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Insuffisance cardiaque

Publié le 14 fév 2016Lecture 6 min

Notre rôle clé dans la période vulnérable du patient insuffisant cardiaque

M.-C. ILIOU, Service de réadaptation cardiaque et prévention secondaire, Hôpital Corentin Celton, AP-HP, Issy-les-Moulineaux

Les Journées nationales du GERS-SFC

La période vulnérable : qu’est-ce que c’est, quels risques ?   La phase dite « vulnérable » couvre la période du premier mois qui suit l’hospitalisation. En effet, le nombre d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque augmente en France pour atteindre actuellement plus de 140 000 séjours (+14 % en 6 ans)(1) avec une prévalence de près de 70 000 patients par an(2). Toutefois, alors que l’on observe une tendance à la diminution de la durée moyenne des séjours (liée essentiellement à un souci d’efficience), le nombre des réhospitalisations précoces augmente et s’accompagne d’une plus forte mortalité. Ainsi, la période qui suit une hospitalisation pour insuffisance cardiaque est associée à un sur-risque de décès à court terme (risque multiplié par 6)(3) et à un risque majoré de réadmission (25 % à 30 jours(2) et de 56 % à 1 an(4)). On connaît par ailleurs la corrélation entre le nombre de réhospitalisations et la mortalité(5,6). Parmi les caractéristiques des patients qui influencent la surmortalité, on retrouve bien entendu l’âge et les comorbidités : fibrillation atriale, hypertension artérielle ou hypotension marquée, AVC, diabète, apnées du sommeil, insuffisance rénale ou hépatique, obésité, BPCO et anémie(7). Mais les facteurs organisationnels ont également un impact sur la morbi-mortalité, parmi lesquels on retrouve la baisse de la durée du séjour, les facteurs de vulnérabilité sociale et le délai de consultation du médecin et/ou du cardiologue traitant après la sortie de l’hôpital. En France, le taux de consultation du médecin traitant ou du cardiologue 2 mois après la sortie de l’hôpital n’est que de 86 % et 34 % respectivement. Or, une consultation du médecin généraliste dès la première semaine après la sortie permet une réduction de la mortalité et des réhospitalisations(8).   À quoi est due cette « vulnérabilité » ?   La phase vulnérable est souvent due à la correction incomplète de la rétention hydrosodée et du syndrome congestif dont les principaux marqueurs sont les signes cliniques pulmonaires, les œdèmes et le taux de peptides natriurétiques et/ou l’altération de la fonction rénale. Par ailleurs, les conditions liées à l’hospitalisation — les modifications diététiques, l’alitement et le déconditionnement musculaire qui en découle, parfois la perte de repères et l’aggravation de troubles cognitifs — sont également sources de fragilisation du patient. Enfin, des pathologies iatrogènes essentiellement liées au maniement des traitements (diurétiques, hypnotiques, etc.) peuvent majorer les risques. Ainsi, il semble essentiel d’améliorer la prise en charge en post-hospitalisation, de façon précoce, pour optimiser la thérapeutique, limiter les coûts et mettre en place une prise en charge multidisciplinaire pour laquelle de nombreuses solutions organisationnelles sont maintenant proposées.   Que peut-on faire avant la sortie du patient ?   L’optimisation du parcours du patient doit se préparer très tôt, c’est-à-dire avant la sortie du patient des soins aigus. Plusieurs organisations peuvent être imaginées, dont le parcours proposé par la HAS(9) ou par l’American Heart Association(10). Avant la sortie du patient, quelques questions simples peuvent être proposées : - quels ont été les facteurs de la décompensation ? Les risques de récidive de ces facteurs peuvent orienter la prise en charge (par exemple : la non-observance du régime et/ou des traitements qui imposent de reprendre l’éducation du patient, ou l’organisation des explorations complémentaires d’une anémie ferriprive, etc.) ; - le patient est-il stabilisé ? Évaluation clinique (état général, poids, oedèmes), capacités fonctionnelles, fonction rénale et des marqueurs pronostiques tels que le taux de BNP et la fréquence cardiaque à la sortie ; – le retour à domicile est-il organisé ? Parmi les interventions testées, on peut citer : la consultation précoce (< 7 jours) programmée avec le médecin et/ou le cardiologue, le suivi par un professionnel de santé (infirmière ou coordinateur dédié comme dans le programme Prado actuellement testé en France), l’éducation thérapeutique, les différents types de suivi téléphonique ou par télémédecine ; sans oublier le volet psycho-social de la prise en charge. La transmission au médecin de ville et la qualité des documents de sortie semblent également associées à une réduction des réadmissions ; - le traitement est-il optimal en regard des recommandations ? - le patient a-t-il une indication de réadaptation cardiaque ? En pratique, l’association de ces interventions personnalisées pourrait permettre une meilleure qualité de la prise en charge. Que disent les recommandations ?   