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Études

Publié le 21 sep 2004Lecture 21 min

Cardiologie Pratique a 20 ans - 2 décennies d’essais cliniques

Infarctus du myocarde avec sus-décalage persistant du segment ST

Restauration précoce du flux coronaire Il est admis, depuis les travaux de Falk (Br Heart J 1983 ; 50 : 127-32), Davies (Br Heart J 1985 ; 53 : 363-9) et Dewood (N Engl J Med 1986 ; 315 : 417-21), qu’une thrombose coronaire occlusive est à l’origine de l’infarctus du myocarde aigu dans plus de 90 % des cas. La restauration précoce du flux coronaire, qui peut être obtenue par thrombolyse IV ou angioplastie, est le meilleur garant du pronostic car elle limite l’étendue de la nécrose et préserve ainsi la fonction ventriculaire gauche.   Thrombolyse intraveineuse La thrombolyse IV diminue la mortalité des patients traités pendant les 12 premières heures de l’infarctus. Telle est la conclusion des études menées avec les 3 premiers fibrinolytiques évalués vs placebo, à savoir la streptokinase, dans les essais GISSI (Lancet 1986 ; 1 : 397-402) et ISIS 2 (Lancet 1988 ; 2 : 349-60), l’altéplase dans l’étude AIMS (Lancet 1990 ; 335 : 427-31) et l’APSAC dans l’étude AIMS (Lancet 1990 ; 335 : 427-31). Le gain en matière de pronostic est d’autant plus important que la thrombolyse a débuté précocement après l’apparition des symptômes. - C’est ce qu’a montré la métaanalyse de Boersma (Lancet 1996 ; 348 : 771-5) dans laquelle le nombre de vies sauvées est respectivement de 65, 37 et 26 pour 1 000 patients traités aux 1re, 2e et 3e heures de la nécrose. Dans l’étude GISSI, la réduction maximale de la mortalité atteint 50 % chez les patients traités au cours de la 1re heure de l’infarctus, encore appelée « golden hour » : d’où l’intérêt de la thrombolyse préhospitalière, débutée au domicile du patient. - L’étude EMIP (N Engl J Med 1993 ; 329 : 383-9), réalisée chez 5 469 patients randomisés dans les 6 premières heures de l’infarctus, a montré que la thrombolyse préhospitalière, comparée à la thrombolyse réalisée à l’arrivée à l’hôpital, permettait de gagner 55 minutes et s’accompagnait d’une baisse significative de la mortalité d’origine cardiaque à la fin de la période hospitalière (8,3 vs 9,8 %). De même, la métaanalyse de Morrison (JAMA 2000 ; 283 : 2686-92), qui a porté sur 6 études randomisées ayant inclus 6 434 patients au total, a confirmé que la thrombolyse préhospitalière permettait de gagner environ 1 heure et s’accompagnait d’une diminution significative de la mortalité hospitalière de 17 % en valeur relative, par rapport au traitement débuté à l’arrivée à l’hôpital. Le délai d’application de la thrombolyse peut néanmoins être étendu jusqu’à la 12e heure. Telle est la conclusion de l’étude LATE (Lancet 1993 ; 342 : 759-66) qui a inclus 5 711 patients dont l’infarctus évoluait depuis 6 à 24 heures. La thrombolyse IV par altéplase vs placebo a diminué la mortalité au 35e jour, mais uniquement chez les patients traités entre la 6e et la 12e heure : 8,9 vs 12,0 %, soit une réduction relative de 25 % (p = 0,02). Le bénéfice de la thrombolyse est significatif quels que soient l’âge (tout au moins avant 75 ans), le sexe, la pression artérielle, la fréquence cardiaque, l’existence ou non d’un antécédent d’infarctus ou d’un diabète. Telle est la conclusion de la méta-analyse du FTT Collaborative Group (Lancet 1994 ; 343 : 311-22) qui a porté sur 9 études regroupant 58 600 patients. Le bénéfice absolu de la thrombolyse est d’autant plus important qu’elle s’adresse à des patients à haut risque. C’est ce qui ressort de la métaanalyse du FTT Collaborative Group. Si la baisse relative de la mortalité, voisine de 20 %, est peu différente dans les sous-groupes de patients analysés, il n’en est pas de même du bénéfice absolu exprimé en nombre de vies épargnées, qui s’avère d’autant plus important que les patients ont un risque spontané élevé. Ainsi, le nombre de vies sauvées pour 1 000 patients traités est de 49 lorsqu’existe un bloc de branche, 37 en cas d’infarctus de localisation antérieure (vs 8 en