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Publié le 30 mar 2022Lecture 5 min

Étude MASTER DAPT : quelle durée de bithérapie pour nos patients ?

Laurent DELORME, Clinique du Pont de Chaume, Montauban

La double antiagrégation plaquettaire est toujours la pierre angulaire des patients revascularisés par angio- plastie et ce quel que soit le type de stent. Ces dernières années ont vu la durée de la bithérapie se raccourcir chez le patient implanté de stent actif.

Initialement prescrites pour 12 mois, les recommandations actuelles(1) préconisent (en dehors du syndrome coronarien aigu) 6 mois de bithérapie chez le patient à risque hémorragique faible et 3 mois chez le patient à risque hémorragique élevé. Les nouvelles générations de stents ayant diminué drastiquement le taux de MACE après angioplastie, la diminution des complications hémorragiques est devenue une priorité. L’incidence des événements hémorragiques la première année est de l’ordre de 14 %(2) (4 à 7 % d’hémorragies majeures) chez les patients à haut risque hémorragique. Si certains scores permettent de mieux évaluer ce risque hémorragique sous bithérapie antiagrégante, comme le score Precise DAPT(3), jusqu’à quel point peut-on raccourcir la bithérapie ? ▸ DESIGN DE L’ETUDE MASTER DAPT L’étude MASTER DAPT(4,5) a été élaborée pour répondre à une question : peut-on raccourcir la bithérapie antiagrégante à 1 mois après la mise en place d’un stent actif de dernière génération à polymère biorésorbable sans risquer une augmentation du risque ischémique (étude de non-infériorité) ? Critères d’inclusion • Les patients inclus devaient être à haut risque hémorragique (indication de traitement anticoagulant, épisode hémorragique < 12 mois, âge > 75 ans, trouble de la coagulation ou thrombopénie, anémie répétée < 11 g/dl, traitement au long court par corticoïdes ou AINS, cancer à haut risque hémorragique, antécédents d’AVC, score Precise DAPT > 25). • Avoir été traité par angioplastie avec des stents UltimasterTM (Terumo, stent en CoCr, mailles fines de 80 μm, polymère biorésorbable abluminal). • Tous types d’angioplasties étaient possibles (lésions complexes, CTO, tronc commun etc.). Seul le traitement de la resténose et des thromboses de stent étaient exclus. Trois critères de jugement hiérarchisés • NACE (net adverse clinical events) : critère composite associant décès, infarctus, AVC, sai-nement majeur. • MACCE (major adverse cardiovascular and cerebral events) : critère composite associant décès, infarctus et AVC. • Événements hémorragiques incluant saignements majeurs et cliniquement significatifs. ▸ RÉSULTATS Les critères d’inclusion très larges ont permis d’inclure des patients de la « vraie vie », proches des patients que nous voyons tous les jours dans nos cathlabs. La moyenne d’âge était de 76 ans, comptant 1/3 de patients diabétiques, 1⁄4 de patients déjà traités par angioplastie et 18 % d’infarctus préalables. Il y avait autant de patients stables (51 %) qu’instables. Au total 4 579 patients ont été randomisés et stratifiés en fonction de la présence ou non d’un traitement anticoagulant avec 63,6 % de patients sans anticoagulant et 36,3 % de patients sous anticoagulant (figure 1). Dans les groupes abrégés, la monothérapie antiagrégante reposait dans 80 % des cas sur le clopidogrel et 20 % des cas sur l’aspirine dans le groupe sous anticoagulant et dans 22 % des cas sur le ticagrelor, 41 % des cas sur le clopidogrel et 36 % des cas sur l’aspirine dans le groupe non traité par anticoagulant. Dans le groupe sous anticoagulant on notait l’utilisation dans 1/3 des cas des AVK et 2/3 des cas d’un AOD. Au terme d’un suivi moyen de 335 jours, il n’y a pas de différence sur les deux premiers critères primaires préspécifiés : – le NACE était de 7,5 % dans le bras abrégé, 7,7 % dans le bras standard (OR 0,97 ; IC : 0,78-1,2) (figure 2) ; – les MACCE étaient de 6,1 % dans le bras