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Focus

Publié le 30 nov 2010Lecture 8 min

Le système MitraClip®

A. TIROUANZIAM, Hôpital Guillaume et René Laennec – CHU Nord, Nantes

L’insuffisance mitrale (IM) représente la deuxième cause de chirurgie valvulaire en Europe, après le remplacement valvulaire aortique pour sténose dégénérative dite de « Monckeberg ».  

L’IM peut être, en dehors d’une étiologie rhumatismale, d’origine dégénérative (par prolapsus valvulaire, élongation de (s) cordage (s), dégénérescence myxoïde), ou fonctionnelle par dilatation ventriculaire (ischémique postinfarctus, cardiomyopathie dilatée).  Les mécanismes physiopathologiques qui ont fait l’objet d’une classification par Carpentier, peuvent se combiner et conditionnent le (s) type (s) de correction à effectuer par le chirurgien en fonction du (des) site (s) de dysfonctionnement de l’appareil mitral : valvulaire (résection de prolapsus, plastie de glissement, réparation bord à bord, cordage (remplacement, transposition), muscle papillaire (repositionnement, raccourcissement), ou annulaire (annuloplastie de réduction).    Les trois buts principaux de la correction chirurgicale, la célèbre « French Correction » de Carpentier(1), sont le rétablissement d’une cinétique bivalvulaire normale, l’obtention d’un alignement bivalvulaire sur le même plan de coaptation et éventuellement la réduction du diamètre de l’anneau. La plastie mitrale correctrice, lorsqu’elle est possible, représente le traitement de choix de cette valvulopathie, ayant prouvé sa supériorité sur le remplacement valvulaire avec une mortalité opératoire de 2 à 5 %, associée à une amélioration de la survie postopératoire en cas de succès, comparable à celle de la population générale.  Toutefois, l’âge avancé des patients, la présence de facteurs de comorbidités et la dysfonction ventriculaire gauche, majorent le risque opératoire. Une approche percutanée à l’instar du TAVI (Trans-Aortic Valve Implantation) permet d’offrir une alternative chez ces patients à risque opératoire élevé.  Ces alternatives – technique dite de « bord à bord », d’annuloplastie directe ou indirecte, ou par le sinus coronaire, voire endovalve mitrale – sont actuellement en évaluation. Elles reproduisent pour la plupart les modèles chirurgicaux et sont adaptées à un usage endovasculaire et percutané (elles ne seront pas décrites ici).    Parmi les plus avancés, le système MitraClip® (Abbott Vascular, Santa Clara, Canada) a déjà fait l’objet de plusieurs études.  Il consiste à reproduire la technique d’Alfieri, en suturant bord à bord les feuillets valvulaires par la mise en place d’un clip en chrome cobalt, recouvert de polyester (ponction transseptale veineuse, désilet 24 F), afin de former un double orifice mitral, réduisant ainsi la volumineuse régurgitation initiale (figure 1). On peut espérer une diminution des volumes ventriculaires et un bénéfice associé sur le remodelage.    Figure 1. Technique dʼAlfieri : suture bord à bord des feuillets valvulaires par la mise en place du clip en chrome cobalt et formation dʼun double orifice mitral pour réduire la volumineuse régurgitation initiale. Description du système  Le système MitraClip® est un cathéter guide muni d’un clip implantable (figure 2).    Figure 2. Présentation visuelle de MitraClip®. Ce cathéter est en 24 F, à sa partie proximale et 22 F à sa partie atriale. Il est livré avec un dilatateur septal. Le clip est fixé à l’extrémité du cathéter, il est déflexible sur les plans médiolatéral et antéropostérieur de l’espace.  Le MitraClip® est un implant de 4 mm de largeur, muni de bras en chrome cobalt dont l’ouverture et la fermeture sont contrôlées à partir de la poignée du cathéter.  Durant la phase de capture, deux systèmes d’accroche sont situés à l’intérieur des bras afin de faciliter la reprise et de sécuriser les feuillets pendant la fermeture du clip. Les deux bras ainsi que les accroches sont recouverts de polyester qui favorise la croissance tissulaire et la jonction par un pont intervalvulaire (idéalement entre les segments A2 et P2), une fois implantés.  La technique d’implantation Effectuée sous anesthésie générale, fluoroscopie et guidage échocardiographique, les premières étapes de la procédure s’apparentent à celles d’une valvuloplastie mitrale.  Après ponction veineuse transseptale, le cathéter de Mullins est échangé pour le cathéter guide de 24 F et un dilatateur septal. Le MitraClip® est introduit dans le cathéter guide et avancé dans l’oreillette gauche.  Sous guidage échographique et fluoroscopique, le clip est positionné jusqu'à être aligné et centré sur l’origine du flux régurgitant.  Le clip est alors ouvert et positionné dans le ventricule gauche sous les feuillets. Il est ensuite refermé jusqu’à capture et coaptation des feuillets. L’IM résiduelle est alors évaluée par échocardiographie.  Le clip est réouvrable et repositionnable (un clip additionnel peut être également implanté) en cas de résultat jugé insatisfaisant.  Dans le cas contraire, le clip est largué, le reste du dispositif est alors retiré des cavités cardiaques.  