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Thrombose

Publié le 20 oct 2011Lecture 8 min

Recommandations et pratiques professionnelles pour la prise en charge de la maladie thromboembolique veineuse

J.-F. ALEXANDRA, Hôpital Bichat, Paris

Nous allons passer en revue les modalités pratiques d’introduction et les durées recommandées du traitement par HBPM dans les différentes situations chirurgicales puis médicales.
Notons en préambule que la contention mécanique dont les effets secondaires apparaissent négligeables et les contre-indications rares (artériopathie sévère des membres inférieurs) est recommandée dans toutes les situations, malgré des niveaux de preuve hétérogènes.

Traitement préventif   Milieu chirurgical   La conférence de consensus est consultable sur le site de la SFAR : http://www.sfar.org   Possibilités théoriques La prophylaxie est fonction du risque lié au geste. De manière générale, les traitements recommandés sont les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) à une écrasante majorité ou les autres inhibiteurs indirects de la thrombine (héparine non fractionnée, fondaparinux). De manière plus anecdotique, sont proposés les inhibiteurs directs de la thrombine (hirudine principalement) ou les AVK dont le niveau de preuve est nettement inférieur. Plus récemment, sont apparus dans ces indications des inhibiteurs oraux des facteurs IIa ou Xa dont la place en situation gériatrique est encore à cerner.   En pratique : les HBPM avant tout Les HBPM semblent le traitement de référence dans la plupart des situations. Dans les suites d’une prothèse totale de hanche (PTH), le fondaparinux apparaît supérieur aux HBPM, mais son utilisation au-delà de 75 ans ou chez l’insuffisant rénal est mal évaluée, et cette molécule semble comporter un risque hémorragique plus élevé. La posologie des héparines est fonction du niveau de risque et est résumée dans le tableau 1.   Quand démarrer l’anticoagulant ? L’introduction du traitement préventif peut avoir lieu avant ou après la chirurgie, aucune étude n’établissant avec certitude le moment le plus opportun. La durée du traitement est spécifique à chaque geste chirurgical.   Chirurgie orthopédique Cette discipline confère un risque thrombotique élevé autour de 50 % sans traitement 14 jours apè.s une PTH.   • Prothèse totale de hanche : le traitement sera prolongé jusqu’à 6 semaines après le geste chirurgical. Le choix de la molécule varie entre le fondaparinux (avant 75 ans), ou les HBPM à dose préventive « forte ». • Fracture du col fémoral : prophylaxie à dose « forte » jusqu’au 35e jour postopératoire, sans que les recommandations ne distinguent la prothèse de l’ostéosynthèse. • Prothèse de genou : la duée du traitement est de 14 jours, à dose préventive « forte ». Elle peut se prolonger en cas de facteurs de risque propres au patient. • Rachis : il n’y a pas de consensus en cas de chirurgie . type de hernie discale ou de laminectomie. Le risque paraît modéré mais le contexte gériatrique rend licite un traitement préventif « fort » jusqu’à la reprise de la déambulation.   En cas de pathologie orthopédique non chirurgicale (fracture du bassin…) ne donnant pas lieu à une intervention, il semble licite de proposer une prévention « forte » jusqu’à reprise de la déambulation. En cas de risque hémorragique, une contention veineuse est impérative.   Chirurgie urologique Schématiquement, le risque est modéré lors d’un geste par voie endoscopique et élevé en cas de chirurgie ouverte du bas appareil. Il n’y a pas lieu de modifier la durée du traitement en fonction du caractère ambulatoire ou non.   • En chirurgie endoscopique (prostate, vessie, incontinence urinaire par voie périnéale), le risque modéré justifie une anticoagulation à dose « faible » pendant 7 à 10 jours. • En chirurgie ouverte, le traitement à dose « forte «  est prescrit pendant 7 à 10 jours. • En chirurgie carcinologique, la durée d’une prévention « forte » est au cas par cas, pouvant aller jusqu’à 6 semaines.   Chirurgie abdominale et varices • En cas de chirurgie « majeure » (côlon, foie, pancréas, lésions cancéreuses), le risque thrombotique élevé justifie une anticoagulation préventive « forte » de 7 à 10 jours et jusqu’à un mois en cas de cancer. • En cas de chirurgie non majeure (vésicule non inflammatoire, paroi, appendice, proctologie) ou de varices, le risque apparaît modéré. Une prévention « faible » pour une durée de 7 à 10 jours semble licite.   Chirurgie gynécologique Pour un risque modéré (hystérectomie vaginale, laparotomie exploratrice, coelioscopie > 60 min, chirurgie mammaire carcinologique), la situation gériatrique amène à une anticoagulation « forte » pendant 7 à 14 jours. Si le risque est élevé (hysé.rectomie voie haute, prolapsus, tumeur pelvienne), une anticoagulation « forte » est prescrite pendant 4 semaines. Milieu médical La démonstration, dans la littérature, de l’intérêt d’une intervention médicamenteuse a longtemps été rendue difficile par l’hétérogénéité des patients pris en charge et des méthodes emplo.es pour la détection de la MVTE. Les résultats ont longtemps été décevants et les recommandations délicates. On constate d’ailleurs toujours un mésusage des HBPM avec à la fois une tendance à la surprescription et à la sous-prescription par méconnaissance des facteurs de risque identifiés de MVTE. L’indication d’une prévention de la MVTE en médecine se situe de plus au carrefour de phénomènes aigus et chroniques ajoutant à la confusion. Elle impose pour finir une évaluation rigoureuse et répétée de la situation afin de définir la durée optimale du traitement.   Depuis 1999, sous l’influence de l’essai MEDENOX, comparant 2 dosages d’énoxaparine (20 et 40 mg) au placebo en situation médicale aiguë, la situation apparaît en partie clarifiée : – la dose d’énoxaparine 20 mg n’est pas supérieure au placebo ; – à 40 mg l’énoxaparine réduit de 15 à 5,5 % l’incidence de la MVTE (p < 0,001). À la dose de 40 mg par jour, l’énoxaparine paraît être le standard « historique » de la prévention de la MVTE(1). Quelques questions restaient néanmoins en suspens.   • Quelles alternatives ? En 2003, F.X. Kleber et coll. montrent que les HNF semblent posséder un profil de tolérance et d’efficacité superposable avec un sur-risque hémorragique non significatif dans le groupe HNF. Leur usage est une alternative validée aux HBPM(2). • Quelles posologies pour les HBPM ? En l’absence d’essai clinique, la posologie des HBPM à dose préventive en milieu médical est calquée sur le risque fort chirurgical. • Quelle durée de traitement ? L’essai MEDENOX limitait la durée du traitement à10 °± 4 jours. Il n’est pas certain que cette durée soit optimale chez tous les patients… En théorie, le bénéfice du traitement préventif de la MVTE doit se prolonger tant que persiste le phénomène aigu. On bascule ensuite dans un excès de risque hémorragique induit par les HBPM. La limitation à 10 jours apparaît ainsi théorique et la durée optimale très difficile à estimer (figure).   L’étude EXCLAIM compare la poursuite du traitement anticoagulant préventif au-delà de 10 °± 4 jours au placebo, pour une durée totale de 28 jours. La poursuite du traitement s’accompagne d’une diminution significative des épisodes veineux thromboemboliques, mais l’essai ne démontre pas de baisse significative de la mortalité spécifique(3). En revanche, le traitement par énoxaparine pendant 28 jours augmente significativement le risque d’hémorragies de tous grades. Il n’y a pas eu d’essai de ce type avec les autres HBPM.   Il est difficile de tirer une conclusion définitive de cette étude mais la remise en question régulière du bénéfice du traitement par HBPM paraît s’imposer, tout particulèrement au-delà de 75 ans, même s’il peut apparaître licite de prolonger le traitement préventif tant que le phénomène aigu perdure. La question de la durée du traitement né.tant pas tranchée de manière formelle, elle reste majoritairement à l’appréciation du clinicien.   Traitement curatif   Il est indiqué chez tous les patients, hors contre-indication, dès la mise en évidence ou la suspicion de TVP ou d’EP. Les modalités en cas d’insuffisance rénale et les spécificités propres au sujet âgé seront détaillées plus loin.   Le tableau 2 recense les molécules disponibles et leur posologie. La durée requise de traitement est celle nécessaire au relais par le traitement AVK, sauf dans le cas particulier du cancer où le traitement prolongé par HBPM permet une réduction significative et importante du risque de récidive sans réduction de tolérance (recommandations Afssaps 2009). Ces résultats ont été obtenus avec des posologies d’HBPM légèrement inférieures aux posologies curatives habituelles, sauf pour la tinzaparine.     Dans cette situation, la durée du traitement par HBPM doit idéalement être de 3 à 6 mois en fonction de la tolérance et de l’évolution du cancer ainsi que des modifications de son traitement. Au-delà de 6 mois, si le traitement anticoagulant est nécessaire : – si le cancer est toujours traité et si le patient tolère le traitement héparinique, il est recommandé de poursuivre les HBPM ; – si le cancer n’est plus traité ou si le patient ne tolère plus les HBPM, il est recommandé d’instaurer un relais par AVK. Devant une MVTE confirmée objectivement survenant au cours d’un cancer, il est recommandé d’utiliser les posologies suivantes : – dalé.parine 200 UI/kg une fois par jour pendant un mois puis 150 UI/kg une fois par jour ; – tinzaparine 175 UI/kg une fois par jour ; – énoxaparine 150 UI/kg une fois par jour.   Quelle surveillance, quelles contre-indications ?   La crainte d’accidents hémorragiques graves avec les HBPM est fondée : ils arrivent au second rang derrière ceux liés aux AVK à la fin des années 1990. Ils sont d’autant plus fréquents que la fonction rénale est altérée, ce qui a conduit l’Afssaps à contre-indiquer leur emploi si le DFG est < 30 ml/min dans les indications curatives. Outre la surveillance spécifique à la population gériatrique (activité anti-Xa…) qui sera détaillée plus loin, certaines recommandations restent valables dans toutes les populations concernées. Elles concernent surtout la crainte d’une thrombopénie induite par l’héparine (TIH). Elles sont reprises par l’Afssaps et actualisées en 2009 avec un allègement des recommandations lié au faible risque de TIH sous HBPM. Il est indispensable d’obtenir une numération plaquettaire avant tout traitement héparinique ou le plus tôt possible après l’instauration du traitement. En cas de traitement ambulatoire, le patient doit être informé de la possibilité de survenue d’une TIH et des manifestations pouvant faire évoquer le diagnostic.   Une surveillance systématique de la numération plaquettaire n’est pas recommandée en cas de traitement par HBPM à dose prophylactique ou curative en dehors d’un contexte postopératoire.   Une surveillance systématique de la numération plaquettaire est recommandée : – en cas de traitement par HNF souscutanée ou intraveineuse avec une numération plaquettaire 2 fois par semaine pendant 21 jours ; – en cas de traitement par HBPM en cas d’administration préalable de traitement par HNF ; – en cas de traitement d’une MVTE postopératoire avec une numération plaquettaire 2 fois par semaine pendant 1 mois ; – devant tout nouvelé.pisode thromboembolique artériel et/ou veineux ; – devant toute lésion cutaé.e douloureuse au site d’injection ; – devant toute manifestation anaphylactoïde en cas d’administration d’HNF intraveineuse faisant suite à un traitement héparinique prescrit dans les 3 à 6 mois précédents. Si une surveillance plaquettaire est préconisée pendant 1 mois et que le traitement héparinique est poursuivi, notamment chez les patients cancéreux avec un épisode de MVTE, une surveillance régulière systématique ne semble pas nécessaire au-delà du 1er mois (accord professionnel).   • En cas d’antécédent de thrombopénie à l’héparine, des alternatives telles que l’orgaran ou le fondaparinux seront proposées. • En cas de DFG < 30 ml/min, l’HNF doit alors être privilégiée même si, dans ce cadre, elle n’a jamais démontré d’innocuité supérieure(5) aux HBPM. "Gérontologie Pratique, supplément, publication avancée en ligne"

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