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Polémique

Publié le 30 mar 2023Lecture 4 min

Le déremboursement de la FFR

Martine GILARD, Inserm UMR 1304 GETBO, Faculté de médecine, Brest

Le déremboursement de la fractional flow reserve (FFR) est une décision dramatique pour la prise en charge de nos patients présentant un syndrome coronarien chronique.

IMPORTANCE DE LA FFR   On sait que seule la revascularisation des lésions coronaires responsables d’une ischémie myocardique a un impact sur la morbimortalité des patients. Ceci a été largement démontré au cours des syndromes coronariens aigus avec la dilatation de la lésion responsable. En revanche, l’efficacité de l’angioplastie coronaire semblait se limiter à une amélioration des symptômes dans le syndrome coronarien stable (SCC). Ces dernières années, de nombreuses études, randomisées ou non, ont démontré l’efficacité de la FFR dans la prise de décision de revasculariser ces patients stables avec des sténoses sur 2 ou sur les 3 artères coronaires. Une méta-analyse incluant les lésions stables de 2 400 patients inclus dans les essais FAME-2, DANAMI-PRIMULTI et COMPARE-ACUTE a prouvé qu’une revascularisation guidée par FFR réduisait de 28 % le critère composite de décès cardiovasculaire et d’IDM, comparativement au traitement médical(1). Les données de « vraie vie » issues du registre suédois SCAAR ayant inclus plus de 23 000 patients ont également montré que le recours à la FFR dans le cadre de lésions intermédiaires stables était associé à une réduction de la mortalité sans que ce bénéfice soit médié par les revascularisations urgentes ou l’IDM(2). Un autre registre américain de plus de 17 000 patients retrouve les mêmes résultats(3). On peut en conclure, que lorsque l’on revascularise un patient stable seulement guidé par la coronarographie, on revascularise des patients à tort ce qui explique les résultats des premières études ne montrant qu’un effet sur la symptomatologie de l’angioplastie du patient stable. Guidée par la FFR, l’angioplastie entraîne en revanche une diminution de la morbimortalité. Par ailleurs, la FFR est un des rares systèmes diagnostiques qui soit aussi efficace tout en s’accompagnant d’une diminution du coût de la prise en charge(4).   FFR EN FRANCE   Depuis 13 ans, la FFR a une recommandation IA dans toutes les recommandations européennes pour guider la revascularisation des patients présentant un SCC. Le remboursement en France a été obtenu plus tardivement en 2015. En 2019, elle a été mise sur la liste en sus (titre 5). L’utilisation et le recours à la mesure de la FFR se fait aujourd’hui de manière non homogène au niveau national car cette technologie est encore en cours de déploiement. Le 23 décembre 2023 a lieu une réunion au cours de laquelle nous avons appris que la FFR allait quitter la liste en sus pour être réintégrée dans le Groupe homogène de séjours (GHS). Cette décision a été prise sans aucune concertation avec les professionnels ce qui est une première. Nous avons décidé donc de demander une réunion dédiée qui a eu lieu le 6 janvier 2023, en présence de tous les départements du ministère de la Santé (DGOS, DGS, DSS, etc.), du SNITEM et des représentants du Conseil national professionnel de cardiologie (CNPCV) et du GACI. Malheureusement, le 30 janvier, le ministère a confirmé la décision et prévoie de réintégrer la FFR dans les GHS sans augmentation du tarif du GHS, donc, de réaliser un déremboursement. On parle cependant d’une enveloppe budgétaire qui serait accordée aux gros centres utilisateurs de la FFR dont le montant et les modalités d’attribution ne sont pas connus. Malgré de nombreuses lettres, des contacts directs avec le ministère, la décision a été confirmée par le Journal Officiel du 1er mars 2023. Cette radiation sans réintégration de la masse financière est donc une première et revient à une perte de financement directe pour les établissements qui utilisent ces produits. De plus, cette décision a été prise sans véritable dialogue avec les parties prenantes. Cette radiation va conduire à réduire les efforts consacrés par la communauté médicale pour une meilleure prise en charge des patients : – en mettant en difficulté les établissements, les patients et les professionnels de santé qui verront l’accès à ces technologies limité voire impossible ; – en étant désincitatif pour les centres ne l’ayant pas encore intégré, ce qui serait contreproductif en termes de qualité de soins prodigués aux patients. En Angleterre, la mesure de la FFR est remboursée. En France, alors que nous sommes supposés avoir une médecine qui tient le haut du palmarès, l'État interrompt la diffusion du progrès médical pour des raisons financières. Des lettres de la Société française de cardiologie, du Conseil national professionnel de cardiologie, de la Fédération des sociétés médicales, du SNITEM ont été adressées au ministre sans aucune réponse.

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