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Coronaires

Publié le 10 oct 2006Lecture 12 min

Banc d'essai des traitements du coronarien - Les antiischémiques

S. WEBER, hôpital Cochin, Paris

Cette catégorie de médicaments de la maladie coronaire n’a pas connu de réelle innovation ces 10 à 15 dernières années. Les trois grandes classes pharmacologiques d’antiischémiques restent les bêtabloquants, les inhibiteurs calciques et les dérivés nitrés (et molécules apparentées).

Il n’y a pas eu de mise sur le marché de molécule réellement innovante ; en revanche, plusieurs essais thérapeutiques de morbi-mortalité, publiés, ayant inclus de larges effectifs et sur de longues durées, viennent combler le déficit d’information que nous avions concernant les anticalciques dihydropyridiniques et, parmi les médicaments apparentés aux nitrés, le nicorandil. Les bêtabloquants Cette classe pharmacologique (tableau 1) reste le socle du traitement antiischémique du patient coronarien. Nous ne reviendrons pas sur la pharmacologie des bêtabloquants qui se déduit très logiquement du mécanisme même de leur effet antagoniste compétitif de la noradrénaline endogène. Les acquis Les bases de leur efficacité thérapeutique sont représentées par l’épargne énergétique du myocarde ischémique et la réduction du risque d’arythmie ventriculaire sur ce même myocarde ischémique. Le socle consensuel de certitude est donc très vaste : • contrôle de l’ischémie d’effort chez le coronarien stable ; • participation au contrôle de l’ischémie de repos dans l’angor instable ; • réduction de mortalité et de morbidité dans le postinfarctus. La réduction de mortalité est liée principalement à la diminution de fréquence des morts subites mais également à celle des infarctus myocardiques mortels. La réduction de morbidité est représentée par une diminution du nombre de récidives d’infarctus, de récidives d’angor instable, d’angor d’effort résiduel, de troubles du rythme et d’apparition d’une insuffisance cardiaque postischémique. Dans le postinfarctus, l’amplitude de l’effet bénéfique des bêtabloquants est, fort logiquement, d’autant plus importante que l’infarctus était initialement grave et, en pratique, que la fraction d’éjection ventriculaire gauche était plus basse.   Un bémol ? La seule nuance que l’on peut apporter à ce constat triomphaliste est que l’essentiel des études ayant démontré ce bénéfice a été effectué avant l’ère de la reperfusion myocardique à la phase aiguë de l’infarctus ; la mortalité des groupes placebo de ces études était très significativement supérieure à ce que nous observons actuellement. Il est probable, de façon purement mathématique, que l’ampleur du bénéfice des bêtabloquants administrés à une population de postinfarctus dont le pronostic spontané s’est amélioré, soit un peu moins spectaculaire. La prescription reste néanmoins incontournable sauf contre-indication majeure. En effet, aucune autre classe d’antiischémique ne peut prétendre à une telle amélioration du pronostic dans le postinfarctus. Leur bénéfice ne doit pas être remis en cause. Enfin, les bêtabloquants ont établi leur efficacité dans la prise en charge : • des troubles du rythme ventriculaires chez le coronarien ; • de l’insuffisance cardiaque postischémique en termes d’amélioration des symptômes et de réduction de la mortalité. La question pratique n’est donc pas de savoir à quelle catégorie de coronarien l’on prescrit les bêtabloquants, mais : • Quels sont les rares patients ne relevant pas du traitement bêtabloquant ? • Comment limiter le risque d’effets indésirables ? • Y a-t-il un choix préférentiel pour telle ou telle molécule ?   À quel type de coronarien ne pas prescrire un bêtabloquant ? Tout d’abord, ceux qui ont une contre-indication insurmontable, la principale étant l’asthme bronchique. Quelle que soit la cardiosélectivité de la molécule utilisée, s’il s’agit d’un asthme authentique, le risque d’aggravation et de favoriser la survenue d’un état de mal est indiscutable. Attention cependant au diagnostic d’asthme chez le coronarien âgé ! Un asthme bronchique au-delà de la soixantaine est une éventualité possible mais plutôt rare. Bien souvent le diagnostic d’asthme  a été porté à tort devant une dyspnée à composante broncho-spastique correspondant en fait à de l’insuffisance ventriculaire gauche, conséquence directe de la cardiopathie ischémique. Si le diagnostic est rétabli en faveur d’un asthme cardiaque et non bronchique, le traitement bêtabloquant doit faire partie intégrante du traitement, en coprescription avec un IEC et un diurétique. Dans ce cas particulier, le bêtabloquant contribuera à la guérison de « l’asthme ». La bronchite chronique à composante bronchospastique n’est pas une contre-indication formelle des bêtabloquants mais nécessite