publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Cardiologie interventionnelle

Publié le 22 juin 2004Lecture 6 min

Stents actifs - C’était il y a 15 ans à peu près…

S. WEBER, hôpital Cochin, Paris

C’est en arpentant l’un des gigantesques lieux de congrès nord-américain, il y a une quinzaine d’années, que les cardiologues ont senti souffler le puissant vent du progrès et de l’innovation : la lutte contre la resténose était engagée. L’engouement actuel pour les stents actifs, dont les indications restent à « formaliser », justifie cette première mise au point de Cardiologie Pratique dans un domaine qui évolue très rapidement.

    Apparition des stents métalliques Cette année-là, deux sessions vedettes étaient en compétition. Dans un petit amphithéâtre, c’est-à-dire dont la capacité devait être limitée à un millier de sièges, se déroulait, sous la présidence des deux co-inventeurs de la plus ancienne des endoprothèses, une session consacrée aux possibilités de limiter le phénomène de resténose par l’implantation d’une vulgaire barrière métallique. Une heure plus tard, dans le grand auditorium, débutait une session plénière consacrée à la thérapie génique endocoronaire et notamment à son potentiel de lutte contre la resténose post-angioplastie. De bon matin — cette assiduité matinale étant au demeurant largement facilitée par le décalage horaire — j’ai assisté à la première session sur les endoprothèses : du sérieux, du solide ; les séries de contrôle angiographique de stents se succédaient à la tribune, faisant état de résultats honorables. Mais, soyons clairs, cela a été un peu ennuyeux, répétitif et dénué de véritable challenge intellectuel. La salle était pleine mais, après le quatrième ou cinquième exposé de la série, à l’heure où débutait la session plénière dans la « main arena », l’essentiel de l’audience déserta l’amphithéâtre pour aller s’adonner aux joies de la thérapie génique. Les diapositives étaient plus belles, multicolores, les nombreux messagers intracellulaires de la resténose dansaient devant nos yeux un ballet très séduisant, préfigurant, à l’ère des bonnes vieilles diapositives, ce qu’allaient être, quelques années plus tard, les présentations informatisées. Les présentations étaient originales et passionnantes, les discussions qui les ont suivies, de très haute tenue intellectuelle. L’auditoire en est sorti séduit et persuadé que, décidément, l’avenir était dans les acides nucléiques et leurs vecteurs et non pas dans l’acier inoxydable. Quinze ans plus tard, les thérapies géniques n’ont pas réellement trouvé d’applications validées, en tout cas pas en cardiologie et, tout au moins selon ma modeste connaissance du problème, à peine plus dans les autres disciplines. Cependant, soyons honnêtes ; il y a 15 ans ou un peu plus, nos collègues fondamentalistes nous avaient bien mis en garde sur le gouffre existant entre la biologie cellulaire et la réalité clinique ; dans l’ivresse de la découverte d’un concept nouveau et brillant, probablement ne les avons-nous pas assez écoutés. En contrepartie, les modestes petits ressorts métalliques, dont l’impact « théâtral » avait été à l’époque fort médiocre, ont accompli un sacré bout de chemin ! Après quelques courtes années de mise au point, les stents métalliques nus ont très fortement réduit le risque de complication aiguë de l’angioplastie, d’abord chez les coronariens stables puis quelques années après, moyennant un accompagnement pharmacologique adéquat, lors des syndromes coronariens aigus. Cette première étape a été marquée par l’obsolescence du concept de stand by chirurgical et l’extension rapide (parfois un peu trop...) des indications de la cardiologie interventionnelle.   Restait le très irritant problème de la resténose Certes, les endoprothèses « nues » avaient non seulement fortement réduit le risque de complications immédiates de l’angioplastie, mais également partiellement fait diminuer l’incidence de la resténose symptomatique. Diminuer, mais pas disparaître, loin de là : le problème restait bien réel, plus encore chez le coronarien diabétique ; la gestion de la resténose représentait à peu près 10 % de l’activité des laboratoires de cardiologie interventionnelle et nécessitait parfois des thérapeutiques lourdes chirurgicales, voire une radiothérapie interne.   