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Coronaires

Publié le 15 mar 2011Lecture 5 min

­­­­­­Patient coronarien opéré d’une chirurgie non cardiaque - Synthèse et algorithme décisionnel

J. MACHECOURT, CHU Grenoble et V. PIRIOU, Lyon-sud, pour le groupe de travail SFAR-SFC

La prise en charge des patients coronariens en chirurgie non cardiaque représente un problème de santé majeur. Lorsque l’on extrapole à l’hexagone les statistiques européennes, on estime que 500 000 à 1 million d’interventions chirurgicales dites à haut risque d’accident cardiaque sont réalisées par an, ce qui conduirait à 5 à 10 000 décès en phase hospitalière.
Le vieillissement de la population va encore aggraver le problème dans les années à venir (chirurgie après 75 ans : + 24 % en 10 ans). La Société française d’anesthésie réanimation (SFAR) et à la Société française de cardiologie (SFC) ont voulu mettre en place des recommandations communes reposant non seulement sur une analyse de l’ensemble de la littérature et des précédentes recommandations publiées (parmi lesquelles les recommandations européennes), mais aussi en édictant, après obtention d’un consensus obtenu par vote, des recommandations.

Ces recommandations ont résulté des rapports de trois groupes de travail (1 : quantification du risque préopératoire, 2 : performance des examens, 3 : résultat des traitements médicaux et interventionnels). Nous présentons la synthèse de ces groupes de travail, sous forme d’un algorithme simple de prise en charge du patient coronarien ou à risque, devant être opéré de chirurgie non cardiaque. Cet algorithme présenté en figure 1, découle d’une approche par étapes successives, développée initialement par K Eagle. Cette démarche par étapes a pour objectif de reconnaître les patients les plus à risque de survenue d’une complication cardiaque, pour leur faire bénéficier d’une stratégie préventive : surveillance renforcée, mesures thérapeutiques, voire contre-indication à la chirurgie. Figure 1. Algorithme général de prise en charge du coronarien avant chirurgie non cardiaque. Etape n° 1 : examiner si cette chirurgie est urgente ou non. En cas de chirurgie urgente et vitale, celle-ci doit être réalisée quelle que soit la condition du patient ; le rôle de l’évaluation sera de mettre en garde contre l’importance du risque péri- ou postopératoire et, bien entendu, d’optimiser les traitements et la surveillance périopératoires. Le patient pourra alors être exploré et traité à l’issue de la chirurgie. Etape n° 2 : Si la chirurgie est élective (c’est-à-dire non urgente), la première question à se poser est d’écarter l’existence d’une pathologie cardiaque « instable ». La chirurgie réglée est contre-indiquée chez les patients qui, au moment de l’évaluation, présentent un syndrome coronarien aigu ou un angor sévère de classe 3 ou 4, une insuffisance cardiaque décompensée, une valvulopathie sévère, ou une arythmie ventriculaire ou supraventriculaire (incluant une fibrillation auriculaire à réponse ventriculaire trop rapide ou une bradycardie excessive, figure 2)). Le patient doit alors être traité selon les recommandations de la pathologie en cours avant d’envisager la chirurgie non cardiaque élective. Étape n° 3 : Chez les patients ne présentant pas une pathologie cardiaque « instable », considérer le niveau de risque de la chirurgie à réaliser. En cas de chirurgie à risque bas, (figure 3), celle-ci peut être effectuée sans investigation complémentaire. Etape n° 4 : Avant la réalisation d’une chirurgie à risque intermédiaire ou élevée, il faut mesurer la capacité fonctionnelle du patient et son score de risque (score de Lee). Ces facteurs sont facilement disponibles (figures 4 et 5) : • Lorsque le patient présente une bonne capacité fonctionnelle à l’effort (> 4 Mets), toutes ces chirurgies peuvent être réalisées d’emblée, quel que soit le score de Lee. Cette chirurgie possible d’emblée ne signifie pas l’absence de prise en charge ou d’adaptation du traitement médical. Chez un coronarien stable, outre la réalisation d’un ECG, la poursuite d’un traitement bêtabloquant ou par statine en cours est recommandée. L’introduction d’un traitement bêtabloquant est licite chez les patients devant bénéficier d’une chirurgie vasculaire mais une titration doit alors être réalisée afin que la fréquence cardiaque du patient soit ramenée progressivement aux alentours de 70 bpm ou un peu moins. • Lorsque le patient a une capacité d’effort diminuée (< 4 Mets), ou une capacité fonctionnelle non évaluable, intervient alors le nombre des facteurs (marqueurs) de risque clinique indépendants du score de Lee clinique du patient : 1. Lorsque ce patient n’a pas ou a un seul des facteurs de risque clinique, les chirurgies sus-citées peuvent être réalisées. 