l’utilisation de molécules cardiosélectives et, plus encore, une étroite concertation avec le pneumologue. Il ne s’agit, en effet, pas de se contenter de la mention « cardiosélectif » dont se prévaut tel ou tel médicament ; il faut vérifier, dans le cas particulier de chaque patient, qu’à la dose prescrite le traitement n’aggrave pas l’obstruction bronchique. En dehors de l’asthme, toutes les autres contre-indications théoriques des bêtabloquants peuvent être surmontées. De même, la majorité des effets indésirables peuvent être corrigés, ou tout du moins fortement limités, si le prescripteur est suffisamment motivé dans son désir de faire bénéficier à son patient du blocage adrénergique et s’il sait donc être suffisamment pédagogue et convaincant ! Chez le coronarien totalement revascularisé après un geste de pontage ou d’angioplastie, les bêtabloquants n’ont plus d’indication formelle, sauf si l’on se situe dans les deux à trois premières années après un infarctus myocardique transmural. La prévention secondaire et la coprescription obligatoire d’aspirine et de statines doivent être assorties de la répétition à échéance régulière de tests de détection de l’ischémie qui ont toutes leurs logiques dans ce cas précis.   Comment gérer les contre-indications relatives et limiter les effets indésirables ? Malgré un niveau de preuve d’efficacité particulièrement élevé, la classe des bêtabloquants a longtemps été très notoirement sous-prescrite en raison d’un double préjugé négatif de la part des prescripteurs comme de celle des patients (tableau 2). Replacée dans le contexte « historique » du début des années 60 où l’adrénaline était considérée comme une « substance vitale » par excellence, la notion de contrecarrer l’effet de ce médiateur, surtout au niveau du cœur, était pour le moins effrayante. Il en est résulté, de façon bien compréhensible, une énorme litanie de contre-indications et de précautions d’emploi, dont la plupart sont tombées au fil du temps ; la plus impérieuse, l’insuffisance cardiaque, est même devenue aujourd’hui une indication impérative. Les troubles conductifs, la dysfonction sinusale, représentent une limitation fréquente à la prescription des bêtabloquants chez les sujets âgés. Lorsque l’indication est réellement bien posée, il est raisonnable d’implanter un pacemaker dans le seul but de permettre au patient de bénéficier d’un bêtabloquant. De toutes façons, les patients dont la fréquence cardiaque s’effondre dès la prescription d’un quart de comprimé de bêtabloquant auraient été « spontanément » candidats au pacemaker quelques mois ou quelques toutes petites années plus tard. L’apparition d’un phénomène de Raynaud sous bêtabloquants représente parfois un réel problème ; généralement la coprescription d’une dihydropyridine permet de rétablir la situation. L’imputabilité des bêtabloquants dans l’apparition d’une impuissance chez le coronarien sexa- ou septuagénaire est très fortement exagérée. Dans les essais contrôlés, la prévalence de l’impuissance dans le groupe bêtabloquant est, certes, élevée sur ce terrain mais elle l’est à peine moins, de 2 à 3 % généralement, dans le groupe placebo. En pratique, si les bêtabloquants sont interrompus, tout du moins dans ces tranches d’âges, le retour à une libido et une fonction érectile normales est loin d’être assuré. Rappelons que d’autres classes pharmacologiques prescrites chez le coronarien chronique comme les statines peuvent être imputables, là aussi avec une fréquence réelle de déclenchement d’un trouble de l’érection relativement faible. En pratique, un peu de discernement s’impose avant d’interrompre « automatiquement » un traitement bêtabloquant lorsque le patient se plaint de difficulté érectile. Si le problème persiste malgré cet arrêt et s’il devient nécessaire d’y apporter une réponse pharmacologique spécifique, il faudra tenter de réintroduire les bêtabloquants, notamment chez les coronariens à haut risque. L’asthénie physique et psychique est un effet indésirable fréquemment observé dans le groupe bêtabloquant mais également sur ce terrain dans le groupe placebo. Dans certains cas cependant les bêtabloquants sont indiscutablement asthéniants ; l’utilisation de posologies initiales progressives et le reconditionnement musculaire lorsqu’il est nécessaire permettent souvent de surmonter ce symptôme et de poursuivre la prescription sur le long cours.   