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Explorations-Imagerie

Publié le 02 mar 2004Lecture 8 min

Quand programmer un test d’ischémie après revascularisation ? Et comment ?

D. CARRIÉ, CHU de Toulouse

Prendre en charge un coronarien revascularisé consiste, d’une part, à surveiller et évaluer un geste mécanique ponctuel anti-ischémique et, d’autre part, à suivre et contrôler une affection diffuse, évolutive, voire parfois imprévisible.
Trois périodes sont classiquement différenciées après un geste de revascularisation myocardique :
- celle du premier mois qui correspond à la phase de cicatrisation,
- la deuxième allant du 1er aux 6-9e mois et correspondant aux périodes de resténose,
- la dernière étape, enfin, qui est celle de l’évolutivité athéromateuse chez un patient devenu « coronarien chronique ».

Facteurs à prendre en compte après l’angioplastie   La resténose est une lésion stabilisée, à l’inverse de la sténose qui est une lésion potentiellement instable. Son corollaire est que le taux de resténoses angiographiques est toujours supérieur au taux de revascularisations de la lésion ou du vaisseau cible (TLR-TVR) traités par angioplastie. De plus, si la resténose n’évolue qu’exceptionnellement sur un mode aigu, il faut toujours avoir à l’esprit que la progression athéromateuse sur un autre site de la même artère ou sur une autre artère peut être activée et amplifiée précocement après un geste d’angioplastie et qu’elle peut alors évoluer sur un mode plus aigu que celui de la resténose. Enfin, il est bien établi que l’événement le plus prédictif de resténose est la récidive angineuse qui survient dans environ deux tiers des cas.           Ainsi : - si le taux de resténoses angiographiques est de 30 à 50 % après ballonnet, il diminue de 10 à 30 % avec les stents classiques et se réduit encore en fonction du type de lésions de 0 à 15 % avec les stents actifs « coatés » au sirolimus ou au paclitaxel ; - le taux de resténoses cliniques (TLR-TVR) est, globalement, pour les stents classiques ou « nus », de 10 %, avec une fréquence accrue entre le 1er et le 4e mois, une majorité des patients (70 à 80 %) resténosant avant le 6e mois et les autres avant la fin de la première année.           Certaines conditions sont propices au développement de la resténose : le sexe masculin, le diabète, l’angor instable, les greffons veineux, les lésions pluritronculaires, la pose de plusieurs stents, voire un geste imparfait.  À partir de ces données, deux types de patients peuvent être classés Sujet à bas risque de resténose, c’est-à-dire ayant au maximum un facteur de risque, un angor récent, stable, une lésion focale, monotronculaire, sans état inflammatoire et ayant eu un geste thérapeutique complet. Sujet à haut risque, à savoir les âges extrêmes, plus d’un facteur de risque, un angor ancien, instable ou un infarctus, un état inflammatoire, des lésions diffuses, complexes, pluritronculaires et avec un geste thérapeutique incomplet.   À partir de ces données, plusieurs questions méritent d’être posées • Faut-il programmer un test d’ischémie après revascularisation ? • Si oui, quelle en est la date idéale et quelles en sont les modalités ?    Utilité et fiabilité d’un test d’ischémie ?   Le mode révélateur de la resténose est rarement aigu   Toutefois, lorsque la resténose est symptomatique (deux tiers des cas), la coronarographie semble l’examen réalisé le plus souvent en première intention, d’autant plus que la douleur angineuse est précoce par rapport au geste d’angioplastie et qu’elle présente les mêmes caractères séméiologiques qu’avant l’intervention.   Plus rarement (30 % des cas), la resténose est asymptomatique, et le test d’ischémie peut avoir son intérêt Mais cet examen (par exemple l’épreuve d’effort) pour qu’il soit interprétable, doit être comparé à un même examen effectué avant l’intervention, dans les mêmes conditions de charge et sous des modalités thérapeutiques identiques. Or : - la majorité des patients entrent dans leur maladie par un syndrome coronaire aigu et bénéficient d’emblée de la coronarographie et d’un geste de revascularisation ; - seuls 30 % des patients stables ou stabilisés ont eu une épreuve d’effort ou un autre test d’ischémie avant angioplastie coronaire. C’est dire la difficulté d’interprétation d’un test d’ischémie dans les suites d’une revascularisation, et le recours au moindre doute à la coronarographie.   Quand faut-il programmer un test d’ischémie ?     Les différentes études et la pratique clinique sont aujourd’hui unanimes pour reconnaître que le test d’ischémie ne doit pas être réalisé trop précocement après angioplastie. Outre le risque vasculaire au point de ponction, devenu rare depuis l’avènement de la voie radiale et la réduction de la taille des cathéters, une réocclusion brutale est toujours possible en raison des modifications hémodynamiques, mécaniques, vasomotrices ou hémo-biologiques engendrées par le geste interventionnel et réactivées par l’effort. En effet, l’angioplastie va induire des modifications biologiques et structurales proches de celles observées dans l’angor instable (dissection localisée, microthrombi, etc.) et perturber les effets vasomoteurs de l’EDRF-NO ou des prostaglandines sur cet endothélium abrasé. De plus, le dysfonctionnement myocardique dans le territoire de l’artère dilatée, l’effet de déconditionnement constant du patient, les anomalies persistantes de la vasomotricité coronaire et la normalisation tardive de la réserve coronaire concourent à différer d’autant ce premier test ischémique.       