cas d’infarctus inférieur), 27 chez les patients âgés de 65 à 74 ans (vs 11 chez les moins de 55 ans), 62 lorsque la PAS est < 100 mmHg, 33 lorsque la fréquence cardiaque est ≥ 100 battements /minute (vs 13 si elle est < 80 battements/minute), 37 en présence d’un diabète (vs 15 en son absence). La thrombolyse entraîne un risque accru, bien que modeste, d’hémorragies graves qui justifie le respect de ses contre-indications. Dans la métaanalyse du FTT Collaborative Group, cette augmentation du risque est estimée à 7 pour 1 000 pour les hémorragies non cérébrales et 4 pour 1 000 pour les AVC hémorragiques, lesquels surviennent essentiellement le jour ou le lendemain de la thrombolyse. Le pronostic des hémorragies cérébrales est mauvais puisque la moitié d’entre elles entraîne le décès et une sur quatre est responsable d’un AVC avec séquelles modérées ou sévères. Pour Simoons (Lancet 1993 ; 342 : 1523-8), trois facteurs favorisent la survenue d’une hémorragie intracrânienne après thrombolyse : âge > 65 ans, poids < 70 kg, présence d’une hypertension artérielle à l’admission. L’altéplase est supérieur à la streptokinase. - C’est ce qu’a montré l’étude GUSTO (N Engl J Med 1993 ; 329 : 673-82), qui a inclus plus de 40 000 patients chez lesquels l’altéplase en perfusion accélérée et adaptée au poids, était comparé à la streptokinase ou à une association altéplase-streptokinase à doses réduites. L’altéplase a diminué significativement la mortalité au 30e jour (6,3 vs 7,3 %) ainsi que le taux cumulé de décès ou AVC invalidants (6,9 vs 7,8 %). Ainsi, bien qu’il augmente le risque d’AVC hémorragique, le bénéfice net de l’altéplase, comparé à la streptokinase, est de 9 vies sauvées sans AVC invalidant pour 1 000 patients traités. - Avant l’étude GUSTO, 2 autres essais de grande envergure, l’étude GISSI 2 (Lancet 1990 ; 336 : 65-71) et l’étude ISIS 3 (Lancet 1992 ; 339 : 753-70) n’avaient pas pu démontrer la supériorité de l’altéplase, lequel était utilisé en perfusion prolongée (sur 3 ou 4 heures) et sans héparinothérapie immédiate. L’amélioration du pronostic par la thrombolyse IV est directement liée au degré de perméabilité coronaire obtenue précocement. Telle est la conclusion de l’étude angiographique (N Engl J Med 1993 ; 329 : 1615-22) issue de l’étude principale GUSTO, qui a porté sur 2 431 patients ayant eu un contrôle coronarographique dans un délai variable par rapport au début de la thrombolyse (90 minutes, 180 minutes, 24e heure ou 5e-7e jour). Indépendamment du thrombolytique utilisé (altéplase ou streptokinase), c’est le degré de perméabilité coronaire précoce (90e minute) qui a influencé directement la mortalité au 30e jour et le devenir de la fonction ventriculaire gauche. Ainsi, la mortalité au 30e jour n’a pas dépassé 4,4 % lorsque la perméabilité coronaire était optimale (grade TIMI 3) alors qu’elle atteignait 7,4 % en cas de perméabilité incomplète (grade TIMI 2) et 8,9 % en cas d’occlusion persistante (grade TIMI 0 ou 1). Parallèlement, la fonction ventriculaire gauche a été significativement mieux préservée à la 90e minute et au 5e-7e jour en cas de perméabilité complète précoce, comparée à une perméabilité incomplète et aux échecs de la thrombolyse. L’altéplase n’assure une reperméation précoce optimale que chez 1 patient sur 2 environ. Dans cette même étude angiographique issue de l’étude GUSTO, l’altéplase a permis d’obtenir une perméabilité complète (grade TIMI 3) à la 90e minute chez 54 % des patients, proportion significativement supérieure à celle observée avec la streptokinase (environ 30 %) ou avec l’association altéplase-streptokinase (38 %). L’association altéplase-streptokinase à doses réduites s’est révélée décevante. Utilisée chez 10 374 patients dans l’étude GUSTO, cette association, comparée à la streptokinase seule, n’a pas diminué la mortalité au 30e jour, mais a augmenté le risque d’hémorragie cérébrale et n’a pas modifié le taux de réocclusions coronaires au 5e-7e jour. Les nouveaux thrombolytiques ont un mode d’administration simplifié, mais aucun ne s’est révélé supérieur à