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Publié le 29 déc 2022Lecture 6 min

Ponction distale rétrograde isolée pour traiter les lésions fémoropoplitées - Éviter la voie fémorale en restant proche de la lésion

Raphaël COSCAS(a,b) et coll.*, a. service de chirurgie vasculaire, CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt. b. UMR 1018, Inserm-Paris 11-CESP, Université de Versailles, Saint-Quentin-en-Yvelines ; Université Paris-Saclay, Hôpital Paul Brousse, Villejuif.

La ponction fémorale (PF) est considérée comme la voie d’abord de référence dans le traitement des lésions occlusives artérielles des membres inférieurs. Pourtant, la PF est assortie d’un taux non négligeable de complications (hématomes, faux anévrismes, dissections, ischémies distales, conversions chirurgicales) constamment rapportées dans la littérature(1-3). La voie fémorale est par ailleurs associée à des échecs de franchissement allant jusque 10-20 % des cas pour les lésions complexes(4). Dans ces situations, la ponction distale rétrograde est de plus en plus utilisée comme voie de secours(5,6). Elle est associée à peu de complications propres(5,6).

Suivant quelques expériences américaines(7,8), nous nous sommes mis à utiliser la ponction distale rétrograde isolée (PDRI) de première intention, aussi appelée technique TAMI (tibio-pedal arterial minimally invasive retrograde revascularization), pour traiter les lésions occlusives fémoropoplitées.   Technique opératoire   L’intervention se déroule dans un cadre ambulatoire et sous anesthésie locale potentialisée (figure 1). La tibiale postérieure rétromalléolaire a notre préférence comme site de ponction car elle a un trajet linéaire. La ponction est réalisée de manière échoguidée avec une aiguille de microponction 21 G puis 5 000 UI d’héparine sont injectés. Nous n’injectons pas en routine de cocktail intra-artériel antispasmodique car nous n’avons pas rencontré de problème de spasme dans cette voie d’abord. Un guide V-18™ (Boston Scientific) est mis en place car il permet un bon support tout en ayant une extrémité propice à une recanalisation endoluminale. Un cathéter de support de profil 0,018’’ est souvent utilisé. L’objectif est de réaliser tant que possible la procédure en 4 F pour être le moins traumatique possible d’autant qu’il existe maintenant du matériel de bas profil adapté (ballon Passeo-18 et stent Pulsar®-18 T3 ; Biotronik). Un introducteur 4 F court (Terumo) est parfois utilisé pour créer le trajet sous-cutané et élargir le point de ponction puis il est remplacé selon le niveau de la lésion cible par un introducteur 4 F de 45 ou 70 cm de long (Cook Medical). Le travail de franchissement commence alors. Un point de difficulté de la PDRI est qu’il est impossible de faire une angiographie antérograde classique visualisant l’ensemble de la lésion avant de l’avoir franchie. Dans ce cadre, il est important de se fier aux données du scanner préopératoire voire à la fusion d’image pour avoir une idée de la zone de réentrée. En cas de difficulté, un cathlon fémoral de petit calibre pourrait être mis en place mais cela n’a jamais été nécessaire dans notre pratique. Une fois la lésion franchie, on vérifie la réentrée par une injection de produit de contraste. La préparation de la lésion est réalisée par une angioplastie au ballon 4 F Passeo-18 (Biotronik). Lorsqu’un stenting est nécessaire, le stent Pulsar®- 18 T3 (Biotronik), qui passe lui aussi dans un introducteur 4 F est utilisé. Lorsque la procédure nécessite du matériel de profil supérieur (lithotripsie, ballon actif, stent couvert, cathéter de réentrée) il nous est arrivé d’utiliser des introducteurs plus larges, jusque 6 F, par voie rétrograde sans complication – ou alors d’utiliser des matériaux profilés sans introducteur pour ne pas élargir l’orifice de ponction (figure 2).   En fin de procédure, le matériel est retiré et une compression manuelle légère d’une dizaine de minutes permet l’hémostase.   Sélection des malades   Les patients à haut risque pour une ponction fémorale sont de parfaits candidats. Il s’agit des patients obèses, ne tenant pas le décubitus, sous anticoagulants et/ou présentant des scarpas déjà opérés ou stentés (figure 3). Avec l’expérience, nous avons proposé cette approche à proportion grandissante de patients, souvent de façon élective. En phase d’apprentissage, il est plus simple de traiter des sténoses courtes et isolées plutôt que des occlusions. Les occlusions traitables par cette technique étaient sélectionnées sur la base de la classification C-TOP(9), déterminée sur l’angioscanner préopératoire, qui permet d’élaborer la stratégie de franchissement en fonction de