml/min). Les travaux d’un consortium sur la MRC ont permis d’approfondir les connaissances sur la maladie et en particulier de définir un effet de seuil d’augmentation du risque en deçà de 60 ml/min, pour la mortalité toutes causes, le risque cardiovasculaire, l’insuffisance rénale terminale et l’insuffisance rénale aiguë. Le même effet de seuil de DFG est retrouvé chez les diabétiques et les non-diabétiques ; s’y ajoute un risque supplémentaire lié à l’albuminurie avec une relation parfaitement linéaire. De plus, l’existence d’une pathologie cardiovasculaire accélère la dégradation de la fonction rénale. L’ajout des nouveaux facteurs de risque cardiovasculaire dans les équations de risque n’améliore pas la prédiction du risque d’événements cardiovasculaires chez l’insuffisant rénal. Certains arguments plaident en faveur du développement d’une artériosclérose, génératrice de rigidité artérielle et d’hypertrophie ventriculaire gauche, sous l’effet de la MRC, et d’une aggravation de l’athérosclérose.   Comment gérer le risque cardiovasculaire de l’insuffisant rénal ?   Dans la population cardiologique, 30 à 40 % des patients ont une MRC. À côté des facteurs de risque classiques associés chez ces patients (diabète, hypertension, tabagisme, dyslipidémie), d’autres facteurs de risque d’artériosclérose jouent un rôle de catalyseur de l’athérosclérose et précipitent la survenue des événements cardiovasculaires (AVC, HVG, troubles du rythme, décompensation cardio-rénale). Le dépistage cardiovasculaire est souvent difficile chez les patients avec MRC car les symptômes sont volontiers noyés dans le bruit de fond polysymptomatique de la maladie rénale et du diabète associé. En outre, la sensibilité et la spécificité des examens de dépistage sont moins bonnes qu’en population générale. La prise en charge est souvent moins aboutie en cas de maladie cardiaque avérée chez un patient avec MRC, alors qu’il mériterait un traitement plus agressif. Les facteurs de risque doivent être traités à l’instar de la population générale, notamment les dyslipidémies avec un objectif de LDL-C < 0,7 g/l, même chez des patients ayant une fonction rénale très dégradée, comme en témoignent les bénéfices mis en évidence dans l’étude SHARP avec l’association ézétimibe + simvastatine. Il existe clairement un bénéfice de l’aspirine sur le risque ischémique ; alors que le clopidogrel n’a pas montré de bénéfice net chez ces patients, les nouvelles molécules semblent efficaces (ticagrélor chez l’insuffisant rénal, prasugrel chez le diabétique). Les bêtabloquants semblent efficaces pour prévenir la mort subite et le défibrillateur est particulièrement indiqué chez les patients porteurs de MRC.   Le point de vue du diabétologue   La vision de Mogensen sur la physiopathologie de la néphropathie diabétique a évolué, notamment l’histoire naturelle voulant que la microalbuminurie précède la protéinurie, en particulier chez le diabétique de type 2 dont les lésions se développent en l’absence de micro - albuminurie. Schématiquement, l’élément responsable serait probablement une altération des protéines de la membrane basale glomérulaire, qui constitue l’interface entre l’espace sanguin et l’espace urinaire avec les podocytes. Une classification a été proposée en 2010, qui fait de la néphropathie diabétique une glomérulopathie avec plusieurs stades successifs : épaississement de la membrane basale glomérulaire ; expansion du mésangium ; sclérose glomérulaire. L’équilibre métabolique est une des façons de prévenir les complications rénales et rétiniennes du diabète, ce qui est connu depuis l’étude DCCT/EDIC, où les 7 années de bon contrôle métabolique ont permis de gagner 15 ans sur la dégradation de la fonction rénale, et a été vérifié par les études UKPDS, ACCORD, ADVANCE et VADT. La normalisation de la glycémie permet aussi de faire régresser la néphropathie diabétique, comme l’a montré le suivi de diabétiques de type 1 ayant bénéficié d’une greffe pancréatique. L’altération de la fonction rénale nécessite d’adapter la cible d’HbA1c (7 % jusqu’à un DFG de 30 ml/min, 8 % si < 30 ml/min) et les traitements chez le diabétique : - metformine : 30-60 ml/min, demi-dose ; < 30 ml/min, arrêt de la metformine ; - glinides/sulfamides : attention aux hypoglycémies en cas d’insuffisance rénale chronique ; - inhibiteurs des α-glucosidases : peu conseillés ; - I-DPP-4 : comparativement à un sulfamide, la sitagliptine occasionne deux fois moins d’hypoglycémies chez l’insuffisant rénal.   La néphropathie diabétique est un modèle de prise en charge multidisciplinaire qui en outre nécessite une modification des objectifs et des moyens thérapeutiques.   D’après B. Stengel (Villejuif), J.-G. Dillinger (Paris) et S Hadjadj (Poitiers), symposium MSD France, Forum Cardio-Diabéto, Paris, 13-14 février 2014

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