Quelle molécule choisir ? La réponse est simple : toutes les molécules ayant prouvé leur efficacité dans le cadre d’un essai thérapeutique contrôlé chez le coronarien. Le choix est donc vaste… Les molécules non cardiosélectives de première génération, dont le vénérable ancêtre le propranolol, exposent plus aux effets indésirables ß-2 (asthme, Raynaud) ; surtout, elles ont un profil pharmacocinétique médiocre et nécessitent des ajustements posologiques initiaux plus fréquents. Les molécules cardiosélectives à longue demi-vie (métoprolol, aténolol, tétaxolol, acébutolol, etc.) sont à juste titre largement prescrites. L’acébutolol, doté d’une petite activité sympathomimétique intrinsèque, est parfois utile chez le sujet âgé dont la fonction sinusale est modérément déprimée ; il met à l’abri d’une bradycardie de repos excessive, rarement fonctionnellement gênante mais toujours effrayante pour le médecin traitant et le patient. Certaines molécules revendiquent une cardiosélectivité particulièrement développée (céliprolol). La dose bêtabloquante contenue dans chaque comprimé est cependant plus faible que la moyenne ; les ß-2 récepteurs bronchiques sont moins bloqués mais les ß-1 récepteurs cardiaques le sont aussi. Certains bêtabloquants (nadolol) sont réputés particulièrement puissants ; ils ne sont, en fait, pharmacologiquement guère différents de leur congénères mais le comprimé unitaire est fortement dosé. Les notions de bêtabloquants léger, normal ou puissant n’ont guère de sens en pharmacologie. Enfin, le sotalol a de solides indications en rythmologie ; en revanche, il n’y a pas d’argument réellement déterminant pour lui conférer une protection particulière contre les troubles du rythme ventriculaire ischémiques du coronarien. • Les bêtabloquants peuvent se prévaloir d’un nombre impressionnant « d’étoiles ». Leur taux de prescription dans leur indication principale, le postinfarctus, est globalement satisfaisant en France. • Deux réserves cependant peuvent être émises : ●  chez le sujet âgé où la sous-prescription reste fréquente ; ● un taux probablement excessif d’abandons de traitement pour des effets indésirables fréquemment subjectifs et dont l’imputabilité réelle est incertaine. • Une inquiétude : l’alourdissement progressif de l’ordonnance du coronarien chronique. L’arrivée de nouvelles molécules, coûteuses et bénéficiant de la protection d’un brevet, s’accompagne d’efforts promotionnels importants pouvant faire perdre de vue la prescription de bêtabloquant, une classe pharmacologique ancienne dont la plupart des molécules sont tombées dans le domaine public et qui ne bénéficient donc plus d’un réel soutien « médiatique ». Craignons qu’à l’avenir, le prescripteur ait tendance à oublier le bêtabloquant, dont il n’entendra plus guère parler au profit de classes pharmacologiques plus récentes mais dont l’ampleur du bénéfice pourrait se révéler bien plus faible.   Les inhibiteurs calciques   Les inhibiteurs calciques bradycardisants Le vérapamil et le diltiazem n’ont pas fait l’objet d’études réellement innovantes ces dix dernières années. Ces deux molécules restent la meilleure alternative aux bêtabloquants lorsque ceux-ci sont formellement contre-indiqués ou lorsqu’ils ont suscité un effet indésirable authentiquement insurmontable. Du fait de la conjonction d’un effet bradycardisant, d’un effet inotrope négatif et d’une amélioration des conditions de charge du ventricule gauche, les inhibiteurs calciques bradycardisants ont une efficacité antiangineuse et antiischémique comparable à celle des bêtabloquants chez le coronarien chronique stable (tableau 3). Ils sont donc efficaces sur un éventuel angor résiduel symptomatique. Ils peuvent également efficacement contrôler une ischémie silencieuse. Toutefois, ils ne réduisent pas,  dans des proportions comparables à celles des bêtabloquants, la morbi-mortalité du postinfarctus. Leur utilisation est contre-indiquée en cas d’altération significative de la fonction ventriculaire gauche ; le risque de déclenchement ou d’aggravation d’une insuffisance cardiaque symptomatique est bien réel. De ce fait, les anticalciques bradycardisants ne doivent être proposés qu’en 2e intention lorsque l’utilisation des bêtabloquants s’avère réellement impossible.   Les anticalciques dihydropyridiniques Ils ont fait l’objet, ces cinq dernières années, de plusieurs essais thérapeutiques importants qui modifient leurs conditions d’utilisation. Les anticalciques de 1re génération (essentiellement nifédipine), bien que dotés d’effets antiischémiques et antiangineux indiscutables, ne réduisaient pas la morbi-mortalité coronaire quelle que soit la forme clinique de la maladie coronaire. Aux fortes doses, une tendance à la détérioration du pronostic avait même été notée dans plusieurs essais thérapeutiques, cette tendance étant particulièrement soulignée par les métaanalyses. Les effets nocifs de ces dihydropyridines de 1re génération étaient directement liés à l’activation sympathique consécutive, à l’ampleur et la rapidité de la vasodilatation artérielle qu’ils induisaient. De nouvelles formes galéniques à libération prolongée ont été élaborées (essentiellement pour la nifédipine). De