l’altéplase en termes de pronostic. Trois nouveaux thrombolytiques, administrables en bolus IV unique ou double, ont été comparés à l’altéplase dans des études de mortalité. - Dans l’étude GUSTO III (N Engl J Med 1997 ; 337 : 1118-23), menée chez 15 060 patients, la rétéplase n’a pas modifié la mortalité au 30e jour (7,47 vs 7,24 %) ni le taux cumulé de décès ou AVC invalidants (7,89 vs 7,91 %). - Dans l’étude ASSENT 2 (Lancet 1999 ; 354 : 716-22), qui a inclus près de 17 000 patients, le ténectéplase n’a pas modifié la mortalité au 30e jour (6,18 vs 6,15 %), l’incidence combinée des décès ou AVC non mortels (7,11 vs 7,04 %) ni le taux d’hémorragies intracrâniennes (0,93 vs 0,94 %). - Dans l’étude In-TIME II (Eur Heart J 2000 ; 21 : 2005-13), menée chez 15 078 patients, la lanotéplase n’a pas modifié la mortalité, mais a entraîné un excès d’hémorragies cérébrales (1,13 vs 0,62 % ; p = 0,003) qui pourrait être lié à une héparinisation associée trop forte. L’association d’un anti-GPIIb/IIIa à une demi-dose de thrombolytique améliore la perméabilité coronaire précoce et diminue les complications ischémiques au prix d’une majoration du risque hémorragique. Telle est la conclusion de l’étude GUSTO V (Lancet 2001 ; 357 : 1905-14), menée chez 16 588 patients, et de l’étude ASSENT 3 (Lancet 2001 ; 358 : 605-13), conduite chez 6 095 patients, dans lesquelles l’abciximab était associé soit à une demi-dose de rétéplase, soit à une demi-dose de ténectéplase.   Angioplastie primaire À l’ère des stents, des thiénopyridines et des anti-GPIIb/IIIa, l’angioplastie primaire améliore le pronostic de l’infarctus du myocarde aigu par rapport à la thrombolyse IV. L’angioplastie conventionnelle (par ballonnet sans stent) a eu du mal à s’imposer. Bien que la métaanalyse de Michels (Circulation 1995 ; 91 : 4676-85), qui a porté sur 7 essais regroupant seulement 1 145 patients, ait montré que l’angioplastie primaire réduisait la mortalité de 54 % par rapport à la thrombolyse IV, cette supériorité de l’angioplastie conventionnelle est apparue moins évidente dans les registres américains et dans l’étude GUSTO IIb (N Engl J Med 1997 ; 336 : 1621-8) qui a inclus 1 138 patients. Les progrès techniques ont permis de démontrer la supériorité de l’angioplastie primaire sur la thrombolyse IV. Telle est la conclusion de la méta-analyse de Keeley (Lancet 2003 ; 361 : 13-20) qui a porté sur 23 études randomisées ayant inclus 7 739 pa-tients éligibles pour une thrombolyse. À court terme (4 à 6 semaines), l’angioplastie primaire diminue la mortalité totale (7 vs 9 % ; p = 0,0002), les récidives d’infarctus non mortels (3 vs 7 % ; p < 0,0001), les AVC (1 vs 2 % ; p = 0,0004) et l’incidence combinée de ces événements (8 vs 14 % ; p < 0,001). La supériorité significative de l’angioplastie s’est maintenue à distance (6 à 18 mois selon les études) et s’est montrée indépendante du type de thrombolytique utilisé et d’un éventuel transfert secondaire du patient pour la réalisation de la procédure. L’utilisation des stents associée aux thiénopyridines (ticlopidine et clopidogrel) prévient l’occlusion coronaire aiguë secondaire à la dilatation et diminue le taux de resténoses. - Le bien-fondé de l’association ticlopidine-aspirine pour prévenir les thromboses occlusives des endoprothèses a été largement démontré à travers les études ISAR 1 (N Engl J Med 1996 ; 334 : 1084-9), STARS (N Engl J Med 1998 ; 339 : 1665-71), MATTIS (Circulation 1998 ; 98 : 2126-32) et FANTASTIC (Circulation 1998 ; 98 : 1597-603). - Le clopidogrel, qui a un effet antiagrégant plaquettaire plus puissant, un délai d’action plus court et donne moins d’effets secondaires, s’est montré au moins aussi sûr et efficace que la ticlopidine dans l’étude CLASSICS (Circulation 2000 ; 102 : 625-9) et à travers la méta-analyse de Bhatt (J Am Coll Cardiol 2002 ; 39 : 9-14). - L’endoprothèse, comparée à l’angioplastie conventionnelle (ballonnet seul), ne modifie pas le pronostic, mais diminue l’incidence des revascularisations itératives. Telle est la conclusion de l’étude Stent-PAMI (N Engl J Med 