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Études

Publié le 18 avr 2006Lecture 6 min

Télécardiologie : premiers résultats de l'étude HOME-ICD

L. FAUCHIER, centre hospitalier Universitaire Trousseau, Tours

La télémédecine est l'utilisation des télécommunications en médecine.
Les nouvelles générations de stimulateurs cardiaques ou de défibrillateurs cardiaques implantables avec système de surveillance à domicile permettent une transmission automatique de données. Pour le système actuellement le plus largement utilisé de la société Biotronik, les informations sont dirigées via une antenne incluse dans la prothèse vers un appareil de transmission GSM à proximité du patient pendant son sommeil puis vers un centre général de réception et enfin retransmises auprès des centres implanteurs et des cardiologues responsables (figures 1 et 2).
Outre le bénéfice en termes d'information continue sur les anomalies de fonctionnement du système, les événements cardiovasculaires à type d'arythmie grave, de manière plus précoce que lors des contrôles systématiques, ce système pourrait également avoir l'intérêt potentiel de diminuer le nombre de visites systématiques inutiles.

Figure 1. Configuration générale de la surveillance de stimulateur ou de défibrillateur cardiaque automatique avec un système de télécardiologie. 1 - patient avec sa prothèse. 2 - dispositif cardiomessenger GSM à proximité du patient. 3 - un centre de récupération et de traitement des informations transmises. 4 - récupération des informations pertinentes par le cardiologue assurant le suivi spécifique.     Figure 2. Dispositif cardiomessenger GSM en période nocturne par exemple pour la transmission quotidienne des informations. Au congrès Europace de l’EHRA (European Heart Rhythm Association) P. Brugada a présenté les résultats de l'étude Home-ICD (Home-monitoring Implantable Cardioverter Defibrillators) qui constituent les premières preuves de l'efficacité de ce type de prise en charge. Le contexte général incite très fortement à envisager de nouvelles procédures de suivi car le nombre d'implantations de DAI, en augmentation constante, a quasiment triplé ces cinq dernières années avec les résultats positifs des études de prévention primaire (MADIT 2 et SCD-HEFT). Cela pose des problèmes d’organisation pour les centres implanteurs, avec un nombre de consultations de contrôle en nette augmentation, au détriment parfois des délais entre deux consultations. Dans le même temps, s'agissant d'implantations prophylactiques, le nombre de chocs annuels et le pourcentage de patients recevant des chocs appropriés ont tendance à diminuer. Alors que le risque de choc annuel était de 40 % dans l'étude MADIT 1, il était évalué entre 5 et 10 % dans les récentes études de prévention primaire.   Objectifs de Home-ICD L'étude multicentrique européenne Home-ICD a inclus 266 patients avec une indication standard d'implantation de défibrillateur cardiaque automatique, suivis chacun pendant 12 mois : 64 % avaient une cardiopathie ischémique, la fraction d’éjection ventriculaire gauche moyenne était de 39 % et l'âge moyen était de 62 ans. Un tiers des appareils étaient implantés en prévention primaire. L’objectif était d'évaluer le bénéfice possible apporté par le système de télécardiologie en calculant le nombre de visites qui auraient pu être évitées. Les patients ont donc eu un transfert d'informations quotidien par le système de télécardiologie en plus du suivi conventionnel. En comparant les informations obtenues par les deux techniques, les investigateurs ont déterminé l'utilité ou l'inutilité du suivi conventionnel pour chacune des visites. Les 266 patients de l'étude étaient assez représentatifs des indications actuelles d’implantation de défibrillateur cardiaque.   Résultats   Fiabilité Le premier résultat a concerné la fiabilité du système de télétransmission (figure 3). Les informations destinées à être transmises quotidiennement ont été reçues avec succès dans 84 % des cas. Il n'y a eu que 3,6 % des patients pour lesquels moins de la moitié des messages a été reçue par le centre de réception. Figure 3. Proposition d’un algorithme de suivi pour les patients avec défibrillateur ventriculaire automatique associé à un système de télécardiologie qui permettrait une réduction de 55 % du nombre de consultations de contrôle sans perte significative d’informations. Au cours des suivis, il a été documenté des arythmies ventriculaires dans 45 % des cas. La plupart des événements ont été enregistrés au cours du premier trimestre après implantation, c'est-à-dire à la première visite du suivi trimestriel régulier.   