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Vasculaire

Publié le 28 juin 2005Lecture 6 min

Faut-il donner un traitement antihypertenseur après un infarctus cérébral ?

H. ABBOUD et P. AMARENCO, hôpital Bichat, Paris

L’hypertension artérielle (HTA) est de loin le plus important facteur de risque d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémiques et hémorragiques.
Certains sont directement provoqués par l’HTA comme l’hémorragie intracérébrale secondaire à une rupture d’artériole (dégénérescence hyaline ou microanévrisme) ou l’infarctus lacunaire (nécrose fibrinoïde).
D’autres lui sont indirectement liés, souvent associés à d’autres facteurs de risque comme la maladie athéromateuse et les embolies d’origine cardiaque.

Avec le vieillissement de la population, augmente la prévalence de l’HTA et ce malgré les progrès et avancées thérapeutiques. Le vieillissement normal s’accompagne d’une perte de distensibilité des artères élastiques, entraînant une augmentation de la pression artérielle systolique (PAS). L’HTA systolique isolée est donc un problème fréquent chez la personne âgée et, compte-tenu de la croissance démographique de la population âgée, le nombre d’hypertendus va continuer à augmenter. Nous développerons la prise en charge de la pression artérielle (PA) en phase aiguë et en prévention secondaire des AVC. AVC sylvien superficiel gauche étendu à J3. (Atlas Pratique des complications de l’hypertension artérielle). PA en phase aiguë de l’AVC Au stade aigu de l’infarctus cérébral, la PA est élevée dans 75 % des cas et s’amende progressivement pendant la première semaine de l’AVC. Cette élévation est un phénomène physiologique d’origine multi-factorielle (activation du système neuroendocrinien, augmentation du débit cardiaque, antécédent d’HTA, etc.). Elle est nécessaire dans le cas de l’infarctus cérébral, afin d’assurer un débit sanguin cérébral au-dessus du seuil de nécrose des cellules entourant la zone de l’infarctus (la pénombre). Une baisse brutale de la PA pourrait diminuer le débit sanguin cérébral et par là même accentuer les dégâts cérébraux irréversibles. En revanche, maintenir une PA trop élevée pourrait aussi aggraver la situation en favorisant la formation d’œdème, la souffrance neuronale et éventuellement le pronostic fonctionnel à 3 mois. Ainsi, la surveillance de la PA à la phase aiguë de l’AVC demeure une étape importante dans sa prise en charge. Cependant, il est difficile de fixer des valeurs seuils de PA à partir desquelles une prise en charge thérapeutique doit être discutée en dehors des cas particuliers de la thrombolyse, de l’AVC hémorragique (hémorragie méningée, hématome intracérébral ou épi- ou sous-durale) et certaines circonstances particulières (infarctus du myocarde, dissection de l’aorte et autres). Dans le cas de la fibrinolyse, l’European Stroke Initiative (EUSI) a émis des recommandations pour la prise en charge de l’HTA (tableau). Dans les autres cas et d’une manière plus générale, l’EUSI recommande de traiter des chiffres > 220 mmHg/120 mmHg et sans dépasser les 15 % environ du chiffre initial sur les 24 premières heures et évidemment sous surveillance neurologique. Dans certains cas d’AVC, il est préférable de maintenir une PA élevée ou même de l’augmenter pour maintenir un débit sanguin cérébral suffisant pour éviter la nécrose cellulaire. Un exemple caractéristique est l’occlusion ou la sténose serrée d’une artère carotide associée à un retentissement hémodynamique intracrânien sévère et une aggravation ou fluctuation du déficit neurologique en fonction de la posture (debout-assis ou couchée à plat) du patient. Cette attitude thérapeutique ne peut s’appliquer qu’au stade aigu de l’infarctus cérébral. Ainsi, la prise en charge de la PA au stade aigu de l’infarctus ne peut pas être univoque et afin de l’optimiser il est important de prendre en compte plusieurs facteurs (type d’AVC, traitement thrombolytique, mécanisme d’infarctus, etc.). Nous manquons encore cruellement d’études sur l’efficacité ou, au contraire, sur le caractère délétère de la baisse tensionnelle à la phase aiguë de l’accident cérébral, en dehors des exemples cités plus haut. Par exemple, l’étude IST (International Stroke Trial) suggère l’existence d’une courbe en U du devenir des patients en fonction de la PAS (figure). Figure. Proportion des patients décédés dans les 14 jours de l’infarctus (ligne continue) ou qui ont un mauvais pronostic à 6 mois (ligne pointillée) selon le niveau de la pression systolique initiale (J Leonardi-Bee et al. Stroke 2002). Prévention secondaire de l’AVC En prévention secondaire, le