publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 10 oct 2006Lecture 7 min

Fibrillation auriculaire focale - Comment la reconnaître et comment la traiter ?

F. EXTRAMIANA, hôpital Lariboisière, Paris

La fibrillation auriculaire (FA) focale est un type particulier de FA paroxystique, conséquence de foyers automatiques très rapides situés le plus souvent au niveau des veines pulmonaires. Cette forme de FA est très récidivante sur le plan clinique, caricaturale sur l’ECG avec le phénomène P/T. Sur le plan thérapeutique, la FA focale est souvent difficile à contrôler avec les traitements antiarythmiques. L’isolation électrique des veines pulmonaires par ablation par radiofréquence permet de guérir environ 80 % des patients présentant une FA focale. Compte-tenu du faible taux de complications de cette technique, il est maintenant légitime de la proposer en deuxième intention dans la prévention des récidives de FA focale.

La FA focale : un mécanisme particulier de FA La FA peut être, selon la classification en vigueur, paroxystique, persistante ou permanente. Cette classification ne tient pas compte d’une forme particulière de FA paroxystique représentée par la FA focale. Ce terme regroupe les FA dont le mécanisme est constitué par un ou des foyer(s) actif(s) d’extrasystoles (par automatisme anormal, micro-réentrée ou réentrée de phase 2 ?) qui « bombardent » de manière très rapide les oreillettes. Ces foyers actifs sont capables soit de déclencher une véritable fibrillation auriculaire, soit de « driver » les oreillettes avec une cadence rapide qui, en raison de troubles conductifs, vont entraîner une activation peu organisée des oreillettes laquelle donnera des tracés ECG interprétés comme de la fibrillation auriculaire.   Un foyer est souvent localisable C’est l’équipe de Bordeaux qui, la première, a décrit ce mécanisme particulier de FA et a montré que, chez un individu donné, il y a souvent un foyer topographiquement localisable. De plus, M. Haissaguerre et coll. ont également montré que ces FA focales étaient le plus souvent la conséquence de foyers situés au niveau des veines pulmonaires. Depuis ces travaux initiaux, de nombreuses localisations de ces foyers ont été décrites, au niveau de la veine cave supérieure, inférieure, au niveau du ligament de Marshall, du faisceau de Bachmann, dans le sinus coronaire, dans la partie postérieure de l’oreillette gauche… Cependant, dans la grande majorité des cas, ces foyers sont situés dans, ou à, l’ostium des veines pulmonaires.   La FA focale est le plus souvent la conséquence d’un ou des foyers actifs situés au niveau des veines pulmonaires.   La FA focale : une présentation souvent caricaturale Par définition, la FA paroxystique s’arrête spontanément en moins de 7 jours et le plus souvent en moins de 48 heures mais est caractérisée par un risque élevé de récidive. La FA focale ne fait pas exception à cette règle, cependant sa présentation clinique est souvent caricaturale. En effet, les épisodes de FA sont souvent très fréquents. Il n’est pas rare d’enregistrer plusieurs épisodes de FA soutenue durant quelques minutes à quelques heures sur les enregistrement Holter ECG des 24 h (figure 1). Le mode de déclenchement des épisodes de FA focale peut être adrénergique, vagal ou indifférencié. La FA focale survient le plus souvent chez des sujets jeunes avec un cœur sain. Cependant, il n’est pas exceptionnel qu’elle soit associée à une altération de la fonction systolique du ventricule gauche dans le cadre d’une cardiopathie rythmique. Figure 1. Enregistrement Holter ECG des 24 heures chez un patient ayant une fibrillation auricualire focale typique. C’est l’ECG et le Holter des 24 h qui vont permettre de reconnaître la signature diagnostique de la FA focale. L’aspect le plus caractéristique est représenté par le phénomène P/T. Les extrasystoles auriculaires sont tellement prématurées qu’elles sont identifiables grâce à la déformation de l’onde T qu’elles entraînent (figure 2). Sur l’ECG 12 dérivations, la morphologie, l’axe de l’onde P’ extrasystolique permet de déduire son origine anatomique. L’autre caractéristique de ces extrasystoles focales est représentée par leur fréquence très rapide, sous forme de salves ou « burst » très rapides de tachycardie atriale (figure 3A). Ces salves vont soit déclencher la FA soit donner un aspect ECG de tachycardie atriale plus ou moins organisée, soutenue ou non soutenue. La figure 3B montre une salve d’extrasystoles rapides qui s’arrête spontanément après un ralentissement, mettant ainsi un terme à la tachycardie atriale. Figure 2. Holter 2 voies : extrasystoles auriculaires isolées très précoces avec phénomène P/T. Figure 3. A. Salve très rapide d'extrasystoles auriculaires. Ces salves peuvent déclencher une véritable FA ou bien mimer l'aspect ECG de FA ou de flutter. B. Salve très rapide d'extrasystoles auriculaires. La régularité du foyer donne un aspect organisé de flutter. À l'arrêt du foyer, la tachycardie atriale s'arrête également. La FA focale présente un aspect ECG caricatural avec un phénomène P/T et des salves très rapides, plus ou moins soutenues.   