1999 ; 341 : 1949-56) qui a porté sur 900 pa-tients, et de l’un des bras de l’étude CADILLAC (N Engl J Med 2002 ; 346 : 957-66) qui a inclus 1 030 patients. Dans la métaanalyse de Zhu (Am J Coll Cardiol 2001 ; 88 : 297-301) qui a regroupé 9 études et 4 120 patients au total, le stenting a diminué de près de 60 % les nouvelles revascularisations à 6-12 mois (p < 0,001) sans modifier la mortalité et sans réduction significative des récidives d’infarctus (p = 0,13). Les inhibiteurs des récepteurs GPIIb/IIIa diminuent les complications ischémiques précoces à condition d’être débutés avant l’angioplastie. - Plusieurs essais dont l’étude SPEED (Circulation 2000 ; 101 : 2788-94) et l’étude ADMIRAL (N Engl J Med 2001 ; 344 ; 1895-1903) ont montré que les anti-GPIIb/IIIa augmentent la perméabilité coronaire avant tout geste de dilatation. - En outre, les anti-GPIIb/IIIa diminuent de moitié les complications ischémiques précoces lorsqu’ils encadrent la procédure d’angioplastie, que celle-ci soit conventionnelle (ballonnet sans stent) comme l’ont montré les études EPIC (N Engl J Med 1994 ; 330 : 956-61) et RAPPORT (Circulation 1998 ; 98 : 734-41), ou qu’elle s’accompagne de l’implantation d’un stent comme l’ont montré les études ADMIRAL (N Engl J Med 2001 ; 344 : 1895-903) et ISAR 2 (J Am Coll Cardiol 2000 ; 35 : 915-21). - Ce bénéfice n’a cependant pas été retrouvé dans l’étude CADILLAC (N Engl J Med 2002 ; 346 : 957-66) dans laquelle l’abciximab était utilisé au moment de l’angioplastie et non en administration préalable. Le choix entre thrombolyse IV et angioplastie primaire doit se discuter au cas par cas, en tenant compte des structures médicales existantes et de l’évaluation du rapport risque/bénéfice. L’angioplastie primaire se révèle supérieure à la thrombolyse IV lorsque l’ouverture de l’artère peut être réalisée par une équipe expérimentée, disponible 24 heures sur 24, dans un délai ≤ 1 heure par rapport à ce que serait le début d’une thrombolyse IV. Telle est la conclusion des différentes études et métaanalyses ayant comparé les deux techniques de revascularisation. Cependant, l’étude française CAPTIM (Lancet 2002 ; 360 : 825-9 et Circulation 2003 ; 108 : 2851-6) suggère que la thrombolyse préhospitalière pourrait être supérieure à l’angioplastie primaire chez les patients pris en charge dans les 2 premières heures de l’infarctus. Dans cette étude, qui a inclus 834 patients pris en charge par les équipes du SAMU dans les 6 premières heures d’un infarctus aigu et tous conduits vers un centre interventionnel, l’angioplastie primaire a diminué de façon non significative le taux combiné de décès, réinfarctus ou AVC avec séquelle à 30 jours, par rapport à la thrombolyse préhospitalière par altéplase (6,2 vs 8,2 % ; p = 0,29). L’efficacité du traitement en termes de pronostic était inversement corrélée au délai de la prise en charge. Chez les 460 patients randomisés dans les 2 premières heures suivant l’apparition des symptômes, la thrombolyse IV a semblé plus efficace que l’angioplastie en diminuant les chocs cardiogéniques (1,3 vs 5,3 % ; p = 0,032) et la mortalité à 30 jours (2,2 vs 5,7 % ; p = 0,058). Le rapport risque/bénéfice est favorable à l’angioplastie en cas de contre-indication à la thrombolyse, lorsque l’état hémodynamique est instable et probablement chez le sujet âgé chez lequel le risque hémorragique de la thrombolyse est accru. - L’angioplastie diminue de moitié la mortalité des patients ayant une contre-indication à la réalisation d’une thrombolyse. Telle est la conclusion des registres américains NRMI 2, 3 et 4 (JAMA 2003 ; 290 : 1891-8) qui ont porté sur près de 20 000 patients. Dans le groupe des 4 705 patients ayant bénéficié d’une angioplastie en urgence (ou plus rarement d’un pontage), la revascularisation a diminué la mortalité de 45,8 %. - Le choc cardiogénique représente une indication privilégiée de l’angioplastie en urgence, tout au moins chez le sujet < 75 ans. C’est ce qu’a montré l’étude SHOCK (N Engl J Med 1999 ; 341 : 625-34) qui a inclus 302 patients ayant développé un choc