périndopril associé à l’indapamide (PROGRESS) a été validé dans la prévention des AVC ischémiques et hémorragiques. Les patients inclus dans cette étude, étaient hypertendus ou normotendus avec un antécédent d’AVC ischémique ou hémorragique. La réduction du risque relatif de récidive a été de : • 28 % pour les AVC (IC = 17-38) à 5 ans quel que soit le sous-type d’AVC (50 % pour l’hémorragique et 24 % pour l’ischémique), • 26 % sur les événements vasculaires majeurs. Ces résultats significatifs ont été observés chez les patients avec une PA > ou < 160/90 mmHg. Ainsi on pourrait éviter sur 5 ans : • 1 AVC pour 14 patients traités, • 1 événement vasculaire majeur pour 11 patients traités. Une autre étude, HOPE (Heart Outcomes Prevention Evaluation study), a montré que, même avec une baisse modeste de la PA, on peut obtenir une réduction relative de récidive d’AVC de 32 % en utilisant le ramipril à la dose de 10 mg/j, chez des patients majoritairement coronariens. Cet effet bénéfique a été observé quelle que soit la pression initiale, les traitements associés, la présence ou non de facteurs de risque vasculaire. S’ajoute à cet effet bénéfique, une diminution relative de l’épaisseur intima-média en utilisant une dose de ramipril de 10 mg/j (SECURE, étude ancillaire de HOPE). Les résultats très favorables du traitement hypotenseur et sa bonne tolérance constituent une information majeure et devront nous conduire à introduire ou à renforcer un traitement hypotenseur après un AVC, y compris chez des sujets normotendus. Il faut introduire ou renforcer un traitement hypotenseur après un AVC, y compris chez des sujets normotendus. Peut-on envisager d’autres classes d’hypotenseurs ? Plusieurs questions restent en suspens. Faut-il se limiter à un traitement par IEC associé à un diurétique après un AVC ou peut-on envisager d’autres classes d’hypotenseurs ? En effet, en prévention primaire, le bénéfice des hypotenseurs s’observe pour l’ensemble des grandes classes thérapeutiques (diurétiques, bêtabloquants, inhibiteurs calciques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine [IEC] et antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II [ARA II]). La possibilité qu’une classe thérapeutique puisse être supérieure à d'autres dans la prévention d’AVC reste un sujet débattu et non réglé. La protection apportée par les IEC a été débattue après les résultats de l‘étude ALLHAT (Antihypertensive and Lipid Lowering treatment to prevent Heart Attack Trial) mais devraient être précisés à l’occasion de l’ESC où les résultats de l’étude ASCOT (Anglo-Scandinavian Cardiac OuTcomes) seront présentés en détail. D’autres études détermineront si, après un AVC, il existe une classe thérapeutique supérieure en prévention secondaire, et si cet effet est lié uniquement à la baisse de la PA ou également en partie à d’autres effets pléiotropes agissant sur le remodelage artériel ou la maladie athéromateuse par exemple, et si ces traitements peuvent agir sur le déclin cognitif d’origine vasculaire.   Améliorer l’observance Sur la base des données existantes, il est d’une importance capitale pour la santé publique de tout mettre en œuvre pour optimiser la prise en charge de la PA en prévention secondaire de l’AVC. Ces mesures doivent inclure : • l’éducation thérapeutique du patient et de sa famille, • une infirmière de prévention pour le suivi de l’observance thérapeutique, • la généralisation et le remboursement de l’automesure tensionnelle à domicile, • le développement du suivi de cette automesure par télémédecine par l’infirmière de prévention et le médecin généraliste. Deux articles récents attestent le bénéfice du monitoring ambulatoire de la PA. • L’étude de Hansen et coll. montre une augmentation significative du risque relatif de la mortalité cardio-vasculaire de 1,51 (IC = 95 % ; 1,28-1,77) pour chaque augmentation de la PAS ambulatoire de 10 mmHg et de 1,43 (IC = 95 %; 1,26-1,61) pour chaque augmentation de 5 mmHg de la PAD ambulatoire. • De même, l’étude PAMELA (Pressioni Ambulatoriali e Loro Associazioni) a montré une augmentation significative et exponentielle du risque cardio-vasculaire et de la mortalité toutes causes avec l’augmentation de la PA qu’elle soit mesurée en clinique, en ambulatoire ou à domicile.   En pratique Ces deux études viennent confirmer que la mesure ambulatoire de la pression artérielle est un outil fiable et complémentaire d’évaluation du patient hypertendu et un excellent facteur prédictif de mortalité cardio-vasculaire. Une bibliographie sera adressée aux abonnés sur demande au journal.

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