Après implantation, un pont tissulaire se constitue entre les deux feuillets à leur portion médiane, exerçant un certain degré de traction sur la paroi postérolatérale du ventricule gauche. Critères requis pour l’implantation  Plusieurs critères anatomiques précis et préalables à la procédure sont requis pour l’implantation d’un MitraClip® :  - tout d’abord, le jet régurgitant doit siéger dans les deux tiers centraux de la zone de coaptation ;  - ensuite, la longueur de coaptation des feuillets doit être supérieure ou égale à 2 mm, avec une hauteur entre le plan de l’anneau et la zone de coaptation des feuillets inférieure à 11 mm. En cas de prolapsus d’un des feuillets, l’écart et/ou la largeur du segment prolabé ne doit pas dépasser 10 et 15 mm respectivement (figure 3).    Figure 3. La longueur de coaptation des feuillets doit être ≥ 2 mm, avec une hauteur entre le plan de lʼanneau et la zone de coaptation des feuillets < 11 mm. En cas de prolapsus dʼun des feuillets, lʼécart et/ou la largeur du segment prolabé ne doit pas dépasser 10 et 15 mm respectivement. Les études  Cette technique s’adresse aux IM type II de Carpentier par prolapsus et a été évaluée par les études EVEREST (Endovascular Valve Edge-to-Edge Repair Study). EVEREST I(2) était un registre de faisabilité incluant 55 patients dont 93 % de forme dégénérative. Le clip avait été déployé avec succès (IM post-clip ≤ à 2), dans 74 % des cas, 48 % des patients conservant une IM inférieure à 2, à 6 mois.  EVEREST II, étude toujours en cours, a randomisé 279 patients (à risque opératoire bas ou modéré), pour des IM grade 3 ou 4 en deux groupes : chirurgie (remplacement ou plastie), versus MitraClip®.  Les derniers résultats de l’étude EVEREST II(3) présentés au TCT 2010, concernant le critère primaire (taux de complications en intention de traiter) sont de 15 % à 3 mois (bras MitraClip®, n = 184 patients), versus 47,9 % (bras chirurgie, n = 95 patients) avec une valeur de p < 0,0001.  En ce qui concerne les critères composites (décès, chirurgie de conversion, IM > 2 à 12 mois), on obtient un taux de succès de 72,4 % (clip), versus 87,8 % (chirurgie).  À 12 mois, la persistance d’une IM inférieure ou égale à 2 était de 80 % (clip), versus 97 % (chirurgie).    À noter cependant, un taux similaire de réduction des volumes ventriculaires dans les deux groupes contrôlés par échocardiographie.    Le registre EVEREST haut risque(4) était destiné à des patients contre-indiqués ou jugés à haut risque opératoire, pour des formes dégénératives ou fonctionnelles d’IM. Il a inclus 79 patients plus âgés (68 % de plus de 75 ans) et plus symptomatiques (89 % en NYHA > 3), que dans l’étude randomisée.  La mortalité observée à 30 jours a été de 7,7 % alors qu’elle était estimée par le score de risque chirurgical à 18,2 %.  À 1 an, l’étude a démontré un taux de survie de 76,4 % (groupe clip), versus 54,5 % (groupe traitement médical) avec une valeur de p = 0,037. Ceci conforte l’intérêt d’une solution alternative percutanée chez des patients à haut risque opératoire. Conclusion Les résultats préliminaires concernant l’approche percutanée et la suture bord à bord par le système MitraClip® sont encourageants mais difficilement extrapolables compte tenu du faible nombre de patients inclus à ce jour dans les différentes séries précisées (près de 1 500 patients à travers le monde). Les limites à surmonter paraissent encore nombreuses :  - Place de cette technique par rapport à la chirurgie (plastie ou remplacement) donnant d’excellents résultats dans des centres expérimentés.  - Nécessité de déterminer le profil clinique précis du patient devant bénéficier de cette technique.  - Nécessité d’un screening précis du mécanisme de l’IM, seules les anatomies favorables (longueur de coaptation des feuillets ≥ à 2 mm, écart intervalvulaire du prolapsus < 10 mm) étant éligibles pour cette technique.  - Absence d’efficacité probable en cas de mécanisme multiple de l’IM, notamment en cas d’association à une dilatation annulaire importante, requérant un autre mode de correction.  - Traction de la paroi septolatérale de l’anneau mitral posant la question de la durabilité du système à long terme.  - Procédure longue notamment durant la phase d’apprentissage (temps moyen 204 ± 110 min pour EVEREST II), pour laquelle seule l’imagerie échoguidée (écho-transœsophagienne ou au mieux écho-3D) aide à la capture des 2 feuillets et au positionnement du clip.  - Nécessité indispensable d’une maîtrise préalable du cathétérisme transseptal évitant ainsi une double courbe d’apprentissage, éventuellement dommageable pour le patient et la pérennité de la technique à plus long terme.   Les futurs résultats des études en cours répondront à ces interrogations.  À cet effet, un STIC (étude randomisée clip versus traitement médical des patients à haut risque chirurgical présentant une IM fonctionnelle ou organique) devrait voir le jour sous l’égide du GACI en 2011, en attendant une éventuelle prise en charge de l’acte MitraClip® et la constitution d’un éventuel GHS (coût du système MitraClip® 25 000 €). 

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