Lutter contre la prolifération intimale L’idée de « tapisser » les endoprothèses métalliques d’un polymère permettant de fixer et de diffuser progressivement une substance antiproliférative n’est pas neuve. Le démembrement des mécanismes de la resténose, la mise en évidence de la place proéminente, dans la resténose intrastent, des phénomènes de prolifération intimale a fort logiquement suscité des efforts de recherche dans cette direction. La mise au point n’a pas été simple, mais après la phase habituelle de tâtonnements, plusieurs instruments performants sont actuellement disponibles sur le marché. Certes, lors d’une utilisation à large échelle les résultats constatés dans les registres, fidèle reflet de la vraie vie, sont un tout petit peu moins parfaits que ce que laissaient prévoir les tout premiers essais contrôlés. Ne boudons cependant pas notre plaisir ; la réduction du risque de resténose est bien réelle, considérable, représentant une amélioration authentique et importante du service rendu à nos patients.   Tout n’est pas résolu pour autant Dans cette monographie, les différents auteurs font avec précision et talent le point des indications acquises et validées et des indications encore incertaines en cours d’évaluation dans des situations cliniques différentes (notamment syndrome coronarien aigu) et dans des conditions anatomiques moins standardisées que celles ayant fait l’objet des premiers essais démonstratifs. Quelques petites années sont encore nécessaires pour savoir si, comme le pensent certains, il n’y aura bientôt plus de place que pour les stents actifs ou, comme le suggèrent d’autres auteurs, le rapport coût/efficacité et bénéfice/risque ne sera réellement supérieur à celui des endoprothèses « nues » que dans certains sous-groupes de patients. La réponse à ces légitimes questions — le problème spécifique de la resténose chez le diabétique, l’évaluation de la sécurité pendant 6 mois de coprescription de clopidogrel-aspirine chez les coronariens les plus âgés — feront également sans nul doute l’objet de prochaines publications. Un petit nombre d’années nous sépare donc encore du positionnement définitif des endoprothèses actives. La cardiologie interventionnelle a conquis de très larges parts de marché ; la mise au point des stents actifs lui permettra sans doute, et à juste titre, de les étendre encore.   La prévention reste essentielle Je voudrais cependant terminer par un modeste rappel « étiologique ». Quand bien même la resténose serait totalement domptée et maîtrisée par cette nouvelle génération de stents, l’angioplastie coronaire, ne représentera pas, à elle seule, le traitement curatif de la maladie coronaire ! Face à une maladie diffuse de tout l’arbre artériel coronaire, « débordant » de surcroît vers d’autres territoires vasculaires chez de nombreux patients, une revascularisation, aussi parfaite soit-elle, ne nous dispensera pas de la mise en œuvre énergique de toutes les mesures de prévention secondaire, revascularisation et approche pharmacologique étant indissolublement liées. La maîtrise, peut-être presque totale du phénomène de resténose, pourra probablement légitimement faire opter pour l’angioplastie plutôt que pour la chirurgie chez certains patients, notamment en cas de diabète. Par contre, cette maîtrise de la resténose n’a pas pour corollaire l’extension des indications de l’angioplastie à toutes les lésions coronaires quels qu’en soient la sévérité, la topographie, le retentissement sur la fonction ventriculaire gauche et le potentiel ischémiant.   Pour conclure   Même si le risque, en général, a été spectaculairement réduit ces dernières années, celui inhérent à la cardiologie interventionnelle n’est pas nul, surtout chez le coronarien âgé. La mise sur le marché de ces stents de nouvelle génération ne dispense donc pas de ce qui est l’essence même du travail médical, c’est-à-dire l’évaluation individuelle la plus précise possible du rapport bénéfice/risque du traitement que l’on souhaite mettre en œuvre.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème