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Congrès et symposiums

Publié le 14 déc 2015Lecture 3 min

Faut-il encore dépister la microalbuminurie ?

P. GIAIME, Néphrologue, Marseille

CNCF

L’albumine, de poids moléculaire 65 kDa, ne passe pas ou très peu la barrière de filtration glomérulaire en situation physiologique, à la fois pour des raisons de taille et de charge électronégative. Quand elle passe le glomérule, elle n’est que très peu réabsorbée par le secteur tubulaire. De fait, lorsqu’on en retrouve en quantité significative dans les urines, on conclut à une lésion du glomérule. En dessous de 30 mg/24 h, on considère la quantité comme négligeable. La différence entre microalbuminurie et albuminurie est une simple question de quantité : de 30 à 300 mg/24 h, on parle de microalbuminurie, et au-delà de 300 mg/24 h, on parle d’albuminurie, ou plus simplement de protéinurie « ouverte ».

Les maladies touchant le glomérule et pourvoyeuses d’albuminurie sont nombreuses, mais le diabète est de loin la plus fréquente. On en retrouve aussi dans les glomérulopathies primitives (par exemple la maladie de Berger), ou secondaires (par exemple le lupus). La physiopathologie diffère entre ces affections : pour le diabète, il s’agit du dépôt d’AGE sur le glomérule, générant une lésion de fibrose par activation de mécanismes inflammatoires. D’une manière générale, l’intérêt d’un dépistage réside dans la possibilité à faible coût de prévenir l’évolution vers une maladie plus grave.   Chez qui dépister une microalbuminurie ?   Essentiellement chez les patients diabétiques, pour qui il s’agit du premier signe patent de néphropathie, avec l’hypertension artérielle. La néphropathie diabétique est d’évolution lente, sur plusieurs années ; elle commence par une hyperfiltration, puis au bout d’environ 5 ans apparaît une microalbuminurie, puis quelques années plus tard une protéinurie ouverte, ce qui conduit à l’apparition d’une insuffisance rénale qui va secondairement s’aggraver. Nous sommes donc dans un temps long, généralement supérieur à 10 ans, propice aux interventions thérapeutiques. Le dépistage chez les hypertendus, et bien entendu les insuffisants rénaux, a un intérêt également pour l’orientation diagnostique.   Une fois dépistée, peut-on traiter la microalbuminurie ?   Le traitement repose sur les inhibiteurs du système rénine angiotensine (SRAA), essentiellement les sartans. Le mécanisme est une levée de la vasoconstriction naturelle sur l’artériole efférente, d’où une baisse de la pression de filtration glomérulaire, et donc une baisse de la filtration dont la protéinurie. Cet effet est potentialisé par l’adjonction d’un diurétique. La cible tensionnelle doit être de 130/80. Les meilleurs résultats sont aussi obtenus avec une cible d’hémoglobine glyquée à 7 %. Plusieurs études montrent que l’instauration d’un blocage du système rénine angiotensine permet soit de négativer la microalbuminurie, soit de ralentir son évolution vers la protéinurie ouverte. D’autres études (Brenner, 2004 ; IDNT, 2007) montrent que ce type de traitement ralentit l’évolution vers le stade d’insuffisance rénale chronique. En pratique, la présence d’une microalbuminurie induit des modifications dans le traitement médicamenteux, et des cibles thérapeutiques, pour éviter l’aggravation des paramètres rénaux. Le dépistage de la microalbuminurie est donc justifié du point de vue rénal. Dans l’idée de diminuer encore plus la protéinurie, et d’être plus strict sur le niveau de pression artérielle, il a été tenté de majorer le blocage du SRAA en associant par exemple IEC et sartans. Les différentes études ont retrouvé dans ce contexte un plus grand nombre d’événements rénaux, et pour certaines une surmortalité cardiovasculaire. Cette attitude a donc été abandonnée. Les raisons évoquées de ce manque de résultat ont été un niveau de pression artérielle trop bas, ou bien des effets délétères d’une inhibition trop forte du SRAA sur d’autres paramètres que l’hémodynamique. Du point de vue cardiovasculaire, la microalbuminurie est associée à une surmortalité, d’autant plus que le patient est hypertendu. Il est donc logique d’attendre une réduction des événements cardiovasculaires si on parvient à la réduire. Les résultats des études sont cependant contrastés. En effet, certaines études sont en faveur d’un bénéfice cardiovasculaire associé à la baisse de la microalbuminurie sous sartan. D’autres essais ne retrouvent pas ce bénéfice, voire une surmortalité lorsque des doses importantes de bloqueur du SRAA sont utilisées.   En pratique   La microalbuminurie est un marqueur d’atteinte rénale débutante, avant l’apparition d’une insuffisance rénale, surtout chez les patients diabétiques. Le traitement de la microalbuminurie par le biais de la baisse de la pression artérielle sous bloqueurs du SRAA, potentialisée par un régime adapté, des diurétiques, et un contrôle accru du diabète, permet de ralentir l’élévation de la protéinurie, et de reculer l’apparition de l’insuffisance rénale. Enfin, si le bénéfice cardiovasculaire du traitement de la microalbuminurie n’est parfois pas retrouvé, certaines études sont néanmoins en faveur.

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