En pratique   L’évaluation ischémique ne doit jamais être réalisée avant la fin du 1er mois après angioplastie. Mieux encore, certaines équipes préconisent une simple consultation à 1 mois et programment de principe le test ischémique seulement à 6 mois. Ensuite, la surveillance ischémique est souhaitable à 12 mois après l’angioplastie, puis une fois par an, non plus pour dépister la resténose, mais pour surveiller l’éventuelle évolutivité athéromateuse. En revanche, dans le cadre d’un programme de réadaptation après infarctus du myocarde et revascularisation, le but d’un test d’effort est tout à fait différent. Il peut être réalisé plus précocement (à partir du 10e-15e jour), doit être non épuisant et sert à vérifier que les efforts modérés de reconditionnement à l’effort sont bien tolérés. À la fin du premier mois, il revient dans la situation décrite ci-dessus et doit suivre le même programme de dépistage de l’ischémie que précédemment.   Test ischémique à réaliser : maquillé ou démaquillé ? Cette question revient sans cesse sur le devant de la scène lorsque les cardiologues sont interrogés sur le suivi de leurs patients. Outre le traitement au long cours par aspirine et statines, la question posée est celle du traitement à visée anti-ischémique. Il n’existe pas de consensus formel et le test ischémique doit se rapprocher le plus « de la vie réelle ». Pour cela, il faut prendre en compte la totalité des lésions et savoir si la revascularisation a été ou non complète. Dans la majorité des cas, ce test sera maquillé d’autant plus qu’il existe une diffusion de la maladie et qu’il est proche de l’angioplastie, mais son inconvénient majeur (à l’inverse d’un test démaquillé) sera de ne pas atteindre 85 % de la fréquence maximale théorique et d’être non concluant. Quel que soit le protocole utilisé, l’épreuve d’effort doit être intense et « épuisante » si elle est maquillée afin de dépister l’ischémie. À distance, l’adaptation thérapeutique est fonction : - de la contractilité du ventricule gauche, - des tests ischémiques, - des lésions coronaires, - en sachant que l’on peut très bien concevoir d’arrêter tout traitement anti-ischémique chez un sujet jeune, monotronculaire, à fonction ventriculaire gauche normale et ayant bénéficié d’une angioplastie pour lésion coronaire focale. Enfin, du fait de l’effet rebond de l’agrégation plaquettaire, une recommandation importante est de ne pas arrêter Plavix® dans les jours qui entourent le test ischémique, notamment lors du contrôle du 6e mois après revascularisation ; toutefois les recommandations actuelles qui nécessitent de laisser dans la majorité des cas une double antiagrégation plaquettaire pendant 9 mois diminuent ce risque potentiel de thrombose coronaire.    Quel test ischémique choisir ? Les tests de provocation de l’ischémie peuvent être classés en deux catégories : - ceux qui augmentent la consommation en oxygène du myocarde (épreuve d’effort, injection de dobutamine) ; - ceux qui créent une vasodilatation coronaire directe par injection par exemple de dipyridamole ou d’adénosine. Parfois, la sensibilisation du test peut se faire par l’association des deux tels qu’un effort sous-maximal couplé à l’injection de dipyridamole. Plusieurs métaanalyses ont apprécié les performances diagnostiques de l’épreuve d’effort dans le cadre du diagnostic de la resténose, et l’ont comparée aux autres examens complémentaires. L’épreuve d’effort, méthode la plus physiologique, est celle réalisée le plus souvent en première intention. Elle est d’autant plus interprétable que son niveau d’effort atteint 80 à 85 % de la fréquence maximale théorique. Il est inutile de vouloir mettre en évidence une quelconque ischémie électrocardiographique d’effort témoignant d’une resténose sur un territoire déjà nécrosé sans aucune viabilité. De plus, de nombreux tracés ECG de repos déjà perturbés (HVG, FA, BBG, PM, antécédents d’infarctus, etc.) limitent la fiabilité d’interprétation électrocardiographique. Si la coronarographie dans ces situations-là n’est pas souhaitable en première intention, la présence d’un bloc de branche gauche complet ou l’existence d’un pacemaker doivent faire réaliser un test au dipyridamole alors que, s’il existe une contre-indication à celui-ci et que l’effort est impossible, le test à la dobutamine doit être privilégié. La vraie question est de savoir réserver les examens plus coûteux ou d’accessibilité limitée (isotopes, échographie de stress) aux situations cliniques nécessitant une interprétation topographique et quantitative que l’épreuve d’effort simple ne peut offrir, telles que les territoires infarcis, les angioplasties sur site à risque (IVA proximale…), les terrains à haut potentiel de resténose (diabétiques…), les angioplasties multitronculaires. Dans ces cas, si la fonction ventriculaire gauche est normale et que seule est recherchée une ischémie, la scintigraphie myocardique avec injection du traceur Mibi est suffisante, alors qu’une recherche associée de viabilité myocardique doit nécessiter l’injection du thallium. Certains auteurs reconnaissent toutefois une spécificité supérieure de l’échographie de stress par rapport à la scintigraphie s’il existe une viabilité myocardique, alors que, dans le cas contraire, la scintigraphie myocardique semble supérieure.   En résumé   Après revascularisation myocardique par angioplastie coronaire, le mode révélateur de la resténose est rarement aigu. Toutefois, lorsque la resténose est symptomatique (deux tiers des cas), la coronarographie semble l’examen réalisé le plus souvent en première intention. Plus rarement (30 % des cas), la resténose est asymptomatique, et le test d’ischémie peut avoir son intérêt. Il doit alors être réalisé systématiquement entre le 30e et le 180e jour, soit par épreuve d’effort la plus épuisante possible, soit — en fonction de situations cliniques ou angiographiques particulières — par des examens plus élaborés tels que les isotopes ou l’échographie de stress.

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