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Cas clinique

Publié le 30 nov 2013Lecture 5 min

Une angioplastie miraculeuse… !

A. FARHATa, S. BOURAOUIa, O. CHAMPOUDa, B. BAALAa, J. BERLANDa, F. LEROYb, B. LEGALLICIERb, R. KONINGa a. Clinique Saint-Hilaire ; b. CHU de Rouen

Mme D. Geneviève, 70 ans, nous est confiée par le service de néphrologie du CHU de Rouen pour angioplastie de l’artère rénale gauche. Cette patiente hypertendue présente une insuffisance rénale terminale anurique récente nécessitant trois séances de dialyse hebdomadaires, et ce, depuis trois semaines. 

L’angioscanner aortique et des artères rénales met en évidence une thrombose rénale droite avec un rein droit considéré comme non fonctionnel au Doppler parce qu’il ne mesure que 8 cm. À gauche, il est décrit une sténose hyperserrée (> 90 %) de la rénale gauche avec un retard de flux et un rein de 12 cm. Au vu des résultats de l’imagerie, elle nous est adressée pour angioplastie de l’artère rénale gauche uniquement. La patiente est traitée par aspirine et clopidogrel ; 50 mg d’héparine NF sont injectés en intraveineux et la procédure est réalisée par voie fémorale droite en 6 F. Nous réalisons successivement une artériographie sélective de l’artère rénale droite et de l’artère rénale gauche (figure 1).   Figure 1. Artériographie rénale : sténose serrée de l’artère rénale gauche et sténose thrombotique de l’artère rénale droite. Le cathétérisme sélectif de l’artère rénale droite est très facile avec une sonde RDC 6 F (Cordis®). Cette artère étant, contrairement aux explorations précédentes, perméable avec un rein ne nous semblant pas atrophique et une parenchymographie satisfaisante, une angioplastie avec stenting de la lésion ostiale est pratiquée de manière systématique bien qu'elle n’ait pas été demandée (figure 2) ! Comme pour l’angioplastie coronaire, nous utilisons des microguides 0,014” et des ballonnets d’excellent profil pour prédilater et minimiser au maximum la migration distale de matériel athérothrombotique. Le résultat du stenting étant parfait, nous passons immédiatement avec le même cathéter guide à l’angioplastie de la lésion subtotale ostiale gauche responsable d’un retard de flux de l’artère rénale (figure 3). Figure 2. Angioplastie rénale droite. A. Mise en place d’un guide d’angioplastie BMW 0,014”. B. Prédilatation au ballonnet de 5 mm. C. Implantation du stent rénal de 6 mm de diamètre et 12 mm de long (Dynamic - BIOTRONIK). D. Contrôle du résultat de l’angioplastie qui montre un rétablissement du calibre de l’artère rénale droite.   Figure 3. Angioplastie rénale gauche. A. Mise en place du guide d’angioplastie. B. Prédilatation. C. Implantation du stent 5 mm de diamètre et 12 mm de long (RADIX 2 - CID vascular) et D. Contrôle du résultat de l’angioplastie.  Le résultat de cette angioplastie est également très satisfaisant. Il est décidé de transférer la patiente dès le lendemain dans son service d’origine. Avant son transfert, soit 12 heures plus tard, elle montre une reprise de diurèse de 300 ml alors qu’elle était jusqu’ici totalement anurique. L’évolution ultérieure est spectaculaire : une seule séance de dialyse fut nécessaire et la patiente reprit une diurèse normale. Elle normalisa ses chiffres de pression artérielle, mais surtout sa fonction rénale ! Discussion Il s’agit donc d’une observation remarquable d’une évolution spectaculaire après angioplastie et stenting de sténoses bilatérales des artères rénales chez une patiente anurique en dialyse depuis trois semaines. Des cas semblables d’amélioration de la fonction rénale après angioplastie rénale(1,2) ont déjà été décrits, en particulier chez des patients ayant une sténose bilatérale des artères rénales ou une sténose unilatérale sur rein unique(1). Une petite série chirurgicale a même montré une interruption de dialyse chez 6 des 8 patients ayant une sténose des artères rénales. Tous les répondeurs étaient porteurs d’une sténose bilatérale et les non-répondeurs d’une sténose unilatérale des artères rénales(3). Une grande série portant sur des patients dialysés traités chirurgicalement montre une interruption de dialyse dans 67 % des cas, en sachant que 88 % des patients traités présentaient des sténoses bilatérales ou unilatérales sur rein unique(4). Parallèlement, Tathipelli montre, sur une petite série d’angioplastie rénale, une sortie de dialyse dans 50 % des cas(5,6). La plupart des grandes études (CORAL, RENAISSANCE, ASTRAL, STAR, etc.) ont exclu les patients avec une insuffisance rénale sévère et, a fortiori, les patients dialysés. Les données dont nous disposons actuellement reposent essentiellement sur ces petites séries d’angioplastie ou chirurgicales qui montrent un bénéfice de la revascularisation chez les patients dialysés porteurs de sténoses des artères rénales. L’évaluation des artères rénales est indispensable chez les patients entrant en dialyse puisque la prévalence de cette pathologie a été évaluée à 41 % dans une étude, dont 16 % de sténoses bilatérales(7). Les grandes études randomisées (ASTRAL, STAR, etc.) ont créé une polémique concernant l’angioplastie rénale considérée comme inefficace en comparaison du traitement médical seul. Cependant, ces études comportaient de larges biais et entre autres un seuil bas de 50 % pour déterminer la significativité hémodynamique d’une sténose rénale. On connaît les limites de l’analyse angiographique quantitative de ces sténoses. Par ailleurs, le déclenchement de la sécrétion de la rénine nécessite un gradient trans-sténotique > 10 % (Pd/Pa < 0,9 ; Pd étant la pression distale et Pa la pression aortique moyenne) correspondant à un gradient systolique d’environ 25 mm Hg(8). Angiographiquement, ces sténoses devraient donc être > 70-80 %, en sachant que la corrélation gradient-sténose est faible. Le critère de sténose > 50 % ne permet donc pas de définir les sténoses fonctionnelles et l’évaluation type FFR (Fractionnal Flow Reserve) sous papavérine paraît une technique invasive intéressante à développer avant tout geste sur une sténose rénale comme on le pratique régulièrement pour nos sténoses coronaires dites « intermédiaires »(8). Cette observation démontre que les situations de sténoses bilatérales ou unilatérales sur rein unique responsables d’une dégradation aiguë ou récente même sévère de la fonction rénale doivent être évaluées au cas par cas par des équipes expérimentées et peuvent bénéficier de la revascularisation rénale, les grandes études randomisées n’apportant aucune information pertinente dans ces situations. Conclusion Le screening des sténoses des artères rénales est indispensable chez les patients entrant en dialyse en raison : - de leur prévalence importante dans cette population ; - de la forte probabilité d’amélioration de la fonction rénale ; - voire d’interruption de la dialyse, surtout en cas de sténose bilatérale ou de sténose sur rein unique.

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