cardiogénique dans les 36 premières heures d’un infarctus aigu. La revascularisation en urgence (angioplastie et/ou pontage), comparée à une stratégie conservatrice classique (thrombolyse IV, agents inotropes positifs, contrepulsion aortique et ventilation assistée), a diminué de façon non significative la mortalité hospitalière (46,7 vs 56,0 % ; p = 0,11), mais a amélioré la survie à 6 mois (49,7 vs 36,9 % ; p = 0,027) et à un an (46,7 vs 33,6 % ; p < 0,03). Pour les patients admis dans un centre non équipé pour l’angioplastie, le choix entre thrombolyse et transfert en vue d’une angioplastie dépendra essentiellement du temps de transport prévisible. La supériorité de l’angioplastie après transfert est retrouvée dans l’étude DANAMI-2 (N Engl J Med 2003 ; 349 : 733-42) qui a inclus 1 572 patients, avec un retard moyen de 55 minutes lié au transport, ainsi que dans la méta-analyse de Zijlstra (Eur Heart J 2003 ; 24 : 21-3) qui a porté sur 5 essais et 2 466 patients. Dans cette analyse, l’angioplastie primaire réalisée après transfert, comparée à la thrombolyse sur place, diminue significativement la mortalité à 4-6 semaines (6,8 vs 9,6 % ; p = 0,01) ainsi que le taux combiné de décès, récidives d’infarctus ou AVC (8,5 vs 15, 5 % ; p < 0,001). L’angioplastie facilitée est encore à l’étude. Cette stratégie consiste à faire précéder l’angioplastie par un traitement antithrombotique puissant, associant généralement un thrombolytique à dose réduite et un anti-GPIIb/IIIa, dans le but de raccourcir le délai de reperfusion et de prévenir les complications ischémiques liées à la procédure de dilatation. Autres types de revascularisation L’angioplastie de sauvetage, réalisée immédiatement en cas d’échec de la thrombolyse, est bénéfique, tout au moins dans les infarctus d’étendue moyenne ou importante. Telle est la conclusion de l’étude RESCUE (Circulation 1994 ; 90 : 2280-4) qui n’a inclus que 151 patients dont l’artère interventriculaire antérieure restait occluse après thrombolyse IV. L’angioplastie de sauvetage a amélioré significativement la fonction ventriculaire gauche, a diminué de façon significative l’incidence combinée des décès et insuffisances cardiaques sévères au 30e jour (6,4 vs 16,6 %) et, de façon non significative, la mortalité (5,1 vs 9,6 %). Une revascularisation myocardique est justifiée en cas de récidive ischémique après thrombolyse. C’est ce qu’a montré l’étude DANAMI (Circulation 1997 ; 96 : 748-55) qui a inclus 1 008 patients thrombolysés dont l’évolution précoce a été marquée par la réapparition d’un angor ou par un ECG d’effort positif. La stratégie de revascularisation (angioplastie ou pontage), comparée au traitement conservateur, a diminué dans un délai médian de 2,4 ans les récidives d’infarctus (5,6 vs 10,5 %) et les angors instables (17,9 vs 29,5 %), sans modifier de façon significative la mortalité (3,6 vs 4,4 %).   Traitements adjuvants   Traitement antithrombotique autre que la thrombolyse L’aspirine, débutée le plus tôt possible, réduit la mortalité cardio-vasculaire de 20 % et ce bénéfice s’ajoute à celui de la thrombolyse. - C’est ce qu’a montré l’étude ISIS 2 (Lancet 1988 ; 2 : 349-60) qui a inclus 17 187 patients. Par rapport au placebo, l’aspirine a diminué significativement la mortalité à la 5e semaine (9,4 vs 11,8 %) ainsi que l’incidence des récidives d’infarctus et des AVC non mortels. Si la streptokinase a diminué la mortalité de 23 % (9,2 vs 12,0 %), c’est l’association streptokinase-aspirine qui s’est avérée la plus efficace avec une diminution de 38 % de la mortalité (8,0 vs 13,2 %). - Plusieurs études ont montré qu’il n’était pas nécessaire de dépasser la posologie de 75 à 160 mg/j. Dans l’infarctus non reperfusé, l’héparine diminue la morbi-mortalité précoce et l’énoxaparine peut remplacer l’héparine non fractionnée (HNF). - Avant l’ère de la thrombolyse, la métaanalyse de Collins (BMJ 1996 ; 313 : 652-9), qui avait porté sur 21 petites études regroupant au total moins de 6 000 patients, avait montré un effet bénéfique de l’héparine non fractionnée pendant la période