En réalité, la vulnérabilité des patients insuffisants cardiaques pourrait être considérée comme permanente, même si certaines périodes clés dont les suites immédiates d’une (énième) hospitalisation sont plus à risque. Passé la phase de congestion (associées à un alitement et à la perte de capacités fonctionnelles), les phases suivantes doivent permettre la stabilisation, la titration et la réadaptation. Dans les recommandations de l’ESC : IEC, bêtabloquants, diurétiques constituent la première étape (classe IA), la prescription d’antialdostérone est en seconde ligne (classe IA) et l’association de l’ivabradine (classe IIaB) si le patient garde une fréquence cardiaque supérieure à 70 bpm en rythme sinusal. La gestion du traitement médicamenteux, pourtant bien codifié et connu, n’est pas optimale. Plusieurs registres et études le montrent non seulement pour les taux des classes médicamenteuses utilisées, mais également en ce qui concerne les dosages prescrits. Ainsi par exemple, le registre FUTURE(11) montre que si 75 à 77 % des patients reçoivent un bêtabloquant et 85-86 % des IEC/ARA 2, seuls 10 à 20 % atteignent la dose cible de bêtabloquants et 44-53 % celles des IEC/ARA 2, avec une progression après la sortie de l’hôpital qui reste minime. Or, il est clairement démontré que le pronostic est amélioré par l’adhésion aux recommandations. De même, une fréquence cardiaque qui reste élevée après l’hospitalisation (à la sortie ou dans le mois qui suit) est un facteur de mauvais pronostic. Toutefois, la prescription de novo des bêtabloquants après un premier épisode d’insuffisance cardiaque n’améliore pas le taux de réhospitalisation précoce ; les effets bénéfiques de ce traitement se manifestent à plus long terme(12). De plus, pour diverses raisons : persistance de la congestion ou hypotension artérielle, la titration des bêtabloquants peut être difficile. Dans ces cas, la prescription d’ivabradine peut être proposée car ce traitement permet de ralentir significativement la fréquence cardiaque, on a observé une réduction des réhospitalisations de 35 % à 30 jours dans l’étude Shift(13), et une amélioration de la classe NYHA et des capacités fonctionnelles sans empêcher la titration des bêtabloquants(14). En effet, une étude a montré que l’ajout d’ivabradine au carvédilol permet d’atteindre des doses de bêtabloquants plus élevées et ce, plus rapidement, sans majorer le risque de bradycardie(14). Ce résultat surprenant s’explique par un effet bénéfique de l’ivabradine sur l’hémodynamique ; une administration d’ivabradine en IV chez des patients insuffisants cardiaques sévères entraîne une augmentation rapide du volume d’éjection systolique (VES)(15). Cette augmentation du VES a également été observée à plus long terme dans une sous-analyse de SHIFT(16). Enfin, l’importance des capacités physiques tant sur le pronostic que sur la qualité de vie des patients insuffisants cardiaques, la prise en charge pluridisciplinaire incluant l’éducation thérapeutique font que la réadaptation cardiaque est également dans les recommandations de l’ESC et celles de la SFC de niveau IA. Or en France, seuls 9 % des patients en bénéficient. Pourtant les bénéfices démontrés sont l’amélioration des capacités fonctionnelles et la qualité de vie, des effets bénéfiques sur la survie, la réduction des réhospitalisations. Les programmes de réadaptation permettent également la mise en place d’une éducation thérapeutique, l’évaluation du pronostic avec discussion des différentes options thérapeutiques l’instauration et l’optimisation des traitements médicamenteux y compris ceux qui permettent une réduction de la fréquence cardiaque (paramètre qui intervient dans la tolérance à l’effort). D’après les communications de A. Cohen-Solal, P. Meurin et B. Gellen aux Journées nationales du GERS-SFC 2015

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