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Focus

Publié le 01 juin 2022Lecture 6 min

Réadaptation cardiaque de dispositifs électroniques cardiaques implantables

Marie-Christine ILIOU, hôpital Corentin Celton, Issy-les-Moulineaux

La réadaptation cardiaque (RC) est une prise en charge multidisciplinaire qui comprend l’évaluation à l’effort, un programme personnalisé d’entraînement physique, l’éducation thérapeutique, le contrôle de facteurs de risque cardiovasculaires, l’optimisation des traitements médicamenteux, des aides psychologiques et conseils pour le retour au travail. Elle est recommandée avec un haut niveau de preuve dans de nombreuses pathologies cardiovasculaires, essentiellement cardiopathies ischémiques et insuffisance cardiaque, car les bénéfices pour le patient (amélioration des capacités d’effort et pronostic) et pour le système de santé sont maintenant reconnus.

En France, le nombre de patients porteurs d’un dispositif électronique cardiaque implantable (DECI) ne cesse d’augmenter, les implantations dépassant les 10 000 par an. Ces patients sont très souvent adressés en réadaptation en raison de leur cardiopathie, mais la réadaptation est actuellement élargie aux porteurs de DECI sans cardiopathie(1). Récemment, un document de consensus des groupes de l’ESC concernés (EAPC et EHRA)(2) a fait le point sur les spécificités de la réadaptation cardiaque. Que retenir de cet avis ? L’évaluation clinique et technique avant la RC Les auteurs décrivent, bien entendu, l’évaluation complète incluant l’indication du DECI et la recherche de symptômes postimplantation pouvant évoquer des dysfonctionnements (syncope, palpitations). Ils insistent sur les aspects psychologiques : anxiété et acceptation du dispositif. Un examen cardiovasculaire soigneux doit comprendre la recherche d’éventuelles complications liées à l’implantation. Un point très important est rappelé : la communication au centre de réadaptation de la programmation du dispositif, en particulier les seuils de déclenchement d’un DAI, est indispensable. Le pourcentage de stimulation et l›analyse des histogrammes de fréquence sont également utiles. Un certain nombre d’anomalies pouvant nécessiter des réglages sont listés avec des propositions de solutions. Parmi les examens complémentaires requis, il est rappelé que la radiographie ou le scanner permet de détecter les éventuelles fractures, dislocation ou perforation, et que l’échocardiographie devra porter une attention particulière à la valve tricuspide. Enfin, un Holter ECG peut permettre de détecter des anomalies rythmiques ou de fonctionnement du DECI. L’épreuve d’effort (sur tapis roulant, cardiopulmonaire de préférence) limitée par les symptômes est nécessaire au début de la RC. Celle-ci permet une réassurance du patient, de prescrire l’entraînement en fonction des seuils ventilatoires et constitue un moyen d’évaluer que la programmation du DECI est adaptée à l’effort (en termes de fréquence cardiaque, arythmies induites par l’effort, efficacité du contrôle de la fréquence par les traitements). Par ailleurs, la détection de l’ischémie étant plus difficile chez les patients stimulés, il est rappelé que l’épreuve d’effort cardiopulmonaire permet de la suspecter en cas d’anomalies du pouls d’oxygène ou du débit cardiaque. Bénéfices et risques de l’entraînement physique Les bénéfices de l’entraînement s’observent aussi bien chez les patients appareillés par stimulateur conventionnel, CRT ou DAI, avec des gains de la capacité d’effort (et en conséquence de la qualité de vie) de 15 et 30 % selon les études. Si la resynchronisation cardiaque améliore les capacités physiques des insuffisants cardiaques, un programme d’entraînement permet une amélioration supplémentaire de 14 à 16 % du pic de VO2. Dans l’étude HF-ACTION (2 332 patients randomisés avec/sans réadaptation), 48 % des patients étaient implantés par un DAI (683 conventionnels et 435 avec resynchronisation), et il n’y a pas eu de réduction significative de la mortalité après 2 ans dans ce sous-groupe. En revanche, il n’a pas été observé de surrisque de survenue d’effets indésirables, et au contraire on note une diminution des arythmies graves dans le groupe entraîné(3). L’absence de risque est confirmée par quelques autres études randomisées réalisées chez les porteurs de DECI. Plus récemment une étude de cohorte multicentrique sur 460 393 patients appareillés(4) a montré que les 13 % de patients qui ont bénéficié d’un programme de réadaptation dans les 6 mois après l’implantation avaient une réduction de mortalité et de ré-hospitalisations (37 et 17 % respectivement) par rapport au groupe sans RC, sans différence significative des arythmies incidentes. Les spécificités du programme de réadaptation Elles sont décrites sur les plans de l’entraînement physique, de la prise en charge psychologique et des conseils. L’entraînement physique La RC doit se faire dans un centre spécialisé (en hospitalisation ou en ambulatoire selon la pathologie) mais peut, dans un second temps, être réalisée à domicile et en particulier en télé-réadaptation. Les patients appareillés par DAI sont généralement peu adressés en réadaptation et/ou ont une faible observance en rapport avec les syndromes anxiodépressifs et la peur de chocs. Il est recommandé de faire l’entraînement en centre, sous supervision cardiologique et monitoring ECG dans un premier temps. Il est recommandé d’arrêter l’exercice (test effort ou entraînement) à une FC < 10-20/min sous le seuil des thérapies. La pos-ibilité de consultation avec le centre implanteur est conseillée. Le risque d’arythmie sévère dépend de la pathologie sus-jacente et des antécédents ; les arythmies supra-ventriculaires peuvent déclencher des chocs inappropriés et doivent être prévenues par des bêtabloquants, par exemple. Les principales études ont été faites avec un entraînement classique d’intensité modérée sur un mode continu. Plus récemment, deux études ont démontré que l’utilisation de protocoles d’interval training (alternance de phases d’entraînement à haute intensité et de phases de récupération) est également possible en fonction des patients. L’entraînement en résistance active peut aussi être utilisé en évitant les tractions brusques du membre concerné par l’implantation et les chocs directs. L’électrostimulation qui est parfois proposée pour améliorer le tonus musculaire, à but antalgique ou d’amélioration de la circulation, peut générer des interférences électromagnétiques (IEM) avec les dispositifs. Celles-ci sont peu prédictibles mais plus fréquentes avec des courants alternatifs et peuvent altérer le fonctionnement du dispositif. Il n’y a pas de recommandations claires sur leur utilisation ; il semble raisonnable de réévaluer le risque en accord avec les recommandations du fabricant et du centre implanteur, l’utiliser sous monitoring ECG, avec une interrogation du dispositif après chaque possible interaction. L’éducation thérapeutique et la prise en charge psychologique Elles sont essentielles – requises dans les autorisations réglementaires de la RC –, pour l’amélioration de la qualité de vie. Celle-ci est clairement améliorée à court et long terme par l’implantation d’un stimulateur pour des raisons conventionnelles, elle semble préservée après implantation d’un DAI. Le risque de survenue de chocs peut conduire à des phénomènes de stress, anxiété voire dépression et après un choc (approprié ou non) d’une perte de la qualité de vie ressentie par le patient et son entourage. Les méthodes cognitivo-comportementales ont démontré leur efficacité pour réduire l’anxiété. Les conseils Les conseils concernant les activités physiques de loisir ou sportives sont en accord avec les recommandations européennes. Ainsi les patients asymptomatiques, sans arythmies ventriculaires à l’effort, doivent recevoir des conseils d’activité de loisirs à intensité modérée à moyenne. Pour les porteurs de DAI, les cardio-fréquencemètres ou montres connectées peuvent être utiles. À l’inverse, les patients symptomatiques doivent éviter les activités à haute intensité, y compris sportives. Les hautes intensités sont également déconseillées pour la cardiomyopathie arythmogène et les patients avec une cardiomyopathie hypertrophique (CMH). Chez tous les porteurs de DECI, les activités physiques ou sportives associées à des traumatismes thoraciques doivent être évitées (rugby, boxe, arts martiaux), de même que celles avec des mouvements répétés et violents du bras homolatéral (volleyball, basket, tennis, golf) en raison du risque d’endommagement des sondes. Les risques lors de l’activité sexuelle sont très rares, car la demande cardiaque n’est que modérée, mais les patients doivent bénéficier d’une éducation et de conseils sur ce sujet. Enfin, certaines activités professionnelles peuvent exposer à des interférences et nécessitent l’avis des médecins du travail. La conduite automobile et d’engins (à titre personnel ou professionnel) doit se conformer aux législations en vigueur(5).

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