Événements Confronter les données au suivi conventionnel. En comparant les informations transmises par télécardiologie et celles récupérées lors du suivi conventionnel, il n'y a eu que 4 % de faux positifs et 14 % de faux négatifs. C'est ce dernier chiffre qui doit être principalement pris en compte, puisqu'il représente la quantité d'informations que le système de télécardiologie n'a pas réussi à déceler comparativement au suivi conventionnel. Savoir interpréter les faux négatifs. Il y a eu par ailleurs deux épisodes d'arythmie auriculaire sous-diagnostiqués et quatre épisodes d'arythmie ventriculaire qui n'ont pas été immédiatement transmis. Il faut toutefois préciser que les deux tiers de ce qui a été considéré comme des faux négatifs parmi les événements concernaient en réalité des reprogrammations de paramètres qui n'avaient aucun caractère d'urgence, à type d'optimisation des fréquences cardiaques et d’amplitude de stimulation ou détection. Il n'y a donc eu, selon les investigateurs, que 6 % de faux négatifs « significatifs » et leur répartition dans le temps leur a fait proposer un algorithme de surveillance permettant de se dispenser du suivi conventionnel en l'absence de critères péjoratifs (figure 4). Cet algorithme permettrait ainsi de diminuer de 55 % le nombre de consultations ce qui représente bien sûr un progrès potentiel notable en termes d'organisation des soins. Figure 4. A. Exemple de rapport informatisé au cours du suivi avec déclaration d’un événement potentiellement grave : impédance anormalement élevée de la sonde ventriculaire. B. L’historique montre une baisse transitoire de l’impédance de la sonde suivie d’une augmentation brutale faisant suspecter une rupture de la sonde. C. À gauche, mise en évidence d’un Twiddler syndrome (torsade de la sonde) ; à droite, confirmation de la rupture complète de la sonde en peropératoire. La prise en charge clinique globale et psychologique du patient ne doit pas être négligée pour autant. Néanmoins, cela rejoint une évaluation faite dans plusieurs centres français récemment qui, par spéculation d'un résultat approchant, estimait possible d’obtenir, avec ce système, une réduction significative des coûts, aussi bien médicaux que non médicaux ; la moitié des dépenses pour ces patients en France était liée à des frais de transport. Les principaux problèmes techniques non détectés ont été dans deux cas un dysfonctionnement de sonde et dans 21 cas une augmentation du seuil de stimulation. Dans tous les cas, ces problèmes sont apparus dès le premier suivi et les investigateurs en ont conclu clairement que le système ne permet pas de se dispenser de la première visite à trois mois après implantation.   Au total Ainsi, après quelques études préliminaires, l'étude Home-ICD montre qu'un monitorage permanent par télécardiologie est techniquement réalisable et fiable chez les patients porteurs de DAI. La proportion de faux négatifs est limitée, si l'on s'en tient aux informations significatives. Ce système pourrait alléger « la charge » liée au suivi des patients et réduire de moitié le nombre de consultations de suivi, une fois passé le délai des 3 premiers mois après l'implantation.   Les questions en suspens Il est encore difficile de savoir si la somme des informations transmises, qui va donc permettre le diagnostic précoce de pannes ou d'arythmie, se traduira au final par un surcroît de jours d'hospitalisation pour des événements dont la gravité est relativement modeste ou, au contraire, apportera un bénéfice économique par une intervention précoce avant la survenue d'événements réellement graves. Il est également possible que le bénéfice économique soit reporté à plus long terme lorsque le réglage optimal de l'appareil permettra d'obtenir un allongement de sa durée de vie, ce bénéfice restant bien sûr actuellement à déterminer. Enfin, l'intérêt d'un tel système pour les patients porteurs de stimulateur cardiaque est questionné, et non pas seulement pour les porteurs de DAI. Chez les porteurs de DAI, le bénéfice pourrait être assez net compte tenu du nombre restreint de centres et de l'éloignement obligatoire du domicile de certains patients. Néanmoins, le bénéfice pourrait également concerner le suivi des stimulateurs cardiaques puisque le taux d'événements est proportionnellement plus bas chez les patients porteurs de prothèses antibradycardiques que chez ceux porteurs de prothèses antitachycardiques, ce qui fait que le suivi pourrait être nettement espacé. Le surcoût d'un système de télécardiologie (environ 1 200 e) doit lui-même être mis en regard du coût de la prothèse, très différent pour les stimulateurs cardiaques et les DAI, du moins en France.   En pratique Il faut envisager à l'avenir que le suivi, chez certains patients, puisse s'effectuer avec de tels systèmes. Cela nécessite sûrement une mise à jour de certains aspects réglementaires pour la reconnaissance et la valorisation de l'apport diagnostique du système, d'une part, et du temps médical passé à l'analyse des informations fournies en remplacement d'un suivi conventionnel de consultation, d'autre part.

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