hospitalière, au niveau de la mortalité (11,4 vs 14,9 %), des AVC (1,1 vs 2,1 %), des récidives d’infarctus (6,7 vs 8,2 %) et des embolies pulmonaires (2,0 vs 3,8 %), au prix d’un excès d’hémorragies sévères (1,9 vs 0,9 %). - Dans l’étude TETAMI (J Am Coll Cardiol 2003 ; 42 : 1357-9), qui a inclus 1 224 patients hospitalisés moins de 24 heures après un infarctus non reperfusé, l’énoxaparine, vs HNF, a diminué de façon non significative le taux combiné de décès, récidives d’infarctus ou récidives d’angor à un mois (15,4 vs 17,3 %), sans augmenter les hémorragies majeures (1,5 vs 1,3 %). Il est recommandé d’associer aux thrombolytiques fibrino-spécifiques (altéplase, ténectéplase, rétéplase) une héparinothérapie IV modérée, adaptée au poids et maintenue pendant 24-48 heures. - Plusieurs petites études ont montré que l’HNF prévient les réocclusions précoces liées à l’effet prothrombotique paradoxal rencontré avec l’utilisation de ces agents thrombolytiques. - À l’inverse, l’intérêt d’associer l’HNF à la streptokinase n’est pas formellement démontré. L’énoxaparine va probablement détrôner l’HNF. - C’est ce que laissent présager les résultats de l’étude ASSENT 3 (Lancet 2001 ; 358 : 605-13), menée chez 6 095 patients, dans laquelle l’énoxaparine associée au ténectéplase a diminué, comparée à l’HNF, le taux combiné de décès à 30 jours, réinfarctus, ou ischémies réfractaires pendant la phase hospitalière (11,4 vs 15,4 % ; p = 0,0002), sans augmenter le risque hémorragique. - La sécurité d’emploi des HBPM chez le sujet âgé est cependant encore incertaine. Ainsi, dans l’étude ASSENT-3 PLUS (Circulation 2003 ; 108 : 135-42) qui a inclus 1 639 patients ayant bénéficié d’une thrombolyse préhospitalière par ténectéplase, l’énoxaparine, vs HNF, a augmenté le risque d’hémorragie intracrânienne (2,20 vs 0,97 % ; p = 0,047), mais uniquement chez les patients de plus de 75 ans.   Bêtabloquants Dans l’infarctus non reperfusé, l’administration IV de bêtabloquants diminue la morbi-mortalité précoce. - C’est ce qu’ont montré l’étude MIAMI (Eur Heart J 1985 ; 6 : 199-211) qui a évalué le métoprolol IV et surtout l’étude ISIS 1 (Lancet 1986 ; 2 : 57-66). Dans cette dernière, qui a inclus 16 027 patients à la 5e heure en moyenne d’un infarctus aigu, l’aténolol 5 à 10 mg IV puis 100 mg/j per os a diminué significativement de 14 % la mortalité vasculaire au 7e jour avec maintien du bénéfice à un an. Dans une analyse faite a posteriori, l’effet bénéfique du bêtabloquant a semblé lié à la prévention des ruptures cardiaques et des fibrillations ventriculaires. - Cette efficacité des bêtabloquants a été confirmée dans la métaanalyse de Yusuf (J Am Med Ass 1988 ; 260 : 2088-93) qui a porté sur 27 essais ayant inclus 27 000 patients en majorité à faible risque. Il a été noté sous bêtabloquant une diminution significative de 13 % de la mortalité hospitalière, surtout pendant les 2 premiers jours, ainsi qu’une réduction de 19 % des récidives d’infarctus non mortels et de 16 % des arrêts cardiaques récupérés. À l’ère de la reperfusion coronaire, les bêtabloquants restent indiqués, y compris en cas de dysfonction ventriculaire gauche. Dans l’étude CAPRICORN (Lancet 2001 ; 357 : 1385-90), menée chez 1 959 patients ayant un infarctus aigu avec fraction d’éjection ventriculaire gauche ≤ 40 % et traités dans la moitié des cas par thrombolyse ou angioplastie primaire, le carvédilol, comparé au placebo et débuté entre le 3e et le 21e jour après stabilisation de l’état hémodynamique, a diminué la mortalité totale (12 vs 15 % ; p = 0,031) et les récidives d’infarctus non mortels (3 vs 6 %; p = 0,014), pour un suivi moyen de 1,3 an. À l’ère de la thrombolyse, l’utilisation intraveineuse des bêtabloquants doit être prudente. En effet, si l’étude TIMI IIB (Circulation 1991 ; 83 : 422-37), qui a inclus 1 390 patients thrombolysés par altéplase, était en faveur d’une administration précoce et IV du bêtabloquant, par rapport à une administration retardée par voie orale, une analyse rétrospective de l’étude GUSTO (J Am Coll Cardiol 1998 ; 32 : 634-40) a souligné le danger potentiel de l’utilisation IV des bêtabloquants après thrombolyse, laquelle a majoré l’incidence des insuffisances cardiaques, des états de choc, des récidives ischémiques et des recours à la stimulation ventriculaire. De même, la métaanalyse de Freemantle (BMJ 1999 ; 318 : 1730-7), qui a porté sur 51 essais et plus de 29 000 patients, n’a pas montré de bénéfice de la voie IV précoce par rapport à la voie orale.   Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine Les IEC, débutés tardivement au cours de l’hospitalisation et poursuivis sur le long terme, améliorent très nettement le pronostic des infarctus compliqués d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche. - C’est ce qui ressort de 3 grandes études : l’étude SAVE (N Engl J Med 1992 ; 327 : 669-77) qui a évalué le captopril chez 2 231 patients, l’étude AIRE (Lancet 1993 ; 342 : 821-8) qui a testé le ramipril chez 2 006 patients et l’étude TRACE (N Engl J Med 1995 ; 333 : 1670-6) qui a évalué le trandolapril chez 1 749 patients. - Dans ces études, l’IEC était débuté à faibles doses, à partir du 3e jour de l’infarctus et augmenté progressivement. Avec un recul moyen variant de 15 à 42 mois selon les études, l’IEC a permis de sauver 42 à 74 vies pour 1 000 patients traités, ce qui représente une diminution relative de la mortalité de 19 à 27 %. L’effet bénéfique de l’IEC s’est montré indépendant de celui des autres traitements administrés, notamment la thrombolyse. L’intérêt d’administrer systématiquement un IEC dès le 1er jour d’un infarctus apparaît moins évident. - C’est ce qu’ont montré les études GISSI 3 (Lancet 1994 ; 343 : 1115-22), ISIS 4 (Lancet 1995 ; 345 : 669-85) et la métaanalyse réalisée par l’ACE Inhibitor Myocardial Infarction collaborative group (Circulation 1998 ; 97 : 2202-12) qui a porté sur 4 études et près de 100 000 patients. Celle-ci permet de conclure qu’un IEC, débuté le 1er jour de l’infarctus et poursuivi pendant 4 à 6 semaines, prévient 5 décès pour 1 000 patients traités et réduit le risque de survenue d’une insuffisance cardiaque. - Compte tenu du risque d’hypotension artérielle sévère, cette prescription précoce est surtout réservée aux infarctus de localisation antérieure ou compliqués d’insuffisance cardiaque congestive, en l’absence d’hypotension artérielle.   Antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II Le valsartan peut être utilisé dans l’infarctus compliqué de dysfonction ventriculaire gauche et/ou d’insuffisance cardiaque, lorsqu’il existe une intolérance aux IEC. C’est ce qu’a montré l’étude VALIANT (N Engl J Med 2003 ; 349 : 1893-6), menée chez 14 703 patients, dans laquelle le valsartan vs captopril, débuté dans les 10 premiers jours de l’infarctus, a eu le même effet sur la mortalité à 2 ans (19,9 vs 19,5 %). Statines Il est recommandé de débuter de façon systématique un traitement par statine au cours de l’hospitalisation, à une posologie visant à obtenir un taux de LDL cholestérol < 1 g/l. - Plusieurs grandes études ont montré une amélioration du pronostic à long terme lorsqu’une statine était prescrite à distance d’un infarctus du myocarde et ce, quel que soit le taux de LDL cholestérol à l’inclusion. - Cependant, le fait que plusieurs enquêtes et études de cohorte aient retrouvé une utilisation largement insuffisante au 6e mois après l’infarctus plaide en faveur d’une prescription de la statine dès la phase hospitalière. - D’autres essais, en cours, étudient l’intérêt de débuter une statine à fortes doses dès le 1er jour de l’infarctus, dans le but de stabiliser les plaques d’athérome et réduire ainsi les complications ischémiques précoces (effets pléïotropes des statines).   