2. Lorsque ce patient présente ≥ 2 facteurs de risque et doit bénéficier d’une chirurgie vasculaire, ou s’il présente ≥ 3 facteurs de risque avant chirurgie non vasculaire à risque intermédiaire ou élevé, une recherche de l’ischémie est recommandée, et doit être discutée de façon collégiale, car cette recherche peut être suivie au besoin d’une revascularisation myocardique. Dans les autres situations cliniques, l’indication du test d’effort reste à discuter selon le contexte chirurgical et local. Bien entendu ce patient coronarien à risque opéré en chirurgie vasculaire doit aussi bénéficier du maintien voire de l’introduction du traitement par bêtabloquants ou statine. Un traitement en cours par statines ne doit jamais être interrompu. Etape n° 5 (éventuelle) : Discuter la place (limitée) d’une revascularisation myocardique préalable. La réalisation d’un test d’ischémie en préopératoire est donc limitée avant chirurgie à risque intermédiaire ou élevée aux patients qui présentent à la fois une capacité fonctionnelle diminuée et un score de Lee élevé. Selon l’expertise du centre, il s’agit d’une scintigraphie de perfusion ou d’une échographie sous dobutamine, les solutions les moins irradiantes devant être privilégiées. Selon l’importance de l’ischémie notée (classiquement > 15 % du myocarde à la scintigraphie myocardique, ou > 4 segments pathologiques/17 à l’échographie de stress), une revascularisation myocardique préalable peut être justifiée. Le niveau de cette recommandation reste modéré, suite aux résultats en demi-teinte des études CARP ou DECREASE 5, mais, par analogie à ce qui a déjà été montré dans des études médicales, les sous-groupes de patients à ischémie étendue semblent pouvoir tirer un bénéfice d’une telle revascularisation prophylactique. De l’importance de détecter les accidents coronariens péri-et postopératoires D’autres situations pathologiques rencontrées chez le coronarien sont discutées dans le texte des recommandations, par exemple la gestion d’un traitement par IEC, d’une FA à haut risque embolique ou d’un rétrécissement aortique calcifié, ou encore la gestion des patients ayant bénéficié d’une revascularisation myocardique par pontage ou angioplastie coronaire. Une spécificité des recommandations SFAR-SFC est de dire que la collaboration anesthésistes-cardiologues ne doit pas se limiter à la seule stratégie préopératoire, mais doit aussi se poursuivre durant la phase périopératoire, puis à distance de l’intervention. En effet, les stratégies diagnostiques et thérapeutiques développées en préopératoire réduisent l’incidence des complications cardiovasculaires les plus graves, parfois létales. Toutefois, les accidents coronariens aigus restent fréquents, car la situation péri- et postopératoire cumule pour le patient coronarien plusieurs des mécanismes déclencheurs du syndrome coronarien aigu : à la fois des facteurs de vulnérabilité d’un athérome coronarien préexistant (inflammation), et des facteurs de thrombose coronaire ; même lorsqu’ils sont frustres, ces accidents coronariens entraînent à distance un risque accru de récidive ischémique et de décès. Il est donc important de savoir les identifier en péri- ou postopératoire. Le groupe de travail recommande : - La réalisation systématique d’un ECG préopératoire avant toute chirurgie à risque élevé ou modéré, pour pouvoir ensuite le confronter au besoin avec des ECG postopératoires. - Le monitoring peropératoire et si possible postopératoire des patients bénéficiant d’une chirurgie à haut risque ou une chirurgie vasculaire. - Et surtout un dosage répété des troponines cardiaques, qui apparaît le marqueur le plus prédictif de l’évolution à distance. La mise en évidence d’une ischémie péri- ou postopératoire justifie alors un retour vers l’équipe cardiologique pour proposer une prise en charge adaptée, médicamenteuse et parfois interventionnelle de ce syndrome coronarien aigu, et plus généralement pour mettre en œuvre une stratégie de prévention secondaire de la maladie coronarienne.

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