la morphologie du début et de la fin de l’occlusion (figure 4). Les occlusions présentant une terminaison en « U inversé » dont le sommet est vers l’occlusion (C-TOP, types II et IV) constituent les bons candidats pour un franchissement endoluminal par PDRI (figure 5). Le scanner permet aussi de visualiser les axes jambiers et déterminer le site de ponction. Les artères jambières occluses peuvent tout à fait être ponctionnées dans l’occlusion ou en aval pour être recanalisées dans le même temps (figure 6) sans avoir l’arrière-pensée de léser une artère déjà pathologique. Figure 6. Patient posant le problème d’un ulcère artériel en lien avec une longue occlusion fémoropoplitée vue à l’angioscanner (A). Il n’existe pas de véritable moignon fémoral superficiel proximal (B). La tibiale postérieure est occluse (flèche) et peut justement être ponctionnée à ce niveau ou en aval sans crainte de la léser (C). La lésion a pu être recanalisée, dilatée (D) et stentée (E, F) avec du matériel 4 F (ballons Passeo-18 et stents Pulsar®-18 T3, Biotronik) par ponction distale rétrograde isolée sous anesthésie locale potentialisée et en ambulatoire.   Résultats   Sur 3 ans (août 2019 à juillet 2022), nous avons utilisé cette technique pour traiter 50 membres chez 42 patients dans nos deux centres. La majorité (74 %) présentait des situations stratégiques défavorables pour une PF : antécédent de chirurgie fémorale commune (28 %), obésité (24 %), antécédent de kissing stents ou d’endoprothèse rendant compliquée la réalisation d’un cross over (8 %) et stent fémoral commun en place (4 %). La tibiale postérieure était ponctionnée dans 70 % des procédures. Un introducteur 4 F était utilisé dans 86 % des interventions mais au besoin un 5 F voire un 6 F étaient utilisés dans 6 % et 8 % des cas, respectivement. La longueur moyenne de lésion était de 101 mm et 62 % étaient des occlusions. Le taux de succès technique était de 100 %. Tous les patients pouvaient déambuler le jour même. Certains patients ont décrit des douleurs modérées au point de ponction dans les premiers jours postopératoires. À 30 jours, aucune complication postopératoire majeure n’était notée, notamment hémorragique ou ischémique. La perméabilité primaire de la lésion cible était de 98 %. L’artère ponctionnée était perméable dans tous les cas sur l’écho-Doppler de suivi postopératoire. Les résultats de la technique de PDRI ont été rapportés dans quelques séries limitées dans la littérature(7,8). La principale expérience est celle de J.A. Mustapha et al.(7,8). Dans un premier papier(7), 36 lésions étaient traitées chez 23 patients. La stratégie était similaire à la nôtre mais les lésions traitées étaient principalement des lésions jambières dans le cadre d’ischémies critiques. Les seules complications notées à 30 jours étaient un faux anévrisme au point de ponction chez les deux seuls patients traités via une PDRI de la péronière, artère peu comprimable. Nous n’avons jamais utilisé de ponction directe de la péronière dans notre expérience pour éviter ce type de problème. La même équipe a publié par la suite une expérience plus large et comparative incluant les patients traités par PDRI (n = 101), ceux par voie fémorale (n = 840) et ceux traités par double accès antérograde et rétrograde (n = 254)(8). Les trois groupes n’étaient pas vraiment comparables sur le plan lésionnel. On peut toutefois noter l’absence de différence significative sur le taux de succès technique. Les seules complications d’accès notées dans le groupe PDRI étaient deux hématomes (2 %). Il n’y avait pas de faux anévrisme, de fistule ni de thrombus aux points de ponction.   Conclusion   L’angioplastie de l’axe fémoropoplité par PDRI est sûre et efficace. Elle constitue une alternative utile à la voie fémorale tout en étant parfaitement compatible avec une procédure ambulatoire. Cette technique est assortie d’une amélioration du confort du malade (procédure pouvant se faire sans décubitus strict, compression manuelle légère, pas de pansement compressif) et fait l’économie d’un système de fermeture percutané. La PDRI devrait être considérée plus régulièrement comme une approche possible lors de la planification d’une procédure endovasculaire périphérique. * Maxime Dubosqa,b, Régis Renardc, Jérémie Jayeta,b, Yves Castierc, Marc Coggiaa,b a. Service de chirurgie vasculaire, CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt. b. UMR 1018, Inserm-Paris 11-CESP, Université de Versailles, Saint-Quentin-en-Yvelines ; Université Paris-Saclay, Hôpital Paul Brousse, Villejuif. c. Service de chirurgie thoracique et vasculaire, CHU Bichat, Paris.

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