nouvelles molécules à effet plus progressif ont été synthétisées (la plus utilisée étant l’amlodipine) (tableau 4). Cette nouvelle génération de dihydropyridines, non dénuée de réflexe sympathique délétère, a fait l’objet de plusieurs études cliniques de morbi-mortalité, objectivant une diminution significative d’événements pertinents : réhospitalisations pour angor, recours à la coronarographie, à l’angioplastie ou à la chirurgie ainsi qu’une tendance à la réduction de la mortalité cardiovasculaire, sans cependant d’effet significatif sur la mortalité toute cause. Contrairement aux anticalciques bradycardisants, les dihydropyridines peuvent être coprescrites avec les bêtabloquants ; il s’agit même d’une coprescription potentiellement synergique. Les données récentes sur les dihydropyridines ne sont pas d’ampleur suffisante pour recommander leur utilisation systématique en coprescription aux bêtabloquants chez tous les coronariens. Néanmoins, cette classe pharmacologique peut être utilement associée aux bêtabloquants dans d’assez nombreuses circonstances cliniques : • persistance d’une ischémie sous bêtabloquants, qu’elle soit symptomatique ou silencieuse ; • réapparition de symptômes chez un coronarien bêtabloqué chez lequel une nouvelle exploration coronarographique n’est pas envisagée (âge, comorbidité, lit d’aval) ; • prise en charge d’une hypertension résiduelle chez un coronarien dont les chiffres tensionnels ne seraient pas suffisamment contrôlés par les bêtabloquants.   Dérivés nitrés et apparentés La trinitrine sublinguale garde toute sa place et devrait être prescrite et « enseignée » à tout patient coronarien quels que soient le mode de début de sa maladie et sa sévérité. Ce rappel pourrait paraître scolaire et superflu mais dans la pratique, cette prescription ancestrale est parfois oubliée lors de la rédaction de l’ordonnance de sortie ou bien est inscrite en bas de l’ordonnance sans explication du mode d’emploi aux patients, ce qui est pire encore ! • L’utilisation d’une forme galénique en dragées sublinguales nous paraît offrir de meilleures garanties d’efficacité et de sécurité que les sprays (tableau 5). • Les dérivés nitrés retards sont principalement utilisés en patchs transdermiques permettant effectivement d’assurer un profil pharmacocinétique satisfaisant à condition que les patchs ne soient positionnés que 12 à 14 h/j en respectant un intervalle libre d’au moins une dizaine d’heures pour prévenir le phénomène d’échappement. • La molsidomine est administrable par voie orale, sa demi-vie courte nécessitant cependant 3 prises par jour. • Les patchs transdermiques de nitrés et la molsidomine se conçoivent essentiellement en coprescription avec un bêtabloquant ou un inhibiteur calcique bradycardisant si les bêtabloquants sont contre-indiqués. Ils sont surtout utiles lorsque persiste une ischémie résiduelle malgré un bêtabloquage adrénergique correct. • Le nicorandil associe des propriétés antiischémiques « de type nitré » à un effet agoniste potassique reproduisant le « préconditionnement » ischémique et améliorant donc, sur divers modèles pharmacologiques, la tolérance du myocarde à l’ischémie. Une étude récente a montré que cette particularité pharmacologique s’accompagne bel et bien d’une réduction de morbidité chez le coronarien chronique (essentiellement moins d’angors résiduels, moins de réhospitalisations pour angor, moins de recours à la revascularisation). Tout comme pour les anticalciques dihydropyridiniques, la réduction de morbidité n’est certes pas d’ampleur suffisante pour préconiser la prescription systématique de nicorandil à tous les coronariens ! Cette molécule gagne cependant une place utile en coprescription aux bêtabloquants lorsque ceux-ci ne suffisent pas à contrôler l’ischémie.   Pour conclure   Rappelons que l’utilisation judicieuse des antiischémiques, à des posologies suffisantes, en élaborant des associations médicamenteuses logiques et cohérentes (par exemple : bêtabloquant + dihydropyridine de 2e génération ou bêtabloquant + nicorandil), permet non seulement de contrôler les symptômes mais également de contrôler l’ischémie et de réduire la morbidité. Les antiischémiques ne sont donc pas de simples cosmétiques qu’il convient d’interrompre pour évaluer « vraiment » la maladie coronaire (la célèbre spécialité hexagonale des tests d’effort démaquillés…). Il s’agit, au contraire, d’un traitement susceptible de contrôler l’ischémie  en limitant le recours aux techniques de revascularisation par chirurgie et surtout par angioplastie, qui devraient être réservées, chez le coronarien chronique, aux patients porteurs des formes anatomiques les plus sévères et/ou à ceux dont l’ischémie n’est pas pharmacologiquement contrôlable.

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