Autres traitements Les dérivés nitrés n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. - Telle est la conclusion de 2 grandes études, GISSI 3 et ISIS 4, qui n’ont pas retrouvé d’effet favorable des dérivés nitrés sur la mortalité à la 5e semaine et ultérieurement. L’étude GISSI 3 (Lancet 1994 ; 343 : 1115-22) a inclus près de 19 000 patients et a testé un dérivé nitré administré dès le premier jour de l’infarctus, en IV pendant 24 heures et relayé par la voie transdermique. L’étude ISIS 4 (Lancet 1995 ; 345 : 669-85) a été menée chez 58 000 patients et a évalué un dérivé nitré administré d’emblée per os. - On peut en rapprocher les résultats de l’étude ESPRIM (Lancet 1994 ; 344 : 91-7) qui a inclus 4 000 patients, dans laquelle la linsidomine IV relayée par la molsidomine per os n’a pas modifié la mortalité et les événements cardiaques pendant la phase hospitalière et à un an. - Bien que toutes ces études ne soient pas exemptes de critiques, il est recommandé d’utiliser les dérivés nitrés par voie IV, à posologie faible, dans un but antalgique, et dans les infarctus compliqués d’insuffisance cardiaque ou de récidive ischémique. L’utilisation des inhibiteurs calciques ne doit pas être systématique. Globalement, les inhibiteurs calciques n’ont montré aucun effet bénéfique. Telle est la conclusion de la métaanalyse de Held (BMJ 1989 ; 299 : 1187-92) qui a porté sur 22 essais regroupant environ 18 000 patients randomisés quelques heures à quelques jours après le début de l’infarctus. Pris dans leur ensemble, les inhibiteurs calciques n’ont modifié ni la mortalité (9,8 vs 9,3 %) ni l’incidence des récidives d’infarctus (4,2 vs 4,6 %). Une tendance défavorable a été retrouvée avec l’utilisation des dihydropyridines de première génération. C’est ce qu’ont montré les études TRENT (BMJ 1986 ; 193 : 1204-8) et SPRINT II (Arch Intern Med 1993 ; 153 : 345-53) qui ont évalué la nifédipine à courte durée d’action. Aucune étude n’a cependant évalué les dihydropyridines de 3e génération à la phase aiguë de l’infarctus. Les inhibiteurs calciques bradycardisants peuvent être prescrits passés les premiers jours de l’infarctus, en cas de contre-indication aux bêtabloquants et en l’absence de dysfonction ventriculaire gauche. - C’est ce qu’ont montré l’étude MDPIT (N Engl J Med 1988 ; 319 : 385-92) qui a testé, chez 2 466 patients, le diltiazem débuté entre le 3e et le 15e jour, et l’étude DAVIT II (Am J Cardiol 1990 ; 66 : 779-85) qui a évalué, chez 1 775 patients, le vérapamil débuté entre le 7e et le 15e jour. Un effet favorable de ces inhibiteurs calciques, plus ou moins important sur la mortalité et/ou les récidives d’infarctus, n’a été retrouvé qu’en l’absence d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche. Dans le cas contraire, leur effet a été soit nul, soit délétère. - Dans l’étude INTERCEPT (Lancet 2000 ; 355 : 1751-6), menée chez 874 patients thrombolysés pour un premier infarctus sans dysfonction ventriculaire gauche, le diltiazem LP 300 mg, débuté 36 à 96 heures après la thrombolyse, a diminué de façon presque significative le taux combiné de décès d’origine cardiaque, récidives d’infarctus non mortel ou ischémies myocardiques réfractaires au 6e mois (23 vs 30 % ; p = 0,07), le bénéfice ayant porté exclusivement sur les récidives ischémiques. La lidocaïne ne doit pas être utilisée de façon systématique dans la prévention des troubles du rythme ventriculaire de la phase aiguë. Telle est la conclusion de méta-analyse de Mac-Mahon (JAMA 1988 ; 260 : 1910-6) qui a porté sur 14 études regroupant 7 165 patients. La lidocaïne a été responsable d’une augmentation non significative de 38 % de la mortalité précoce. L’utilisation systématique du magnésium IV n’apporte aucun bénéfice. - Malgré le résultat positif de l’étude LIMIT 2 (Lancet 1992 ; 339 : 1553-8), 2 grands essais ont détruit définitivement les espoirs mis dans le magnésium. - Dans l’étude ISIS 4 (Lancet 1995 ; 345 : 669-85), le magnésium IV, testé chez 58 000 patients, n’a pas modifié la mortalité à 5 semaines et à 1 an, mais a augmenté significativement l’incidence des insuffisances cardiaques, des hypotensions artérielles sévères et des épisodes de bradycardie. - Dans l’étude MAGIC (Lancet 2002 ; 360 : 1189-96), menée chez 6 213 patients à haut risque, le magnésium n’a montré aucun bénéfice ni effet délétère dans les différents sous-groupes de patients analysés.

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