abrégé et 5,9 % dans le bras standard (OR 1,02 ; IC : 0,80-1,30)(figure 3). En revanche, on constate une diminution des saignements majeurs et cliniquement significatifs (BARC 2,3 et 5) avec 6,4 % dans le bras abrégé et 9,2 % dans le bras standard (OR : 0,68 ; IC : 0,55-0,85) (figure 4). Cette différence est principalement liée à la diminution des saignements non majeurs, à savoir les saignements BARC type 1 et 2. Une étude en sous-groupe montre que cette différence n’est présente significativement que dans le groupe non traité par anticoagulant (figure 5). Une bithérapie courte de 1 mois après la mise en place d’un stent UltimasterTM permet donc de réduire les événements hémorragiques sans augmenter significativement les événements ischémiques chez les patients à haut risque hémorragique. ▸ D’AUTRES PREUVES DE LA BITHÉRAPIE COURTE D’autres études ont montré l’absence de surrisque à raccourcir la bithérapie à 1 mois chez le patient à haut risque hémorragique. L’étude LEADERS FREE(6) ne comparait pas deux stratégies différentes d’antiagrégation mais l’utilisation d’un stent actif sans polymère, le BioFreedomTM (Bio-sensors), comparé à un stent nu chez des patients traités par bithérapie antiagrégante pendant 1 mois. On observait, en toute logique, un taux de saignement équivalent vu que tous les patients avaient le même régime d’antiagrégation. Toutefois, les patients traités par stent actif faisaient moins d’infarctus et nécessitaient moins de revascularisation ultérieure. L’étude ONYX ONE(2) a comparé un stent actif sans polymère (BioFreedomTM) à un stent actif avec polymère (Resolute OnyxTM, Medtronic) chez 1 996 patients toujours traités par bithérapie antiagrégante courte de 1 mois. Les deux stents ont fait jeu égal sur les risques ischémique et hémorragique avec un taux de saignement moyen sur l’ensemble des patients de 14,4 % pour les saignements majeurs et mineurs (BARC 2 à 5) et 4,65 % sur les saignements majeurs (BARC 3-5). L’étude STOPDAPT-2(7) comparait une bithérapie de 1 mois à 12 mois chez 3 009 patients implantés d’un stent XIENCETM (Abbott). Les deux stratégies ont été équivalentes en termes d’événements ischémiques. En revanche, la bithérapie courte a diminué significativement les hémorragies majeures (BARC 3 à 5). À noter, un taux d’événements faibles dans cette étude qui n’incluait pas que des patients à haut risque hémorragique. Nous disposons donc de beaucoup de preuves solides sur la sécurité d’utiliser une bithérapie courte de 1 mois chez des patients traités par stent actif de dernière génération et ce, quelle que soit sa technologie : sans polymère (BioFreedomTM), avec polymère (XIENCETM ou Resolute OnyxTM) ou avec polymère biorésorbable comme l’ UltimasterTM de l’étude MASTER DAPT. Est-ce donc la fin de la bithérapie de plus d’un mois dans l’angioplastie réglée ? C’est peu probable dans la mesure où d’autres études ont montré une efficacité sur la diminution des événements ischémiques du traitement antithrombotique au-delà de 12 mois. L’étude DAPT(8) qui comparait une bithérapie de 12 mois versus 30 mois a montré une diminution des infarctus et des thromboses de stents au détriment d’une augmentation des événements hémorragiques majeurs et mineurs. Il existait aussi un signal inquiétant : la mortalité non cardiaque était 2 fois supérieure dans le groupe bithérapie à 30 mois. Plus proche de nous, l’étude COMPASS(9) a montré la supériorité de faibles doses de rivaroxaban (2,5 mg deux fois par jour) en plus de l’aspirine chez des patients à haut risque ischémique. Il a été retrouvé une diminution significative des événements ischémiques et même de la mortalité chez les patients traités par rivaroxaban. Ce bénéfice s’accompagne toujours d’une augmentation des événements hémorragiques majeurs. Malheureusement, le rivaroxaban 2,5 mg ne sera pas commercialisé en France.

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