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Mise au point

Publié le 25 juin 2020Lecture 5 min

Ablation hybride de la FA

Issam ABOULIATIM Bordeaux

La procédure chirurgicale Cox-Maze a été introduite il y a 25 ans pour traiter les patients atteints de fibrillation auriculaire (FA) réfractaire, avec un taux de succès de la version Cox-Maze III allant jusqu'à 85 % de patients en rythme sinusal à 10 ans(1). Malgré ce résultat satisfaisant à long terme, l’ablation chirurgicale reste trop invasive pour être largement adoptée comme option thérapeutique de premier plan. Une simplification de la procédure a été proposée avec un accès minimalement invasif, en utilisant différents dispositifs d'ablation et différentes sources d’énergie(2).

Les techniques d’ablation endocavitaire se sont également développées pour réaliser, entre autres, des lignes d’ablation autour des veines pulmonaires. Malgré les bons résultats de cette technique pour traiter la FA paroxystique, l'isolement des veines pulmonaires reste insuffisant pour restaurer un rythme sinusal chez les patients atteints de FA persistante(3,4,5).

La procédure hybride est, par définition, « une procédure d’ablation conjointe réalisée par des électrophysiologistes et des chirurgiens cardiaques soit dans le cadre d’une seule procédure, soit réalisée en tant que deux procédures distinctes mais à moins de six mois d’intervalle »(6). Elle permet d’intégrer les avantages de l’approche épicardique (création d’une « box » autour des quatre veines pulmonaires) et de l’approche endocavitaire (accès à des zones inaccessibles à la chirurgie mini-invasive et comblement des zones incomplètement ablatées) pour réaliser une ablation complète et la moins invasive possible. Technique Temps chirurgical Deux approches épicardiques par radiofréquence peuvent être conduites par voie mini-invasive et dans le cadre d’une prise en charge hybride : – l’approche transdiaphragmatique : grâce à une incision sous xiphoïdienne, le dispositif d’ablation (EPi-Sense® Guided Coagulation Technology) est inséré à travers le diaphragme puis dans le péricarde et plusieurs applications de radiofréquence sont réalisées au niveau de la paroi postérieure de l’oreillette gauche pour une isolation complète du mur postérieur ; – l’approche thoracoscopique bilatérale : sur l’hémithorax droit, trois ports de 5 mm sont placés dans le troisième, cinquième et sixième espace intercostal (figure 1). Le péricarde est ouvert. Les sinus transverses et obliques sont disséqués. L’isolement antral des veines pulmonaires droites est effectué en utilisant une pince radiofréquence bipolaire (Atri- Cure). La même procédure est ensuite effectuée du côté gauche. Une ligne de toit (connectant les deux veines pulmonaires supérieures) et une ligne inférieure (connectant les deux veines pulmonaires inférieures) sont réalisées à l’aide d’un stylo linéaire (Coolrail, AtriCure). Figure 1. Installation des thoraco-ports droits et ligne d’ablation des veines pulmonaires droites. À la fin de la procédure, un clip (AtriClip, AtriCure) est positionné à la base de l’auricule gauche sous vision directe et avec assistance échographique, pour obtenir une exclusion externe. Temps électrophysiologique Le cathéter est mis en place dans l’oreillette gauche pour réaliser sa cartographie (figure 2). Les lésions de la « box » épicardique sont contrôlées en vérifiant le bloc d’entrée et de sortie des veines pulmonaires. Une ablation endocardique de l’isthme cavo-tricuspide ou une ablation de la ligne mitrale est ajoutée en présence d’un flutter commun ou d’un flutter mitral dépendant de l’isthme(7). Si nécessaire, un choc électrique externe est réalisé à la fin de la procédure. Figure 2. Cartographie de l’oreillette gauche après ablation épicardique, montrant un isolement électrique complet. Indications Actuellement il n’existe pas de recommandations spécifiques pour l’ablation hybride de la FA. En accord avec les recommandations européennes et américaines, l’ablation chirurgicale de la FA — préférablement par voie mini invasive — peut être considérée pour les patients symptomatiques après échec d’une ablation endocavitaire (classe IIa, C) ou, comme première option thérapeutique chez les patients présentant une FA persistante ou de longue durée réfractaire au traitement anti-arythmique. L’indication est posée en prenant en compte le choix du patient, le rapport bénéficesrisques et après validation de la « Heart Team »(8,9). Résultats Les résultats de l’approche hybride sont prometteurs. Cependant, notre compréhension de l’efficacité de ce traitement est entravée par la grande variabilité qui existe entre les centres en termes d’inclusion des patients (FA persistante, de longue durée ou paroxystique), du schéma thérapeutique (ablation en un temps ou en deux temps), des lésions effectuées et enfin du protocole post-opératoire et du suivi. Dans une série récente, le taux de succès global est de 80 % à 3 ans. Ce résultat est identique chez les patients en FA paroxystique et persistante(10). L’intérêt majeur de l’ablation hybride reste le traitement des patients atteints de FA persistante de longue durée. En effet, dans ce groupe les résultats de l’ablation endocardique sont décevants, avec un taux de succès à 5 ans de 20 % après une ablation et de 45 % après de multiples procédures(4). Une métaanalyse récente a démontré la supériorité de l’ablation hybride par rapport à la seule ablation endocavitaire chez les patients avec FA persistante de longue durée (70,7 % vs 49,9 % en rythme sinusal sans anti-arythmique à 1 an(11)). En effet, l’approche hybride offre plusieurs avantages techniques. Tout d’abord, le temps chirurgical permet la création de lésions transmurales, limite majeure de l’approche endocardique, grâce à l’utilisation d’une pince de radiofréquence bipolaire, plus efficace en terme d’ablation que les sources monopolaires(12). Ensuite, le temps endocavitaire offre la possibilité de combler les lacunes laissées après la procédure épicardique, permettant de réaliser une ablation la plus complète et efficace possible(13,14). Enfin, l’ablation hybride permet l’exclusion de l’auricule gauche afin de prévenir les embolies cérébrales. Elle est recommandée pour les patients présentant une contre-indication à l’anticoagulation orale et pour ceux bénéficiant d’une chirurgie cardiaque ou d’un traitement thoracoscopique de la FA(8). De plus, il a été démontré que l’auricule gauche peut être à l’origine de foyers arythmiques, et l’application de l’AtriClip permet d’associer à l’exclusion mécanique une exclusion électrique(15,16). L’approche hybride présente, en revanche, des inconvénients en termes de lourdeur de l’intervention et par conséquent de complications : conversion en sternotomie, tamponnade, lésion du nerf phrénique, pneumothorax. Ce taux de complication, plus élevé qu’avec l’approche endocardique seule, est à relativiser si l’on prend en compte la lourdeur de la procédure hybride et aussi le fait que, bien que conduite dans des centres d’excellence, le nombre de patients traités et le nombre de centres référents restent limités(17). Le choix de l’ablation hybride doit être fait après consultation de la « Heart Team » et dans une population sélectionnée, notamment avec FA persistante, symptomatique, avec une oreillette gauche dilatée. Le succès futur de l’approche hybride pour le traitement des FA persistantes dépendra indéniablement des complications qui lui sont associées. Comme tout traitement innovant, la limitation de ces complications passera par la diffusion de la technique dans les centres de références pour la prise en charge de la FA.

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