La FA focale : un traitement souvent difficile Les recommandations de l’ACC, AHA et ESC publiées en 2001 conseillent de prévenir la récidive des FA paroxystiques lorsqu’elles sont symptomatiques. Il faut reconnaître que cette recommandation ne s’appuie pas sur un niveau de preuve élevé. En effet, s’il semble établi, en particulier depuis les études ancillaires d’AFFIRM (Atrial Fibrillation Follow-up Investigation of Rhythm Management), que le maintien en rythme sinusal est associé à une augmentation de la survie ; cela n’a pas été définitivement démontré pour ce qui concerne spécifiquement la FA paroxystiques ni la FA focale. Cependant, les épisodes de FA focales peuvent être très gênants sur le plan fonctionnel, mal tolérés sur le plan hémodynamique en cas d’altération de la fonction systolique et sont parfois responsables de cardiomyopathies rythmiques.   Traitements médicamenteux Les antiarythmiques de classe IC peuvent être utilisés en prévention des récidives lorsque la FA n’est pas associée à une altération de la fonction systolique ventriculaire gauche. Cependant, leur efficacité n’est pas bonne, avec seulement autour de 50 % d’efficacité à un an. L’amiodarone semble meilleure avec une efficacité de l’ordre de 70 % mais au prix de nombreux effets secondaires. Par ailleurs, les antiarythmiques sont tous potentiellement associés à un risque proarythmique. À ce titre, il est intéressant de souligner que, dans l’étude ancillaire d’AFFIRM en intention de traiter, l’utilisation d’antiarythmiques était associée à une majoration du risque de mortalité totale (risque relatif = 1,41 ; IC 95 % 1,10 : 1,83). Cependant, et malgré ce signal négatif, les antiarythmiques restent pour l’heure le traitement de première intention de la prévention des récidives des épisodes de fibrillation auriculaire paroxystique.   Traitement radical C’est toujours l’équipe de Bordeaux qui a démontré que les foyers responsables de la FA focale pouvaient être traités de manière radicale par ablation par radiofréquence. L’attitude initiale consistant à documenter le ou les foyers actifs et à n’isoler que les veines en cause a rapidement évolué vers l’isolation électrique systématique des 4 veines pulmonaires. Les foyers non veineux ne sont ablatés que si l’on documente une activité anormale à leur niveau.   Technique L’isolation des veines pulmonaires peut être facilitée grâce à l’utilisation de sondes circulaires permettant d’enregistrer simultanément l’activité électrique en différents points de l’ostium d’une veine pulmonaire. La figure 4 montre un exemple des signaux enregistrés à l’ostium d’une veine pulmonaire supérieure gauche après isolation électrique ou « déconnexion » de cette veine. On observe également dans cet exemple, que la veine continue à être active après l’isolation. Cependant, le foyer intraveineux reste bloqué dans la veine, ne se propage plus vers l’oreillette gauche et n’est donc plus capable d’induire de salves d’extrasystoles auriculaires. Figure 4. Enregistrements ECG et de signaux endocavitaires. Les 20 pôles de la sonde circulaire "lasso" (LAS) enregistrent les potentiels d'une veine pulmonaire supérieure gauche déconnectée. L'activité très rapide (autour de 400/min) enregistrée dans la veine ne se propage pas vers le sinus coronaire (sonde décapolaire nommée CS) ni vers l'oreillette gauche (absence d'extrasystole sur l'ECG de surface). Cette technique dite « électrophysiologique » n’est cependant pas la seule. Il est également possible d’utiliser une approche plus anatomique basée sur les systèmes de cartographie endocavitaire tridimensionnelle. L’isolation seule des veines pulmonaires permet d’obtenir la guérison complète, sans antiarythmique, d’environ 80 % des patients présentant une FA focale avec parfois la nécessité d’une deuxième procédure mais sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à une segmentation plus complexe des oreillettes. Cette isolation des veines pulmonaires est maintenant assez rapide et associée à un taux de complications acceptable.   Indications Ces résultats poussent de plus en plus d’équipes à proposer cette technique après l’échec d’un traitement antiarythmique. Wasni et coll. ont même publié une étude randomisée dans laquelle l’isolation des veines pulmonaire par radiofréquence était testée versus le traitement antiarythmique pour le traitement en première intention de la FA focale. Dans cette étude, à 1 an de suivi, 87 % des patients ayant subit une ablation par radiofréquence n’avaient pas présenté de récidive, alors que cela était le cas chez seulement 37 % des patients ayant reçu un traitement antiarythmique bien conduit. Il est donc actuellement clair que l’isolation des veines pulmonaires est plus efficace que les traitements antiarythmiques dans la prévention des épisodes de FA focale. Cependant, en raison des complications rares mais potentielles de la technique, il semble encore difficile de proposer systématiquement l’ablation en première intention. En revanche, il est légitime de proposer l’ablation par radiofréquence en deuxième intention, avant la prescription d’amiodarone. L’isolation électrique des veines pulmonaires par ablation par radiofréquence permet de guérir complètement environ 80 % des patients présentant une FA focale.   En pratique   La FA focale est une entité particulière au sein des FA paroxystiques, qui mérite d’être individualisée. Cette FA focale est assez facile à reconnaître et peut, en cas d’échec du traitement antiarythmique, être guérie définitivement par l’isolation électrique endocavitaire des veines pulmonaires réalisée par ablation par radiofréquence.  Une bibliographie sera adressée aux abonnés sur demande au journal.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème